Les dangers du Rapport fin de vie

Les dangers du Rapport fin de vie

La mission sur la fin de vie des deux députés – Alain Claeys, PS, et Jean Leonetti, UMP – s’est achevée par la remise d’un rapport au président de la République le 12 décembre 2014, avec comme mesure principale la création d’un « droit à une sédation profonde et continue jusqu’au décès ». Cette sédation deviendrait obligatoire pour le médecin, y compris lorsqu’une personne qui n’est pas en fin de vie décide d’arrêter tout traitement et, de ce fait, engage son pronostic vital à court terme.

Alliance VITA avait été auditionnée le 24 septembre dernier par la mission. A cette occasion, elle avait notamment souligné trois points essentiels :

1/ les dangers de transformer la pratique normale de la sédation – acte d’endormir un patient pour soulager ses douleurs, en principe temporaire et réversible – en une sorte de droit où le patient pourrait imposer au médecin de lui faire perdre conscience jusqu’à la mort.

2/ le statut de l’alimentation et de hydratation artificielles, contestant qu’elles soient forcément considérées comme des « traitements » qu’on peut interrompre en vue de mettre fin à la vie d’une personne.

3/  la priorité à donner au développement des soins palliatifs et à une juste utilisation des directives anticipées, celles-ci ne devant pas transformer le médecin en un simple prestataire de service devant se contenter d’ « exécuter les ordres » du patient.

Les conclusions du rapport Claeys-Leonetti renforcent les inquiétudes d’Alliance VITA sur ces points essentiels, qui ont été particulièrement mis en lumière ces dernières semaines par le collectif Soulager mais pas tuer dont elle fait partie. La notion de « sédation profonde et continue jusqu’au décès » nécessite en priorité d’être expliquée et clarifiée, en prenant l’exemple de situations médicales concrètes. Avant tout débat législatif, l’opinion publique doit être informée de la réalité des dérives euthanasiques qui seraient liées à cette pratique.

Le 12 décembre, François Hollande avait annoncé, lors de la remise du rapport, qu’un débat parlementaire sans vote aurait lieu courant janvier. Celui-ci vient d’être fixé au 21 janvier 2015. Ce débat sera suivi, à une date non encore déterminée, par l’examen au Parlement d’une proposition de loi sur ce sujet, vraisemblablement celle proposée dans le rapport Claeys-Leonetti.

Dans les prochaines semaines, Alliance Vita entend alerter les politiques et le grand public, en coordination avec le collectif Soulager mais pas tuer, sur les risques réels d’une interprétation euthanasique d’un éventuel “droit à une sédation profonde et continue jusqu’au décès”.

Rapport de l’Observatoire du suicide

L’Observatoire national du suicide (ONS), créé le 9 septembre 2013, a rendu public son premier rapport en décembre 2014, intitulé “Suicide, état des lieux des connaissances et perspectives de recherche”.

Les deux premières missions de l’ONS ont été de recenser les outils et les données disponibles sur les suicides et les tentatives de suicide, en vue d’améliorer le système de surveillance existant et rendre la prévention plus efficace.

La France connaît un taux de suicide parmi les plus élevés d’Europe. Un décès sur 50 est un suicide. En 2011, 11 400 décès par suicide ont été enregistrés, et on estime le nombre de tentatives de suicide à 190 000 par an.

Deux tiers des tentatives de suicide concernent des femmes, mais elles aboutissent moins souvent au décès que pour les hommes : le taux de suicide est trois fois supérieur chez les hommes que chez les femmes.

Le taux de décès par suicide augmente fortement avec l’âge et un tiers de ceux qui se suicident ont plus de 60 ans.  En revanche, la part des décès dus au suicide est nettement plus élevée chez les 15-24 ans, représentant 16% du total des décès de cette tranche d’âge. Globalement les taux de décès par suicide ont diminué de 25% entre 1990 et 2010.

Le rapport met en lumière des inégalités sociales et régionales face au suicide : les agriculteurs et ouvriers ont un risque deux à trois fois plus élevé que les cadres de décéder par suicide, et les régions de la Bretagne, Basse-Normandie, Nord-Pas-de-Calais et Champagne-Ardenne sont les plus touchées. Il existe également des études permettant d’approcher le risque suicidaire auprès de populations spécifiques : les adolescents, les détenus, les personnes sans domicile.

