La « capsule à suicide » ou comment « glamouriser » le passage à l’acte

La « capsule à suicide » ou comment « glamouriser » le passage à l’acte

La « capsule à suicide » ou comment « glamouriser » le passage à l’acte

 

Alors qu’en France, la dissolution de l’Assemblée nationale a stoppé net le projet de loi fin de vie et avec lui l’éventuelle légalisation du suicide assisté et de l’euthanasie, des « capsules à suicide » devaient être inaugurées en Suisse dans le courant du mois de juillet. Un concept qui en dit long…

 

Qu’est-ce qu’une « capsule à suicide » ?

Dispositif au look futuriste, baptisé « Sarco », pour « sarcophage », la capsule ovale en plastique violet a la taille d’un corps humain. Son rôle : provoquer la mort sur commande… Sa structure est inclinée, un peu comme une chaise longue. Pour les personnes valides, de l’azote y est libéré sur pression d’un simple bouton. Et pour les personnes paralysées, c’est le clignement des yeux qui active la machine.

La mort dans la capsule « Sarco » est présentée comme « sans douleur » ce qui est loin d’être avéré : le directeur du Death Penalty Information Center, Robert Dunham, indiquait dans une interview au journal Le Temps en 2018 qu’ « Il n’y a pas de preuves scientifiques permettant d’assurer que le recours à l’azote pour exécuter des prisonniers sera rapide et indolore. ». Pour son coté « écolo », les matériaux qui la composent étant biodégradables, « Sarco » peut aussi servir de cercueil. Ses concepteurs ont pensé à tout…

Derrière cette invention macabre : Philip Nitschke, médecin australien fondateur de l’association Exit International, organisation militant pour la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté. En 2002, pour protester contre les lois australiennes qui assimilaient l’aide au suicide à un crime, les militants d’Exit Australia avaient organisé une distribution de « sacs de suicide » pour permettre à des malades en phase terminale de s’étouffer eux-mêmes. Selon Philip Nitschke, « Tous les adultes responsables de leurs actes devraient, selon lui, avoir le droit de se choisir une fin paisible, même s’ils sont encore en bonne santé. »

Celui qui se définit lui-même comme un pionnier humaniste militant pour la libéralisation du suicide assisté, fut le premier praticien au monde à procéder à des injections létales sur des patients en phase terminale. A son actif, des inventions donc le sac de suicide et aussi un livre publié en en 2019, sorte de guide pratique pour réussir son suicide grâce à des conseils sur les poisons et les gaz. Dernière lubie de ce militant plus que controversé du « libre choix », la capsule « Sarco » pourrait même, à terme, être fabriquée par les personnes voulant en finir grâce à une imprimante 3D.

Pourquoi choisir la Suisse ?

En Suisse, le suicide assisté est permis depuis 1937, avec comme seule limite imposée par l’article 115 du Code pénal, que celui qui porte assistance à l’acte ne soit pas motivé par un mobile égoïste. Le suicide assisté n’étant pas considéré comme un soin, ce sont des associations qui en gèrent la logistique et le médecin n’intervient que dans la prescription du produit létal.

La pratique de l’assistance au suicide y est encadrée selon des critères fixés par l’Académie Suisse des Sciences Médicales (ASSM) : être majeur, disposer de sa capacité de discernement, pouvoir s’administrer soi-même la dose létale, et être atteint soit d’une maladie incurable, soit de souffrances intolérables, soit de polypathologies invalidantes liées à l’âge.

L’annonce par The Last Resort, organisation créée il y a quelques mois, de l’installation imminente de ces capsules a suscité la controverse et l’opposition des associations d’aide au suicide. Pour le coprésident de l’association Exit, Jean-Jacques Bise, dans une interview au journal Le Temps : « Affirmer qu’il s’agit du moyen le plus humain de s’en aller est complètement fou. Aucune association d’aide à mourir n’utilisera cette machine, la question ne se pose même pas.»

De son côté, Philip Nitschke l’assure : il a fait faire une expertise, et il est, selon lui, dans les clous. “Puisque son appareil n’est pas médical, il n’a pas besoin d’autorisation pour être utilisé en Suisse”.

