Vincent Lambert : la nouvelle expertise remise en cause

Vincent Lambert : la nouvelle expertise remise en cause

medecin

Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne s’est interrogé, le 20 juin, sur la pertinence d’une nouvelle expertise pour établir l’état clinique actuel de Vincent Lambert, suite au tout récent désistement des trois médecins en charge de la conduire.

Ces trois médecins avaient été désignés, le 2 mai 2018, par le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne pour réaliser un « tableau clinique » de Vincent Lambert. Ils avaient un mois pour conduire leur examen. Le 14 juin dernier, ils ont fait part de leur désistement estimant ne pas avoir « la stature pour résister aux tentatives de manipulation et aux critiques diverses ». Ils ont souligné que « les trois experts n’ont aucun moyen de mettre de l’ordre dans cette procédure d’expertise et d’affirmer une autorité qui mettrait au pas ceux qui manient opprobre et dénigrement ou fausses vérités ». Enfin, ces médecins ont suggéré au tribunal la nomination d’« un collège d’experts faisant preuve d’une autorité tout à fait non contestable ».

L’audience du 20 juin avait pour objectif de déterminer « les modalités de cette expertise ». Le président du tribunal a expliqué que le tribunal avait « deux pistes de réflexion : soit rechercher trois nouveaux experts et réaliser l’expertise, soit tirer les conséquences de l’échec de la première expertise » et, dans ce cas, « statuer sans attendre » sur la décision d’arrêt des traitements.

D’un côté de la famille, « Nous réclamons cette expertise et surtout la vérité sur la situation médicale de Vincent Lambert » dont « l’état de conscience et d’éveil a évolué » a plaidé Maître Jean Paillot, un des avocats des parents qui demandent une expertise dans une unité spécialisée, hors de l’hôpital.

D’un autre côté, « l’expertise n’apportera rien au débat car les médecins sont allés au bout de leur logique, et seule compte l’obstination déraisonnable » a répliqué Maître Gérard Chemla, avocat de François Lambert (le neveu de Vincent Lambert) qui appelle à un arrêt des soins de son oncle avec d’autres membres de la famille dont l’épouse et tutrice, Rachel Lambert.

La date du délibéré n’est pas connue à ce jour.

 

Mise à jour du 2 juillet 2018 :

Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a ordonné le 2 juillet 2018 une nouvelle expertise « confiée à un collège de médecins désignés par le président du tribunal ». Il a ajouté que « l’examen du patient s’effectuera hors de la présence des parties » mais « celles-ci pourront être représentées par des médecins qui seront limités à un praticien pour l’ensemble des requérants et un praticien pour chacun des défendeurs, soit un total maximum de quatre médecins ».

Les délais pour les nominations et le rendu du rapport ne sont pas précisés.

 

Evaluation de la loi fin de vie : l’IGAS préconise des ajustements limités

Evaluation de la loi fin de vie : l’IGAS préconise des ajustements limités

findevie

L’IGAS a rendu public, le 12 juin 2018, son rapport sur l’évaluation de la loi fin de vie de 2016 : trente recommandations sont préconisées pour rendre son application plus homogène et renforcer la prise en compte des personnes les plus vulnérables.

Ce rapport, très attendu, a été demandé par la ministre de la Santé en novembre 2017 avec pour objectif « d’évaluer l’application de la loi notamment en ce qui concerne la formation des professionnels de santé, la mise en œuvre des directives anticipées, la désignation des personnes de confiance, l’accès aux soins palliatifs sur l’ensemble du territoire et de la mise en place de la sédation profonde en établissements sanitaires, en HAD mais aussi en EHPAD ou à domicile. »

Le rapport invite à « des ajustements limités des textes législatifs et réglementaires en vigueur » en rappelant que « la stabilité du cadre juridique est une condition de sa bonne appropriation par les professionnels et par les personnes en fin de vie, leur famille et leurs proches ». Selon les rapporteurs, « une dynamique encourageante dans la prise en charge de la fin de vie et la culture palliative a été impulsée par la loi du 2 février 2016 » dont les textes réglementaires ont été rapidement adoptés. Malgré le peu de recul pour évaluer l’application de la loi, seulement deux ans, ce travail riche s’inscrit dans la volonté d’améliorer la prise en charge de la fin de vie, sans gommer la complexité des situations.

