L’euthanasie aux Pays-Bas

L’euthanasie aux Pays-Bas

NOTEXPERT L’euthanasie aux Pays-Bas

 

Les Pays-Bas sont historiquement le premier pays en Europe à avoir dépénalisé l’euthanasie et le suicide assisté, par une loi de 2001. Le nombre de personnes euthanasiées n’a cessé de croître chaque année, dans le cadre d’une évolution culturelle préoccupante, notamment pour les plus fragiles de la société. 

La présente note dresse un bilan approfondi de la situation actuelle, avec les données statistiques et la législation applicable, ou en cours de discussion pour élargir son champ d’application. Elle examine les principales dérives éthiques constatées, avec une interprétation de plus en plus laxiste des organes de contrôle, au point que même l’ONU s’en est préoccupé.

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I – LA SYNTHÈSE

 

L’euthanasie est légale aux Pays-Bas depuis maintenant plus de 15 ans, par une loi du 12 avril 2001 entrée en application le 1er avril 2002. Les Pays-Bas sont historiquement le premier pays en Europe à avoir autorisé cette pratique. Depuis cette légalisation, le nombre d’euthanasies pratiquées a plus que triplé. Les chiffres présentés chaque année par les comités régionaux d’examen de l’euthanasie montrent également une augmentation du nombre de dérives, et une interprétation toujours plus large des conditions requises par la loi de 2001.

Si les conditions strictes établies par la loi n’ont pas évolué stricto-sensu, leur interprétation très extensive donne lieu en effet à des situations de plus en plus discutables : euthanasie de personnes atteintes de troubles psychiatriques, de personnes démentes, de personnes très âgées ou encore de personnes souffrant de plusieurs pathologies, mais ne respectant pas les conditions initiales requises par la loi.

D’autres voix se font entendre, et notamment de la part de certains médecins regrettant une banalisation de l’euthanasie.

Alors que les dérives sont dénoncées par certains, d’autres souhaitent élargir les conditions d’accès et de pratique de l’euthanasie. Des pressions fortes s’exercent pour que le Parlement autorise le suicide assisté des personnes de plus de 70 ans qui en feraient la demande, en n’invoquant pas d’autre mobile que l’âge et la « fatigue de vivre ».

Ainsi, l’association « De plein gré » (Uit vrije will) avait organisé une pétition d’initiative citoyenne début 2010, pétition qui avait obligé le Parlement à débattre sur le sujet. Un projet de loi déposé par le gouvernement en octobre 2016 est actuellement étudié.

 

II – LES DONNÉES STATISTIQUES

 

Les données présentées ci-dessous proviennent du rapport annuel des comités régionaux de l’examen de l’euthanasie (Regionale Toetsingcommissies Euthanasie, RTE). Ces chiffres ne prennent pas en compte les euthanasies clandestines et les sédations palliatives cachant en réalité des euthanasies[1].

En 2002, première année d’application de la loi, on a recensé 1 882 euthanasies. Ce nombre est passé à 4 188 en 2012 et à 6 091 en 2016. En 10 ans, le nombre d’euthanasies a donc doublé, et triplé en 15 ans. Pour mémoire, la population néerlandaise n’a augmenté que de 4 % de 2002 à 2016.

Sur l’année 2016, les Pays-Bas ont comptabilisé 16 euthanasies par jour, sur une population de 16,8 millions d’habitants. Cela représente 4 % de l’ensemble des décès de l’année.

83 % de ces euthanasies ont été pratiquées sur des patients souffrant de maladies incurables, les autres euthanasies étant liées à des pluri-pathologies (10%), des infirmités liées au grand âge (4%), ou encore à des troubles psychiatriques (2%) et démences (1%).

Une synthèse du rapport 2016, publiée en français, présente les statistiques de l’euthanasie aux Pays-Bas, avec des tableaux et les principaux éléments d’analyse. Ainsi, 80% des personnes euthanasiées l’ont été chez elles et, dans 85% des cas, par le médecin de famille.

Le graphique ci-dessous présente l’évolution du nombre d’euthanasies et de suicides assistés ayant été réalisés depuis 2002.

evolution euthanasie paysbas

 

III – LA LÉGISLATION

 

A) La loi de 2001 : Légalisation de l’euthanasie et de l’aide au suicide

L’euthanasie est devenue légale aux Pays-Bas par la loi du 12 avril 2001, dite « Loi de contrôle d’interruption de la vie sur demande et l’aide au suicide », qui a été mise en application à partir du 1er avril 2002. Elle est le fruit d’une évolution historique qui a commencé dès les années 70-80, avec une jurisprudence pénale plus « compréhensive » pour les médecins et plusieurs propositions de loi : voir chronologie en annexe.

Sans dépénaliser l’euthanasie à proprement parler, la législation néerlandaise actuelle la permet dans certains cas précis. En effet, l’euthanasie, l’incitation au suicide et l’aide au suicide demeurent juridiquement des infractions pénales. Mais la loi introduit une excuse exonératoire de responsabilité pénale au profit du médecin qui respecte cinq « critères de minutie » :

1) La demande du patient doit être volontaire et mûrement réfléchie. Le consentement du patient qui n’est plus en état de l’exprimer peut être pris en compte, s’il a préalablement établi une déclaration écrite en ce sens et est âgé d’au moins 16 ans.

2) Les souffrances du patient sont insupportables et sans perspective d’amélioration.