Alors qu’un homme avait prévu de mettre fin à ses jours avec « Sarco » la semaine du 15 juillet, les autorités du canton du Valais ont interdit le dispositif sur le territoire. Cédric Dessimoz, médecin cantonal adjoint en Valais a expliqué « actuellement, avec les informations que nous avons eues, […] nous ne savons pas comment cette organisation procéderait pour un éventuel suicide assisté en Suisse ou en Valais ». Il a également rappelé le rôle nécessaire du médecin en Suisse, « notamment pour évaluer la capacité de discernement » alors que le dispositif « Sarco » veut démédicaliser le processus.

Un projet qui valide une culture de la toute-puissance 

Le buzz médiatique autour de cet objet aussi appelé « Tesla du suicide » révèle que tout cadre visant à limiter le recours au suicide assisté et de l’euthanasie dès lors qu‘ils sont légalisés, est vain.

À travers cette volonté de démédicaliser le suicide, l’Australien cherche en réalité à ouvrir le suicide aux personnes qui estiment avoir suffisamment vécu et balaye les critères de pronostic vital ou de maladie en phase terminale. Ils sont pourtant utilisés par les promoteurs de la légalisation pour donner des gages et rassurer ceux qui s’inquiéteraient de dérives éventuelles.

Cette installation pose plus encore la question de la prévention du suicide. Qu’il s’agisse de son design, de la simplicité d’utilisation, de la promesse de ne pas souffrir, tout est fait pour rendre le suicide attractif. Si les autorités suisses finissaient par l’autoriser, le risque serait grand de voir augmenter le nombre de passages à l’acte suicidaire.

Cette capsule isole totalement la personne qui souhaite en finir et l’enferme dans une bulle : cette image à elle seule est parlante.

Derrière le sensationnalisme de façade et le militantisme pro euthanasie émerge une vision de l’homme et de la société où comme le dit Philip Nitschke, « Chacun doit être le seul maître de son destin ». Seule compte l’autonomie de la personne qui confine à la toute-puissance, au mépris de la vulnérabilité et de la solidarité.

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PMA : enjeux de la « pénurie » du don de sperme

PMA : enjeux de la « pénurie » du don de sperme

PMA : enjeux de la « pénurie » du don de sperme

 

Le 1er juillet dernier s’est tenue la deuxième réunion du comité national de suivi du plan ministériel 2022-2026 pour la Procréation, l’Embryologie et la Génétique humaines (PEGh). À cette occasion, l’Agence de la biomédecine a dévoilé les derniers chiffres de son enquête de suivi de mise en œuvre de la loi de la bioéthique.

 

Hausse des demandes, baisse des dons de sperme 

Concernant l’Assistance médicale à la procréation (AMP), elle révèle deux choses importantes, qui étaient totalement prévisibles :

  • L’augmentation du nombre de demandes de consultations pour don de spermatozoïdes, selon le simple effet de l’offre qui créée la demande, générée par l’ouverture de la PMA aux femmes seules ou en couple. « On fait face à un tsunami de demandes » constate Catherine Guillemain, présidente de la Fédération des centres d’étude et de conservation du sperme humain (Cécos).
  • Le nombre insuffisants de donneurs pour répondre à cette demande, voire, un nombre de donneurs qui diminue : en 2023, 676 hommes ont donné leurs gamètes, contre 714 en 2022. A noter que si les dons sont rares, cela démontre que ce n’est pas rien, de donner ses gamètes. Cela reste pour les hommes la possibilité d’être père biologique d’un ou plusieurs enfants. Il faut savoir que les dons d’un même donneur de sperme peuvent aboutir à la naissance de 10 enfants, selon les règles en vigueur. Par ailleurs, depuis le 1er septembre 2022, tout donneur doit obligatoirement accepter que son identité ainsi que des données non-identifiantes le concernant puissent être révélées aux enfants nés de leur don, s’ils en font la demande, à leur majorité. Sachant que la loi a prévu qu’aucun « lien de filiation ne puisse être établi entre l’auteur du don et l’enfant issu de l’assistance médicale à la procréation ».

