[CP] – IVG dans la Constitution : un déni d’humanité

[CP] – IVG dans la Constitution : un déni d’humanité

COMMUNIQUE DE PRESSE – 04 mars 2024

IVG dans la Constitution : un déni d’humanité

En constitutionalisant l’avortement comme une liberté garantie, sans aucun garde-fou et sans prendre en considération les situations qui pourraient être évitées, le gouvernement et les parlementaires font preuve d’une absence totale d’humanité. Comment penser que le « pays des droits de l’homme » s’honore en passant sous silence que notre humanité commence au tout début de l’existence ?

Malgré l’instrumentalisation politicienne indécente de cette question douloureuse, malgré les questions persistantes autour de la clause de conscience spécifique des soignants et autour de l’avènement d’un droit opposable à l’avortement, l’Assemblée nationale et le Sénat ont fait le choix de graver l’IVG dans le marbre de la Constitution.

Près de 50 ans se sont écoulés depuis la loi de dépénalisation de l’avortement en 1975, 50 ans au cours desquels toutes les dispositions prévues initialement pour accompagner et informer les femmes ont été progressivement supprimées.  Au fil des années, on est passé de la possibilité de l’IVG, « pour la contrôler et, autant que possible, en dissuader la femme », à un droit à l’avortement, revendiqué « sans contrainte ».  L’inscription de la liberté d’avorter dans la Constitution marque une étape supplémentaire et hautement symbolique vers la banalisation d’un acte qui met la vie humaine en jeu.

 

Une réalité invisibilisée

En 2022, 234 300 avortements ont été réalisés avec un taux de recours à un niveau jamais atteint auparavant de 16,9 pour mille femmes en âge de procréer. En 2020, une étude de la Drees révélait que c’étaient les femmes aux revenus les plus faibles qui avaient davantage recours à l’IVG. On sait aussi que 85% des grossesses imprévues pendant les études se terminent par une IVG et que les 20-29 ans concentrent les plus forts taux d’IVG (26,9 ‰ parmi les 20-24 ans et 28,6 ‰ parmi les 25-29 ans). En outre des études récentes montrent des liens entre les violences conjugales et les interruptions volontaires de grossesse à répétition.

En France, le lien entre IVG et violences demeure cependant peu exploré : très peu de médecins posent systématiquement la question des violences aux femmes réalisant une IVG [1]. Or, on sait que pour 40 % des 201 000 femmes concernées chaque année par les violences du conjoint, celles-ci ont débuté à la première grossesse.

 

Une liberté sous pressions

Confirmant ces données, Alliance VITA, qui accompagne des femmes depuis plus de 20 ans, constate que nombre de femmes confrontées à des grossesses inattendues se tournent vers l’IVG à contrecœur, très souvent sous les pressions masculines, mais aussi de l’entourage ou pour des raisons économiques. Notre expérience montre que toutes les femmes n’avortent pas « librement et par choix » mais par défaut d’alternative et de sécurité. Face à ces réalités qui ne semblent guère émouvoir les pouvoirs publics, la constitutionnalisation d’une liberté d’avorter parait bien déconnectée.

Même constitutionnalisé, l’avortement, jamais anodin, ne devrait pas s’imposer comme une fatalité.

Nous demandons depuis des années une étude approfondie sur les causes et les conséquences de l’avortement. Proposer une politique de prévention est plus que jamais nécessaire.

Face au déni du politique, et afin de libérer la parole des femmes, nous préparons une campagne de sensibilisation sur les liens entre l’IVG et les pressions, violences et discriminations faites aux femmes au début de la grossesse.

 

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[CP] – Rencontre internationale fin de vie – Euthanasie et suicide assisté à l’étranger

[CP] – Rencontre internationale fin de vie – Euthanasie et suicide assisté à l’étranger

COMMUNIQUE DE PRESSE – 1er mars 2024

Rencontre internationale sur la fin de vie : Euthanasie et suicide assisté à l’étranger

 

La légalisation de l’euthanasie ou du suicide assisté s’est effectuée dans chacun de ces pays à partir d’une triple promesse, dont la rencontre internationale a permis d’évaluer la crédibilité :

  • l’euthanasie et le suicide assisté ne seront autorisés qu’à titre exceptionnel,
  • l’accompagnement des personnes vulnérables et ou en fin de vie ne sera pas affecté,
  • ce « nouveau droit » individuel, qui n’enlèvera rien à personne, sera sans conséquence sur les autres.

Pour le Belge Léopold Vanbellingen, docteur en droit, chargé de recherche à l’Institut européen de bioéthique, « la logique de subjectivité et de non-discrimination, à l’origine de la légalisation de l’euthanasie, a très rapidement conduit à son extension à des cas qui auraient été inimaginables au moment du vote de la loi ».

Le Canadien Trudo Lemmens, professeur de droit et politique de la santé, rappelle que dans son pays, « l’ouverture d’une aide médicale à mourir (AMM) à des cas exceptionnels en fin de vie a glissé vers une thérapie quasi-universelle pour les souffrances parfois vagues liées à la maladie et au handicap ».

Aux Pays-Bas, le nombre d’euthanasies a été multiplié par cinq depuis 2002 et au moins 20 pour cent des maladies invoquées pour recourir à l’euthanasie concernent aujourd’hui des patients qui ne sont pas en phase terminale : démence, psychiatrie, polypathologies liées au vieillissement, handicaps, etc.

Même tendance en Suisse où les conditions d’admission au suicide assisté se sont progressivement élargies, si bien que le taux de suicide en général a doublé en quelques années.

Johannes Irsiegler, psychiatre et psychothérapeute, rapporte qu’en Suisse la personne en détresse qui estime que sa propre vie ne vaut plus la peine d’être vécue rencontre tout un réseau lui permettant d’aller jusqu’au suicide.

Catherine Dopchie, médecin en soins palliatifs en Belgique, constate, témoignages à l’appui, que dans les maisons de repos, l’euthanasie devient un « droit » pour le résident et un devoir qui s’impose au médecin.

En Belgique, l’euthanasie est devenue une proposition parmi d’autres dans la planification des soins.

Au Canada, seulement 30 à 50% des Canadiens ont accès à une forme de soins palliatifs de qualité, et très peu, seulement environ 15%, ont accès à des soins palliatifs spécialisés pour traiter des problèmes plus complexes, explique Leonie Herx, médecin en soins palliatifs.