3) Le patient doit avoir été pleinement informé de sa situation et des perspectives qui   sont les siennes.

4) Le médecin et le patient sont parvenus conjointement à la conclusion qu’il n’existe pas d’autre solution raisonnable.

5) Un autre médecin indépendant doit avoir été consulté et doit avoir donné par écrit son avis sur les critères de minutie. Dans l’hypothèse où la demande d’euthanasie est formulée par un patient souffrant de troubles mentaux, deux médecins indépendants doivent avoir été consultés, dont au moins un psychiatre.

La loi s’applique également aux mineurs : elle prévoit que le médecin peut accepter la demande d’un mineur, à condition que ses parents soient associés à sa prise de décision (lorsque le mineur a entre 16 et 18 ans) ou donnent leur accord (lorsqu’il a entre 12 et 15 ans). Par ailleurs, depuis 2005, un protocole appelé « protocole de Groningen » énumère les conditions et les étapes à suivre dans le cadre des décisions de fin de vie de jeunes enfants, essentiellement des nouveau-nés.

B) Les pressions pour élargir les possibilités d’euthanasie ou de suicide assisté

Régulièrement, divers organismes se positionnent en faveur d’une interprétation plus large de la loi de 2001. A titre d’exemple, l’Association médicale royale néerlandaise (KNMG) a proposé en 2011 de nouvelles directives pour préciser ce qui est permis ou pas dans le cadre légal, estimant que les souffrances endurées en phase non-terminale doivent pouvoir, elles aussi, motiver une demande d’euthanasie [1].

Mais les pressions les plus fortes, dans le cadre de débats dans la société ou de propositions au niveau législatif, visent à ouvrir l’application de la loi à de nouvelles situations non prévues à l’origine.

  1. Les personnes « fatiguées de vivre »

En octobre 2016, le gouvernement néerlandais a déposé un projet de loi visant à autoriser un nouveau cadre juridique pour l’assistance au suicide des personnes âgées[2], même si elles ne sont pas souffrantes, en invoquant la notion de « vie accomplie » ou « achevée » (voltooid leven). Le principe directeur ne serait donc pas de soulager la souffrance, mais de respecter l’autonomie. Selon le gouvernement, les personnes concernées « ne voient plus de possibilité pour donner un sens à leur vie, vivent mal leur perte d’indépendance, ont un sentiment de solitude ».

Pourtant, une commission composée principalement de médecins, de philosophes et de juristes avait conclu en février 2016 que cette notion de « vie accomplie » ne pouvait être retenue. Ces experts considèrent que la loi de 2002 est déjà suffisamment large, et surtout que ce pourrait être la porte ouverte à des euthanasies sous l’influence de certaines familles désireuses « d’en finir » avec des proches âgés et fragilisés.

Ces craintes sont partagées par certains partis politiques qui estiment qu’un éventuel texte ne peut que mener à « une pression sur les autres personnes âgées qui vont se sentir de trop dans la communauté ». Un professeur d’éthique médicale considère ainsi l’initiative du gouvernement « prouve que nous n’avons pas réussi à intégrer réellement les personnes âgées dans notre société [3]». La Société royale néerlandaise pour la promotion de la médecine (KNMG) a indiqué également, dans un communiqué de mars 2017 : « Une telle proposition radicale n’est pas souhaitable pour des raisons pratiques et de principe »[4].

Le ministre de la santé et celui de la justice ont décidé de passer outre cet avis important et poussent à l’adoption de ce projet de loi. Celui-ci doit encore être précisé, notamment concernant l’âge à partir duquel une euthanasie serait possible : l’âge de 70 ou 75 ans est souvent évoqué. Ce type de demande serait alors pris en charge par un travailleur social (et non plus un médecin), spécialement formé à l’aide à mourir, et par un expert indépendant.

  1. L’euthanasie pour les mineurs de moins de 12 ans

La loi néerlandaise actuelle permet l’euthanasie des enfants à partir de 12 ans (pour la période 2002-2015, 7 cas ont été déclarés), et le Protocole de Groningen  de 2005 permet l’euthanasie des nouveau-nés atteints d’une grave affection et dont la “qualité de vie” est estimée insatisfaisante[5].

A partir de 2014, la NVK (Nederlandse Vereniging voor Kindergeneeskunde – Association néerlandaise de Pédiatrie), dans le cadre de sa Commission Ethique et Droit,  a proposé des débats sur l’ouverture de l’euthanasie aux enfants de moins de 12 ans (la décision serait prise par les parents et le médecin, sans nécessairement avoir l’accord de l’enfant)[6]. Dès 2015, la NVK a officiellement pris position en faveur de l’euthanasie des enfants entre 1 et 12 ans, en se fondant sur une analyse de la capacité de discernement[7].

Dans les cas où les enfants ne pourraient ni comprendre ni s’exprimer, le médecin, en accord avec les parents, pourrait lui-même décider l’euthanasie, comme cela se fait déjà pour les nouveau-nés.

La ministre de la santé a précisé en mai 2016 qu’il n’y a pas besoin de nouvelle loi pour élargir ces pratiques, en affirmant : « C’est une méprise de croire que le cadre légal actuel ne permet pas de provoquer la mort des enfants gravement malades. En effet, un médecin en cas de « force majeure » peut toujours faire appel à l’état de nécessité. »

  1. Le développement du don d’organes après euthanasie

Après un premier prélèvement en 2012, la pratique se développe pour contribuer à pallier le manque d’organes disponibles. Un cas emblématique a été médiatisé en mars 2016, avec l’euthanasie d’un homme « qui a permis de sauver cinq vies ».