 

Le changement de regard et de mentalité sur la procréation humaine : vers le droit à l’enfant, le droit d’être parent

La loi bioéthique de 2021 a profondément transformé le cadre de l’assistance médicale à la procréation. Auparavant, elle visait à restaurer ou pallier une infertilité ou une stérilité médicale touchant un couple homme-femme, en âge de procréer. En ouvrant notamment l’accès à l’AMP aux femmes seules ou en couple de femmes et en autorisant l’accès à l’autoconservation des gamètes sans raisons médicales, le gouvernement a contribué à modifier les mentalités et le regard porté par la société sur la procréation humaine.

On a quitté le domaine du soin pour entrer dans une forme de prestation de service, intégralement prise en charge par l’assurance maladie dans la limite de six inséminations et quatre tentatives de fécondation in vitro.

 

Des millions d’euros dépensés dans des campagnes de pub

Désormais, l’AMP a tendance à être considérée comme un ensemble de techniques qui doit permettre à chacun d’accomplir son projet personnel, qu’il soit seul ou en couple. C’est d’ailleurs l’axe choisi par la dernière campagne de promotion du don de gamètes orchestrée par l’Agence de la biomédecine.

En 2023, son « message est désormais centré sur l’importance du don pour permettre à toute personne qui le souhaite de « devenir parent » », comme le décrit le dernier rapport de la Cour des comptes de janvier 2024 sur « les missions de l’agence de la biomédecine après la dernière loi de bioéthique ». Depuis 2021, le budget alloué à cette campagne de publicité par le ministère de la santé a été multiplié par cinq par rapport aux autres années pour atteindre la somme de 3,8 millions d’euros en 2021 et 3,5 millions en 2023.

 

Une pénurie de sperme prévisible

Cette pénurie était prévisible. Nombre d’observateurs, experts et députés l’avaient évoquée avant le vote de cette loi. Lors de son audition par la mission d’information sur la révision de la loi de bioéthique en octobre 2018, la Fédération des centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (Cécos) envisageait une multiplication des demandes par deux ou trois. Cette estimation s’avère, pour l’instant, en-deçà de la réalité.

En effet, alors que le nombre de demandes d’assistance médicale à la procréation avec don de spermatozoïdes s’élevait en moyenne à 2 000 par an, l’agence a recensé près de 23 000 demandes de premières consultations et 11 800 premières consultations provenant des nouveaux publics entre août 2021 et décembre 2022. Ces dernières ont représenté environ 90 % du total des consultations réalisées en 2022.

 

Vers la marchandisation du corps et la libéralisation du marché de la procréation

Le problème de la rareté des gamètes s’accompagne d’un risque évident de marchandisation. Dans son avis de juin 2017, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) pointait déjà du doigt ce grave enjeu. Evidemment, pour encourager les donneurs, quoi de plus efficace que de les rémunérer, comme cela existe dans quelques pays étrangers ? Mais la rémunération des donneurs poserait des problèmes considérables au regard des principes gouvernant l’ensemble des dons d’éléments et produits du corps humain.

Une fois le principe de la gratuité rompu sur les gamètes, on voit mal ce qui empêcherait de faire la même chose pour les autres produits et éléments du corps humain, y compris les organes. En outre, parmi les inconvénients de ces rémunérations, le plus important est sans doute l’absence de traçabilité des « donneurs » de sperme, qui peuvent trouver un avantage à multiplier les prélèvements et les centres auxquels ils s’adressent, puisque chaque don représente une source de revenus.

