Loi bioéthique : saisine du Conseil constitutionnel

Loi bioéthique : saisine du Conseil constitutionnel

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80 députés, LR et UDI, ont saisi le Conseil Constitutionnel (CC) sur le projet de loi bioéthique adopté dans sa version définitive le 29 juin 2021. Ils dénoncent un « scientisme sans limite ».

Les critiques portées sur le texte se concentrent sur plusieurs axes clairement « bioéthiques » et n’aborde pas les questions de société. En l’occurrence, l’ouverture de la procréation assistée à tous, sans raison médicale, n’est pas abordée. Un article du Figaro souligne que « les juristes connaissent la réticence du Conseil constitutionnel à s’immiscer dans les questions de société ».
Cette saisine met l’accent sur l’importance des limites constitutionnelles autour de la protection de l’être humain et de la dignité humaine en posant des limites à la recherche car la science ne peut être le seul déterminant de l’éthique.

Parmi les axes retenus par la saisine, deux principaux :

1er axe : la recherche sur l’embryon

En effet, celle-ci contredit la limite éthique posée par la loi elle-même, notamment par l’article 16 du code civil qui pose le principe que « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie. »

Or, la loi banalise aujourd’hui toujours plus l’encadrement de la recherche sur l’embryon et sur les cellules souches issues d’embryons et autorise la création d’embryons chimères animal-homme ainsi que la modification génétique d’embryons humains. Et par ailleurs, la loi ouvre la possibilité de cultiver in vitro l’embryon humain jusqu’à 14 jours, date des premières ébauches du système nerveux de l’être humain en cours de développement. Ces « nouveautés » législatives permettant une instrumentalisation accrue de l’embryon humain sont donc autorisées malgré le respect dû à l’embryon humain. Ces modifications législatives d’ampleur ont été adoptées « sans que le respect de la dignité de l’être humain ne s’oppose en rien aux intérêts de la recherche », expliquent les députés qui n’hésitent pas à décrire ces évolutions comme étant un « changement complet de paradigme ».

Aujourd’hui, force est de constater que dans le domaine de la recherche, l’animal, y compris sous forme fœtale ou embryonnaire, est désormais mieux protégé que l’embryon humain lui-même . Quant au principe de précaution qui existe pourtant de manière constitutionnelle pour protéger l’environnement, pourquoi ne s’appliquerait-il pas à l’être humain ?

2ème axe : la protection de la loi contre toute forme d’eugénisme

En effet, la porte ouverte à la modification génétique des embryons humains est une rupture inédite qui amorce l’ère de l’humain génétiquement modifié. « En autorisant la création d’embryons transgéniques sans en fixer les objectifs ni les limites, le dispositif porte atteinte à l’intégrité de l’embryon et à l’intégrité du patrimoine génétique, donc de l’espèce humaine. Il porte atteinte à la prohibition de l’eugénisme » soulignent les auteurs de la saisine. Ils rappellent que « la recherche fondamentale a vocation à passer un jour au stade clinique ».

Il faut rappeler qu’en 1994, à l’occasion de la première loi de bioéthique, le Conseil constitutionnel a jugé que les principes de « primauté de la personne humaine, le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie, l’inviolabilité, l’intégrité et l’absence de caractère patrimonial du corps humain ainsi que l’intégrité de l’espèce humaine » tendent à assurer le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine . Plus que jamais, ces valeurs constitutionnelles doivent être réaffirmées et surtout leur application garantie.

La saisine révèle d’autres incohérences graves de ce texte. L’article 20 permet à une femme enceinte de ne pas transmettre des informations médicales concernant la santé de son enfant à naitre à son conjoint ou sa conjointe si celle-ci ne le souhaite pas. Mais s’il s’agit d’un enfant né par don de sperme, le donneur, lui, en sera automatiquement informé s’il s’agit d’une anomalie génétique. Alors que le père, ou l’autre femme du couple, pourrait être tenu dans l’ignorance. Cette rupture d’égalité va contre un régime de responsabilité qui s’adresse aux parents et méconnaît les devoirs mutuels des conjoints envers leurs enfants.

