Infertilité masculine et enjeux environnementaux

Infertilité masculine et enjeux environnementaux

La chute de la fertilité masculine est un phénomène identifié depuis une trentaine d’années. Dans le Rapport sur les causes de l’infertilité [1]remis à l’ancien ministre de la santé, Olivier Véran en février 2022, une méta-analyse publiée en 2017 dans Human Reproduction Update est mentionnée. D’après elle, on constate un déclin de plus de 50 % de la concentration moyenne de spermatozoïdes chez les hommes des pays industrialisés en quarante ans (entre 1973 et 2011). En 2019, une enquête – publiée dans la revue Urology – a été menée sur 120 000 hommes espagnols et américains ayant consulté un centre d’assistance médicale à la procréation. Elle montre que le nombre d’hommes ayant moins de 15 millions de spermatozoïdes mobiles par millilitre (moyenne considérée comme normale par l’OMS, seuil en dessous duquel on parle d’oligospermie) a augmenté entre 2002 et 2017, passant de 1 sur 8 à 1 sur 5 en seulement quinze ans. Une étude française de 2018 va dans le même sens que ces constats internationaux. Elle déplore une baisse significative et continue de la concentration spermatique entre 1989 et 2005, avec une baisse annuelle de 1.9% environ.

Plusieurs causes sont pointées du doigt, parmi elles : les facteurs environnementaux. Des chercheurs de Londres et Copenhague ont publié ce 9 juin 2022 dans Environment International une étude qui part de ce postulat d’un lien entre fertilité masculine et substances polluantes du quotidien.  Ses auteurs émettent l’hypothèse que les problèmes d’infertilité (qualité du sperme, insuffisance ovocytaire, augmentation du taux de cancer des testicules…) sont en partie liés à l’augmentation de l’exposition humaine à certains produits chimiques. Ils ont sélectionné une trentaine de molécules déjà suspectes d’avoir un impact sur la qualité du sperme et pour lesquelles la littérature donne des informations sur leur niveau acceptable d’exposition. Ensuite, sur une centaine d’hommes volontaires, ils ont cherché la présence de ces substances dans différents prélèvements, comme les urines.

« Nous avons ensuite rapporté l’exposition estimée de la population pour chaque substance au niveau auquel des effets ne se produisent plus », explique M. Kortenkamp de l’université Brunel de Londres au Journal Le Monde. « Ce que nous montrons est que l’exposition combinée à ce grand nombre de produits excède largement ce seuil de sécurité. Nous parlons d’une exposition médiane qui excède d’un facteur 20 l’exposition acceptable. Les individus de notre échantillon les plus exposés sont jusqu’à 100 fois au-delà de ce seuil. C’est considérable ».

L’étude conclut que les expositions tolérables à des substances associées à des détériorations de la qualité du sperme sont largement dépassées. Les bisphénols, les dioxines polychlorées, les phtalates et les analgésiques seraient à l’origine de ces risques. Cette analyse a un caractère prédictif et pourrait être vérifiée dans des études épidémiologiques adéquates sur la qualité du sperme, précisent les auteurs dans leur article.

En France, les résultats de l’étude Esteban (étude de santé sur l’environnement, la biosurveillance, l’activité physique et la nutrition et, plus particulièrement, de son volet relatif à la biosurveillance humaine), publiés en septembre 2019 par Santé publique France, montrent une imprégnation généralisée du sang et des fluides corporels humains pour six familles de polluants, présents dans les produits de consommation courante, parmi eux également, les bisphénols et les phtalates.

Mais l’identification d’un lien de cause à effet entre l’action d’une molécule incriminée et ses effets néfastes précis reste complexe.

Outre les conséquences en termes de baisse de fertilité, les auteurs de la méta-analyse de 2017 rappellent que la qualité du sperme peut être un indicateur global de santé publique. En effet aujourd’hui, trois larges études font le lien entre une mauvaise qualité du sperme et une augmentation de la mortalité et de la morbidité chez les hommes, toutes causes confondues[2].

En France, 3,3 millions de personnes sont directement concernées par la question de l’infertilité. Plus de 15% des couples en âge de procréer consultent pour une difficulté à concevoir. Les chiffres sont inquiétants et n’ont de cesse de s’aggraver. Selon les études menées sur 195 pays, la fréquence de l’infertilité a augmenté de 0,29% par an pour les hommes et de 0,37% par an pour les femmes sur les 20 dernières années.

Il s’agit donc d’un défi majeur, tant au niveau individuel pour ceux qui la subissent qu’au niveau collectif. Cette question, à la fois intime et sociale, devrait être placée au cœur des grands défis politiques contemporains.