Début 2017, des directives organisant le don d’organe après euthanasie (Richtijn orgaandonatie na euthanasie) ont été élaborées, à la demande de la ministre de la santé, par des professionnels de la santé, des associations de patients, des éthiciens et des proches de patients. Ce manuel pratique multidisciplinaire (Richtijn orgaandonatie na euthanasie) a été mis au point pour expliquer en détail la procédure médicale combinant euthanasie puis don d’organes. 

Ces directives, contraignantes pour l’ensemble des médecins et hôpitaux, insistent sur le fait que l’euthanasie doit être effectuée dans un hôpital, et non comme la plupart du temps au domicile par le médecin traitant : cela doit permettre de prélever les organes dans les minutes qui suivent le décès, avec une équipe dédiée dans une autre salle d’opération.

Au-delà des préoccupations de techniques médicales, les questions éthiques demeurent en réalité nombreuses. L’objectif clairement affiché est de faciliter le prélèvement d’organes sur des personnes décédées par euthanasie : grâce à ces nouvelles directives, le nombre d’organes disponibles post-mortem aux Pays-Bas devrait être doublé.

On peut craindre que la pression médicale ou sociétale pour obtenir des organes amène des personnes « à se sacrifier », au nom d’une conception erronée de la solidarité entre malades et bien-portants.

  1. La pilule du suicide

L’association De Laatste Will (« La dernière volonté ») a annoncé en septembre 2017 pouvoir mettre à disposition des personnes qui le souhaitent un produit pour provoquer la mort en une heure, sans nécessiter l’encadrement d’un médecin. Forte de 3 500 adhérents ayant une moyenne d’âge de 70 ans, cette association milite pour « le droit de mourir dans la dignité » quand la personne l’aura décidé, et pas forcément dans le cas où elle souffre de manière inapaisable.

 

IV – UNE MULTIPLICATION DES DÉRIVES CONSTATÉES

Si la loi n’a pas formellement évolué depuis 2001, l’interprétation de celle-ci a laissé libre cours à des pratiques de plus en plus permissives. La loi prévoit des conditions relativement strictes, mais la pratique tend à élargir l’interprétation de celles-ci pour rendre l’euthanasie plus accessible.

A) Des euthanasies au détriment des soins palliatifs
  1. La loi sur l’euthanasie est intervenue « beaucoup trop tôt »

En décembre 2009, Madame Els Borst, ministre de la Santé des Pays-Bas en 2001, responsable de la loi légalisant l’euthanasie, s’est confiée dans un ouvrage d’entretiens avec Anne-Mei The, anthropologue et juriste : pour elle, la légalisation de l’euthanasie est intervenue « beaucoup trop tôt ».

Elle pense que les pouvoirs publics n’ont pas prêté l’attention nécessaire aux soins palliatifs et à l’accompagnement des mourants. « Aux Pays-Bas, nous avons d’abord écouté la demande politique et sociétale en faveur de l’euthanasie. Évidemment, ce n’était pas dans le bon ordre. » Elle met en cause notamment la « pression sociale » venant des médecins, qui cherchaient à soulager leurs patients de leurs souffrances sans avoir à réaliser des « bricolages » illégaux.

  1. Des sédations inappropriées et des euthanasies masquées.

En 2013, le centre intégral du cancer néerlandais (NKNL) a dénoncé des euthanasies masquées et des soins inappropriés apportés aux patients. Chaque année, 1700 cas de sédations en fin de vie pourraient relever de pratiques inadéquates cachant des euthanasies.

Dans le 3ème rapport quinquennal (2012-2016) d’évaluation de la loi néerlandaise, publié en juillet 2017, l’étude des certificats de décès montre que les « sédations profondes et continues jusqu’au décès » sont passées de 8,2% des décès en 2005 à 18% en 2015. Cette forte augmentation pose la question de mieux comprendre si cette technique relève des soins palliatifs ou des pratiques euthanasiques.

Par ailleurs, une étude rendue publique le 26 août 2016, réalisée auprès de médecins du SCEN (Steun en Consultatie bij Euthanasie in Nederland), soutient que beaucoup d’euthanasies seraient pratiquées parce que la personne qui en demande une n’aurait pas bénéficié d’une prise en charge adéquate.

B) Les personnes souffrant de troubles psychiatriques

La loi dispose explicitement que la demande du patient doit être volontaire et mûrement réfléchie. De ce fait, accorder l’euthanasie à des patients qui souffrent de troubles psychiatriques ou de démence pose problème. Pour une décision aussi irréversible que l’euthanasie, la question de la liberté de choix se pose pour toute personne, jusqu’au dernier moment. Lorsque le patient est atteint de troubles relatifs à sa santé mentale, l’expression de sa volonté demeure encore plus difficile à établir.

Pourtant les cas d’euthanasie dans ces situations ne sont pas rares. La référence à une directive anticipée (document écrit préalablement, demandant l’euthanasie dans les cas où la personne serait amenée par la suite à ne plus pouvoir donner son consentement) est fréquente pour justifier l’euthanasie des personnes démentes.