Enfin loin de constituer seulement un nouveau droit qui n’enlève rien à personne, les pratiques de l’euthanasie et du suicide assisté changent la société en profondeur. Stève Bobillier, docteur en philosophie et sciences sociales et éthicien suisse rappelle que le suicide n’est pas un acte individuel, mais qu’il a un impact conséquent sur les proches, les soignants et la société en général. Et par effet de suicide mimétique (phénomène documenté par des chercheurs depuis des décennies), la législation relative au suicide assisté mène à une banalisation dangereuse au détriment de sa prévention.

Pour Theo Boer, professeur d’éthique de la santé aux Pays-Bas, qui a cru à la loi de son pays avant de déchanter : « L’euthanasie a un impact bien plus important que sur les 6 % de Néerlandais qui meurent après avoir été euthanasiés. Le regard que nous portons tous sur le vieillissement, la fragilité, la dépendance aux soins et la notion même d’humanité a changé. Même les personnes qui meurent de mort naturelle se posent la question du choix de l’euthanasie en raison de la possibilité d’y avoir recours.»

Il a conclu la rencontre sur ces mots :

« Quand la mort accélérée des personnes dépendantes, malades ou âgées est présentée comme une solution, un bien, une forme de désespérance devant la vulnérabilité s’insinue inexorablement dans les esprits. Et les premières victimes de cette désespérance, ce sont les personnes les plus fragiles, menacées par le suicide – sous toutes ses formes – et l’euthanasie. »

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[CP] – IVG dans la Constitution : le débat enterré

[CP] – IVG dans la Constitution : le débat enterré

COMMUNIQUE DE PRESSE – 29 février 2024

IVG dans la Constitution : le débat enterré

 

En votant le projet de loi constitutionnelle pour inscrire l’avortement dans la Constitution, les sénateurs ont cédé aux pressions et enterré tout débat démocratique. En inscrivant la « liberté garantie » de la femme de recourir à l’IVG, le Sénat détourne à son tour la Constitution de son objet pour créer un droit opposable à l’avortement.

 

Par ce vote, le Sénat a renoncé à sa mission spécifique de défense des libertés et droits fondamentaux, comme la liberté de conscience des professionnels de santé, fragilisée par ce projet de loi.  En constitutionnalisant une « liberté garantie » dont on ignore précisément la portée, qui peut garantir qu’on n’aboutira pas à terme à des avortements sans délai ou selon le sexe du fœtus ?

Pourtant, la question de l’avortement mérite mieux. Rappelons que ce sont les femmes aux revenus les plus faibles qui y ont davantage recours selon la Drees. Rappelons que l’avortement peut être aussi parfois la conséquence de violences faites aux femmes. Pour 40 % des 201 000 femmes concernées chaque année par des violences conjugales, ces dernières ont commencé lors de la première grossesse.

 

En se faisant la chambre d’enregistrement du gouvernement et de l’Assemblée nationale, le Sénat est passé complètement à côté de la réalité et des difficultés qui poussent les femmes à l’avortement.

Pour Alliance VITA qui accompagne des femmes en difficulté depuis plus de 20 ans, inscrire l’IVG dans la Constitution est non seulement injustifié et dangereux mais aussi totalement déconnecté de l’urgence sociale. Avec cette révision constitutionnelle, le gouvernement entrave toute politique de prévention de l’IVG alors que les chiffres du recours à l’avortement n’ont jamais été aussi élevés.

Alliance VITA demande que soit conduite une enquête sur les causes et les conséquences de l’IVG et la mise en place d’une véritable politique de prévention.

 

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ivg dans la constitution : le débat enterré

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La loi sur le grand âge verra-t-elle le jour ?

La loi sur le grand âge verra-t-elle le jour ?

La loi grand âge verra-t-elle le jour ?

Cette annonce répondait à une demande forte des professionnels du secteur dans un contexte de vieillissement démographique. D’après un rapport de la Drees, « en 2050les plus de 60 ans seront 25 millions, dont 4 millions en perte d’autonomie. ». A cette évolution démographique s’ajoutent des pénuries de personnel et des difficultés financières.

Le 5 octobre 2023, une enquête réalisée par la Fédération Nationale des Associations de Directeurs d’Établissements et Services pour Personnes Agées (FNADEPA) auprès de ses adhérents a révélé que 78 % des établissements et services manquaient de personnel et que 92,3 % d’entre eux estimaient être déficitaires en 2023.

Ainsi, par un amendement, le gouvernement avait inscrit dans la proposition de loi « pour bâtir la société du bien vieillir », l’adoption d’une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge avant la fin de l’année 2024.

Pourtant, lors de son discours de politique générale, le 30 janvier 2024, le nouveau Premier ministre, Gabriel Attal, n’a fait aucune référence à cette loi grand âge. Le sujet a été évoqué en une phrase : « Nous continuerons à bâtir une société où chacun peut vieillir dignement et comme il l’entend, en facilitant le maintien à domicile de ceux qui le souhaitent et en améliorant le quotidien en EHPAD ». Sans doute faisait-il référence à la proposition de loi Bien vieillir”, qui contient quelques mesures pour lutter contre la maltraitance, notamment en EHPAD, et pour favoriser le maintien à domicile.

Interrogée par la députée socialiste Christine Pirès Beaune à ce sujet lors des questions au gouvernement le 14 février, la nouvelle ministre des Personnes âgées et des Personnes handicapées, Fadila Khattabi, n’a même pas pris la peine de répondre à la question.

Ce silence du gouvernement laisse penser que ce projet a été abandonné, une nouvelle fois. La raison est sans aucun doute d’origine financière, puisque le ministre de l’Économie, Bruno Lemaire, vient d’annoncer une coupe de 10 milliards d’euros dans le budget de l’Etat.

Sur un autre sujet, c’est sans doute aussi pour cette raison que le gouvernement ne donne aucune nouvelle de la stratégie décennale pour les soins palliatifs qui devait être dévoilée en janvier, et qui aurait aussi dû être une priorité, puisque la Cour des comptes estime que l’offre actuelle de soins palliatifs ne couvre que la moitié des besoins.

Fait emblématique, l’unique unité de soins palliatifs des Yvelines, située à Houdan, ferme ses portes ce vendredi 23 février à la suite du départ de la cheffe de service.

 
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Séparation des parents : quels impacts pour les enfants ?

Séparation des parents : quels impacts pour les enfants ?