[1]Réparer et Mettre le lien vers ce FA car sur le site le lien ne fonctionne pas :  Infertilité : un rapport axé sur la prévention et la recherche

[2] Rapport sur les causes de l’infertilité – 1.4.1.3

Mobilisation SLA : mieux connaître pour mieux soutenir

Mobilisation SLA : mieux connaître pour mieux soutenir

Mobilisation SLA : mieux connaître pour mieux soutenir

 

Peu de personnes connaissent la SLA, certains ont entendu parler de la maladie de Charcot… il s’agit d’une seule et même maladie, très invalidante et pour laquelle la recherche est encore balbutiante. Un faible pourcentage des cas est attribué à la génétique ; les autres causes, probablement multiples, restent pour l’instant non prouvées. Il n’existe actuellement aucun traitement curatif probant contre cette maladie dégénérative non contagieuse qui a été identifiée vers 1880 par le Professeur Jean Martin Charcot, le père de la neurologie moderne.

La SLA affecte 5 000 à 7 000 patients en France avec une incidence annuelle proche de 2,5 pour 100 000 habitants. Sur le plan clinique, la SLA débute en moyenne à l’âge de 55-60 ans avec une très faible prépondérance masculine.

La signification des trois lettres SLA permet de mieux comprendre ce qu’elle est:

  • Le S pour “sclérose” correspond à un durcissement,
  • Le L pour “latérale” car elle s’attaque au côté de la colonne vertébrale,
  • Le A final de “amyotrophique” indique une privation de nutrition des muscles.

Cette maladie neuromusculaire empêche peu à peu le contrôle des muscles volontaires. Cela entraîne un affaiblissement puis une paralysie des muscles des jambes et des bras, des muscles respiratoires, ainsi que des muscles de la déglutition et de la parole. Les fonctions intellectuelles et sensorielles ne sont pas touchées. L’évolution de la maladie peut être très variable d’un patient à l’autre, mais elle est globalement rapide, entraînant le plus souvent un décès dans les deux à cinq ans après le diagnostic.

La SLA est la moins rare des maladies rares, pourtant les moyens alloués à la recherche restent bien en-deçà des besoins. Les pistes thérapeutiques qui tendent à être mises à jour le sont principalement via la recherche concernant d’autres maladies neurodégénératives.

Un groupe de travail du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie a publié en novembre 2021 une synthèse sur les conditions de fin de vie des personnes atteintes de SLA. Elle souligne la complexité, l’importance de l’information et de l’anticipation des épisodes évolutifs de la maladie et la nécessité d’améliorer la coordination entre les services de neurologie et de soins palliatifs pour permettre un accompagnement gradué du patient à tous les stades de sa maladie.

Un mois de mobilisation

Le 21 juin a été choisi comme la journée mondiale de lutte contre la SLA, car c’est le jour le plus long de l’année, espérance d’une prolongation de vie pour les personnes atteintes par cette maladie.

L’Association pour la Recherche sur la Sclérose Latérale amyotrophique (ARSLA), autre nom de la maladie de Charcot, lance une grande mobilisation ce mois-ci, baptisée #EclatsdeJuin sur les réseaux sociaux : des « éclats d’histoire » pour partager des expériences vécues ; des « éclats de joie », pour mettre en avant le combat et la ténacité des personnes atteintes de la maladie et de leurs proches, pour que la vie prenne le dessus.

Une course connectée solidaire

L’association ARSLA invite aussi le plus grand nombre à courir, marcher, randonner, rouler… dans une course 100% connectée, « Défie la SLA » . Il ne s’agit pas d’une compétition sportive, mais d’un événement solidaire afin de sensibiliser le grand public à la maladie, collecter des fonds pour faire avancer la recherche et pour aider les personnes atteintes de SLA et leurs proches aidants. L’objectif est de parcourir tous ensemble 21.000 Kms d’ici le 21 juin.

Ce mois de sensibilisation est aussi soutenu par plusieurs personnalités parmi lesquelles le rappeur Pone, membre du groupe de rap Fonky Family et producteur de musique. De sa maladie, il dit qu’elle lui a laissé l’essentiel : “Ma tête et mon cœur.” Son sens de l’humour semble également intact quand il file la métaphore du sport de combat pour décrire son quotidien depuis bientôt cinq ans : “Je suis passé ceinture noire de patience”, confie-t-il. Il vit entouré de son épouse et de ses deux filles, communique, écrit et compose grâce à un logiciel de poursuite oculaire : “Quel que soit le handicap, je veux leur dire qu’une vie existe”.