Le risque de libéralisation du marché de la procréation est bien réel. Sur le sujet connexe de l’autoconservation des ovocytes, rendue difficile par l’afflux des demandes, le président de la République, Emmanuel Macron, a lui-même proposé d’« ouvrir aux centres privés l’autoconservation ovocytaire, jusqu’ici réservée aux établissements hospitaliers », dans un entretien à Elle, début mai…

L’augmentation du recours à l’AMP à l’étranger…

Dès 2021, 2 247 femmes ont bénéficié d’une première consultation en vue d’une AMP. Ce chiffre a quadruplé en 2022 (4 560 couples de femmes et 4 959 femmes seules). Ce nouveau public représente désormais 90 % des consultations réalisées dans ce cadre. La constitution d’une liste d’attente ainsi que l’allongement des délais résultant de ce surcroît d’activité a conduit à l’inverse de ce qui était recherché : une augmentation du nombre de demandeuses se tournant vers l’étranger.

C’est ce que dévoile la Cour des comptes : l’ouverture à de nouveaux publics pourrait conduire à un accroissement du nombre de demandes d’assistance médicale à la procréation à l’étranger ainsi que semblent en témoigner les dernières données disponibles du Centre national des soins à l’étranger (+ 26 % depuis 2021). En 2022, le nombre d’avis favorables donnés par le Centre national des soins à l’étranger était passé à 2032, contre 1507 en 2018.

Cela ne concerne pas les chiffres des personnes, bien plus nombreuses, qui ont toujours recours au don de sperme à l’étranger, « en dehors des radars ».

 

Retrouvez tous nos articles sur la PMA.

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[CP] Stratégie décennale de soins palliatifs : déception et inquiétude

[CP] Stratégie décennale de soins palliatifs : déception et inquiétude

Communiqué de presse

Stratégie décennale de soins palliatifs : déception et inquiétude

 

1,1 milliard d’euros sur 10 ans pour les soins palliatifs, tel est le montant annoncé par la ministre du travail, de la santé et des solidarités dans un entretien au Monde.

Catherine Vautrin indique que « Les crédits de la Sécurité sociale engagés aujourd’hui pour les soins palliatifs sont de 1,6 milliard d’euros par an. » Une progression qui représente une croissance annuelle de 6%. En tenant compte de l’inflation qui vient diminuer l’impact positif de cette hausse, il est difficile de voir comment les besoins réels des Français seront couverts d’ici 2034. Selon les propos de la ministre elle-même, 50% des Français n’ont toujours pas accès à ces soins.

Comment peut-on prétendre que 235 lits supplémentaires en 2025 vont faire une différence alors que des centaines de milliers de français qui en ont besoin n’ont pas accès aux soins palliatifs ? En revanche si la loi fin de vie est votée, ils auront accès dès 2025 à l’ « aide à mourir ». Le risque est grand de voir l’euthanasie et le suicide assisté s’imposer aux patients par défaut d’accès aux soins nécessaires. Cette réalité est difficile à concilier avec l’objectif présenté par le gouvernement que la première chose qu’on va proposer à une personne, « ce sont des soins palliatifs ».

Quant aux soins d’accompagnement censés embrasser une dimension élargie des soins palliatifs, ils correspondent en réalité à la définition que livre l’OMS des … soins palliatifs. Il y a lieu de s’interroger sur cette volonté permanente de changer les mots.

Il y aussi lieu de s’inquiéter sur la vocation finale de ces maisons d’accompagnement dont la ministre elle-même précise que si leur but premier n’est pas d’y pratiquer l’ « aide à mourir », « nous verrons en fonction de l’expérimentation ».

Face aux besoins des Français, le gouvernement renonce à faire des choix ambitieux qui permettraient d’assurer à tous un accès égal aux soins palliatifs. Il fait au contraire le choix d’accélérer sur la mise en place d’une mort administrée. Dans un système de santé en crise et un contexte économique et budgétaire tendu, ce choix risque d’être lourd de conséquences pour les plus fragiles de notre société.

Alliance VITA appelle à renoncer à ce projet qui mine la solidarité nationale et à tout mettre en œuvre pour que le système de santé français accueille tous les patients qui en ont besoin.

Voir tous nos communiqués de presse.

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Les progestatifs, un nouveau scandale de santé publique ?

Les progestatifs, un nouveau scandale de santé publique ?

Les progestatifs, un nouveau scandale de santé publique ?