Enfin le rapport s’intéresse aux actions de prévention du suicide et au comportement suicidaire. Trois types d’actions paraissent efficaces : la réduction des moyens létaux, le maintien du contact et la mise en place de lignes d’appel. Une recommandation de ce rapport est d’améliorer le suivi des suicides et des tentatives du suicide. En effet, parmi les facteurs de risque, une tentative de suicide antérieure constitue le facteur le plus important.

Les membres de l’Observatoire partagent la conviction que le suicide n’est pas une fatalité, que sa prévention constitue un enjeu de santé publique majeure. Ils considérent que la société se doit de proposer à ses membres d’autres options que celle qui consiste à mettre fin à ses jours. Toutefois l’ensemble des questions éthiques associées à la prévention du suicide ( frontière entre prévention et prise en charge de la personne ) fera l’objet de travaux ultérieurs.

Tugdual Derville décrypte le rapport Claeys-Leonetti pour Soulager mais pas Tuer

Tugdual Derville décrypte le rapport Claeys-Leonetti pour Soulager mais pas Tuer

Suite à la remise officielle du rapport Claeys/Leonetti au Président de la République, vendredi 12 décembre, Tugdual Derville, délégué général d’Alliance Vita, et porte-parole du colle Soulager mais pas tuer“, s’est exprimé auprès des médias sur le danger de la sédation, mettant en garde contre une “euthanasie masquée”.  

DÉPÊCHE AFP (reprise par de nombreux médias)

Pour le porte-parole de Soulager mais pas tuer, Tugdual Derville, également porte-parole de La Manif pour tous, “l’interdit de tuer est fondateur de la confiance entre soignants et soignés” et la proposition des deux députés, même si elle ne parle pas d’euthanasie introduit un “risque de tour de passe-passe” entre soulagement profond et mort.  

LE MONDE : « On a toujours été hostiles à une interprétation extensive de la loi Leonetti », déclare Tugdual Derville, évoquant une « pente glissante ». Pour lui,« systématiser un droit à la sédation terminale, c’est prendre le risque de l’euthanasie déguisée ».

Dans l’après-midi, le collectif a publié un communiqué dans lequel il rappelait qu’il inviterait « les Français à descendre dans la rue s’il se confirme que l’interdit de tuer est remis en cause ».

Lire l’intégralité de l’article  

LE FIGARO : «Rendre les directives anticipées contraignantes, c’est prendre le risque de mettre à mal le dialogue soignant/soigné. Il ne faut pas faire des médecins les exécuteurs de prescriptions des patients, avertit Tugdual Derville, délégué général d’Alliance Vita et porte-parole du nouveau mouvement anti-euthanasie «Soulager mais pas tuer».

Une digue importante est en train de sauter. Cette proposition lève l’interdit de tuer par un artifice, avec la conjonction de la sédation, de l’arrêt de l’alimentation et de l’hydratation. Il s’agit bien d’administrer la mort. C’est gravissime de mélanger des sédations légitimes et celles qui seront euthanasiques. Le risque, c’est de répondre à l’angoisse des Français sur la mort par la promesse d’une anesthésie générale. On fait croire que mourir en relation avec ses proches est devenu insupportable.»

Lire l’intégralité de l’article  

LE GENERALISTE : Parmi les associations anti-euthanasie, le mouvement “Soulager mais pas tuer” critique le recours à une “sédation terminale jusqu’à la mort” qui “s’apparente à une euthanasie masquée”. Pour le porte-parole de cette association, Tugdual Derville, “l’interdit de tuer est fondateur de la confiance entre soignants et soignés” et la proposition des deux députés, même si elle ne parle pas d’euthanasie introduit un “risque de tour de passe-passe” entre soulagement profond et mort.

Lire l’intégralité de l’article LA VIE : « Arrêter la nutrition et l’hydratation, qui sont des soins, c’est provoquer dans un délai rapide une fin qui aurait être plus longue, alors que pendant cette fin, le malade a besoin de tous nos soins », déclare ainsi Tugdual Derville, le secrétaire général d’Alliance Vita. 