Rompre l’isolement

Nous sommes les liens que nous tissons. La SLA génère inévitablement beaucoup de sentiments négatifs : la culpabilité d’imposer ça aux proches, la frustration à chaque étape de l’évolution de la maladie, le sentiment d’être inutile… Dans les moments difficiles, l’isolement rend l’épreuve plus lourde et enferme davantage.

Pour un proche, l’accompagnement d’une personne atteinte de SLA peut devenir un travail de tous les instants, jours et nuits, week-ends et jours fériés inclus. La valorisation du rôle des aidants est essentielle. Proposer un espace d’écoute aux personnes atteintes d’une maladie grave et à leurs proches, permet de leur donner une respiration, un peu de recul, plus de liberté : c’est ce qu’offre le service SOS Fin de vieanimé par Alliance VITA.

La force des témoignages

Lionel avait 34 ans lors du diagnostic d’une SLA. Emprisonné dans son propre corps, il utilise ses yeux pour faire connaître la maladie et la condition des personnes qui en souffrent et celle de leur entourage sur le site Les yeux qui parlent :

“ A toutes les personnes qui découvrent qu’elles sont atteintes de ce fléau, j’aimerais surtout dire la vérité, sans édulcorant. Vous allez souffrir, probablement beaucoup. Peut-être pas physiquement, mais votre mental va être soumis à rude épreuve, comme il ne l’a jamais été. Mais si vous êtes bien entouré, par des personnes qui vous aiment inconditionnellement, tout est possible.

Vous pouvez surmonter toutes les difficultés et trouver la résilience nécessaire pour construire une vie différente. Différente mais belle ! ” Son conseil : l’anticipation. ” Il faut devancer la maladie et son évolution pour ne pas la subir encore plus. “

David Sagnier souffre lui aussi d’une SLA. Lui qui a beaucoup navigué, confie que “comme en mer, il s’agit, non pas de dompter les éléments, mais plutôt de les apprivoiser. La meilleure façon de se battre contre la maladie, c’est d’être capable d’être heureux avec la maladie, en se recentrant sur un travail intérieur.”

mobilisation sla : mieux connaître pour mieux soutenir

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Un couple de commanditaires abandonne le bébé né de gestation pour autrui

Un couple de commanditaires abandonne le bébé né de gestation pour autrui

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C’est un fait divers sordide comme la pratique de la Gestation pour Autrui ou plutôt par autrui, si l’on veut être exact, sait en produire. Il a été repéré par Cafemom qui relaye ce témoignage d’un couple publié sur Redit, puis supprimé depuis en raison de l’émotion et de la polémique qu’il a suscité.

Un couple d’américains a fait appel à une mère porteuse. Aux Etats-Unis, la GPA est tolérée dans plusieurs états. Les gamètes du couple ont été utilisés pour la réalisation de la procréation in vitro. A la naissance, quand ils sont venus rencontrer et récupérer le nouveau-né, le père explique avoir eu l’impression « que quelque chose n’allait pas ». En découvrant son visage, ils lui trouvent des traits asiatiques. Pour eux, ce petit bébé aux yeux marrons et aux cheveux noirs ne leur ressemblait pas, car ils sont tous deux blonds aux yeux bleus. Les deux commanditaires décident alors de procéder à un test ADN. Les résultats montrent que l’homme, se croyant père biologique ne l’est finalement pas. Une enquête révèlera par la suite une erreur commise par l’agence de mères porteuse et la banque de sperme. C’est celui d’un autre homme qui a servi à concevoir l’enfant. Le couple explique alors dans un message avoir décidé d’abandonner le bébé et de le remettre à l’adoption : « Nous nous fichons de l’origine ethnique, nous sommes juste contrariés que le bébé ne soit pas le nôtre, s’il était blanc et pas de moi nous aurions été tout aussi en colère. La mère porteuse avait le cœur brisé aussi quand nous lui avons révélé ce qui s’était passé, mais ne peut se permettre de garder le bébé car elle a déjà cinq enfants ».

Pour Alliance VITA, là où la GPA est légalement tolérée, elle génère d’injustes et inextricables situations. C’est pourquoi nous demandons une action internationale pour interdire cette pratique.

 


 

Pour aller plus loin :

DOSSIER GPA à l’international
[Vidéo Replay] – Webinaire “La réalité de la GPA” – Alliance VITA
Déconstruire la GPA « éthique », VITA 2021

La Belgique dépénalise la prostitution, un modèle qui inspire ?

La Belgique dépénalise la prostitution, un modèle qui inspire ?