Le Conseil constitutionnel dispose d’un mois pour statuer. Sauf si le gouvernement, qui a annoncé son intention de publier certains décrets d’application très rapidement, notamment celui de la PMA pour toutes, demande l’urgence au Conseil constitutionnel. Dans ce cas, le délai pourrait être raccourci à une semaine.

 

GPA : le nouvel objectif des partisans à la PMA dite “pour toutes”

GPA : le nouvel objectif des partisans à la PMA dite “pour toutes”

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Un faisceau d’informations récemment publiées remet la GPA sur le devant de la scène médiatique en France.

D’une part, la loi de bioéthique est à peine votée que les partisans de la GPA ont annoncé, sur différents canaux, que celle-ci était leur nouvel objectif après la PMA dite « pour toutes ». L’argument standard avancé reste celui de l’égalité de tous devant la « parentalité », conçue comme un droit que la technique rend disponible. Ainsi, dans un éditorial de Libération le 29 juin, le journaliste explique qu’il faut que « le désir d’enfant soit universellement satisfait ».

Pourtant, à l’occasion des débats sur la loi bioéthique, plusieurs personnalités politiques de toutes sensibilités partisanes ont affirmé leur opposition à la GPA, conscientes qu’en elle-même cette pratique est contraire à l’éthique.

Sur ce sujet, Arte présentait un documentaire le 7 juillet sur les pratiques de GPA dites « non commerciales » en Belgique. Alors que la France et l’Allemagne ont interdit cette pratique, elle est tolérée en Belgique, ce qui crée un effet de passage de frontière de quelques couples français. Cette situation de course au moins-disant éthique reçoit l’assentiment de certains acteurs médiatiques français.

D’autre part, la crise sanitaire internationale que nous traversons a mis en lumière de nombreux drames liés à la GPA.

Des « parents d’intention » incapables de venir chercher le bébé, des enfants bloqués dans des appartements loués en catastrophe suite à la fermeture des frontières, ou confiés à des nourrices, la liste s’allonge de situations dramatiques liés à cette pratique. La Russie, pays où la GPA est autorisée y compris pour les étrangers, compte environ 150 cliniques la proposant. L’encadrement juridique, avec une autorisation votée dès 1993, et les coûts bas favorisaient cette pratique, que la fermeture des frontières a fortement perturbée. Suite à ces situations tragiques, une proposition de loi pour interdire les GPA internationales a été déposée à la Douma, par le parlement russe. La proposition de loi fait explicitement référence aux drames évoqués plus haut, allant jusqu’à la mort de nourrissons.

Si la Russie votait cette proposition contre la GPA internationale, elle rejoindrait d’autres pays comme l’Inde, le Népal, la Thaïlande ou encore le Cambodge qui sont revenus sur leurs législations ces dernières années.

Fin de vie : le CCNE lance un groupe de travail

Fin de vie : le CCNE lance un groupe de travail

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Dans un communiqué de presse du 25 juin, le Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE) annonce le lancement d’un groupe de travail sur les questions de fin de vie.

Ce groupe sera animé par trois membres : Régis Aubry, Florence Gruat et Alain Claeys, le co-auteur de la loi de 2016 créant de « nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie ».

Le CCNE rappelle qu’à la fin des Etats Généraux de la bioéthique, il s’était prononcé contre la modification de cette loi. Avec cette initiative, le CCNE entend prendre une place dans les débats, alors que le Sénat et l’Assemblée Nationale ont discuté plusieurs propositions de loi promouvant l’euthanasie. Lors des débats au Sénat, Olivier Véran avait annoncé le lancement d’un plan de développement des soins palliatifs, et avait argumenté pour un bilan de l’application du dispositif législatif actuel avant toute modification. Ce plan de soins palliatifs annoncé en avril n’a toujours pas été lancé.

