Vente d’enfant après GPA : les insuffisances de la loi française

23/03/2016

gpa

Une première en France : le tribunal correctionnel de Blois a condamné, ce mardi 22 mars, à un an de prison avec sursis une mère de famille qui a vendu deux de ses enfants à des couples homosexuels à la suite d’une GPA. Le procès s’était tenu fin janvier 2016 ; le procureur avait alors requis un an de prison (dont neuf mois avec sursis) contre la mère porteuse.

Aurore, cette femme de 37 ans, était poursuivie pour avoir vendu deux de ses enfants en 2010 et 2012, mais surtout pour avoir « escroqué » deux couples. En effet, à deux reprises, elle a fait croire à un couple qui lui avait déjà versé la somme de 15.000 euros, que son enfant était mort-né, ce qui lui a permis de le vendre à un autre couple demandeur pour le même prix.

Le grief retenu par le tribunal n’est pas la vente d’enfant à des tiers, qui est pourtant une pratique illégale en France, mais le fait qu’Aurore ait escroqué ses acheteurs. Il a pourtant été souligné que cette femme était dans une situation de grande détresse, ayant révélé avoir été violée par son père à l’adolescence, d’une part, et ayant de grandes difficultés financières, d’autre part.

L’association Juristes pour l’Enfance, qui s’est constituée partie civile de cette affaire afin de défendre les intérêts des enfants, déplore cette décision, dans un communiqué : « En retenant l’escroquerie comme chef de poursuite contre la mère, la justice se soucie seulement de protéger d’imaginaires droits des acheteurs d’enfant à obtenir l’objet payé, un enfant, petite victime innocente et grande absente de ce procès ».

De leur côté, les 4 couples ont été condamnés à une amende de 2.000 euros avec sursis pour « incitation à l’abandon d’enfant » et non pas pour « trafic d’êtres humains », ce que déplore cette association « Le droit pénal français n’incrimine pas spécifiquement l’achat d’enfant ». « Les acheteurs d’enfants ont été traités comme des victimes, commente Adeline Le Gouvello, avocate de cette association. « Arnaquer les acheteurs d’enfants tomberait sous le coup de la justice, mais vendre des enfants ne serait pas un problème ? Ces enfants sont les grands absents de la procédure alors qu’ils sont les seules véritables victimes », commente la juriste Aude Mirkovic, porte-parole de l’association.

La question est maintenant de savoir ce que vont devenir ces enfants… Faut-il rendre l’un à ses parents biologiques, à savoir Aurore et son mari, et l’autre au couple toulousain qui le réclame, cette deuxième affaire étant au coeur d’une autre bataille judiciaire ? C’est le plus grand regret confessé par Aurore à l’audience de janvier dernier : « je m’en veux surtout pour cet enfant », avait-elle déclaré.

L’association Juristes pour l’enfance va saisir le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies qui a recommandé plusieurs fois à la France de condamner la vente d’enfants. Le gouvernement avait répondu en 2012 que si la vente d’enfants n’était pas spécifiquement visée par le Code pénal, elle était tout de même sanctionnée. Cet exemple prouve le contraire. L’association saisira également le Rapporteur spécial sur la vente d’enfants.

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