Séparation des parents : quels impacts pour les enfants ?

 

France Stratégie, organisme rattaché au Premier Ministre, a publié un récent rapport étudiant l’impact de la séparation des parents sur le niveau de vie de leurs enfants . 

Qui est concerné par la séparation des parents ?

Quelques chiffres clés sont rappelés dans cette étude. Une publication de l’INSEE datant de 2020 estime que 4 millions d’enfants mineurs ont des parents séparés. Il y a environ 14.7 millions d’enfants mineurs en France. La proportion est donc de 27% d’enfants mineurs ayant des parents séparés. L’étude donne également quelques éléments sur la taille des familles. Les familles avec 1 enfant mineur représentent 45% des familles, celles avec 2 enfants mineurs sont 38%.

Les enfants mineurs vivant dans des familles de 4 enfants ou plus forment 4% de cette population. Enfin, quand la séparation survient, 86% des enfants restent avec leur mère, 11.5% sont en garde alternée selon les données de 2020.

L’étude apporte des détails sur les probabilités de séparation des parents. En évolution, le risque de séparation a légèrement augmenté entre 2012 et 2019. La probabilité pour un enfant de voir ses parents se séparer est la plus forte vers l’âge de 7 ans (2.8%) et elle décroît jusqu’à l’âge de 11 ans (2.1%) pour rester ensuite stable. Les couples plus pauvres se séparent davantage que les couples aux revenus plus élevés. Enfin, « Les enfants de parents mariés ou pacsés font face à une probabilité de rupture bien moindre (1,8 %) que les enfants dont les parents sont en union libre (4,4 %) ».

Comment évolue le niveau de vie des enfants après la séparation des parents ?

Le rapport souligne que l’impact de la séparation a été souvent étudié sous l’angle des parents. Le but de l’étude est de se centrer sur les enfants mineurs par « le projet de création d’une base de données ad hoc permettant de suivre la trajectoire de niveau de vie et les conditions de vie des enfants et d’étudier l’impact de la séparation du point de vue de l’enfant ». Un panel d’environ 36 000 enfants ayant vécu une séparation de leurs parents a été constitué, panel suivi sur plusieurs années.

Un groupe dit « de contrôle » constitué de 93 000 enfants dont les parents sont restés ensemble permet de comparer l’évolution des situations.

Les auteurs constatent un impact important de la séparation : « les enfants dont les parents se séparent vivent l’année de la séparation dans un ménage dont le niveau de vie est en moyenne 19 % inférieur à celui précédant la séparation ». De plus cet impact n’est pas ponctuel : « Cette baisse de niveau de vie est durable : cinq ans après la séparation, le niveau de vie des enfants dont les parents se sont séparés est toujours inférieur d’environ 12 % en moyenne à leur niveau de vie avant la séparation ».

Cette moyenne cache une disparité : l’impact est plus fort lorsque les enfants résident avec leur mère, le cas le plus fréquent de loin. L‘étude ne fait pas apparaître de grandes différences en fonction de la taille de la fratrie.

Si l’impact sur le niveau de vie s’atténue, voire disparaît dans le temps lorsque le parent gardien se remet en couple, cette situation n’est pas majoritaire. Selon les auteurs, « la remise en couple du parent gardien ne concerne qu’une proportion minoritaire des enfants, qui croît de manière régulière mais lentement : 5 % d’entre eux sont concernés l’année suivant la séparation, près de 20 % trois ans après, et près de 30 % six ans après. Ainsi, six ans après la séparation, 70 % des enfants vivent encore avec le parent gardien seul ».

Quand on compare la situation avec les enfants du même âge dont les parents restent ensemble, le contraste est plus fort : « la différence de niveau de vie après la séparation est encore plus marquée, de l’ordre de 27 % l’année de la séparation, et toujours 22 % au bout de cinq ans ».

L’impact de la séparation des parents sur les conditions de logement.

L’étude se penche aussi sur l’évolution des conditions de logement de ces enfants. La séparation des parents implique souvent un changement de logement : « L’année de la séparation, 38 % des enfants quittent le logement occupé l’année précédente, 18 % un an après la séparation puis 15 % deux ans après ». Pour la plupart, le déménagement se fait dans la même commune ou le même département. Le logement social joue un rôle important d’amortisseur du « choc économique » de la séparation.

« Trois ans avant la séparation, 15 % des enfants résident en logement social quand ils vivent avec leurs deux parents. Cette proportion fait plus que doubler après une séparation pour les enfants vivant chez leur mère. » Une étude de 2013 montrait déjà que les familles monoparentales sont les plus demandeuses de ces logements.

En conclusion, les auteurs appellent aussi à croiser ces premières données de « trajectoire » des enfants mineurs avec des données du ministère de l’Education nationale « pour connaître l’impact des séparations sur la réussite scolaire ». Une étude ancienne de l’INED (2002) concluait que « quel que soit le milieu social, la rupture du couple parental est associée à une réussite scolaire plus faible chez l’enfant ».

Ces données constituent une incitation supplémentaire à des politiques de soutien pour les familles et les couples afin de favoriser « un éco-système pour la famille durable » comme Alliance VITA le demandait dans ses « priorités à l’humanité » en 2022.

 

impacts sur les enfants de la séparation des parents

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Solitude, le mal d’un siècle hyperconnecté ?

Solitude, le mal d’un siècle hyperconnecté ?

Solitude, le mal d’un siècle hyperconnecté ?

 

La solitude est-elle le mal d’un siècle hyperconnecté ? Cette question est posée par de nombreux observateurs et des organisations comme l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé). Notre monde a été décrit comme un village tant les distances se sont évanouies grâce aux moyens de transports rapides et bien sûr grâce à la toile numérique et aux réseaux sociaux. Tout le monde se connait dans un village. Mais il y a un écart entre se connaître et se rencontrer.

En novembre dernier, l’OMS annonçait la création d’une commission sur le lien social “afin d’aborder la question de la solitude en tant que menace urgente pour la santé, de promouvoir en priorité les liens sociaux et d’accélérer la mise à l’échelle des solutions dans les pays, indépendamment de leur niveau de revenu“.