Pour « Soulager mais pas tuer », le mouvement de contestation dont il est le fer de lance, il y a danger, notamment à partir du moment où les dispositifs contraignants s’articulent entre eux. « Les directives anticipées d’un côté, la possibilité de l’autre d’interrompre l’alimentation et l’hydratation, et la systématisation de la sédation, cela constitue de fait un cocktail qui permet d’obtenir la mort. Nous y voyons de l’euthanasie déguisée », dénonce ainsi Tugdual Derville, qui voit là le renforcement de ce qui était « une dérive de la loi Leonetti »« Au moment où le basculement est attesté publiquement, nous disons ‘attention à la pente glissante’ ! » 

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FAMILLE CHRETIENNE : « Nous sommes face à un risque d’euthanasie qui ne dit pas son nom, affirme Tugdual Derville, cofondateur du collectif Soulager mais pas tuer. Il y a une sorte de tour de passe-passe avec cette sédation que l’on tire du chapeau. La sédation en phase terminale, exceptionnelle, qui assume le double effet (soulager la douleur au risque d’accélérer la survenue de la mort), se trouve mélangée, comme dans une salade empoisonnée, avec la sédation euthanasique. »

Cette proposition de sédation continue jusqu’au décès n’est pas sans rappeler les actes posés par le Dr Bonnemaison, acquitté en juin dernier par la cour d’assises de Pau. « On ne fait rien d’autre que de cautionner ce type de dérapage », assure Tugdual Derville, également délégué général d’Alliance Vita. Sans parler de la possibilité de poser une sédation profonde et continue sans hydratation dont la finalité ne fait aucun doute.

Lire l’intégralité de l’article

 

 

 

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[CP] – GPA : VITA dénonce une politique de l’autruche

Communiqué de presse : Paris, le 12 décembre 2014

Circulaire Taubira – GPA : Alliance VITA dénonce une politique de l’autruche : 

prétendre interdire la GPA en France tout en fermant les yeux sur sa « délocalisation » à l’étranger.

En rejetant ce 12 décembre les recours contre la circulaire Taubira qui enjoint aux greffiers de délivrer des certificats de nationalité française aux enfants nés par GPA à l’étranger, le Conseil d’Etat valide de facto les conséquences d’une pratique interdite en France, qui est en complète contradiction avec les principes fondamentaux de notre Code civil : la non instrumentalisation des femmes et la non marchandisation des enfants.  Comment le rapporteur public du Conseil d’Etat peut-il qualifier la pratique de la GPA de « commerce sordide, cauchemardesque »,  tout en soutenant la légalité de cette circulaire ?

Pour Alliance VITA, cette circulaire éditée par la garde des Sceaux était inutile : la nationalité française de l’enfant peut s’acquérir naturellement avec le temps. En effet, en vertu de l’article 21-12 du Code civil, un enfant recueilli en France depuis 5 ans peut réclamer la nationalité française, sans relation avec son mode de procréation. Il n’y avait donc aucune nécessité de publier cette circulaire contestée et contestable.  Par contre sa validation par la plus haute juridiction conforte les conventions de GPA illicites qui organisent l’abandon de l’enfant dès sa conception. Si une loi cesse d’être dissuasive, elle n’est plus protectrice.

De plus, il y a un grave oubli manifeste : une convention de GPA ne peut pas être distinguée de ses effets, puisque la naissance de l’enfant constitue l’objet même et exclusif de cette convention. Donc en validant ses effets, c’est la convention de la GPA en elle-même que l’on valide. L’interdiction légale française ne devient alors qu’une pure pétition de principe.

Pour Caroline Roux, Secrétaire générale d’Alliance VITA et coordinatrice des services d’écoute : « Il ne s’agit pas de passer sous silence le douloureux désir d’enfant, qui doit être entendu et accompagné, mais il y a des limites à ne pas franchir. On ne peut disposer du corps d’une femme, on ne fait pas « fabriquer »  des enfants par une autre. Les femmes ne sont pas à louer, et les enfants ni à acheter, ni à donner. Mais la validation de cette circulaire est une brèche très grave qui fragilise notre droit, protecteur de l’intérêt des femmes et des enfants. C’est une manière insidieuse de banaliser la violation de la loi française qui dessert l’intérêt des enfants, pour qui cette interdiction de la GPA a été établie. Les commanditaires ayant recours en toute connaissance de cause à la GPA attentent gravement au droit de l’enfant en décrétant délibérément son abandon, en niant les interactions entre l’enfant et celle qui le porte, en en faisant un objet de contrat, qu’il soit rémunéré ou pas. C’est une véritable maltraitance originelle. »

Alliance VITA appelle l’ensemble de la classe politique à réagir et nos gouvernants à prendre leurs responsabilités, en retirant cette circulaire et en s’engageant sur le plan international à signer un traité d’interdiction universelle de la GPA.

Alliance VITA soutient, avec d’autres ONG internationales, l’appel pour la prohibition universelle de la gestation pour autrui, lancé le 20 novembre dernier à l’occasion de la Journée Internationale des droits de l’enfant : www.nomaternitytraffic.eu.