Le rapport 2009 des commissions régionales de contrôle fait état de 12 cas d’euthanasies pratiquées pour des maladies neurologiques, dont des personnes démarrant la maladie d’Alzheimer. Selon les données de 2016. 201 euthanasies ont été déclarées cette année-là pour des pathologies psychiatriques (60 cas) et des démences (141 cas). La capacité d’une personne psychologiquement atteinte à donner son consentement n’est pas évidente à établir, et beaucoup de médecins refusent de pratiquer ce type d’euthanasies.

La question des « souffrances sans perspective d’amélioration » peut aussi être soulevée pour certains cas de psychiatrie.

Le  16 février 2017, une pétition signée par 350 médecins dénonce les euthanasies de personnes démentes, et la multiplication des « cas limites ». « Donner une injection mortelle à un patient atteint de démence avancée, sur la simple base d’une déclaration anticipée ? À quelqu’un qui n’est pas en mesure de confirmer qu’il veut mourir ? Nous nous y refusons. Notre réticence morale à mettre fin à un être humain sans défense est trop grande. »

C) La clinique de fin de vie : un moyen de contourner le refus des médecins

Alors que la loi prévoit explicitement que le médecin et le patient doivent conjointement parvenir à la conviction qu’il n’existe pas d’autre solution, certaines associations considèrent que la volonté du patient doit toujours primer, et que le refus d’un médecin de pratiquer une euthanasie ne doit pas empêcher celle-ci d’avoir lieu.

En 2012, l’association NVVE (association pour la fin de vie volontaire) a mis en place des « équipes volantes » permettant de donner satisfaction aux personnes dont les médecins traitants refusent l’euthanasie. Une trentaine d’équipes mobiles seraient ainsi constituées d’un médecin et d’un infirmier. L’association, avec un objectif de réaliser 1000 euthanasies par an, a également ouvert une « clinique de la mort » à la Haye, spécialisée dans les euthanasies.

Selon le rapport officiel 2016 des comités régionaux d’euthanasie, les médecins de la clinique de fin de vie seraient responsables d’environ 400 cas d’euthanasie, contre 107 en 2013. Ceux-ci acceptent effectivement les cas les plus tangents et « complexes » que les autres médecins ne jugent pas forcément justifiés, et pourtant ils ne sont pas réellement inquiétés par la commission de contrôle ou la justice (voir ci-dessous).

Ce dispositif est critiqué par l’association KNMG, regroupant 53 000 médecins, ces « équipes volantes » ne connaissant pas suffisamment bien les patients pour être à même de juger de leur état : « Nous ne sommes pas contre l’euthanasie s’il n’y a pas d’autre alternative. Mais l’euthanasie est un processus compliqué, à l’issue d’un traitement à long terme d’un patient, basé sur une relation de confiance. Il faut avoir une approche holistique du traitement du patient et voir notamment s’il existe une alternative à l’euthanasie : nous doutons sérieusement que cela puisse être fait par un médecin uniquement chargé de pratiquer des euthanasies. »

 

V – UN CERTAIN LAXISME DES ORGANES DE CONTROLE

Si la loi n’a pas formellement évolué depuis 2001, l’interprétation de celle-ci a laissé libre cours à des pratiques

A) Les commissions régionales de contrôle ont une interprétation extensive de la loi

Les cinq commissions régionales de contrôle mises en place en 2002 sont des organes chargés d’étudier les signalements de cas d’euthanasie et de vérifier que les médecins agissent conformément aux critères de minutie. Ils rendent chaque année un rapport sur les euthanasies pratiquées dans leur région.

Dès 2008, un rapport officiel français relève que le taux de signalement des cas d’euthanasie est en constante augmentation chaque année. Mais le taux d’euthanasies clandestines est encore estimé à 20% en 2005, ce qui pose la question de la transparence de cette législation.

Ce rapport montre également « qu’aucune poursuite pénale n’a été exercée à l’encontre d’un médecin sur les fondements des articles 293 (euthanasie) et 294 (aide au suicide assisté) du code pénal. 24 cas litigieux ont été transmis par les commissions de contrôle au Collège des procureurs généraux en 6 ans. Dans la plupart des cas, les médecins concernés ont été invités à s’entretenir avec le Procureur de la Reine pour un simple rappel à l’ordre, le parquet, semble-t-il, n’ayant pas été saisi de deux avis de violation de la loi par le même médecin ».

En 2016, ces commissions n’ont demandé des informations complémentaires que pour 77 cas sur 6 091, soit 1,3% du total. Sur ces 77 cas, 10 euthanasies ont eu lieu alors que les médecins n’ont pas respecté les conditions requises.

Le 3ème rapport quinquennal (2012-2016) d’évaluation de la loi néerlandaise, publié en juillet 2017, donne les statistiques globales suivantes :

  • 0,2% des cas déclarés à la commission de contrôle ont été jugés non-conformes aux critères de minutie établis par la loi (76 cas sur les 43 171 cas déclarés entre 2002 et 2015).
  • La commission de contrôle a demandé des clarifications au médecin dans 4% des cas déclarés.
  • Dans 1% des cas déclarés, la commission de contrôle a convoqué le médecin à l’une de ses séances afin de clarifier l’affaire.