Dans son communiqué de presse, l’OMS souligne l’urgence de cette question, du fait de son ampleur. Selon l’Organisation, l’isolement social se définit comme “l’insuffisance de relations sociales” tandis que la solitude est “la douleur sociale liée au fait de ne pas se sentir en lien avec autrui“. Le Directeur Général de l’OMS a souligné que “les taux élevés d’isolement social et de solitude dans le monde ont de graves conséquences sur la santé et le bien-être. Les personnes qui n’ont pas suffisamment de liens sociaux étroits sont davantage exposées au risque d’accident vasculaire cérébral, d’anxiété, de démence, de dépression, de suicide et bien d’autres maladies“.

Des chercheurs se sont en effet penchés sur cette question et plusieurs études ont été publiées. L’une d’elles, menée au Danemark, a associé l’isolement social à un risque accru de mortalité à un horizon de 7 ans. Une étude américaine a associé la solitude, mais pas l’isolement social, avec des risques cardio-vasculaires chez des patients déjà atteints de diabète.

La solitude, un mal mondial et intergénérationnel

L’entreprise de sondage Gallup a conduit l’an dernier une “méta enquête” sur le sujet. Conduite dans 142 pays de conditions économiques diverses, elle a révélé que 24% des personnes interrogées se sentaient ” très ou assez” seules. L’enquête n’a pas détecté de différence de pourcentage entre femmes et hommes dans la plupart des pays. Un rapport, conduit avec l’entreprise Méta (Facebook) a été publié en fin d’année dernière sur l’état mondial des liens sociaux. Il cite dans son introduction une phrase vieille de 2500 ans : l’homme, selon le philosophe Aristote, est “un animal social”.

Le rapport donne davantage de détails sur la situation par pays, âge et sexe. Ainsi, 8% des personnes se disent “très seules”. Cela représente 370 millions de personnes dans les 142 pays de l’enquête. A la question sur les interactions sociales dans les 7 derniers jours, avec la famille ou les amis, dans le cas où ceux-ci vivent avec ou près de la personne, 8% disent n’avoir eu aucune interaction et 7% une seule fois. Un résultat perturbant puisqu’il interroge sur des interactions avec des personnes qui vivent à proximité.

Une autre question porte sur les interactions des personnes interrogées avec des groupes partageant leurs intérêts ou leurs croyances. 37% affirment n’avoir eu aucune interaction avec eux dans les 7 derniers jours et 11% une seule fois. Il faut noter aussi que l’enquête croise deux axes : le sentiment de solitude et le sentiment d’être connecté socialement. Si les résultats sont souvent proches, ils ne se calquent pas complètement : une personne se sentant très connectée pourrait ressentir plus fortement la solitude dans les moments sans lien.

L’enquête ne révèle pas une répartition géographique marquée. Les cinq pays avec les taux les plus faibles de solitude sont : Lettonie, Ukraine (!), Slovénie, Allemagne et Vietnam. Les cinq pays avec les taux les plus élevés sont : Lesotho, Philippines, Uganda, Bostwana et Afghanistan. Rappelons qu’il s’agit du sentiment indiqué par les personnes elles-mêmes et non pas un indicateur statistique construit à partir de données plus objectives comme le nombre de visites, de sorties etc.

Cette enquête de l’IFOP apporte d’autres données sur la situation dans notre pays. La famille, largement devant les amis, les collègues de travail ou les voisins, est le principal réseau de socialisation. A la question, “à quelle fréquence passez-vous du temps tous les jours?“, la famille recueille sans surprise 30% de réponses, contre 7% les amis.

9% des personnes sont isolées au sens où elles ne voient personne au moins une fois par mois. Le taux le plus élevé est en région parisienne, densément peuplée, à 14%, et le plus bas à 2% en Bretagne, suivie de près par la Normandie à 3%. Le détail des situations de ces personnes, à côté de leur lieu d’habitation, révèle que les hommes, les ouvriers, les personnes modestes ou pauvres sont davantage touchés par cet isolement.

Le sentiment de solitude est expérimenté par 44% des Français régulièrement, un pourcentage en baisse comparé à 2022 (50%). Cela se manifeste pour eux par des moments de pleurs (67%) ou d’anxiété et de stress (66%). 50% disent avoir vécu des moments de dépression et 34% ont eu des pensées suicidaires. Pour pallier ce sentiment de solitude, 69% ont surfé sur les réseaux sociaux, 32% ont bu de l’alcool seuls et 13% ont dialogué avec des intelligences artificielles conversationnelles

Ces enquêtes constituent un appel fort à soigner les liens autour de nous. Si le monde est à la portée d’un seul clic via la toile numérique, il reste que cette interaction est d’abord celle d’un humain avec une machine. Cela ne remplace pas le besoin de rencontrer des “alter ego”, d’autres humains qui sont à la fois uniques et semblables. L’insistance sur l’autonomie de l’individu pourrait être un facteur de séparation dommageable aux sentiments d’appartenance et aux liens qui peuvent unir.

Récemment interrogé dans la Croix, le prix Nobel de littérature Jon Fosse rappelait ces deux faces de la condition humaine : “Je pense que chaque être humain a quelque chose d’unique et que, dans le même temps, tout être humain a quelque chose de semblable“. Pour garder le lien, il est bon de cultiver aussi le sentiment d’appartenance à notre commune humanité.

 
 
 
solitude, le mal d'un siècle hyperconnecté ?

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Euthanasie au Canada : l’extension de l’euthanasie pour maladie mentale est reportée

Euthanasie au Canada : l’extension de l’euthanasie pour maladie mentale est reportée

Euthanasie au Canada : l’extension de l’euthanasie pour maladies mentales est reportée

 

Le gouvernement canadien a annoncé le 1er février 2024 reporter à nouveau à mars 2027 la possibilité de proposer l’euthanasie et le suicide assisté en cas de trouble mental.

Ce report a été définitivement adopté le 29 février 2024 par le vote de la loi C 62. Devant la difficulté à trouver des critères qui ne rencontrent pas en confusion avec les efforts de prévention du suicide, des personnalités ont plaidé pour la suppression de cette mesure et plus largement pour remettre en question les élargissements qui affectent les personnes handicapées.

Le gouvernement fédéral a repris la recommandation du rapport du Comité mixte spécial de l’aide médicale à mourir (AMAD) qui considère que le « le système de santé au Canada n’est pas prêt pour l’aide médicale à mourir lorsque le trouble mental est le seul problème médical invoqué. »

Selon ce rapport, ouvrir l’accès à l’euthanasie aux personnes atteintes de trouble mental est particulièrement inapproprié notamment pour trois raisons :

  • la question de l’état irrémédiable des patients,
  • le manque de consensus des professionnels de la psychiatrie,
  • l’enjeu prioritaire de la protection des plus vulnérables.