Les rapporteurs soulignent en particulier l’urgence de mettre en place un système plus fiable de recueil des données sur les décisions médicales en fin de vie, notamment « le traçage spécifique pour les décisions de limitations et d’arrêts de traitement ainsi que pour les sédations profondes et continues jusqu’au décès » au plan national. Constatant le manque de recherche sur la fin de vie, le rapport recommande que la thématique “Soins palliatifs et fin de vie” soit confortée dans les appels à projets nationaux et dans les programmes des grands organismes de recherche. Observant ces déficiences, ainsi qu’un problème de gouvernance du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie, la mission préconise un audit de ce Centre créé par la loi de 2016 « pour contribuer à une meilleure connaissance des soins palliatifs mais aussi pour contribuer au suivi et à l’évaluation des politiques publiques en matière de fin de vie ».

Même si des dispositions ont été prises ces dernières années en matière de formation en soins palliatifs, ces efforts doivent se poursuivre pour que la culture palliative puisse se diffuser et que les inégalités régionales s’estompent. Dans la suite des rapports et des études effectués ces derniers mois, le rapport insiste sur la nécessité de renforcer les soins palliatifs dans les EHPAD.

Les directives anticipées et la personne de confiance

Les personnes désignent plus facilement une personne de confiance qu’elles ne rédigent leurs directives anticipées. Si le recueil de ces dernières est « perfectible » et leur nombre encore réduit, les rapporteurs rappellent qu’elles ne sont pas obligatoires. « La multiplication des formulaires même de qualité inégale, doit être encouragée ». Certains patients privilégient le moins de cadrage possible, d’autres sont rassurés par des formulaires précis. La majorité des formulaires est rédigée sur papier libre. L’aspect contraignant des directives inscrit dans la loi est en réalité limité par des rédactions peu précises. Cependant, « la plupart des professionnels de santé rencontrés (médecins, soignants), libéraux et hospitaliers, convergent pour souligner que le dialogue sur la fin de vie avec les patients et leur entourage s’est ouvert, étoffé et amélioré car la loi du 2 février 2016 a permis de réduire les tabous et d’avoir davantage de marge de manœuvre pour parler de souffrance, d’accompagnement et de confort, de sédation, et d’adaptation dans le temps ».

La difficile qualification des situations d’obstination déraisonnable

Les remontées du terrain mettent en lumière la détection particulièrement complexe des situations d’obstination déraisonnable : « le caractère inutile ou disproportionné des traitements en question, laissant une marge d’interprétation ou d’incertitudes en fonction des situations. » Comme le soulignent les auteurs, l’enjeu réside « dans l’adaptation à chaque situation et dans la fluidité de la circulation de l’information afin de faciliter le consensus ». Si l’initiative des décisions des limitations ou d’arrêts de traitement appartient le plus souvent, dans les faits, à l’équipe médicale, des patients ou des familles s’y opposent, persuadés de leur intérêt persistant : « la médecine se trouvant ainsi piégée par son propre discours sur le progrès médical. »

Les cas conflictuels les plus actuels sont cités : ceux des jeunes Marwa et Inès mais aussi le cas de Vincent Lambert. Le rapport préconise dans ces situations la création d’une plateforme téléphonique permettant aux professionnels de terrain confrontés à des situations conflictuelles d’accéder à un consultant extérieur compétent, un professionnel de la médiation ou un expert des questions éthiques.

En particulier, la reconnaissance de la nutrition et l’hydratation artificielles comme un traitement qu’il est possible d’arrêter se révèle « délicat à déployer sur le terrain ». Cela concerne spécialement les personnes les plus vulnérables comme les patients Alzheimer ou les patients en situation pauci-relationnelle. Comme l’a souligné l’Union nationale des traumatisés crâniens (UNAFTC), la nutrition et l’hydratation artificielles « font partie intégrante du projet thérapeutique et de vie de ces patients et ne peuvent être présumées relever d’une obstination déraisonnable sauf volonté contraire exprimée par le patient par des directives anticipées ou recueillie par le témoignage de la personne de confiance ou à défaut de la famille ou des proches ou résultant de la survenue de complications. »

La sédation profonde et continue jusqu’au décès

Les demandes sont rares d’après les centres hospitaliers consultés. Une enquête quantitative a été lancée par le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie qui a été contestée par la SFAP (Société Française d’accompagnement et de soins palliatifs). Des données plus précises devraient être connues en fin d’année.

