Au Sénat, audition fin de vie d’Alliance VITA

24/03/2023

A la demande de la Mission d’information sur la fin de vie du Sénat, Tugdual Derville porte-parole d’Alliance VITA et le docteur Paul Régnier-Vigouroux ont été auditionnés le mercredi 22 mars 2023 au Palais du Luxembourg.

 

L’audition d’une heure trente était animée par les trois rapporteures de la mission : Christine Bonfanti-Dossat (LR, Lot-et-Garonne) et Michelle Meunier (PS, Loire-Atlantique) sur place et Corinne Imbert (LR, Charente-Maritime) en visioconférence. Les sénatrices avaient choisi d’interroger en même temps que les représentants d’Alliance VITA ceux de la Fondation Jérôme Lejeune.

 

Les représentants d’Alliance VITA ont exprimé leur point de vue à partir :

  • des convictions de fond portées par l’association : respect de la vie et de la dignité de toute personne,
  • de son expérience de l’aide aux personnes confrontées aux situations de fin de vie délicates, au travers de son service SOS fin de vie.
  • de la compétence spécifique du Docteur Régnier-Vigouroux, membre engagé dans Alliance VITA, médecin formé en gériatrie, spécialiste de la lutte contre la douleur et, depuis vingt ans praticien en soins palliatifs, à domicile et en établissements.

 

A partir de plusieurs situations de fin de vie sensibles qu’il a pu accompagner jusqu’au bout (maladie de Charcot, cancer en phase ultime), le docteur Régnier Vigouroux a notamment explicité sa pratique de la sédation raisonnée, celle qui permet d’abord  – tant que cela est possible – de soulager correctement sans interdire toute relation, quitte à poser une sédation profonde en toute fin de vie, qui respecte le temps de la mort naturelle.

Il a explicité la différence de nature et non de degré entre ce type de sédation et le suicide assisté ou l’euthanasie, selon les justes recommandations de la Haute autorité de santé (HAS). Légaliser une « aide active à mourir » – terminologie à ses yeux très contestable – pour des personnes dont le pronostic vital est engagé à moyen terme conduirait à priver ces patients et leurs proches – tous devant bénéficier des soins palliatifs – d’un accompagnement réconfortant et d’une mort paisible. Entre la mort administrée et la mort naturelle bien accompagnée, l’impact sur le patient, ses proches et les soignants est en effet radicalement différent.

Le médecin a logiquement plaidé pour le maintien du principe hippocratique doublement millénaire : l’interdit de tuer est la condition première de la confiance entre un patient vulnérable et ses soignants, qui doivent se garder de la toute-puissance.

 

De son côté, Tugdual Derville, récent auteur de l’essai Docteur, ai-je le droit de vivre encore un peu ? – Euthanasie et suicide assisté démasqués (Salvator) a défendu la prévention de tout suicide, sans exception, et donc le soutien aux personnes les plus dépendantes, désespérées et isolées. Au nom de la démocratie, il a contesté l’idée que certaines catégories de patients – du fait de leur handicap évolutif – puissent être privés de cette prévention. Ce serait une discrimination.

Il a rappelé l’avis de Robert Badinter : pour contester toute forme d’euthanasie même « d’exception » l’artisan de l’abolition de la peine de mort affirmait : « En démocratie, on ne tue pas ». Tugdual Derville a par ailleurs dénoncé l’indécence d’une promotion des soins palliatifs conçue pour compenser la légalisation du suicide assisté ou de l’euthanasie. Les deux pratiques sont incompatibles : l’une est expéditive et récuse la valeur de certaines vies ; l’autre considère toute vie fragile comme digne et respecte le temps de la mort naturelle.

Rappelant la liste des dérives observées à l’étranger, le porte-parole d’Alliance VITA a mis en garde contre l’illusion d’une légalisation « encadrée » de l’administration de la mort. Pointant l’irruption de l’argument économique dans le débat, il a enfin souligné l’impact douloureux des deuils par mort brutale.

 

Les représentants d’Alliance VITA ont en conclusion demandé au Sénat de plaider pour une politique de santé globale qui ne se contente pas de dire non au suicide assisté et à l’euthanasie en suggérant :

 

  1. Une enquête en profondeur sur la réalité du « mal mourir » qu’on continue de mettre en avant sans données précises, sérieuses et fiables ;
  2. Une loi Grand âge et autonomie qui prenne en compte l’accélération du vieillissement, s’appuie sur les options intergénérationnelles et lutte contre la « mort sociale » de beaucoup de personnes âgées isolées ;
  3. La mise en œuvre concrète du droit de tous, en cas de besoin, à accéder à des soins palliatifs de qualité ;
  4. Le renforcement d’une politique de prévention du suicide n’excluant surtout pas nos concitoyens les plus vulnérables, dépendants ou âgés.

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