 

Dans une réforme votée en mars dernier et prenant effet début juin, le royaume de Belgique a dépénalisé la prostitution. Se présentant comme le premier pays à le faire en Europe, et deuxième dans le monde après la Nouvelle Zélande, cette loi qui couvre plus largement les infractions sexuelles était portée par le ministre fédéral de la justice Vincent van Quickenborne, du Parti libéral flamand. La prostitution étant pratiquée et tolérée dans ce pays, la dépénalisation signifie que la Belgique cesse de pénaliser les parties tierces “sauf en cas de profit anormal”. Concrètement, un loueur ou une banque travaillant avec une prostituée ne tombera pas sous le coup de la loi, et les prostituées bénéficieront d’un accès à la protection sociale au titre de leur activité. Le proxénétisme reste en revanche interdit. Autre pan de cette réforme, la notion d’attentat à la pudeur disparaît et est remplacée par la notion d’atteinte à l’intégrité sexuelle. Celle-ci se définit comme “tout acte qu’une personne normale et raisonnable considère comme sexuellement inapproprié”. La définition du viol est élargie et les peines alourdies, tandis que les peines pour voyeurisme sont allégées.

Parmi les arguments avancés pour cette réforme par le personnel politique ou des associations de prostituées, sont souvent cités les mots :  “donner un cadre à une activité dans l’ombre”, “faire évoluer la loi aux problématiques actuelles”, ou encore “criminaliser c’est créer des zones de non-droits”.

L’Allemagne, terrain expérimental de la légalisation de la prostitution.

Sur la question de l’encadrement d’une activité existante et de ses bénéfices potentiels, l’exemple de l’Allemagne peut éclairer le débat. Une réforme législative portée par le parti des Verts en 2002 et votée au Parlement fédéral supprimait l’interdiction générale de la promotion de la prostitution et permettait aux prostituées d’obtenir des contrats de travail. Dans une interview à Public Sénat, la Sénatrice et ancienne ministre Laurence Rossignol rappelle que le marché de la prostitution a été multiplié par 4 en 10 ans dans ce pays (2003-2013). La légalisation avec encadrement a entraîné en fait une forte hausse de la demande. La hausse de la demande nécessitant une hausse de l’offre, il ne semble pas que l’objectif de combattre la traite humaine en supprimant les “zones de non-droits” selon l’expression des promoteurs de la légalisation, soit atteint. Une étude approfondie datant de 2012 et portant sur 150 pays a conclu que l’effet de la légalisation de la prostitution sur la traite humaine était négatif. Selon les termes des économistes auteurs de l’étude, l’effet d’échelle, c’est-à-dire la hausse de la demande, l’emporte sur l’effet de substitution, qui verrait une préférence des clients pour des prostituées “légales” réduire la demande pour des prostituées en situation illégale. “En moyenne, les pays où la prostitution est légale expérimente des flux plus importants de traite humaine” selon les termes de l’étude.

La dignité humaine, irréductible à une approche marchande.

Les facteurs conduisant aux situations de prostitution sont complexes. L’approche choisie par la Belgique est d’inspiration néo-libérale : “laissez faire” afin que l’offre et la demande trouve un “équilibre”, la légalisation de ce “marché” solutionnant magiquement la question des trafics illégaux.

Ce choix de la Belgique va à l’opposé de celui de la France qui reste dans une approche abolitionniste. La loi du 13 avril 2016 visant à “renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées” a institué une pénalisation des clients. La notion de non-marchandisation du corps humain, entre autres, soutient la philosophie de cette loi.  La dignité humaine n’est tout simplement pas compatible avec une approche marchande. Criminaliser les atteintes à la dignité humaine, ce n’est pas favoriser des trafics, c’est fonder en droit et garantir le combat contre ces atteintes.

 

Euthanasie : fortes controverses sur l’aggravation de la loi au Québec

Euthanasie : fortes controverses sur l’aggravation de la loi au Québec

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Une nouvelle loi sur l’Assistance médicale à mourir (AMM), le projet de loi 38, a été déposée le 25 mai dernier aggravant la loi existante avec des dispositions très controversées : suppression du critère de mort prévisible, recours à l’euthanasie pour des personnes en raison de leur handicap neuromoteur ou encore suppression du libre choix des centres de soins palliatifs.

Son adoption est prévue très rapidement, le 10 juin au plus tard, date de la fin de la session parlementaire, précipitation vivement critiquée par l’opposition et les associations.