Le témoignage du dr K Sonu Gaind, chef de service en psychiatrie est à ce titre très éloquent.

« Il serait discriminatoire d’administrer l’AMM sous prétexte qu’il s’agit d’un problème de santé irrémédiable, alors qu’en fait, les Canadiens marginalisés atteints d’une maladie mentale, qui pourraient améliorer leur état, recevront plutôt l’AMM pendant des périodes alimentées par le désespoir et la souffrance sociale. »

Comme le souligne le réseau citoyen Vivre dans la dignité dans un communiqué , « les enjeux soulevés par le rapport du comité devraient mener au retrait complet de ce nouvel accès à l’aide médicale à mourir… »

Un précédent report en 2023

Le gouvernement canadien avait déjà présenté le 2 février 2023 un projet de loi pour reporter d’un an l’admissibilité à l’euthanasie et au suicide assisté pour les personnes dont le seul problème médical est une maladie mentale.

 

Les glissements progressifs de la loi sur l’euthanasie au Canada

Le Canada a légalisé en 2016 ce que leur loi nomme Aide médicale à mourir (AMM) qui recouvre les pratiques d’euthanasie et de suicide assisté.

En 2021, à peine cinq ans plus tard, une nouvelle loi a étendu ces pratiques aux personnes atteintes d’une affection grave et incurable dont le pronostic vital n’est pas engagé à court terme.  Le critère est devenu encore plus flou et extensible, reposant sur le fait, pour le patient, d’éprouver des souffrances physiques ou psychiques qu’il juge lui-même insupportables. Une personne physiquement handicapée ou atteinte d’une maladie chronique est désormais éligible à l’euthanasie. Le législateur avait par ailleurs prévu que la loi puisse s’appliquer aux personnes souffrant de maladies mentales à partir du 17 mars 2023, le temps de réfléchir sur les conditions à exiger pour assurer la sécurité des personnes.

Un groupe d’experts avait donc été mis en place comme cela était prévu dans la loi de 2021. Ce dernier avait remis aux ministres de la Justice et de la Santé un rapport assorti de 19 recommandations en mai dernier. Elles concernaient la nécessité d’une attention particulière sur les conditions de détermination de l’incurabilité, de l’irréversibilité d’une pathologie, des contours d’une souffrance persistante et intolérable, de la prise en compte des tendances suicidaires, de la capacité de décision et de consentement des personnes confrontées à la vulnérabilité, et des moyens de soulager la souffrance.

C’est dans ce contexte et après que les professionnels de psychiatrie ont exprimé leurs réserves qu’avait été annoncé le report au 17 mars 2024 de l’application de l’AMM aux personnes souffrant de maladies mentales.

L’enjeu majeur de la prévention du suicide au Canada

En effet, l’Association des présidents de psychiatrie du Canada, qui comprend les chefs des départements de psychiatrie des 17 facultés de médecine, ont signé une déclaration en décembre 2022 demandant le report de l’application de l’AMM aux maladies mentales.

Ils soulignaient que les patients ont besoin d’un meilleur accès aux soins, y compris pour les services d’addictologie et de toxicomanie. Notamment les patients des communautés rurales peuvent ne pas avoir accès aux soins de santé mentale, ainsi que ceux aux prises avec une dépendance. Cette situation est particulièrement préoccupante dans la période post covid qui connait une épidémie de consultations psychiatriques et des temps d’attente importants pour recevoir des soins adaptés.

Outre la grave question de l’accès aux soins, de nombreuses questions demeurent controversées concernant les définitions des personnes éligibles, l’évaluation de leur état, l’improbable discernement entre une demande de suicide à prévenir en cherchant un traitement adapté ou à « assister » en abandonnant tout soin.

Alors que la semaine nationale de prévention du suicide se déroule depuis le 5 février 2023, Georgia Vrakas, professeur agrégé au département de psychoéducation et travail social de l’Université du Québec rend public son témoignage.

« Je suis psychologue clinicienne et professeure d’université. Mes domaines d’expertise sont la santé mentale et la prévention du suicide. Et je vis avec une maladie mentale grave depuis au moins les 23 dernières années, sinon plus. J’ai su seulement en mai 2021 que j’ai un trouble bipolaire. Avant cela, les médecins m’avaient tous et toutes diagnostiqué un trouble dépressif majeur récurrent. »

Elle explique avoir voulu « mourir pour que la souffrance arrête».

Elle explique que lors d’une grave crise, elle a appelé le centre de prévention du suicide et son médecin, ce qui a permis de trouver un psychiatre qui a pu enfin poser le bon diagnostic et débuter le traitement adapté en mai 2021.

« Où donc tracer la ligne entre suicide et aide médicale à mourir pour les personnes vivant avec une maladie mentale ? Peu importe l’encadrement et les mesures de sécurité mis en place, on ne peut pas tracer une ligne qui n’existe pas. » 

Elle rappelle la totale contradiction avec le slogan « Mieux vaut prévenir que mourir » lancé en cette semaine de prévention du suicide. Elle conclut que le gouvernement fédéral devrait s’en inspirer et réfléchir aux moyens à mettre en place pour réellement diminuer la souffrance des personnes vivant avec une maladie mentale. Pour le psychiatre John Maher, spécialiste des maladies mentales et rédacteur en chef du Journal of Ethics in Mental Health « L’AMM sape profondément des décennies d’efforts de prévention du suicide. »

L’enjeu de la prévention du suicide est clé : le Canada saura-t-il le prendre en considération pour protéger les Canadiens les plus vulnérables ? Dans le débat qu’a ouvert le gouvernement français sur la fin de vie, Alliance VITA rappelle que la prévention du suicide ne souffre aucune exception. « Personne ne doit être exclu de la prévention du suicide » rappelle Tugdual Derville dans son essai paru en janvier, Docteur, ai- le droit de vivre encore un peu ?

IVG dans la Constitution : les doutes de la commission des lois du Sénat

IVG dans la Constitution : les doutes de la commission des lois du Sénat

IVG dans la Constitution : les doutes de la commission des lois du Sénat

 

Mercredi 14 février 2024, la commission des lois du Sénat a examiné le projet de loi constitutionnelle pour inscrire l’avortement dans la Constitution. Si la commission « prend acte » du texte présenté par le Gouvernement, elle émet plusieurs réserves sur sa rédaction dans un communiqué. L’examen en séance publique le 28 février prochain permettra aux Sénateurs de modifier le texte par des amendements, ce qui pourrait conduire à reporter la réunion du Congrès prévue le 5 mars.