 

Le tribunal administratif de Montreuil a enregistré fin mars 2024 deux requêtes qui visent à engager la responsabilité de l’Etat, au travers de l’Agence nationale du médicament (ANSM), pour le retard pris dans l’information auprès des prescripteurs comme des patients des risques de méningiome en cas de prise de progestatifs.

Aujourd’hui, des femmes demandent réparation pour les préjudices subis. D’autres requêtes suivront. L’avocat chargé de les défendre annonce détenir 450 dossiers de femmes ayant consommé de l’Androcur ou d’autres progestatifs, Lutéran et Lutényl. Il y aurait 50 expertises judiciaires individuelles ordonnées, dont les 20 déjà terminées ont toutes retenu le lien de cause à effet entre la prise de ces médicaments et l’apparition de ces méningiomes. Une association de victimes de méningiomes a vu le jour en 2020 : AMAVEA.

Entre 2019 et 2020, des études épidémiologiques successives ont démontré que ce risque augmente avec la dose reçue, pour trois progestatifs (Androcur, Lutenyl, Lutéran et génériques). Dans un communiqué de janvier 2023, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) indiquait que dans le cadre d’une surveillance renforcée à la suite de ces études, des cas de méningiome survenus lors de traitements par d’autres progestatifs ont été aussi constatés. Un effet « classe » des progestatifs sur le risque de méningiomes ne pouvait donc être exclu.

Qu’est ce qu’un méningiome ?

Le méningiome désigne une tumeur des méninges, membranes qui entourent le cerveau et la moelle épinière. Il touche donc le cerveau mais peut aussi se situer dans la colonne vertébrale. Les signes évocateurs d’un méningiome peuvent être très différents selon sa taille et sa localisation. Les symptômes les plus fréquents sont les suivants (liste non exhaustive) : maux de tête fréquents, troubles de l’audition, vertiges, troubles de la mémoire, troubles du langage, faiblesse, paralysie, troubles de la vision, perte d’odorat, convulsions, nausées… Elles sont complexes à soigner, demandent parfois des opérations chirurgicales délicates et de longues convalescences.

Cette maladie peut bouleverser la vie des personnes touchées. Le méningiome peut être découvert lors d’un scanner ou d’une IRM réalisé devant des symptômes variés, comme des maux de tête, ou parce qu’il entraîne déjà un dysfonctionnement du cerveau (crise d’épilepsie, déficit neurologique, troubles de la conscience…). Le traitement est chirurgical, associé parfois à de la radiothérapie. Les récidives ne sont pas rares.

A quoi servent ces traitements ? 

Les progestatifs sont des médicaments prescrits parfois en dehors de leur autorisation de mise sur le marché (AMM) dans diverses pathologies gynécologiques (endométriose, fibromes, règles particulièrement longues et/ou abondantes, troubles du cycle), dans le traitement hormonal substitutif (y compris ménopause) ; mais aussi en obstétrique (stérilité par insuffisance lutéale, avortements à répétition) ou encore dans les processus de « transition de genre ».

Sous certaines indications, des personnes ont été amenées à ce traitement pendant des années, voire des décennies. Or, le sur-risque de méningiome, connu depuis les années 2010, s’intensifie à mesure que la dose et la durée du traitement par acétate de cyprotérone augmentent.

Androcur (acétate de cyprotérone)

Ce médicament contient un dérivé de la progestérone. Il a une action antihormonale (anti-androgénique) : il s’oppose à l’action des hormones androgènes (essentiellement la testostérone) et inhibe donc les effets des hormones sexuelles mâles. C’est pour cela qu’il est utilisé hors AMM dans les processus de de « transition de genre » par les hommes qui désirent réduire leurs caractères sexuels physiques masculines (pilosité, masse musculaire… ) et faire évoluer des caractères sexuels secondaires féminins (taille de seins).

Chez l’homme, son action permet de ralentir la croissance des cellules de la prostate. Il est donc indiqué dans le cas du cancer de la prostate.