Le projet de loi visait originellement à rendre la loi québécoise conforme à la dernière évolution de la loi fédérale adoptée en 2021. Cette dernière a étendu l’euthanasie et le suicide assisté même si la mort n’est pas raisonnablement prévisible, tout en maintenant la condition liée à l’existence d’une maladie grave et incurable et au fait d’éprouver des souffrances que le patient juge lui-même insupportables.

Outre cette mesure, Il prévoit également d’autoriser une demande anticipée à mourir «  aux personnes atteintes d’une maladie grave et incurable menant à l’inaptitude ». Cela concernerait notamment des personnes atteintes d’Alzheimer, de démence, de Parkinson dans certains cas. Des associations se sont élevées contre l’absence de débat sur cette question. C’est ce que dénonce l’association Vivre dans la dignité dans un communiqué daté du 1er juin : « Il s’agit là d’une première très préoccupante. En effet, depuis le début des débats sur la question de « mourir dans la dignité » au Québec, les groupes parlementaires ont toujours eu la sagesse de donner la parole aux opposants. »

Deux mesures « sorties du chapeau ».

D’autre part, dès le lendemain de son dépôt, le gouvernement a dû retirer les articles qui rendaient admissibles à l’euthanasie les personnes atteintes d’un handicap neuromoteur (quadriplégie, paralysie cérébrale, amputation après un accident) comme le souligne la presse, mesure qui n’avait jamais été débattue au préalable.

La suppression de la « protection de conscience » des maisons de soins palliatifs qui ont actuellement le libre choix de pratiquer ou pas l’AMM en leur sein, est également extrêmement controversée. Dans un communiqué l’Alliance des maisons de soins palliatifs du Québec a demandé officiellement le retrait de cette mesure. Sur 35 maisons de soins palliatifs, 9 exercent leur libre choix de ne pas pratiquer l’euthanasie. Sa présidente, consultée par la commission parlementaire ad hoc mercredi 1er juin, espère que « les dés ne soient pas joués d’avance » et plaide pour que les maisons puissent être en harmonie avec leurs valeurs et la qualité des soins apportées aux patients en fin de vie.

En à peine 6 ans d’application, les euthanasies concernent déjà 2% des décès au Canada. Des débats sont ouverts sur la question de l’accès à l’euthanasie aux personnes souffrant de maladies mentales et aux mineurs. Ces évolutions montrent combien la porte entrouverte à l’interdit de tuer conduit à toujours plus de dérives. Ce sont aujourd’hui les associations de personnes handicapées qui dénoncent une atteinte à leur droit de vivre. Des auditions (voir en particulier les auditions du 30 mai) sont en cours au niveau fédéral.

 

Le 10 juin 2022, la loi n°38 sur la fin de vie n’a pas été soumise au vote à l’Assemblée nationale du Québec. La proposition de loi avait été introduite très tardivement dans la législature. Le ministre de la Santé, Christian Dubé, a finalement reporté l’examen devant les divergences sur un texte controversé. Il devrait être mis à nouveau à l’ordre du jour de l’Assemblée à l’automne prochain, après les élections législatives du 3 octobre 2022.
Suicide : augmentation inquiétante chez les jeunes

Suicide : augmentation inquiétante chez les jeunes

suicide jeunes

Les dernières données montrent une augmentation inquiétante de suicides chez les jeunes, plus particulièrement des filles en 2020 et 2021, avec une persistance dans les premiers mois de 2022.

Avec près de 9 200 décès par suicide par an, la France présente un des taux de suicide les plus élevés d’Europe.

La période de pandémie a fait apparaître un phénomène en croissance de plus de 22% chez les jeunes femmes en 2021. Les professionnels appellent à la mobilisation de tous pour enrayer le phénomène.

Sur les 3 premiers mois de de 2022, Santé Publique France a enregistré 6418 passages aux urgences , en hausse de 27% sur la même période en 2021.

Les filières d’accueil psychiatriques se révèlent sous dimensionnées comme le rapporte le journal Libération qui a consacré un dossier sur cette question.

Comment expliquer ce phénomène ? Comme le rapporte un article paru dans le Monde, “la crise sanitaire et le climat anxiogène qu’elle a engendré ont particulièrement affecté la santé mentale des enfants, des adolescents et des jeunes adultes dans la plupart des pays ». Elle a sans doute rehaussé le niveau de vulnérabilité individuelle. D’autres facteurs augmentent le risque suicidaire : le rôle des difficultés vécues dans l’enfance et l’adolescence (violence physique, sexuelle ou psychologique), les problèmes psychiatriques (dépression, troubles anxieux et alimentaires), la consommation de drogue ou d’alcool, l’impulsivité, une rupture amoureuse, la pression scolaire ou le harcèlement à l’école et via les réseaux sociaux.