 

Le 30 janvier 2024, l’Assemblée nationale avait adopté par un vote solennel le projet de loi constitutionnelle qui prévoit d’inscrire à l’article 34 de la Constitution la phrase suivante : « La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse ». Cette rédaction reprend en partie une proposition de loi adoptée par le Sénat le 1er février 2023 selon laquelle : « La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté de la femme de mettre fin à sa grossesse. »

 

« Liberté garantie », un droit opposable ?

En ajoutant le mot « garantie », le gouvernement a voulu donner des gages à l’Assemblée nationale qui aurait voulu inscrire dans la Constitution un « droit » plutôt qu’une « liberté » (voir notre article IVG dans la Constitution : liberté ou droit, un faux débat ?).

Néanmoins, lors de l’audition du garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, puis dans leur communiqué, les Sénateurs ont exprimé à plusieurs reprises leurs doutes sur l’ajout de ce mot « garantie ». « Vous introduisez un concept nouveau qu’on ne retrouve nulle part dans la Constitution […], c’est celui de liberté garantie » a déclaré la sénatrice Agnès Canayer, rapporteure du projet de loi (apparentée LR). Le sénateur Philippe Bas, qui était à l’origine de la rédaction adoptée par le Sénat en février 2023, s’interroge : « Je me suis demandé s’il y avait des droits et libertés garantis et d’autres qui ne le seraient pas dans la Constitution. ».

En effet, la garantie des droits et libertés est un élément même de définition d’une Constitution.

En revanche, les Sénateurs s’inquiètent des effets juridiques de l’introduction d’un nouveau concept : « Vous nous assurez que ça ne pourra pas créer d’effet conséquent en matière de responsabilisation. Sur cet avis, les juristes sont relativement encore partagés. » a relevé Agnès Canayer

Malgré les propos du garde des Sceaux qui a assuré que le terme « garantie » ne crée en « en aucune manière un droit absolu, sans limite ou opposable », Philippe Bas a surenchéri :

« Si ce mot n’a pas de portée juridique, il ne faut pas le mettre. Et s’il en a une et que cette portée tendrait à faire reconnaître un nouveau pouvoir du juge d’indemniser une personne qui n’aurait pas eu accès à l’IVG parce que les moyens n’auraient pas été mis par le gouvernement et le Parlement, ça en fait un droit opposable. Alors il y aurait un déplacement du pouvoir du Parlement vers le pouvoir du juge et je n’y serais pas favorable ».

 

Des inquiétudes sur la liberté de conscience

La deuxième interrogation des Sénateurs concerne la liberté de conscience des professionnels de santé. La loi sur l’avortement de janvier 1975 avait pris soin de protéger cette liberté de conscience en introduisant une clause de conscience spécifique qui figure à l’article L2212-8 du Code de la santé publique.

Comme le relève le communiqué de la commission, « pas plus que la liberté de la femme de recourir à l’IVG, la liberté de conscience des professionnels de santé n’est aujourd’hui consacrée en tant que telle dans la Constitution. Il semble donc discutable de n’inscrire dans la Constitution qu’une seule de ces deux libertés ».

En effet, face à l’inscription d’une liberté constitutionnelle, on peut craindre que la clause de conscience spécifique, qui ne figure que dans la loi, soit perçue à l’avenir comme un obstacle à l’avortement et supprimée par le législateur, comme le prévoyait la proposition de loi initiale sur l’extension du délai de l’IVG. La liberté de conscience des professionnels de santé requiert donc une protection juridique équivalente à l’interruption volontaire de grossesse.

 

Des amendements possibles en séance publique

Lors de l’examen en séance publique, le 28 février, les Sénateurs pourront présenter des amendements pour modifier le texte. Ces amendements pourraient ainsi supprimer le mot « garantie » ou ajouter la liberté de conscience des professionnels de santé dans la Constitution. En cas de modification du texte, le texte serait renvoyé à l’Assemblée nationale jusqu’à ce que les deux assemblées se mettent d’accord sur un texte identique. Cela repousserait donc la réunion du Parlement en Congrès pour l’adoption définitive du projet de loi constitutionnelle, initialement annoncée pour le 5 mars.

 

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Stérilisation masculine : une pratique en hausse

Stérilisation masculine : une pratique en hausse

Stérilisation masculine: une pratique en hausse

 

Bien qu’elle reste rare – environ 0,15% des hommes de moins de 70 ans ont fait ce choix en 2022 – le nombre de vasectomies augmente fortement en France, avec un taux annuel multiplié par 15 en 12 ans. On est ainsi passé de 1 940 vasectomies (en 2010) à 30 288 (en 2022).

C’est ce que révèle une étude qui vient d’être rendue publique. Elle se fonde sur des données du Système national des données de santé (SNDS) et est portée par le Groupement d’intérêt scientifique EPI-PHARE constituée de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et de l’assurance maladie (CNAM).

Elle montre qu’entre 2010 et 2022, le recours à la vasectomie a concerné des hommes de plus en plus jeunes (41,7 ans en moyenne, l’âge moyen ayant diminué tout au long de la période d’étude), et aux  profils de niveau socioéconomique plus favorisés.

Qu’est-ce que la vasectomie ?

La vasectomie est un geste qui vise à stériliser un homme. Il consiste en la section et l’occlusion des canaux déférents, ce qui empêche les spermatozoïdes de rejoindre l’urètre et, par conséquent, d’être éjaculés. Ce geste est considéré comme étant à visée contraceptive, mais s’en distingue par son coté définitif, quand la contraception, elle, est en principe réversible et temporaire. Cette technique doit donc être présentée et considérée comme irréversible, car elle l’est, la plupart du temps.

Stérilisations masculines en hausse, féminines en baisse

Il est intéressant de noter que le nombre de stérilisations féminines est lui, en baisse. Il a été divisé par deux, passant de 45 138 stérilisations en 2013 à 20 325 en 2022, après une augmentation initiale entre 2010 et 2013. Pour la première fois depuis la légalisation de la stérilisation en France, un croisement des courbes de stérilisation féminine et masculine a été observé en 2021.