La Haute Autorité de Santé (HAS) a publié le 15 mars 2018 ses recommandations de bonne pratique pour la mise en œuvre de la « sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès » qui sont venues clarifier ses contours. Les auteurs ont pris soin de bien différencier ce type de sédation qui demeure exceptionnelle de l’euthanasie qui a pour but de provoquer la mort. Selon certaines équipes interrogées, « ce nouveau droit avait permis d’ouvrir le dialogue avec les patients et aussi, parfois, de faire tomber des demandes d’euthanasie. ». Mais globalement plusieurs difficultés existent avec « la complexité pour les équipes de soins d’apprécier des concepts essentiels comme ceux de souffrance réfractaire, de souffrance insupportable, de pronostic vital engagé à court terme et de manier de façon adéquate les critères d’évaluation existants… »

En conclusion les rapporteurs rappellent qu’« il faut toujours garder à l’esprit le caractère profondément singulier, douloureux et complexe de chaque situation de fin de vie. »

[CP] Sondage "Fête des pères" : Le rôle du père largement plébiscité par les Français

[CP] Sondage "Fête des pères" : Le rôle du père largement plébiscité par les Français

paternite

À la veille de la fête des pères, selon un sondage IFOP[1] commandé par Alliance VITA, 93% des Français considèrent que « les pères ont un rôle essentiel pour les enfants ».

D’après cette même enquête, ce sont près des trois quarts des Français (73%) qui estiment que « les rôles du père et de la mère sont différents et complémentaires » par rapport à une minorité (27%) qui les jugent « identiques et interchangeables ».

Comme le constate Tugdual Derville, Délégué général d’Alliance VITA, « l’indifférenciation père-mère, promue par certains est largement rejetée et cela se confirme encore davantage quand sont pointées les conséquences de l’absence de père » : 89% des Français considèrent que celle-ci représente « quelque chose qui marque toute la vie » et 85% qu’elle « peut entraîner chez l’enfant des difficultés personnelles ».

Et lorsque l’on demande leur avis aux Français sur un point sensible du débat des Etats généraux de la bioéthique – l’ouverture de la PMA sans père aux femmes célibataires et couples de femmes – 61% des français pensent « qu’il faut privilégier le besoin de chaque enfant d’avoir un père en réservant la PMA aux couples homme-femme ayant un problème médical d’infertilité ». Et chez les pères, cet avis monte à 72%.

Pour Tugdual Derville, « Il apparaît aussi clairement que le fait de connaître son père relève de l’intérêt supérieur de l’enfant pour une majorité de nos concitoyens »

 

[1] Sondage réalisé par l’IFOP pour Alliance VITA, du 7 au 11 juin 2018, auprès d’un échantillon de 2016 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.
Sondage : le regard des Français sur la paternité

Sondage : le regard des Français sur la paternité

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Au lendemain de la consultation citoyenne des Etats Généraux de la Bioéthique et à quelques jours de la fêtes des pères, Alliance VITA a voulu connaître l’avis des Français sur la paternité.

Depuis de nombreuses années, Alliance VITA est sensible à cette question en raison de témoignages innombrables reçus sur chacun de ses deux services d’écoute, SOS Bébé et SOS Fin de vie, exprimant pour beaucoup le rôle déterminant ou, à l’inverse l’absence douloureuse des pères lors des grandes épreuves de la vie. En 2015, l’association avait déjà réalisé, avec ses équipes, une grande enquête de rue « Un siècle de filiation » auprès de milliers de Français de tous âges à propos de leurs relations comparées à leur père et à leur mère.

Face à la permanence d’un débat bioéthique qu’on peut résumer par une question : à quoi sert d’avoir un père ? le verdict des 2000 sondés* est sans appel.

  • Le rôle du père est « essentiel » (93%) et « différent et complémentaire » (73%) au regard de celui de la mère.
  • L’absence de père marque toute la vie (89%) et même « peut entraîner chez l’enfant conséquences difficiles à vivre » (85%).
  • Entre la revendication d’accès à la PMA pour certaines femmes seules ou vivant à deux et le besoin de père chez l’enfant, les Français sont encore 61% à privilégier ce dernier.
  • Et mis en situation d’être conçus d’une PMA avec un géniteur qui n’aura pas de statut paternel, ils sont la même proportion à considérer que cela leur pèserait.