Si le nombre absolu de suicides est plus important pour les hommes de 45-54 ans, c’est pour la classe d’âge des 25-34 ans que l’importance des décès par suicide, relativement aux autres causes de mortalité, est la plus forte : le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les jeunes.

 

Les singularités du suicide à l’adolescence

Le 3ème rapport de l’Observatoire national du suicide (ONS) souligne en 2018 les interactions entre comportements suicidaires et processus d’adolescence.

L’adolescence est une période marquée par un entre-deux : l’adolescent n’est plus un enfant et pas encore un adulte. La complexité de cette transition est aujourd’hui augmentée du fait d’une délimitation de l’adolescence moins nette qu’auparavant. La sortie plus rapide de l’enfance et le passage plus chaotique à l’âge adulte brouillent le début et la fin de l’adolescence. Chez les jeunes en souffrance les troubles des conduites et l’inadaptabilité sociale sont beaucoup plus précoces que par le passé, en particulier les violences contre soi ou contre les autres et l’exposition de soi par le biais d’internet. Les jeunes ne sont pas plus nombreux à aller mal à l’adolescence, mais ceux qui sont en souffrance, vont mal plus tôt et sans doute de façon plus marquée.

Les pratiques numériques – qui jouent aujourd’hui un rôle prépondérant dans la vie de la plupart des adolescents – ont parfois pour effet de réduire leur durée de sommeil, de diminuer leur activité physique et de les surexposer aux médias. Or, ce trio de facteurs est associé fortement aux idées suicidaires et aux symptômes dépressifs et anxieux.

De plus, l’usage des technologies numériques creuse les inégalités entre les jeunes face au suicide. Il présente en effet un atout pour les adolescents qui évoluent dans un environnement familial et scolaire sécurisant et qui vont bien, mais constitue un espace qui expose les plus vulnérables à la souffrance et au risque suicidaire.

Le risque de « contagion » des comportements suicidaires chez les jeunes peut, dans certaines circonstances particulières, être amplifié par le biais des outils numériques, notamment des réseaux sociaux qui peuvent véhiculer des informations et des images spectaculaires ou romancées du suicide. Les jeunes semblent ainsi particulièrement sensibles à cet effet d’imitation, notamment lorsqu’ils sont confrontés au suicide d’un pair.

« La conjonction de la place plus importante des mondes virtuels, de la diminution du rôle sécurisant des familles et de l’exigence de performance, associée aux changements psychiques et physiques spécifiques à l’adolescence, doit ainsi être interrogée comme facteur aggravant du mal-être et comme éventuelle contribution aux conduites suicidaires chez les adolescents. » conclut le rapport de l’observatoire national du suicide.

 

La prévention du suicide

Chez les jeunes, les usages de substances psychoactives, le décrochage scolaire et les symptômes dépressifs pourraient être utilisés comme des indicateurs pour le repérage de profils d’adolescents présentant un risque accru de conduites suicidaires.

Après des années d’attente, un plan de prévention lancé par les pouvoirs publics en 2018 a vu la mise en place de la ligne d’écoute 3114, numéro national de prévention du suicide. Près de 70 000 appels ont été reçus depuis. Il est prévu de renforcer l’adaptation aux jeunes du dispositif de suivi VigilanS, créé en 2015 dans les Hauts-de-France

D’autres actions pour éviter la contagion sont développées, avec des programmes comme Papageno pour contrer « l’effet Werther » qui désigne le phénomène de suicide mimétique mis en évidence en 1982 par le sociologue américain David Philipps. L’Organisation Mondiale de la Santé, en partenariat avec l’Association internationale pour la prévention du suicide (IASP) a publié des recommandations, en particulier à l’attention des médias : il s’agit entre autres d’éviter le langage qui sensationnalise et normalise le suicide, ou qui le présente comme une solution aux problèmes ; de ne pas donner de détails sur le lieu et la méthode utilisée dans un suicide ou une tentative de suicide ; et de fournir des informations sur les ressources d’aide.