Ce rapport en conclut : « Lorsqu’un médecin a agi de manière non-conforme aux critères de minutie mais apparemment avec bonne foi, la commission préfère adopter à son égard une attitude éducative plutôt que d’entamer des poursuites. »

B) Pour la Justice, aucune dérive constatée depuis 2001

Quant à la justice, elle se montre particulièrement large également : en témoigne l’affaire Albert Heringa, dans laquelle un homme a été acquitté en appel, alors même qu’il avait assisté sa mère au suicide dans des conditions contraires à la loi. Une décision discutable, « au motif qu’il avait agi dans une « situation d’urgence », ayant eu à décider entre respecter la loi ou se plier à une « obligation morale non écrite » en procurant à sa mère les produits mortels lui permettant de se suicider. »

En 2014, par trois fois, la clinique de fin de vie a été blâmée par les commissions régionales de contrôle pour insuffisance d’instruction des dossiers de demande, mais cette clinique a continué de développer son activité sans être inquiétée. En 2015, deux euthanasies ont été jugées non conformes aux exigences de la loi par les commissions de contrôle. Malgré cela, aucune poursuite pénale n’a été engagée contre la clinique de fin de vie, pourtant responsable de ces actes.

Plusieurs autres cas controversés ont été médiatisés. À titre d’exemple, en 2016, un alcoolique de 41 ans a été euthanasié à sa demande. Une jeune femme de 20 ans,  abusée plusieurs fois sexuellement dans son enfance, et souffrant de séquelles psychologiques, a également été euthanasiée, les médecins ayant conclu que ses souffrances physiques et mentales étaient devenues insupportables.

En février 2017, une femme souffrant de la maladie d’Alzheimer a été euthanasiée contre sa volonté dans un établissement de soins : la commission de contrôle a transmis ce cas à la justice pour violation de la loi par un médecin (c’est la première fois depuis 16 ans), mais elle ne demande pas de condamnation pour homicide.

 

VI – LE MAL-ETRE D’UNE PARTIE DU CORPS MEDICAL

A) Une absence de clause de conscience pour les médecins

Aux Pays-Bas, les médecins ne bénéficient pas de clause de conscience formelle, c’est-à-dire d’un droit de refuser une opération d’euthanasie pour des raisons personnelles, morales ou éthiques. Des directives KNGM (Association médicale royale néerlandaise), mises en place en 2011, précisent les conditions de pratique de l’euthanasie, et incluent le médecin dans le processus de décision pour certaines opérations.

Dans ses recommandations conclusives, le 3ème rapport quinquennal (2012-2016) d’évaluation de la loi néerlandaise souligne cependant que « le gouvernement devrait réaffirmer le fait que les médecins ne sont pas tenus d’accéder aux demandes d’euthanasie. » Le rapport fait également la suggestion suivante : « Abandonner l’idée d’inclure dans la loi euthanasie le devoir de référer à un confrère pour les médecins qui refusent une demande d’euthanasie ou de suicide assisté (Clause de conscience). »

En ce qui concerne la sédation palliative, c’est normalement au médecin de prendre la décision, avec l’accord du patient. Cependant en mars 2017 un médecin néerlandais, spécialiste en gériatrie, a été condamné d’un blâme par le conseil de discipline des soins de santé de la Haye. Il avait refusé de sédater une patiente, considérant que celle-ci était calme, dormait bien, et réagissait bien aux doses de morphine, et qu’aucun symptôme réfractaire n’avait été observé.

Le Conseil a considéré que le médecin devait prendre en compte la souffrance psychique d’être encore en vie, et que le seul fait de vouloir mourir peut être qualifié de symptôme réfractaire.

B) Un poids psychologique important chez les médecins

Des personnalités telles que le professeur Theo Boer dénoncent un glissement vers la banalisation et une perte de contrôle de l’euthanasie, qui tendrait à devenir la manière de mourir par défaut des patients atteints de cancer.

En 2015, une enquête a été menée auprès de 500 médecins par la fédération médicale néerlandaise (KNMG) et met en exergue le ressenti de ces derniers par rapport à l’euthanasie. Les médecins dénoncent une banalisation de l’acte, en déplorant que de plus en plus de patients souhaitent recourir à l’euthanasie comme substitut à la mort naturelle. 60 % d’entre eux estiment subir « une pression de la part des patients ou de la famille pour les pousser à pratiquer l’euthanasie » et 90 % considèrent que l’on sous-estime la charge que l’euthanasie représente pour les médecins.

La pétition des médecins concernant les personnes démentes souligne aussi que l’euthanasie est un acte difficile pour les médecins (cf § IV-B).

 

VII – LES CRITIQUES D’OBSERVATEURS ETRANGERS

A) Une loi floue pour les parlementaires français

Des parlementaires français ont étudié la loi néerlandaise en 2008, au cours d’un voyage d’étude approfondi. Il ressort de leur analyse que l’application de cette loi présente plusieurs caractéristiques qui posent question :

« les critères d’évaluation du degré de la souffrance du patient sont flous, l’existence même d’un contrôle a posteriori faisant porter la vérification plus sur le respect de la procédure que sur la réalité des motifs médicaux ; l’appréciation du médecin est subjective et la méconnaissance de la loi n’est pas sanctionnée. Il y a quelque paradoxe à revendiquer haut et fort un droit à l’autonomie de la personne et à s’en remettre avec cette réglementation à la décision du médecin, cette législation consacrant de fait le pouvoir médical ».

