Chiffres IVG 2022 en France : Pour aller plus loin
13/10/2023

Chiffres IVG 2022 en France

 

Les statistiques françaises des interruptions volontaires de grossesse (IVG) en 2022 font état d’un nouveau record du nombre absolu d’IVG : 234300, soit 17000 de plus qu’en 2021 (+8% d’augmentation).

 

Derrière ce nombre, au plus haut depuis 1990, l’enquête de la DREES révèle d’autres réalités :

1. Problème de double comptage d’IVG

La DREES a détecté un problème de double comptage d’IVG pour des interventions de reprises (ou ré-interventions) d’IVG qui ont eu lieu dans un délai inférieur à 9 semaines qui auparavant étaient comptabilisées comme des IVG.

Ces interventions ont été estimées à 7281 cas en 2022 (soit 3% des IVG) et ont entrainé une ré-estimation à la baisse du nombre total d’IVG sur 2022 (234300) ainsi que sur les 2 dernières années (2021 et 2020).

Outre le fait qu’il faut toujours être vigilant sur les chiffres annoncés, cette correction met en avant un phénomène non négligeable de “complications ayant donné lieu à une hospitalisation ou d’un échec de la première méthode utilisée”. Cela illustre la réalité parfois difficile du déroulement des IVG qui ne se passent pas comme prévu.

 

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2. Un chiffre record

Sur la période d’observation 1990-2023, le ratio IVG sur naissances de 2023 a dépassé un record en atteignant 0,32 (234300 IVG /726 000) naissances) soit une progression de plus de 10% par rapport à 2021 (0,29).

Cette hausse est principalement due à l’augmentation des IVG de 8% mais aussi à la baisse de la natalité en France de –2% qui correspond à 12000 naissances manquantes. Il serait intéressant de creuser dans quelle mesure cette hausse significative des IVG a pu contribuer à la baisse de la natalité.

Cette dernière tendance est en train de se confirmer fortement avec une comparaison au mois le mois de –7% depuis le début de l’année 2023 par rapport aux mêmes mois de l’année 2022 (analyse d’Alliance VITA ici). A niveaux d’IVG constants et si cette tendance baissière se confirme, le ratio IVG/Naissances de l’année 2023 sera de l’ordre de 0,35 IVG/Naissance.

 

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3. La DRESS fait référence aux statistiques de ventes de contraceptions d’urgence comme un exemple de l’évolution des pratiques contraceptives.

 

En effet, l’étude relève une forte hausse de l’utilisation de la contraception d’urgence depuis 2017 et une explosion des ventes de +40% en 2021 et 2022 soit 2 millions de boites vendues. Cette tendance viendrait-elle compenser les défaillances des modes de contraceptions dont la fiabilité est réduite dès que les conditions d’utilisation ne sont pas respectées ? L’enquête périnatale 2021 (p.112) montre aussi une baisse de l’utilisation de la pilule (une baisse estimée d’utilisation d’environ -10% de 62% à 52%) mais aussi une augmentation des dispositifs de stérilets (passant de 9% à 14% d’utilisation).

Rappelons que la contraception d’urgence peut perturber la nidation selon la molécule utilisée. En outre, depuis le 1er janvier 2023, la contraception d’urgence hormonale est gratuite (prise en charge à 100 % sans avance de frais) pour toutes les femmes en âge de procréer, quel que soit le médicament demandé (lévonorgestrel ou ulipristal).  Cette gratuité viendra probablement renforcer cette tendance en 2023.

Pourtant, les autorités sanitaires soulignent que l’utilisation de la contraception d’urgence nécessite quelques précautions.

 

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4. En parallèle au taux de recours qui atteint 16,74 IVG pour 1000 femmes, l’indice conjoncturel d’avortement atteint 0,59 IVG par femme.

 

Autrement dit, une femme de 49 ans, ou plus, a 59% de probabilité d’avoir vécu un avortement dans sa vie. Plus exactement, il représente la probabilité d’une femme d’avoir vécu une IVG sur les 35 ans de sa vie féconde de 15 à 49 ans en se basant uniquement sur les chiffres 2022 et en retenant l’hypothèse que chaque femme ne connait pas plus d’une IVG dans sa vie.

Cette hypothèse est cependant douteuse. En effet, selon une étude de l’INED de 2015les IVG répétées (2 ou plus) représentaient presque 40% (0,2) de l’indicateur conjoncturel qui était à l’époque de 0,5 IVG/femmes, le reste (0,3) correspondant à la proportion des femmes ayant vécu une IVG unique. Actualiser ces études permettrait de mieux comprendre la hausse des IVG ainsi que les facteurs conduisant à ces répétitions.

 

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5. Les taux de recours à l’IVG par département sont très divers

 

Les taux de recours à l’IVG par département sont très divers notamment en métropole variant du simple (la Mayenne à 9,9) à plus du double (les Alpes Maritimes à 23,7). Aucune étude de la DREES ou d’autres organismes n’a été réalisée dans les années récentes pour expliquer ces disparités sur le territoire métropolitain. Comprendre les facteurs macro-économiques, sociaux et culturels causant de telles différences, est pourtant essentiel.

 

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Conclusions : 

L’arbre du nombre total d’IVG en France ne doit pas cacher la forêt de situations et de questions qui restent à ce jour ignorées par les pouvoirs publics :

  • Un nombre non négligeable d’IVG ne se déroulent pas comme prévu.
  • La hausse des IVG concomitante avec la baisse de la natalité nécessite des recherches sur de possibles facteurs communs expliquant ces tendances.
  • Comment l’évolution des pratiques contraceptives (notamment liée à la forte hausse de la contraception d’urgence) affecte le recours à l’IVG ?
  • La part des IVG répétées (potentiellement significative) n’est pas isolée dans le total du nombre d’IVG.
  • Quelles sont les causes des fortes disparités de taux de recours à l’IVG en particulier sur le territoire métropolitain ?

 

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