Nous constatons depuis plusieurs années que la médiatisation de revendications de « suicide assisté » par des lobbies ou au travers d’affaires médiatiques produit un effet de contagion, comme Alliance VITA en a témoigné lors de son audition auprès du Comité consultatif national d’éthique en octobre 2021. Comment est-elle compatible avec la prévention de tous les suicides ? Une étude intitulée « Euthanasie et suicide assisté chez les patients psychiatriques : une revue systématique de la littérature » souligne que le nombre de patients psychiatriques demandant l’euthanasie ou le suicide assisté dans le monde ne cesse d’augmenter et conclut : « Étant donné que la prévention du suicide reste une importante priorité de santé publique, il est nécessaire de s’assurer que la demande d’euthanasie ou de suicide assisté n’est pas simplement un moyen (très efficace) de réaliser un suicide. Actuellement, il existe de nombreuses preuves que les patients qui demandent/reçoivent l’euthanasie ou le suicide assisté sont très similaires à ceux qui meurent par suicide. »

Nouvelle loi bioéthique : les premiers chiffres de l’AMP

Nouvelle loi bioéthique : les premiers chiffres de l’AMP

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La loi bioéthique d’aout 2021 a introduit de nombreuses modifications dans le domaine de l’Assistance Médicale à la Procréation (AMP). Désormais, l’accès à l’AMP n’est plus relié à la condition médicalement constatée d’infertilité. Les femmes seules ou en couples de femmes peuvent demander à bénéficier d’un don de sperme ou d’embryon. L’autoconservation des gamètes (sperme et ovocytes) est ouverte à tous, sans raison médicale. Désormais, les enfants nés de don anonyme auront accès à des informations sur leur donneur. Un comité national de suivi de son application a été mis en place par l’Agence de la biomédecine. Le 16 mai 2022 s’est tenue leur troisième réunion à l’issue de laquelle il a communiqué les premiers chiffres montrant l’impact de la loi. Ces données sont basées sur une enquête menée dans les centres autorisés à l’activité de don de spermatozoïdes sur 3 mois, entre le 1er janvier et le 31 mars 2022.

 

Concernant la PMA et les femmes seules et aux couples de femmes

Il y a eu 5126 demandes de consultation pour don de sperme par 47% de couples de femmes et 53% de femmes seules. 53 tentatives d’AMP avec don de spermatozoïdes ont été réalisées au bénéfice de ces nouveaux publics. Le délai moyen d’attente est de 15 mois environ. Les règles d’attribution viennent d’être clarifiées par décret. Celle-ci se fait dans l’ordre chronologique d’arrivée des demandes validées. Il est précisé dans ce décret que certains critères ne peuvent exclure, prioriser ou restreindre l’accès au don, par exemple : le fait d’être marié ou non, d’avoir déjà des enfants ou non, l’orientation sexuelle du ou des demandeurs.

Sur l’année 2019, les données de l’ABM montrent qu’il y a eu 409 naissances par don d’ovocyte (pour 2100 tentatives), 987 par don de sperme (pour 4814 tentatives) et 37 par don d’embryon (pour 151 tentatives) au sein de couples composés d’un homme et d’une femme, en âge de procréer et souffrant d’une infertilité médicalement constatée.

Par ailleurs, chaque couple ou femme seule peut choisir l’option « appariement » ou non. Entendre par là une demande de sélection de gamètes ou d’embryons selon des critères physiques tels que la couleur de la peau, des yeux, des cheveux. Cet appariement, précise le décret, est réalisé dans la mesure du possible à la demande de chaque bénéficiaire.

 

Concernant l’autoconservation des ovocytes et du sperme sans raisons médicales

La mise en banque de ses ovocytes constitue un processus complexe, lourd (stimulation ovarienne, ponction sous anesthésie générale) non dénué d’effets secondaires et n’assurant pas la garantie d’une maternité ultérieure. 2553 femmes ont déjà fait une demande de consultation en seulement 3 mois contre seulement 47 hommes.

 

Concernant le droit aux origines

A compter de septembre 2022, à leur majorité, les enfants nés de dons anonymes auront le droit d’accéder à l’identité du donneur à leur majorité, ainsi qu’à des données non identifiantes (âge, situation familiale et professionnelle au moment du don, motivations du don) des donneurs de gamètes ou d’embryons à l’origine de leur vie. Un registre national est en cours de création. Il sera aussi géré par l’Agence de la biomédecine. Pour toutes les personnes qui ont procédé à un don avant le changement de la loi, en pensant que leur anonymat serait protégé à vie, ils peuvent se manifester pour donner leur accord pour la transmission de toutes ces données aux enfants qui en feront leur demande. S’ils ne le font pas (par ignorance de ce changement de cadre législatif ou par souhait de rester anonymes) leurs données ne seront pas communiquées aux personnes nées de leur don et les gamètes éventuellement restant en stock seront détruits.

Tout au long du processus législatif, Alliance VITA n’a eu de cesse d’expliquer les enjeux sanitaires, éthiques et juridiques au regard de ces basculements majeurs.

Dès avant la modification de la loi qui réservait l’accès de la PMA aux personnes confrontées à une infertilité médicalement constatée, Il y avait plus de demandes d’accès aux dons que de donneurs.