Ainsi, en 2022, 3 stérilisations masculines ont été pratiquées pour 2 stérilisations féminines.

Efficacité et effets secondaires

La vasectomie est considérée comme une méthode contraceptive très efficace (indice de Pearl à 0,1, soit 0,1 grossesse non-planifiée sur 12 mois pour 100 femmes ayant un partenaire avec une vasectomie). Mais elle n’est pas efficace immédiatement (une azoospermie ne peut être observée qu’à partir de 8 à 16 semaines après la section des canaux déférents) ni efficace à 100%.

D’après les données de l’étude, l’échec de la vasectomie est estimé à 1 sur 2 000 interventions. La présence de spermatozoïdes 3 à 6 mois après l’opération est constatée dans 0,2 à 1,5% des cas, et après cette période dans seulement 0,05 à 1% des cas. On relève aussi quelques échecs à distance de l’intervention par reperméation des canaux déférents nécessitant éventuellement une réintervention.

Même s’il s’agit d’une intervention chirurgicale courte, pratiquée de façon croissante en chirurgie ambulatoire (99,2% en 2022) des complications sont possibles : infections locales, hématomes, douleur. L’incidence des échecs et des taux de complications varie en fonction de la technique opératoire utilisée.

En France : conditions

La stérilisation est autorisée depuis 2001 en France. Elle est soumise à quelques conditions. L’homme qui la demande n’a pas besoin d’être déjà père pour y avoir droit, ni besoin d’être en couple.

Dans le cas de personne dite « capable », elle ne peut être pratiquée que si la personne majeure a exprimé une volonté libre, motivée et délibérée en considération d’une information claire et complète sur les conséquences. La loi exige un délai de réflexion de 4 mois. La loi prévoit aussi la possibilité de stérilisation de personne majeure dites « incapable », cette décision est subordonnée à une décision du juge des tutelles. En revanche, la stérilisation contraceptive d’une personne mineure est interdite, et ne souffre aucune exception.

Une clause de conscience prévoit que le médecin n’est jamais tenu de participer à une stérilisation à visée contraceptive.

Incohérence ? La congélation de sperme avant stérilisation

Théoriquement, la vasectomie s’adresse aux hommes qui n’ont pas ou plus l’intention de procréer. Pourtant, il existe des situations de « regret post-vasectomie ». Ce qui traduit la légitime difficulté que l’être humain peut avoir à se projeter dans le futur, lorsque sa situation change, par exemple. Ce phénomène serait estimé entre 6% (99–101) et 7,4% des hommes, notamment chez ceux qui n’avaient pas d’enfants avant la stérilisation.

Par ailleurs, cette pratique n’est pas sans incohérence. Censée être réservée aux hommes qui ne veulent pas ou plus d’enfants, il est proposé au demandeur d’une vasectomie, lors du premier rendez-vous urologique, d’effectuer une autoconservation de spermatozoïdes (congélation de sperme) qu’il pourra utiliser plus tard en cas de désir d’enfant via une procédure d’Assistance Médicale à la Procréation (AMP).

Cette mise en place d’une autoconservation de sperme avant vasectomie, sans motif médical, est possible pour les hommes de leur 29ème anniversaire jusqu’à leur 45ème anniversaire. L’homme peut demander que ses gamètes soient ainsi conservés jusqu’à l’âge de 60 ans. L’acte de dépôt et de congélation est remboursé mais la conservation des gamètes est chaque année financièrement à la charge du bénéficiaire.

L’étude a montré qu’avec leur vasectomie, en moyenne 6,8% des hommes optent pour faire au préalable congeler du sperme. Et ce chiffre est en constante augmentation.

La demande de réversibilité ou d’accès à l’AMP

Entre 2010 et 2022, sur l’ensemble de la cohorte – 109 944 hommes – ayant eu une vasectomie, 125 ont demandé par la suite à ce que leur soient prélevés des spermatozoïdes par voie transcutanée ou par abord direct (ponction).

Et 207 hommes ont demandé un acte de réversion (vasovasostomie), pour essayer de restaurer leur fertilité naturelle. Une procédure dont l’efficacité est moindre.

 

Pour aller plus loin : Analyse des variations de la fécondité en France.

stérilisation masculine vasectomie : une pratique en hausse

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Où en est le projet de loi fin de vie ?

Où en est le projet de loi fin de vie ?

Où en est le projet de loi fin de vie ?

Au lendemain des conclusions de la Convention citoyenne en avril dernier, Emmanuel Macron annonçait un projet de loi fin de vie avant la fin de l’été 2023.

 

Un projet de loi pour changer le cadre de la fin de vie

Entamé après l’avis du CCNE, rendu en septembre 2022 et ouvrant la voie à la légalisation du suicide assisté et de l’euthanasie, le débat s’est ouvert avec la volonté de reconsidérer le « cadre de la fin de vie », en contradiction avec la neutralité revendiquée entre autres par l’ancienne ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé, Agnès Firmin-Le Bodo.

 

Un avant-projet de loi qui acte la levée de l’interdit de tuer

De report en report, une ébauche du projet de loi a été dévoilée par le Figaro le 13 décembre 2023, moins d’une semaine après la présentation d’un rapport intitulé « Vers un modèle français des soins d’accompagnement » et dont les propositions doivent venir alimenter la nouvelle stratégie décennale pour le développement des soins palliatifs.

La version provisoire du texte de loi datée d’octobre 2023, comporte 3 parties :

  • les soins d’accompagnement,
  • les droits des patients
  • l’aide à mourir.

La possibilité de bénéficier de l’administration d’une substance létale serait réservée

  • aux Français majeurs,
  • atteints d’une « affection grave et incurable qui engage son pronostic vital à court ou moyen terme » (selon une fourchette de « 6 à 12 mois » – à noter que d’après un article publié dans le British Medical Journal, le diagnostic des médecins sur la durée de vie résiduelle d’un patient en fin de vie est précis seulement dans 20 % des cas !)
  • ou présentant une « souffrance physique réfractaire ou insupportable » liée à leur maladie.

Le document prévoit l’auto-administration, c’est-à-dire le suicide assisté, par principe ; et le recours à un tiers (soignant ou proche), c’est-à-dire l’euthanasie, en cas d’incapacité physique.

