« Gestation par Autrui » d’une mère pour sa fille

« Gestation par Autrui » d’une mère pour sa fille

grand-mère porteuse

Dans le cadre d’une “Gestation Par Autrui” (GPA), une Australienne a accouché de son petit-fils, Parker, le 2 juin 2016. Theresa Hohenhaus s’était fait implanter les embryons de sa fille et de son gendre. La grand-mère de Parker avait fait cette proposition à sa fille, dont l’utérus avait été fragilisé par le traitement d’une leucémie dans son enfance.

La femme de 46 ans, une mère de 5 enfants, à qui on avait implanté un embryon issu des gamètes de sa fille et de son gendre a donc porté l’enfant de son gendre et de sa fille pendant neuf mois et accouché de son propre petit fils.

Relayant de nombreuses photos de l’accouchement dans la presse et sur les réseaux sociaux les deux femmes ont largement médiatisé cette naissance qui soulève de très nombreuses questions éthiques. Dans cette situation : les générations se confondent : la mère « porteuse » est la grand-mère de l’enfant, avec ce que cela peut entraîner de confusion en termes de filiation et de repères affectifs.  Cela pose également la question de la pression affective intra-familiale qui s’exerce dans des cas d’infertilité et soulève des questions éthiques majeures sur l’instrumentalisation du corps des femmes et le droit des enfants…

Clause de conscience des pharmaciens : abandon sous pression

Clause de conscience des pharmaciens : abandon sous pression

 


pharmacien

Le Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP), réuni le 6 septembre 2016 pour finaliser le projet de refonte du code de déontologie des pharmaciens, a renoncé à introduire une clause de conscience explicite,  proposée dans un pré-projet. En effet ce besoin avait été exprimé par 85% des pharmaciens au cours d’une récente consultation « interne » en décembre 2015, proposée par l’Ordre aux 75 000 pharmaciens inscrits.

La préoccupation du CNOP était de faire évoluer son code de déontologie, pour qu’il puisse être en « adéquation avec son temps, dans un contexte professionnel qui soumet les pharmaciens, acteurs de santé publique de premier plan, à de fortes exigences éthiques ».

La clause de conscience qui était envisagée concernait les actes pharmaceutiques susceptibles d’attenter à la vie humaine.  L’article sur la clause de conscience, dans cette première version, était ainsi rédigé : « Sans préjudice du droit des patients à l’accès ou à la continuité des soins, le pharmacien peut refuser d’effectuer un acte pharmaceutique susceptible d’attenter à la vie humaine. Il doit alors informer le patient et tout mettre en œuvre pour s’assurer que celui-ci sera pris en charge sans délai par un autre pharmacien. Si tel n’est pas le cas, le pharmacien est tenu d’accomplir l’acte pharmaceutique ».

En effet, comme le souligne le code de déontologie actuel ( Art R4235-2 du code de la santé publique),  les pharmaciens ont l’obligation déontologique d’exercer leur métier « dans le respect de la vie et de la personne humaine ».

Depuis quelques années se présente à eux désormais la demande de délivrance de produits abortifs, avec le développement de l’avortement médicamenteux effectué par des médecins en ville ou des sages-femmes, voire, dans le futur, de produits létaux (une possibilité qui ne peut être écartée depuis la nouvelle loi du 2 février 2016 sur la fin de vie, en lien avec les actes de sédation profonde et continue pouvant conduire à des suicides assistés et des euthanasies).

Le Code de la santé publique (article L2212-8) accorde une clause de conscience concernant l’IVG aux professionnels médicaux que sont les médecins, sages-femmes, infirmiers et autres auxiliaires médicaux, mais pas aux pharmaciens qui à l’origine n’étaient pas concernés par l’IVG.

Un droit à l’objection de conscience  pour les professionnels de santé  « dans le cadre des soins médicaux légaux » a été réaffirmé dans une résolution de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe en 2010  pour les actes qui attentent à la vie (avortement,  euthanasie, destruction d’embryons humains).

Comme l’explique le juriste Jean-Baptiste Chevalier, dans une tribune du 5 septembre : « Elle [la clause de conscience] est pourtant la condition pour qu’ils puissent jouir, dans le cadre de leur fonction, d’une pleine liberté de conscience, laquelle est consacrée par l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et à l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme ». Cet avocat au barreau de Paris précise même : « On ne peut donc sans attenter gravement à leur liberté de conscience, imposer aux pharmaciens de délivrer des produits destinés à provoquer la mort ». Car agir ainsi est profondément contradictoire avec leur vocation première qui est de fournir des produits de soins aux patients.

En contrepartie d’une clause de conscience, rappelons que le projet d’article finalement supprimé indiquait qu’un pharmacien invoquant la clause avait néanmoins l’obligation de proposer au patient une solution, et de s’assurer de sa prise en charge et de la continuité des soins.