B) Une interpellation du Comité des Droits de l’homme de l’ONU

En juillet 2009, le Comité des Droits de l’Homme de l’ONU s’est inquiété du nombre élevé de cas d’euthanasies et de suicides assistés. Il a « demandé instamment » aux Pays Bas de réviser sa législation pour se mettre en conformité avec les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966.

Deux sujets ont été abordés en particulier :

  • Le nombre important d’euthanasies et de suicides assistés, et sa progression chaque année.
  • Certaines modalités posent question : le fait d’autoriser un médecin à mettre fin à la vie d’un patient sans recourir à l’avis d’un juge, et le fait que le deuxième avis médical requis puisse être obtenu au travers d’une ligne téléphonique d’urgence.

 

Malgré ces critiques, les Pays-Bas n’ont pas revu leur législation. Le nombre d’euthanasies a continué à progresser chaque année, avec une interprétation de plus en plus extensive de la loi et une pression croissante de certains d’en élargir la portée.

 

ANNEXE

Les évolutions du cadre légal avant la loi de 2001

1973 : une première décision judiciaire enfreint la loi, un médecin n’est condamné qu’à une peine symbolique pour avoir pratiqué une euthanasie sur sa mère. D’autres jugements similaires suivent.

27 novembre 1984 : la Cour Suprême des Pays-Bas introduit dans la jurisprudence la notion de « force majeure », qu’un médecin peut invoquer lorsqu’il a eu recours à une euthanasie mais qu’il a agi en conscience et dans le respect de l’éthique médicale.

1988 : proposition de loi prévoyant une modification du Code pénal, pour dépénaliser les actes d’euthanasie ou de suicides assistés. Elle aboutit en 1989 sur un accord selon lequel il faut créer une commission nationale d’enquête.

1er novembre 1990 : une procédure est instaurée pour réglementer la déclaration des médecins en cas d’euthanasie.

8 novembre 1991 : le gouvernement fait une proposition au Parlement néerlandais pour dépénaliser « de fait » (et non « en droit ») l’euthanasie. Il ne s’agit pas de légaliser l’euthanasie,    mais de légaliser la possibilité de déclaration de décès par euthanasie. Implicitement, le projet de loi reconnaît que l’euthanasie peut être un acte médical légitime.

9 février 1993 : cette proposition de loi est acceptée par le Parlement et entre en vigueur.

Fin des années 90 : débats parlementaires pour dépénaliser « en droit » l’euthanasie et le suicide assisté, aboutissant à la loi du 12 avril 2001.

l'euthanasie aux pays-bas

En savoir plus sur la fin de vie à l’étranger.

L’Association médicale mondiale examine les questions de fin de vie et d’euthanasie

La rencontre régionale pour l’Europe de l’Association médicale mondiale (AMM) qui s’est tenue à Rome les 16 et 17 novembre 2017 est le résultat d’un processus mis en œuvre depuis près d’un an pour examiner les dilemmes éthiques relatifs à la fin de vie.

L’AMM a été créée en 1947 : elle réunit 114 associations médicales nationales à travers le monde. Cette instance internationale a pour objectif de statuer sur les meilleures normes internationales relatives à l’enseignement médical, ainsi qu’à la science, aux pratiques et à l’éthique médicales. En France, l’Ordre des médecins en est membre.

Le Conseil de l’AMM, composé de membres issus des 6 régions (Afrique, Asie, Europe, Amérique Latine, Amérique du Nord et Pacifique) est l’instance dirigeante, actuellement présidé par le Dr. Yoshitake Yokotura (Japon). Le président de la KNGM (l’association royale des médecins des Pays-Bas) vient de rejoindre ce Conseil en 2015. Dans un communiqué, l’association se félicitait de pouvoir influer sur les décisions et aspects éthiques du soin.

Sous la pression des Pays-Bas et du Canada, rares pays à avoir légalisé l’euthanasie et le suicide assisté, le comité exécutif du Conseil de l’AMM a organisé des réunions régionales pour examiner les problématiques de fin de vie. Ces deux pays ont pour objectif clair, tout en étant très minoritaires, de faire évoluer la position de l’AMM et d’obtenir que l’euthanasie et le suicide assisté ne soient plus considérés contraires à l’éthique.

Cette initiative de rencontres et de réflexion intervient après des réunions houleuses, des membres s’inquiétant d’un éventuel changement de position de l’AMM clairement opposée à l’euthanasie et au suicide assisté. L’AMM a plusieurs fois réaffirmé ces dernières années sa position : elle encourage vivement « toutes les Associations Médicales Nationales et les médecins à refuser de participer à un acte d’euthanasie, même si la loi nationale l’autorise ou la décriminalise dans certaines situations ».

« L’euthanasie, c’est-à-dire mettre fin à la vie d’un patient par un acte délibéré, même à sa demande ou à celle de ses proches, est contraire à l’éthique. Cela n’interdit pas au médecin de respecter la volonté du patient de laisser le processus naturel de la mort suivre son cours dans la phase terminale de la maladie. »

« Le suicide médicalement assisté est, comme l’euthanasie, contraire à l’éthique et doit être condamné par la profession médicale. Le médecin qui, de manière intentionnelle et délibérée, aide un individu à mettre fin à sa propre vie, agit contrairement à l’éthique. Cependant, le droit de refuser un traitement médical est un droit fondamental du patient et le médecin n’agit pas contrairement à l’éthique même si le respect de ce souhait entraîne la mort du patient. »

Durant ces deux jours, des tables rondes se sont succédé sur les problématiques posées par la fin de vie en Europe, en particulier concernant les droits des patients, les limites des traitements, les soins palliatifs et l’opinion publique, laissant une large place au débat et à l’expression des différents points de vue.