RETOUR AU RÉEL :
Ce qui est soutenu quand on parle d’un « droit nouveau pour les femmes », ne l’est plus quand on voit la discrimination induite pour l’enfant.

sondage ifop alterite pere mere
sondage ifop absence de pere
sondage ifop pma sans pere

Le plus notable dans ces résultats, c’est peut-être l’avis spécifique des hommes sur la paternité et, plus encore de ceux qui parmi eux sont déjà pères : le taux de 61% monte à 66% pour les hommes puis 72% pour les pères quand il s’agit d’autoriser l’accès à la PMA aux femmes seules ou aux couples de femmes. Même si une grande majorité des femmes soutiennent l’importance des pères, il reste notable que ce soient encore les pères qui défendent le mieux la paternité.

Pour Alliance VITA, les résultats de ce sondage témoignent à quel point les Français sont attachés à la défense et la protection de l’intérêt supérieur de l’enfant.

*Sondage IFOP auprès d’un échantillon représentatif de 2000 personnes, qui permet d’offrir des données sur l’ensemble des sondés (hommes et femmes), mais aussi de faire ressortir de façon fiable l’avis des Français qui sont pères.

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Suisse : des directives pour « élargir » l’aide au suicide

Suisse : des directives pour « élargir » l’aide au suicide

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Le 6 juin 2018, l’Académie suisse des sciences médicales (ASSM), organe qui donne un cadre éthique aux professionnels de la santé en Suisse, a publié de nouvelles directives sur l’« Attitude face à la fin de vie et à la mort » actualisant celles de 2004. L’une de ces directives vise à « assouplir » l’aide au suicide.

Ainsi, le médecin pourra désormais apporter une aide au suicide à un patient en proie à une « souffrance insupportable due à des symptômes de maladie et/ou à des limitations fonctionnelles », le critère venant remplacer celui de la « fin de vie ». Avant, le médecin ne pouvait prescrire la potion létale qu’à une personne malade dont la mort était imminente.

De son côté, la Fédération des médecins suisses (FMH) qui rassemble plus de 40 000 membres et fédère plus de 70 organisations médicales, s’y est opposée. « La notion est vague, ce qui pourrait poser des problèmes d’interprétation devant la commission de déontologie. C’est particulièrement problématique pour une décision si importante où aucun retour en arrière n’est possible », a déclaré son président Jürg Schlup. Il n’est pas sûr que cette nouvelle version soit intégrée dans leur code de déontologie même si l’association professionnelle entend prendre le temps d’examiner la situation.

L’un des membres de la sous-commission qui a rédigé ces directives sur la fin de vie, Samia Hurst, admet que la notion de souffrance insupportable est subjective. « Le critère repose sur une évaluation par le médecin. Il doit pour cela se forger la conviction, sur la base de l’histoire du patient et après des entretiens répétés, que ses souffrances sont insupportables. Quelles que soient ses conclusions, il conserve de toute manière le droit de refuser d’assister le suicide. Il garde d’ailleurs toujours cette liberté. On ne peut forcer personne.»

La commission bioéthique de la conférence des évêques de Suisse souligne un aspect très grave de ces directives qui se révélent aux antipodes de l’éthique en modifiant le sens même de la médecine. Chaque soignant pourrait désormais décider, lui-même, si le suicide assisté « intègre des objectifs médicaux ou non ». Jusqu’alors, les directives affirmaient clairement que l’assistance au suicide ne faisait pas partie de l’activité médicale, car « elle était contraire aux buts de la médecine ».

Depuis quelques années, le taux de suicides assistés est en forte hausse en Suisse. L’Observatoire suisse de la santé constate que « Le décès par suicide est un problème de santé publique souvent sous-estimé en Suisse. Il l’est non seulement en comparaison avec d’autres pays – la Suisse fait partie des pays d’Europe qui présentent un taux de suicide supérieur à la moyenne – mais aussi par rapport à d’autres problèmes de santé ».

Pour rappel et information :

En Suisse, l’aide au suicide est admise sous conditions, en se basant sur article 115 du Code pénal qui interdit d’inciter ou de prêter assistance au suicide pour « des motifs égoïstes ». L’euthanasie est interdite.

L’ASSM, créée en 1943, est reconnue par la Confédération comme « institution de promotion de la recherche » ; elle a notamment pour mission de réfléchir sur les questions éthiques. La Commission centrale d’éthique de l’ASSM élabore des directives médico-éthiques qui sont en principe intégrées au code déontologique de la Fédération des médecins suisses (FMH).