Chez la femme, les hormones androgènes sont présentes en petite quantité et sont impliquées dans les troubles de la pilosité et des excès de sébum. Ce traitement est utilisé dans les cas sévères d’acné et d’hirsutisme (pilosité excessive)

Lutényl et génériques (acétate de nomégestrol) et Lutéran et génériques (acétate de chlormadinone)

Ce sont des dérivés de la progestérone. Ils sont utilisés dans certaines maladies gynécologiques invalidantes comme l’endométriose, les règles très abondantes, irrégulières et prolongées, qu’elles soient ou non en lien avec un fibrome. Ces médicaments sont quelquefois prescrits hors AMM comme contraceptif.

Des risques connus de longue date

L’identification du risque de favoriser l’apparition de méningiome n’est pas récente. La première alerte de pharmacovigilance remonte à 2004. Dès 2007, une étude sur Androcur le mettait déjà en lumière. Il a été clairement établi et rendu public par l’ANSM en 2018 dans une étude menée sur 4000 000 femmes. Cette même année des témoignages bouleversants de femmes émergeaient.

En 2019, le risque accru de développer des tumeurs intracrâniennes pendant la grossesse chez les femmes ayant été auparavant traitées par Androcur, bien après l’arrêt du traitement, était aussi révélé. En effet, dans le cas où une femme ayant été sous traitement aurait développé un méningiome non connu ou non détecté, la période de grossesse devient singulièrement à risque puisque naturellement le corps se met à produire une quantité très importante de progestérone, ce qui déclenche l’augmentation brutale de la taille du méningiome.

Dans une étude portant sur 287 femmes, 56% avaient été sous Androcur pour des cas d’acné ou de contraception, sur une durée moyenne d’exposition de 15 ans… On y découvre aussi que les premiers diagnostics de méningiome remontent à 1995.

Les recommandations accompagnant les prescriptions ont évolué depuis 2018. D’abord, les professionnels ne devaient pas prescrire ou arrêter le traitement en cas de survenue de méningiome. Puis, en 2020, le dépistage par IRM est instauré en début et en cours de traitement.

Pour la présidente de l’association AMAVEA, Emmanuelle Huet-Mignaton, « dix ans ont été perdus », avant que les prescripteurs ne soient correctement informés des risques. Or, « ce retard dans la délivrance d’une information précise et circonstanciée constitue une faute de l’Autorité de santé », précise Maître Joseph-Oudin, l’avocat des femmes ayant déposé ces requêtes. « Cette affaire des progestatifs constitue un scandale de santé publique majeur. Pendant des années, des milliers de femmes ont été exposées à des doses très importantes d’un produit pourtant suspecté de créer des tumeurs cérébrales très graves ».

 

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Loi fin de vie : peut-on ignorer les pressions économiques ?

Loi fin de vie : peut-on ignorer les pressions économiques ?

Loi fin de vie : peut-on ignorer les pressions économiques ?

 

Le débat sur le projet de loi « fin de vie » comporte des aspects économiques qui méritent d’être explicités pour en éclairer toutes les facettes.

 

Le soutien aux soins palliatifs

Un des engagements forts d’Emmanuel Macron dans son discours annonçant un projet de loi portait sur les soins palliatifs : « Je crois qu’une solution unanimement préconisée doit être maintenant rigoureusement mise en œuvre. Il nous faut mieux faire appliquer la loi Claeys-Leonetti, comme le souligne aussi très bien la mission d’évaluation de l’Assemblée nationale. Nous avons en la matière une obligation d’assurer l’universalité de l’accès aux soins palliatifs, de diffuser et d’enrichir notre culture palliative et de rénover la politique de l’accompagnement du deuil« . Le plan décennal qui était prévu pour décembre 2023 n’est pas encore publié. Il est donc difficile de se prononcer, mais quelques éléments sont déjà disponibles.

La filière des soins palliatifs représente, dans les dépenses publiques, un montant avoisinant 1.5 milliard d’euros. Cette estimation se retrouve dans le rapport de la Cour des Comptes publiés l’an dernier. Par comparaison, le budget annuel de la Sécurité Sociale a été fixé dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2024 à 640 milliards d’euros. Les soins palliatifs représenteraient ainsi 0.25% du budget global.