 

Pour aller plus loin, voir le ‘’décodeur’’ d’Alliance VITA sur l’actualité législative : « Les enjeux de la Gestation Pour Autrui (GPA) en France ».

Décodeur n° 39 – « Les enjeux de la Gestation Pour Autrui (GPA) en France »

Le décryptage d’Alliance VITA sur l’actualité législative : « Les enjeux de la Gestation Pour Autrui (GPA) en France »

 

L’EVENEMENT

Ce vendredi 12 décembre 2014, le Conseil d’Etat a validé la Circulaire du 25 janvier 2013, dite « Circulaire Taubira », qui vise à faciliter la délivrance de certificats de nationalité pour les enfants nés de gestation pour autrui (GPA) à l’étranger, bien que cette pratique soit interdite en France.

Le Conseil d’Etat considère, compte tenu de l’arrêt de la Cour Européenne des Droits de l’Homme du 26 juin 2014 (voir ci-après), que la France ne peut plus priver un enfant de sa nationalité française, sous peine de porter “une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée”.

 

LE CHIFFRE

Jusqu’à 100 000 € le contrat de GPA aux Etats-Unis ! En vue de satisfaire les demandes d’avoir un enfant, pour de couples français ou étrangers, le « business » se développe rapidement  dans le monde. Il donne lieu à une vive concurrence entre organismes commerciaux ou cliniques spécialisées :

–  d’un côté les pays riches, avec des prestations haut de gamme comme le choix de la mère porteuse sur catalogue, ou le choix du sexe du bébé ou de caractères génétiques particuliers (par tri d’embryons, réalisé avec un diagnostic pré-implantatoire DPI)

–  de l’autre côté, des pays pauvres où l’on découvre régulièrement des « usines à bébés » (comme en Thaïlande, en Inde, au Mexique, en Ukraine ou au Nigéria), et avec des tarifs entre 10 000 et 30 000 € tout compris. Ces pays ont aussi donné lieu à plusieurs scandales récents, comme celui du bébé thaïlandais Gammy, refusé par le couple commanditaire australien parce que atteint de trisomie 21, contrairement à sa jumelle.

 

UNE LEGISLATION QUI INTERDIT CLAIREMENT LA GPA

a) La GPA est interdite depuis la loi du 29 juillet 1994 (1ère loi bioéthique)

 

–  Selon l’article 16-7 du Code civil : « Toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle ». L’article 16-9 précise qu’il s’agit d’une disposition « d’ordre public », c’est-à-dire qui s’impose à tous sans exception, même si l’acte a été accompli à l’étranger.

–  Cette interdiction est sanctionnée d’une peine d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 15 000 €, selon l’article 227-12 du Code pénal, §2.

–  La GPA est interdite en France au nom des principes de l’indisponibilité du corps humain, de la volonté d’empêcher l’exploitation des femmes démunies et de l’incertitude qui pèse sur leurs conséquences sanitaires et psychologiques pour l’enfant à naitre et la femme qui l’a porté (voir en annexe). Résumé de façon plus directe : le ventre des femmes n’est pas à vendre, et l’enfant n’est pas un objet que l’on peut acheter ou donner.

–  Le Conseil d’Etat, dans son étude de mai 2009 pour la révision des lois de bioéthique, reprend l’ensemble des principes qui conduisent au maintien de l’interdiction. Il fait valoir que la GPA n’est pas sans danger pour la mère porteuse, et que le don d’un enfant à un autre couple « présente une forte probabilité d’être vécu par cet enfant comme un abandon ». La GPA « laisse place à l’idée que l’enfant à naître est, au moins pour partie, assimilable à un objet de transaction. En ce sens, sa légalisation consacrerait la notion de « droit à l’enfant », notion à laquelle le législateur de 1994 et 2004 s’est fermement opposé ».

–  Dans une proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale le 14 octobre 2014 et débattue le 4 décembre dernier, le député UMP Jean Leonetti avait défendu l’idée de doubler ces sanctions qui visent les intermédiaires. Il proposait également de créer deux nouvelles sanctions à l’égard des parents qui accomplissent des démarches auprès d’organismes intermédiaires, français ou étrangers, ou qui obtiennent  la naissance d’un enfant par GPA contre paiement. A l’issue du débat parlementaire, la proposition de loi a fait l’objet d’une motion de rejet préalable demandée par le parti socialiste, qui a été votée par 22 voix contre 16.  Le texte n’a donc pas abouti.