Un message du pape François a été transmis lors de cette rencontre européenne, l’association médicale du Vatican étant membre de l’AMM. Il a rappelé que l’Église catholique rejette autant l’acharnement thérapeutique que l’euthanasie « Nous voyons bien, en fait, que ne pas activer de moyens disproportionnés ou en suspendre l’usage, équivaut à éviter l’acharnement thérapeutique, c’est-à-dire à accomplir une action qui a un sens éthique complètement différent de l’euthanasie, qui demeure toujours illicite car elle prévoit d’interrompre la vie en procurant la mort. »

Des réunions du même type ont été organisées à Rio en mars pour l’Amérique, à Tokyo en septembre pour l’Asie-Pacifique. La rencontre pour l’Afrique est programmée début 2018 au Nigéria.

Le conseil de l’AMM devrait faire une synthèse de ces rencontres courant 2018.

Suicide assisté en Suisse en forte hausse

Suicide assisté en Suisse en forte hausse

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Une récente enquête montre que le nombre de Suisses demandant le suicide assisté est en constante augmentation.

En effet, alors qu’en l’an 2000, seul 86 personnes avaient eu recours au suicide assisté, 965 personnes ont pris une substance létale en 2015, en hausse de 25% par rapport à l’année précédente (742 en 2014), dont 822 avaient plus de 65 ans. Les femmes sont beaucoup plus nombreuses à demander l’aide au suicide que les hommes : 539 femmes et 426 hommes, selon les chiffres de l’Office fédéral de la statistique. Ces chiffres correspondent à environ 3% des décès en Suisse et ne comprennent pas les étrangers qui choisissent d’aller mourir dans ce pays.

Christian Kind, qui a dirigé les travaux du Conseil de l’Académie suisse des sciences médicales (ASSM) sur  les nouvelles directives de fin de vie et les a présentés publiquement, le vendredi 17 novembre dernier, commente en montrant à l’aide d’un graphique la nette augmentation des suicides assistés : « Nous ne comprenons pas ce qui s’est passé ».

Ce sont, par ailleurs, les seniors qui choisissent en premier le suicide assisté, la moyenne d’âge relevée chez Exit, une des principales associations d’aide au suicide, étant de 77,5 ans. 

Il semble pourtant exister un certain paradoxe dans ce pays. En effet, les Suisses sont très engagés dans les soins accordés à leurs proches en fin de vie. Et ils sont également prêts à supporter des coûts élevés. La Suisse a lancé, en 2012, un Plan national de recherche sur 5 ans pour améliorer la prise en charge de la fin de vie et éventuellement octroyer un congé pour les proches des personnes en fin de vie.

La Suisse connaît en même temps un nombre élevé de suicides : selon les chiffres de l’Office fédéral de la statistique, il y a eu 1073 suicides en 2015,  répartis entre 280 femmes et 793 hommes. « Le décès par suicide est un problème de santé publique souvent sous-estimé en Suisse. Il l’est non seulement en comparaison avec d’autres pays – la Suisse fait partie des pays d’Europe qui présentent un taux de suicide supérieur à la moyenne – mais aussi par rapport à d’autres problèmes de santé », constate l’Observatoire suisse de la santé.

Le suicide des jeunes est aussi une préoccupation dans ce pays, alors qu’un jeune Suisse y passe à l’acte tous les 3 jours. L’association « STOP Suicide » vient de fêter ses 15 ans ; des jeunes s’y engagent pour la prévention du suicide.

ONU : le Comité des droits de l’homme promeut l’avortement et l’euthanasie

ONU : le Comité des droits de l’homme promeut l’avortement et l’euthanasie

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Début novembre 2017 s’est tenue à Genève une importante réunion du Comité des droits de l’homme, organe de l’ONU composé d’experts : au cœur de leurs débats, l’examen d’un rapport qui vise à interpréter le droit fondamental à la vie comme incluant la nécessité de faciliter l’accès à l’avortement et à l’euthanasie (ou le suicide assisté) par tous les Etats membres.

Ce comité d’experts est un organe de suivi mis en place à la suite de l’adoption du « Pacte international sur les droits civils et politiques », adopté en 1966 sous l’égide de l’ONU et signé aujourd’hui par la plupart des pays du monde. Ce Pacte constitue un des traités internationaux qui ont été établis pour donner une force juridique plus contraignante aux principes énoncés dans la fameuse Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948.

Le Comité des droits de l’homme, composé de 18 experts indépendants, joue un rôle important dans l’interprétation du Pacte et dans la surveillance de son application par les Etats. Ce qui lui donne une autorité croissante sur les juridictions et les législateurs du monde entier.

Or ce Comité des droits de l’homme est en train, depuis plusieurs mois, de revoir la façon dont il faudrait à l’avenir interpréter l’article 6 du Pacte sur le respect du droit à la vie. Pour donner une nouvelle interprétation officielle et universelle du « droit à la vie », certains de ses membres veulent y introduire un « droit à la mort » en obligeant les États à légaliser/encourager à la fois l’avortement et l’euthanasie – ou le suicide assisté –  (voir le rapport appelé Observation générale n°36, aux § 9 et 10).