Dans une analyse précédente, nous avons proposé une évaluation des allocations du dernier plan : elles suffisaient à peine à couvrir l’inflation courante. Concernant 2024, la Ministre de l’époque avait évoqué en séance à l’Assemblée Nationale une enveloppe de  » 20 millions d’euros supplémentaires pour entamer la création d’une filière de prise en charge palliative, conformément à l’instruction donnée aux ARS. C’est l’une des premières briques du développement des soins palliatifs« . L’insuffisance des montants actuels est bien connue du monde des soignants et des décideurs politiques : au moins la moitié des personnes ayant besoin de soins palliatifs n’y auraient pas accès.

Concernant le futur plan décennal, sa publication est repoussée depuis décembre. Récemment, le chiffre d’un milliard supplémentaire à horizon 2034 a circulé, sans détail sur le rythme et les montants alloués. Une progression linéaire entre 1.5 à 2.5 milliards d’euros sur 10 ans représente une croissance annuelle de 5.2%. En tenant compte de l’inflation qui vient diminuer l’impact positif de cette hausse, il est difficile de voir comment les besoins réels des Français seront couverts d’ici 2034.

Et comme le souligne la société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP), ces besoins seront probablement en hausse avec le vieillissement de la population.

Pourtant, le Comité Consultatif National d’Ethique CCNE lui-même, dans son avis 139 donnant un feu vert à une forme de mort administrée, insistait sur le développement des soins palliatifs selon deux axes :

  1. Imposer les soins palliatifs parmi les priorités des politiques de santé publique.
  2. Assurer le développement effectif d’une discipline universitaire (idéalement interdisciplinaire) consacrée aux soins palliatifs avec nomination d’un universitaire dans chaque faculté de santé.

Interrogée directement sur ce point par le magazine La Vie le 3 avril, la ministre Catherine Vautrin parle d’un « engagement fort » mais ne donne aucun chiffre ni aucun engagement dans un contexte budgétaire très défavorable cette année. Pour 2023, le déficit budgétaire, prévu à 4.9% par le gouvernement, a atteint 5.5%  selon le chiffre officiel de l’INSEE, soit 154 milliards d’euros.

. Pour 2023, le déficit budgétaire, prévu à 4.9% par le gouvernement, a atteint 5.5%  selon le chiffre officiel de l’INSEE, soit 154 milliards d’euros.

Le risque est important de voir un dispositif de mort administrée se mettre en place alors même que les carences dans l’accès aux soins augmentent.

 

Les impacts budgétaires d’une mort administrée

Sans être au cœur des débats, la question des économies budgétaires a déjà été évoquée. Un des soutiens de l’ADMD, le philosophe André Comte Sponville, l’avait abordée dans son argumentaire en faveur de l’euthanasie. Alliance VITA a aussi relevé et questionné le soutien constant que des mutuelles apportent au projet d’euthanasie.

Le risque est non négligeable d’un véritable conflit d’intérêt entre une entreprise qui doit équilibrer ses comptes et les besoins d’un patient à être soigné et pris en charge jusqu’à la fin de sa vie.

Au Canada, l’officiel Bureau du Directeur parlementaire du Budget a publié un rapport sur le dispositif d’euthanasie (dénommée Aide Médicale à Mourir). Sa conclusion chiffrait des économies budgétaires.

Au-delà des erreurs inévitables sur ce type de calcul (une analyse poussée est proposée par Alliance VITA ici), c’est la démarche elle-même qui pose une question. Quelle culture sociale est promue lorsqu’on calcule un bénéfice pour un pays grâce à la mort anticipée des malades ou des personnes en fin de vie ?

Les partisans de l’euthanasie présentent souvent leur revendication comme un pas en avant pour l’autonomie de chaque individu. Les difficultés budgétaires actuelles devraient au contraire alerter sur les pressions réelles que subiront le système de santé et ses usagers, les patients, si le suicide assisté et l’euthanasie sont légalisés.

 

loi fin de vie

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