 

b)   L’administration et la justice appliquent strictement cette législation 

 

–  En application du Code civil, l’administration est censée refuser d’inscrire à l’état civil français un enfant né de GPA à l’étranger. Il en était de même, jusqu’à la circulaire Taubira, pour la délivrance du certificat de nationalité.

–  Lorsque ces décisions ont été contestées en justice par certains parents, la plus haute autorité judicaire – la Cour de cassation – a maintenu une jurisprudence constante : la convention de GPA (le contrat entre les parents d’intention et la mère porteuse), « fut-elle licite à l’étranger, est nulle d’une nullité d’ordre public », comme le rappelle encore deux arrêts du 13 septembre 2013 concernant des enfants nés en Inde. En conséquence, « devant un tel processus frauduleux (…), l’acte de naissance de l’enfant ne peut pas être transcrit sur les registres de l’état civil français ». Un autre arrêt du 19 mars 2014 confirme une fois de plus cette position.

 

DEUX DECISIONS RECENTES QUI FRAGILISENT NOTRE LEGISLATION

 

a)    La « Circulaire Taubira » du 25 janvier 2013 vise à faciliter la délivrance de certificats de nationalité française pour les enfants nés par GPA à l’étranger.

 

–  Cette circulaire, dont la légalité vient d’être confirmée par le Conseil d’Etat, ne concerne pas l’inscription à l’état civil français, formalité importante qui permet de faire figurer un enfant sur le livret de famille des parents. Elle concerne seulement la délivrance de certificats de nationalité française (CNF), qui permet d’obtenir une carte d’identité ou un passeport.

–  Dans ce texte, la ministre de la Justice demande que le CNF soit délivré sans difficulté puisque le père de l’enfant est de nationalité française, même s’il y a un soupçon réel de convention de GPA avec une mère porteuse à l’étranger.

–  A l’époque, Mme Taubira expliquait que ce problème concernait peu d’enfants  (38 cas ces 4 dernières années), mais qu’il fallait régulariser la situation de ces enfants « fantômes de la République ». En réalité, ces enfants ont la nationalité de leur pays de naissance et peuvent vivre en France comme toute personne étrangère légalement établie sur notre territoire : ils ont accès à l’école, à la Sécurité sociale, aux activités diverses organisées pour les enfants de leur lieu de vie, etc. De plus, en vertu de l’article 21-12 du Code civil, « l’enfant qui, depuis au moins cinq années, est recueilli en France et élevé par une personne de nationalité française peut réclamer la nationalité française ».

–  Publiée en plein débat parlementaire sur le mariage des personnes de même sexe, la circulaire a été immédiatement et fortement critiquée. Elle a fait l’objet de plusieurs recours (y compris par un syndicat de magistrats : FO Magistrats) pour excès de pouvoir devant le Conseil d’Etat, au motif qu’elle facilitait et donc encourageait le recours à un dispositif interdit en France, puisqu’elle demandait en réalité aux greffiers de « fermer les yeux » et de reconnaître la nationalité française aux enfants nés de GPA à l’étranger.

 

b)    L’arrêt de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) du 26 juin 2014 demande à l’Etat français de donner un état civil aux enfants nés par GPA

 

–  La CEDH est la Cour de justice qui dépend du Conseil de l’Europe (47 pays membres, 800 millions d’habitants) à Strasbourg. Elle avait été saisie par deux couples – Mennesson et Labassée – qui contestaient le refus  par les tribunaux français de reconnaître la filiation de leurs enfants nés aux Etats-Unis par GPA.

–  Dans cet arrêt, la CEDH considère qu’ « interdire totalement l’établissement du lien de filiation entre un père et ses enfants biologiques, nés d’une GPA à l’étranger, est contraire au droit des enfants au respect de leur vie privée » (cf. article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme). Elle demande donc à la France de modifier sa législation pour reconnaitre la filiation, et donc l’état civil, de ces enfants. Elle ne demande par contre pas à la France de légaliser la GPA, ce qui relève de son pouvoir d’appréciation légitime.

–  Cette décision, qui a choqué beaucoup de personnes en France, repose notamment sur une contradiction majeure. La CEDH considère acceptable de supprimer le lien biologique avec la mère (la mère génétique et/ou la mère gestatrice), mais invoque la nécessité de reconnaître ce même lien biologique avec le père, au nom de l’intérêt supérieur de l’enfant : « Au regard de l’importance de la filiation biologique en tant qu’élément de l’identité de chacun, on ne saurait prétendre qu’il est conforme à l’intérêt supérieur de l’enfant de le priver d’un lien juridique de cette nature ».