Le CCNE souhaite aborder à la fois un bilan des dispositifs existants et les « situations exceptionnelles, telles les maladies neuro-végétatives à évolution lente, auxquelles le droit est confronté ».

Avortement : le Parlement européen outrepasse ses compétences

Avortement : le Parlement européen outrepasse ses compétences

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Le Parlement européen, réuni en plénière le 24 juin 2021, a adopté la proposition de résolution très controversée « sur la situation concernant la santé et les droits génésiques et sexuels dans l’Union, dans le cadre de la santé des femmes » qui entend notamment restreindre la clause de conscience des professionnels de santé sur l’avortement. La proposition de résolution issue du rapport présenté par le député slovaque Preda Fred Matic, présente, de façon erronée, l’avortement comme « un droit », lié à la santé de la femme, dont l’accès devrait être encouragé par les États membres, et ce sans prendre en compte les dimensions éthique, sociale et culturelle de l’avortement.

Deux propositions alternatives n’ont pas été adoptées. Une proposition présentée par le groupe ECR (Conservateurs et Réformistes) rappelait que « la formulation et la mise en œuvre de politiques relatives à la santé et à l’éducation sexuelles, à la reproduction et à l’avortement relèvent de la compétence législative des États membres ». Elle aurait eu le mérite de clarifier la réelle compétence européenne qui tend en ces matières à outrepasser la légitime autonomie des Etats membres.

La proposition alternative présentée par le groupe PPE (Parti populaire européen) rappelait le principe de subsidiarité des États membres en cette matière et distinguait opportunément « santé sexuelle et génésique » et avortement. Ses préconisations étaient plus en lien avec la santé des femmes en matière de maternité et de procréation pour assurer un soutien adapté à la maternité, ou encore prévenir l’infertilité et la violence faite aux femmes. D’autre part, le texte rappelait clairement le droit à l’objection de conscience en matière d’avortement.

Comme Alliance VITA l’a rappelé lors de l’adoption de la résolution Matic, en commission, en mai dernier: « L’expression « santé et droits sexuels et génésiques » est foncièrement ambiguë. Sans claire définition, elle est notamment utilisée dans ce contexte pour banaliser, au nom de la santé, la question délicate de l’avortement, pratique qui ne relève pas de la compétence de l’Union européenne ».

Si l’Union Européenne est compétente en matière de droits fondamentaux, force est de constater que l’accès à l’avortement ne constitue pas un droit fondamental en tant que tel. A l’inverse, la résolution entend restreindre de façon illégitime et disproportionnée le droit à l’objection de conscience des soignants, reconnu pourtant clairement comme une liberté fondamentale par le droit européen, en particulier par l’article 10.2 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE.

Le véritable défi qui doit mobiliser les élus en France et en Europe est celui de la prévention de l’avortement. En France, les données sur l’IVG ont été appariées avec des données fiscales, démontrant ainsi une corrélation nette entre niveau de vie et IVG : il en ressort que les femmes aux revenus les plus faibles y ont davantage recours. L’avortement peut s’avérer un marqueur d’inégalité sociale qui doit alerter les pouvoirs publics en France et en Europe.

D’autre part, une politique commune de lutte plus explicite contre le trafic humain que constitue la Gestation pour autrui (GPA), pratique plusieurs fois condamnée par les textes européens, aurait eu toute sa place dans ce texte. Les élus européens devraient être des précurseurs de la lutte contre un marché de la procréation qui bafoue gravement le droit des femmes et des enfants.

Ce texte, qui n’a pas de valeur contraignante, pose cependant de nombreuses questions quant à sa légitimité.

L’absence de compétence de l’Union européenne (UE) à l’égard de l’avortement a été confirmée à plusieurs reprises par les institutions européennes (Parlement européen, Commission européenne et Conseil européen). Le 30 avril 2012, le Commissaire européen chargé de la Santé, John Dalli, répondait à une question posée par des députés (E-002933/2012) : « Compte tenu de la dimension éthique, sociale et culturelle de l’avortement, il appartient aux États membres d’élaborer et de faire appliquer leurs politiques et leur législation en la matière. La Commission n’entend pas compléter les politiques nationales de santé publique dans ce domaine ».