Cet avant-projet consacre la toute-puissance médicale puisqu’il revient à un seul et unique médecin d’autoriser le patient qui en ferait la demande à recourir à l’aide à mourir. Pire, il va même jusqu’à envisager un “secourisme à l’envers” pour hâter le décès si la dose du produit létal s’avère insuffisante pour provoquer la mort rapide. Quant aux établissements sanitaires ou médico-sociaux, ils seraient privés de toute clause de conscience.

Enfin, à rebours de la définition riche et complète des soins palliatifs donnée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), cet avant-projet les limite aux « soins strictement médicaux destinés à traiter la douleur ». Ce rétrécissement a tout lieu d’inquiéter dès lors que les soins palliatifs seraient in fine englobés dans des « soins d’accompagnement ». On peut craindre que ces derniers ne soient le « cheval de Troie » du suicide assisté et de l’euthanasie.

Ce texte a immédiatement suscité l’opposition de nombreuses organisations de médecins et d’infirmiers qui ont dénoncé un “contenu indigent” dans un communiqué regroupant notamment plusieurs sociétés de gériatres et de soignants spécialisés en soins palliatifs.

 

Quelle place pour les soins palliatifs ?

L’ouverture du débat sur la fin de vie a mis en lumière l’insuffisant développement des soins palliatifs. Lors de son discours aux membres de la Convention citoyenne en avril 2023, Emmanuel Macron déclarait 

« Je crois qu’une solution unanimement préconisée doit être maintenant rigoureusement mise en œuvre. Il nous faut mieux faire appliquer la loi Claeys-Leonetti, comme le souligne aussi très bien la mission d’évaluation de l’Assemblée nationale. Nous avons en la matière une obligation d’assurer l’universalité de l’accès aux soins palliatifs, de diffuser et d’enrichir notre culture palliative et de rénover la politique de l’accompagnement du deuil ».

La stratégie nationale de développement des soins palliatifs (initialement attendue en janvier) doit être dévoilée avant que le chef de l’Etat expose les orientations retenues pour le projet désormais nommé projet sur l’« aide active à mourir » par le premier ministre Gabriel Attal. Les attentes sont grandes quant au financement de ce plan car la crédibilité de ce qui est annoncé comme une priorité sera mesurée à l’aune des moyens supplémentaires qui seront alloués.

Pour mémoire, l’enveloppe globale du plan 2021-2024 de “Développement des soins palliatifs et accompagnement de la fin de vie”, soit 171 millions d’euros, représente un effort de hausse annuelle de 2.85%, inférieur au rythme de l’inflation (en moyenne à environ 4% depuis janvier 2021). Quant au PLFSS (projet de loi de financement de la Sécurité sociale), il a été adopté sans qu’aucun engagement financier supplémentaire relatif aux soins palliatifs n’ait été pris.

Si la nécessité de déployer les soins palliatifs sur tout le territoire fait l’unanimité, nombreux sont ceux qui s’inquiètent de voir ce volet intégré au projet de loi fin de vie. « Est-ce à dire qu’il faudra attendre que la loi soit votée, au mieux pas avant la fin de 2024, pour mettre en place la révolution annoncée dans la prise en charge des malades, alors que l’on sait que 50 % des besoins en soins palliatifs ne sont pas couverts et qu’il y a urgence à agir ? », interroge Claire Fourcade dans La Croix.

Dès le revirement du Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE), Alliance VITA mettait en garde contre la promesse de développer les soins palliatifs pour faire passer la pilule létale de l’euthanasie et du suicide assisté aux soignants. Le droit d’accès aux soins palliatifs est garanti par la loi de 1999 et c’est lui qui doit prioritairement être mis en œuvre sans qu’il soit nécessaire de passer par une nouvelle loi.

Des soignants mais aussi des parlementaires ont plaidé pour que les volets soins palliatifs et aide à mourir fassent l’objet de deux textes distincts. Récemment nommé, le nouveau ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention, Frédéric Valletoux, a cosigné en septembre 2023 une tribune dans L’Express appelant à dissocier aide à mourir et soins palliatifs.

Sa ministre de tutelle, Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités semble pour sa part confirmer que le texte comportera deux briques : la prise en charge de la douleur grâce à la stratégie décennale de développement des soins palliatifs et la mise en œuvre d’une « aide à mourir » soit le suicide assisté et l’euthanasie.  Le 14 février, devant les députés, la ministre s’est dite « très fière de porter ce texte ».

 

Quel calendrier pour le futur modèle français de la fin de vie ?

Après avoir reçu, jeudi 9 février, les représentants des principaux cultes en France, des médecins et d’autres personnalités, le président de la République doit rendre les « ultimes arbitrages » dans le courant du mois de février.

Sur le fond, rien de nouveau n’a filtré après cette réception, si ce n’est cette phrase d’Emmanuel Macron, rapportée par le coprésident de l’Union bouddhiste de France : « parvenir à proposer un espace qui ne soit ni une liberté ni un droit, mais un possible qui serait un moindre mal […] la question est là, il faut y répondre. L’état du droit n’y parvient pas complètement aujourd’hui. Dont acte ».

De son côté, Gabriel Attal a assuré que le projet de loi sur l’ « aide active à mourir » serait examiné « avant l’été », tout en promettant de renforcer « considérablement » les unités de soins palliatifs.

En réalité, en se focalisant sur la légalisation possible de l’euthanasie et du suicide assisté, le débat sur la fin de vie empêche de regarder toutes les autres questions qui se posent en fin de vie : Où va-t-on mourir ? Est-on bien accompagné ? Lutte-t-on suffisamment contre la douleur ? Comment financer le maintien à domicile ? Comment soutenir l’aidant de proximité ? Comment prendre en charge le bien vieillir ?

A cet égard, si les sénateurs ont adopté la proposition de loi pour “bâtir la société du bien-vieillir en France”, les responsables politiques et les professionnels de l’accompagnement des personnes âgées attendent toujours la présentation par le gouvernement d’une loi planifiant les moyens pour faire face au choc du vieillissement de la population ! Quant au système de santé, ses dysfonctionnements inquiètent les Français dont la priorité est l’accès aux soins sur tout le territoire mais pas l’accès à une aide à mourir.

Devant la mission de réévaluation de la loi Leonetti en 2008, Robert Badinter, qui s’est éteint le 9 février, avait affirmé : « Nul ne peut retirer la vie à autrui dans une démocratie. » Puissent ces mots être entendus par ceux qui sont en responsabilité.

 

Pour aller plus loin :

 

où en est le projet de loi fin de vie ?

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