Par crainte d’une remise en cause de l’avortement, une virulente polémique avait envahi les réseaux sociaux mi-juillet, largement relayée par des mouvements « pro-avortement », polémique à laquelle avaient même pris part les ministres Laurence Rossignol et Marisol Touraine.

POUR ALLIANCE VITA

La reculade de l’Ordre des pharmaciens est un épisode emblématique d’une offensive idéologique concertée contre le droit à l’objection de conscience. En réalité, les modalités d’exercice d’un tel droit devraient être renouvelées pour les adapter aux conditions nouvelles d’exercice des professions soignantes, liées à la diffusion de produits susceptibles de provoquer délibérément la mort.

Les pharmaciens français sont donc discriminés : ils demeurent les seuls professionnels médicaux en France à ne pas bénéficier de la clause de conscience quand une vie est en jeu. Plusieurs autres pays d’Europe la leur accordent. Rappelons par exemple qu’en Belgique, les pharmaciens ne sont pas tenus de délivrer des produits d’euthanasie.

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Pour aller plus loin : Les clauses de conscience reconnues en France 

 

VITAliser la France ! 19ème Université d’été d’Alliance VITA

VITAliser la France ! 19ème Université d’été d’Alliance VITA


université d'été 2016

Venus de 51 départements, 312 membres engagés dans Alliance VITA se sont retrouvés près d’Angers, du 26 au 28 août 2016, pour la 19ème Université d’été de l’association.

Alors que l’entrée dans l’année 2016-2017 est déjà accaparée par les querelles partisanes, le thème de cette édition, « VITALISER LA FRANCE », a situé l’association dans sa « grave responsabilité politique », dans le contexte d’une société traumatisée, en quête d’identité, qui ne sait plus ‘qui est l’Homme’ faute de repères anthropologiques.

Au programme, trois jours de conférences, ateliers, témoignages, rencontres, mises en situations, exercices d’expression, initiation à la relation d’aide, travail thématique sur les grands chantiers de « l’année électorale » qui commence, mais aussi en vue du développement des services d’aide animés par Alliance VITA, SOS bébé et SOS fin de vie. Les intervenants sont venus parler de la situation de la France en historien, politologue, journaliste… A noter la présence de nombreux membres de VITA jeunes, dont le développement a été intense ces derniers mois. Et un témoignage bouleversant sur l’héritage de mère Teresa de Calcutta, qui a su incarner à la fois le service de la vie humaine, à ses stades les plus vulnérables, et sa protection.

Pour Tugdual Derville, délégué général de l’Association, qui présentait son nouveau livre <em>Le temps de l’Homme</em> (Plon)

« Chacun des quelque 1100 membres engagés dans les équipes d’Alliance VITA est incité à agir avec nous et autour de lui, ‘ici et maintenant’, comme acteur politique et social. Nous intensifions nos efforts pour établir une société plus juste et plus humaine, sans attendre un sauveur politique, et en prenant du recul face aux batailles des égos. C’est la spécificité d’Alliance VITA que d’avoir un réseau de personnes compétentes, motivées et impliquées, sur tous les thèmes liés à la vie des plus fragiles. C’est ce qui explique notre crédibilité et notre efficacité à long terme. »

Pour François-Xavier Pérès, président de l’association, « Vivre libre, c’est s’engager ! <em>»</em>

« Si Alliance VITA a effectivement une parole crédible pour les candidats aux élections, dès les primaires présidentielles et jusqu’aux législatives, c’est en raison de notre parler vrai et de notre cohérence, grâce à notre expertise juridique et sociale, notre implication concrète auprès de personnes qui font appel à nos services d’aide et nos convictions paisiblement assumées. » Le président d’Alliance VITA a conclu en citant Saint Augustin d’Hippone : « Ne dites pas ‘les temps sont durs’. Vous êtes les temps. Soyez bons et les temps seront bons ! »

La rentrée d’Alliance VITA se poursuit les 24 et 25 septembre à Lyon puis les 8 et 9 octobre 2016 à Paris avec deux « master class», sessions de formation et d’immersion organisées par VITA jeunes.

GPA : éthique ou pas ?

GPA : éthique ou pas ?

gpa éthique

Pour Tugdual Derville, le recours aux mères porteuses ne peut pas « être éthique ».

« Le mot éthique n’est accolé à la GPA que pour connoter positivement une pratique injuste. Derrière toute forme de gestation « par » autrui, il y a la programmation d’une rupture originelle entre une femme et l’enfant qu’elle porte. Cette rupture est plus grave que les autres scandales de la GPA, comme sa dimension commerciale. Pourquoi ? Les interactions entre une femme et l’enfant qu’elle porte sont extrêmement sensibles, précieuses, riches. La science n’en finit pas de découvrir la complexité et même le mystère de ce qui se noue dans cette période de vie intra-utérine. Il y a quelque chose de l’ordre du déni du réel à prétendre qu’on peut escamoter ce moment ou, plus précisément, provoquer d’une manière indolore cette rupture par un contrat qui engage la femme à livrer à des commanditaires celui qu’elle aura porté.