La rareté des donneurs témoigne qu’il n’est pas si simple de procéder à des dons de gamètes, car en transmettant une part de son patrimoine génétique c’est sa paternité ou sa maternité potentielle qui est en jeu.

C’est pourquoi Alliance VITA a plaidé pour de véritables recherches sur les causes de l’infertilité, notamment comportementales et environnementales, et sa prévention ainsi que pour une recherche active sur la restauration de la fertilité proprement dite, pour limiter le recours à la PMA et en particulier la PMA avec donneurs.

Aujourd’hui, Il y a donc, et c’était prévisible, une pression exercée pour que des centres à but lucratif voient le jour. Avec derrière, un réel risque de basculer dans un marché de la procréation, déjà à l’œuvre dans d’autres pays.

L’ouverture à l’autoconservation des ovocytes est un procédé qui crée et instrumentalise l’anxiété des femmes à ne pas pouvoir avoir d’enfant, tout en les encourageant à repousser à plus tard leur grossesse, instituant ainsi une perte de chance. Le passage par la FIV étant rendu indispensable, leur faible taux de succès se voit en plus aggravé lorsque l’âge avance. Cette fausse « assurance maternité » crée en réalité un nouveau marché sur le ventre des femmes.

Enfin, il convient de rappeler que notre pays a ratifié la Convention internationale des droits de l’enfant. Un texte à valeur juridique internationale et contraignant – supérieur aux lois nationales – qui dispose le droit pour tout enfant, dès sa naissance, à un nom, une nationalité et, dans la mesure du possible, de connaître ses parents et d’être élevé par eux. Cette PMA dite « pour toutes » qui organise la conception d’un enfant d’une manière qui fait volontairement disparaitre le père en lui permettant un simple accès à “l’identité” de son « géniteur » et seulement à sa majorité rentre en contradiction avec ce droit international, ratifié par la France, qui vise à protéger les enfants.

 

Pour aller plus loin :

PJL bioéthique : Décryptage après la nouvelle lecture à l’Assemblée nationale
Plus qu’un don de gamète, une hérédité
Congeler ses ovocytes ? On n’épargne pas sa vie…
Connaître ses origines

L’intelligence artificielle et le cerveau – Dr. Grégoire Hinzelin

L’intelligence artificielle et le cerveau – Dr. Grégoire Hinzelin

L’intelligence artificielle est un esprit de synthèse hyperperformant qui analyse, classe et accumule les données. L’intelligence humaine ressent, crée, joue avec les données et oublie l’inutile pour une performance moins puissante mais bien plus intuitive. L’IA est un outil d’exception qui sait lire les radios, doser les médicaments, aider le vivant en l’analysant à une échelle qu’aucun médecin humain ne peut atteindre. Elle est plus performante pour certains diagnostics, thérapeutiques, chirurgies. On peut ainsi dire qu’elle est, au moins dans certains domaines, un meilleur médecin.

Mais le diagnostic repose pour une bonne partie sur la communication non verbale, les gestes du patient et certains traitements marchent mieux si ce dernier est informé, rassuré. Ainsi, la médecine de l’IA nous invite à remettre la relation humaine du médecin avec son malade au centre du jeu.

 

 

Troubles dans le genre – Christian Flavigny

Troubles dans le genre – Christian Flavigny

Des discours banalisés prétendent qu’on pourrait se passer du réel biologique, de la différence sexuelles entre hommes et femmes au profit de singularités choisies fondées sur les seuls “ressentis”. Ces discours mensongers relevant de l’idéologie sont transmis sur les réseaux sociaux où de nombreux adolescents en mal d’identité viennent chercher des solutions à leur malaise.

Au nom de l’“autodétermination” – véritable slogan qui séduit tous les progressistes – je suis libre de choisir le corps que je veux – des enfants et des adolescents sont convaincus qu’ils peuvent changer de sexe à l’aide de traitements hormonaux voire de chirurgies mutilantes.

 

 

La liberté, une pure autodétermination ? – Pascal Jacob

La liberté, une pure autodétermination ? – Pascal Jacob

Notre volonté en son libre arbitre ne se donne pas à elle-même sa propre loi. Ce n’est pas elle qui décide de vouloir ce qui est bon. Or, en vérité, la liberté suppose de savoir que cette liberté ne s’épuise pas dans la simple possibilité de réaliser tous nos désirs. Mieux que libre de suivre nos impulsions, nous sommes libres pour un bien qui nous dépasse et qui est le nôtre, à commencer par le bien commun de la communauté humaine.