Chimères homme-mouton, une nouvelle transgression

23/02/2018

Les chimères sont des embryons mêlant des cellules animales et des cellules humaines. Lors du congrès annuel de l’Association américaine pour la promotion de la science (AAAS)* qui s’est tenu à Austin au Texas du 15 au 19 février, une équipe de chercheurs a annoncé avoir créé des embryons hybrides mouton-humain.

L’objectif affiché est de parvenir à « cultiver » des organes humains à l’intérieur d’animaux, pour obtenir des greffons et faire face à la pénurie d’organes. Cette recherche s’est appuyée sur des expériences antérieures menées par une partie de la même équipe qui a développé des cellules humaines dans des embryons de porc. Les embryons hybrides ont donc été créés en utilisant des embryons de mouton (produits par des techniques de FIV) dans lesquels ont été injectés 0,01% de cellules souches humaines, issues d’embryons humains ou de cellules somatiques (adultes) reprogrammées en cellules souches. L’expérience s’est arrêtée après 28 jours de développement de ces embryons.

L’idée de ces expériences est de parvenir à ce que ces embryons se développent, soient implantés et donnent naissance à des petits sur lesquels les organes seraient prélevées (cœur, poumons…). Ces expériences sont très controversées. Elles soulèvent des questions éthiques très importantes : l’embryon humain est réduit à l’état d’objet. Elles posent la question du respect de la frontière homme-animal. Même si le ratio de cellules humaines est très faible, leur prolifération au cours du développement embryonnaire n’est pas à exclure, elles pourraient même s’installer dans le cerveau ou les organes sexuels des animaux, explique Hiro Nakauchi, biologiste spécialiste des cellules souches à l’université de Stanford et collaborateur du professeur Ross. Avec quels impacts ?

Par ailleurs, le ratio cellules humaines-animales « n’est pas encore assez important pour générer un organe », a déclaré le professeur Ross lors d’un point de presse. Environ un pour cent de l’embryon devrait être humain pour que la greffe d’organe fonctionne, rapporte The Guardian. Pour avancer dans ces recherches, il y a donc le risque d’une fuite en avant de ces essais afin d’injecter de plus en plus de cellules humaines. Le rejet de la greffe est possible, les cellules animales reconnues comme « corps étranger » par le receveur.

Alliance VITA rappelle que la création d’embryons chimériques est interdite en France. La question est cependant mise en débat lors des actuels Etats généraux de la bioéthique sous la forme d’une question : « Faut-il autoriser les recherches scientifiques concourant à l’apparition d’embryons transgéniques ou chimériques ? » dans la rubrique « Cellules souches et recherche sur l’embryon ». Une grande vigilance s’impose pour ne pas instrumentaliser l’opinion, les personnes et leurs familles en attente de greffes avec ces chimères expérimentales qui, loin d’être au point, ne le seront peut-être jamais. Enfin, l’embryon humain doit être respecté et son instrumentalisation par toutes sortes d’expériences d’apprentis-sorciers condamnée.

*American Association for the Advancement of Science

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