 

Le défi du vieillissement au cœur des futures élections 2022

Le défi du vieillissement au cœur des futures élections 2022

Le défi du vieillissement au cœur des futures élections

 

Le défi du vieillissement est au cœur des futures élections. En effet, les annonces d’une prochaine loi Grand âge et autonomie se succèdent depuis 2017. Promesse de campagne annoncée par le président de la République Emmanuel Macron, besoins d’accompagnement des personnes en institution et à domicile exacerbés par la crise sanitaire, les reports successifs de cette réforme provoquent l’inquiétude.

Au cours du mois de juin, la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) a de nouveau réuni les représentants des fédérations du secteur pour échanger sur trois pistes de travail : l’évolution des Ehpad, l’aide à domicile et les droits fondamentaux des adultes en situation de vulnérabilité.

Quelques pistes pour réformer les droits des adultes vulnérables

La protection des personnes et leurs droits fondamentaux ont été étudiés le 14 juin dernier. La DGCS souligne que la défense de ces droits participe à la politique de l’aide à l’autonomie puisqu’il “s’agit de permettre à chacun d’être le plus pleinement capable d’exercer ses droits, de vivre ses projets et de participer à la vie sociale“.

Plusieurs pistes sont envisagées :

  • réaffirmer et renforcer les droits fondamentaux des personnes accompagnées (recherche systématique du consentement, droits de visite) ;
  • inscrire la définition de la maltraitance dans le Code de l’action sociale et des familles ;
  • formaliser une politique de prévention et lutte contre la maltraitance dans les projets d’établissement et de service et prévoir pour les professionnels un temps de réflexion sur l’éthique et la déontologie ;
  • préciser la définition de la profession de mandataire judiciaire à la protection des majeurs et réformer leur formation ;
  • instaurer pour les mandataires judiciaires à la protection des majeurs (MJPM) une obligation de signalement aux autorités administratives et judiciaires ;
  • renforcer les obligations de transparence sur les tarifs d’hébergement en EHPAD et en résidence autonomie…

Plusieurs acteurs du secteur semblent considérer ces problématiques – évolution des EHPAD, aide à domicile, droit fondamentaux des adultes vulnérables– comme les piliers fondateurs d’une future loi qui serait présentée en juillet et débattue à l’automne.

Par ailleurs, une enquête IFOP commandée par le Synerpa ( Syndicat National des Établissements & Résidences Privés et Services d’Aide à Domicile pour Personnes Âgées) et réalisée du 19 au 25 mai 2021, révèle que :

  • 74 % des Français estiment que les candidats aux élections (régionales, présidentielle et législatives) n’abordent pas suffisamment la question de l’accompagnement des seniors dans leur vieillissement.
  • 60 % des Français estiment que le gouvernement devrait mettre en œuvre la loi Grand âge et autonomie rapidement (par exemple en septembre 2021).

Les Français mettent en avant deux priorités sur lesquelles les candidats devraient s’engager pour l’avenir, dans la perspective de l’élection présidentielle de 2022 : 59% d’entre eux souhaitent que les candidats favorisent le développement des services d’aide à domicile aux personnes âgées ; 48% des Français aimeraient la création d’une aide financière à l’hébergement en EHPAD en fonction des ressources.

Ces préoccupations des Français font écho aux conclusions du rapport Libault intitulé « Grand âge, le temps d’agir », issu d’une concertation citoyenne de 414.000 Français entre octobre 2018 et janvier 2019.

Les candidats aux futures élections prendront-ils au sérieux cette attente des Français : affronter la réalité démographique de la hausse du nombre de personnes âgées dépendantes et la nécessité de faire évoluer le regard sur le grand âge ?

 

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