C’est pourquoi il n’y a pas de différence fondamentale entre une GPA qui aurait comme mobile la misère, comme on le voit dans certains pays pauvres, et une GPA qu’on prétendra éthique ou altruiste : les mobiles des mères porteuses ne peuvent être qu’ambivalents. Une GPA ne peut pas être « altruiste » car mon enfant ne m’appartient pas. Ce sont les choses que l’on donne ou que l’on vend, pas les personnes. Un enfant ne donne pas sa mère « par altruisme » à un autre enfant qui en serait privé.

Dans certaines situations dramatiques, une femme peut être amenée à confier son enfant à l’adoption : il s’agit de réparer, sans nier la souffrance. C’est l’inverse avec la GPA : elle ne répare pas un drame, elle le provoque ! Les promoteurs de la GPA mettent en avant la souffrance des couples qui désirent un enfant. Or, les grands désirs risquent d’anesthésier la conscience : toute société se construit en régulant les désirs des forts, qui se font tyranniques au détriment des faibles ».

Tugdual Derville, Délégué général d’Alliance VITA et auteur du Temps de l’Homme (Éd. Plon).

Interview réalisée par Alice Le Dréau et Agnès Chareton et publié dans Pèlerin n°6978 du 25 août 2016.

Loi Fin de vie : publication des décrets d’application

Loi Fin de vie : publication des décrets d’application

soinspalliatifs

Ce 5 août 2016, le Journal Officiel publie deux décrets et un arrêté datés du 3 août qui apportent des précisions sur la « sédation profonde et continue jusqu’au décès » et sur les directives anticipées, telles que prévues dans la loi sur la fin de vie du 2 février 2016.

> Le premier décret n°2016-1066 concerne en priorité les médecins et les professionnels de santé. Il modifie le code de déontologie médicale pour organiser cette nouvelle forme de sédation, avec des modalités différentes selon que le patient peut exprimer sa volonté ou non. Une analyse approfondie de son contenu, et surtout des pratiques qui seront mises en œuvre sur son fondement, seront nécessaires pour évaluer la portée réelle de ce texte.

Pour mettre fin à une situation qu’un médecin juge être une obstination déraisonnable, il est par exemple précisé que celui-ci peut pratiquer cette forme de sédation terminale, lorsque le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté, « même si la souffrance de celui-ci ne peut être évaluée du fait de son état cérébral » : n’y a-t-il pas un paradoxe à utiliser une sédation, dont le but premier est de mettre fin à des souffrances réfractaires, alors même qu’on n‘est pas sûr que la personne souffre ?

Il faudra également apprendre à distinguer deux procédures collégiales qui paraissent légèrement différentes, selon que le médecin veuille limiter ou arrêter des traitements (procédure de l’article L.1110-5-1) ou qu’il veuille passer outre des directives anticipées qu’il juge manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale (procédure de l’article L.1111-11).

> Le second décret n°2016-1067 concerne toute la population française, puisqu’il modernise les conditions de rédaction et de conservation des directives anticipées que chaque personne peut établir pour faire connaître sa volonté au cas où il ne pourrait plus s’exprimer. Ce décret détaille le contenu du modèle demandé par la loi Fin de vie et les diverses façons de conserver ce document.

Deux cas de figure sont distingués, reprenant les suggestions faites par la Haute Autorité de santé il y a quelques mois : celui où la personne est en fin de vie ou se sait atteinte d’une affection grave, et celui où la personne ne pense pas être atteinte d’une affection grave (avec moins de rubriques proposées). Une rubrique spécifique est en outre introduite sur la sédation profonde et continue jusqu’au décès. L’indication d’une personne de confiance est également prévue. Tous ces éléments, ainsi que d’autres informations secondaires, sont contenus dans l’annexe de l’arrêté du ministre de la santé pris en application de ce décret.

> Concernant les façons de conserver ce document, le décret privilégie le « Dossier Médical Partagé » (DMP), cet outil informatisé contenant toutes les données médicales d’une même personne et qu’il est prévu de généraliser à toute la population d’ici 2017. Ce choix a été suggéré dans un rapport de l’IGAS d’octobre 2015, et le gouvernement a décidé que ce support pouvait être considéré comme le registre national prévu à l’article 8 de la loi Fin de vie. Les directives anticipées pourront également être conservées chez son médecin traitant, dans le dossier médical en cas d’hospitalisation ou dans le dossier de soins pour une personne en maison de retraite, par exemple, sans oublier la possibilité de les conserver chez soi ou de les confier à une autre personne de son choix.

Pour aller plus loin :

Décodeur VITA n°45 sur la loi Fin de vie, 4 février 2016