Sur les 18 experts membres du comité, seuls six ont pris la parole au cours de la réunion de début novembre, et cinq se sont exprimés en faveur de l’avortement (1). Il s’agit par exemple du représentant tunisien, le Professeur Ben Achour (voir vidéo), qui se dit défenseur des personnes handicapées une fois qu’elles sont nées (« La société doit faire tout ce qui lui est possible pour protéger les handicapés, les aider […] après leur naissance» ),  mais est favorable à l’avortement de tout fœtus porteur d’un handicap (« Mais ça, ça ne veut pas dire que nous devons accepter de laisser en vie un fœtus qui est atteint d’un handicap. […] Nous pouvons éviter les handicaps et nous devons tout faire pour les éviter »).

L’expert français, Mr de Frouville, professeur de droit international à l’Université Panthéon-Assas, a également recommandé d’éviter toute « considération philosophique ou théorique » et de se concentrer exclusivement sur les droits des femmes. Reprenant les arguments du Planning Familial international, pour lequel l’avortement devrait être décriminalisé et rendu « safe, legal and affordable » (« sûr, légal et accessible/gratuit »), il a affirmé que cet accès à l’avortement « est au cœur de la question du droit à la vie ».

Ce qui se passe dans ce comité d’experts inconnu du grand public, organe en principe consultatif mais disposant d’un pouvoir réel sur l’ensemble des pays du monde, pose ainsi plusieurs questions éthiques majeures.

Cela soulève notamment le problème de la façon dont sont nommés ces experts, et s’ils ne représentent qu’eux-mêmes ou s’ils représentent leur pays d’origine. Pour la France, « pays des droits de l’homme », cette nomination revêt une importance pratique et symbolique qui mériterait un réel débat public.

« Au-delà de la composition de ce comité, si le rapport en cause est adopté dans sa forme actuelle, le « droit à la vie » serait vidé de sa substance pour des millions d’êtres humains, ce qui serait complétement paradoxal et constituerait un grave détournement de l’esprit du traité de 1966.

Une nouvelle réunion du Comité des droits de l’homme se tiendra en mars 2018, dans le but d’aboutir à l’adoption de cette Observation générale n°36.

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  • Ces débats à Genève ont notamment été rapportés par l’ECLJ (European Centre for Law and Justice), qui a mis en ligne une pétition et produit un mémoire pour dénoncer cette évolution dangereuse.
[CP] Université de la vie 2018 : ouverture des inscriptions

[CP] Université de la vie 2018 : ouverture des inscriptions

udv 2018

A l’approche des états généraux de la bioéthique annoncés par le gouvernement pour 2018, Alliance VITA lance une nouvelle session de formation bioéthique sur le thème :

Que faire du temps ? Défi bioéthique, défi d’écologie humaine

Après avoir attiré près de 7000 personnes à chacune de ses 4 premières éditions, l’Université de la Vie d’Alliance VITA se déroulera les lundis 15, 22, 29 janvier et le 5 février, avec un tout nouveau programme, consacré à la question du temps, et plus particulièrement celle du nouveau rapport de l’Humanité au temps. 

C’est à la fois une question personnelle qui concerne chacun dans son rapport à la technologie, au travail et à sa vie quotidienne, et un défi biopolitique : affranchir l’homme du temps est un rêve prométhéen plus que jamais d’actualité, une entorse à l’écologie humaine

Car le temps est de plus en plus malmené, paraissant tour à tour :

« suspendu » pour des êtres humains congelés in vivo à l’état embryonnaire…

« contourné » par des multinationales qui incitent leurs collaboratrices à congeler leurs ovocytes pour prolonger la carrière…

« défié » par les grossesses tardives, l’insémination post-mortem, les filiations bricolées…

« escamoté » » quand on occulte la durée, celle du deuil, de la grossesse, de la fin de vie, de l’engagement…

« accéléré » par la frénésie consumériste, l’obsolescence programmée, la révolution technologique…

Et finalement « menacé » par le grand fantasme transhumaniste qui promet d’abolir toute limite, jusqu’à pronostiquer la mort de la mort…

Ce cycle de formation s’articulera autour de 4 thématiques : « Vivre avec son temps », pour situer le débat dans la société post-moderne, « Etre présent » pour s’ajuster aux personnes qui souffrent,  « Se donner le temps » pour adopter une posture de recul, «  Conserver, progresser » pour choisir une attitude équilibrée.

L’édition 2018 de l’Université de la Vie donnera chaque soir la parole à de grands témoins qui interviendront tous pour la première fois : Philippe Pozzo di BorgoGaultier Bès et Marianne DuranoJean-Baptiste et Séverine-Arneld Hibon. Ils nous partageront leur propre rapport au temps et la manière dont ils tentent de vivre en harmonie avec leur temps.  

Interviendront cette année les philosophes Martin Steffens et François-Xavier Bellamy, l’économiste Pierre-Yves Gomezplusieurs centaines de « témoins locaux », ainsi que les intervenants d’Alliance VITA : Tugdual  DervilleFrançois-Xavier PérèsCaroline RouxValérie BoulangerHenri de SoosBlanche Streb et le docteur Xavier Mirabel.

Cette formation est ouverte à tous, dans plus de 100 villes en France et à l’étranger.

Pour s’inscrire, rendez-vous sur le site  http://www.universitedelavie.fr/