–  L’Etat français n’a pas voulu faire appel de cette décision prise au niveau d’une Chambre de la Cour, alors qu’il avait trois mois pour porter l’affaire devant la « Grande Chambre » de la CEDH, l’instance supérieure la plus solennelle. Ce refus a été maintenu malgré l’appel pressant lancé par Lionel Jospin et Jacques Delors, tribune  co-signée par 60 personnalités politiques et de nombreuses associations le 14 juillet 2014, et malgré plusieurs pétitions rassemblant plus de 60 000 signatures. Il va donc devoir donner un état civil aux enfants nés par GPA à l’étranger, ce qui ne peut qu’encourager les couples qui souhaitent utiliser cette technique toujours interdite en France.

–  Le Premier ministre Manuel Valls a pourtant affirmé, dans une interview à La Croix le 2 octobre 2014, que le gouvernement excluait totalement « d’autoriser la transcription automatique des actes étrangers, car cela équivaudrait à accepter et normaliser la GPA ». Selon lui, trois questions doivent être traitées : celle de la protection des enfants (quel substitut à l’autorité parentale ?), celle de leur droit à hériter, celle de leur nationalité. A ce jour, aucune précision n’a été donnée par l’administration sur la façon dont elle entendait régler ces questions.

 

UN DEBAT DE SOCIETE TOUJOURS VIF

 

a)    Des tentatives d’introduire une « GPA encadrée » n’ont pas abouti 

 

–  En juin 2008, à l’issue d’une mission d’information, le Sénat a publié un rapport proposant d’autoriser en France, sous certaines conditions, la gestation pour autrui.  Pour donner une traduction législative à ces recommandations, une proposition de loi créant une « GPA encadrée » a été déposée le 27 janvier 2010 par Alain Milon et de plusieurs autres sénateurs. Ce texte n’a jamais été débattu et est devenu caduc.

–  Une autre proposition de loi, à l’initiative du sénateur Jacques Mézard et d’autres collègues le 31 juillet 2012, n’a pas fait non plus l’objet d’un débat parlementaire jusqu’à présent. Ce texte a pour but d’autoriser l’inscription à l’état civil français des enfants nés par GPA à l’étranger.

 

b)    Le consensus national reste très fort pour maintenir l’interdiction de la GPA

 

–  Interrogés sur la GPA en préparation de la révision des lois bioéthiques de 2010-2011, les principaux organes consultatifs du pays ont tous rendu des avis négatifs et ont considéré qu’elle ne devait pas être légalisée en France : le Conseil d’Etat, l’Office Parlementaire d’Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (l’OPECST), l’Académie de Médecine, le Conseil d’orientation de l’Agence de la Biomédecine, l’Ordre National des Médecins, le Collège National des Sages-Femmes, les Panels citoyens des états généraux de la bioéthique, le Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE), etc. Ce dernier a produit une utile synthèse des analyses et arguments dans son avis n° 110 du CCNE en date du 1er avril 2010.

–  Depuis son élection en 2012, le Président de la République François Hollande a constamment réaffirmé son opposition au principe de la GPA et s’est engagé à ne pas l’autoriser durant son quinquennat. Même si certains ministres sont personnellement d’avis différent, le gouvernement maintient officiellement cette position dans tous les débats officiels. Début octobre 2014, le premier ministre confirmait à nouveau : « La France est opposée à la légalisation de la GPA qui est, il faut le dire, une pratique intolérable de commercialisation des êtres humains et de marchandisation du corps des femmes. »

–  Le Défenseur des droits, Dominique Baudis, s’était inquiété en mars 2014, un mois avant son décès, du développement de sites internet faisant notamment  la promotion commerciale de services de GPA, et en avait alerté la ministre de la Justice. Jacques Toubon, qui l’a remplacé à ce poste, s’est exprimé comme étant opposé à la GPA lors de sa nomination, puis récemment comme étant favorable à la reconnaissance d’une identité pour les enfants concernés.

–  D’une façon générale, la GPA a donné lieu ces dernières années à de très nombreuses prises de position de personnalités politiques, médicales, médiatiques, etc. Les débats dépassent les clivages politiques traditionnels, notamment  à gauche avec des « Pour » (comme Pierre Bergé en décembre 2013: « Louer son ventre pour faire un enfant ou louer ses bras pour travailler à l’usine, quelle différence ? ») et des « Contre » (comme le récent Collectif pour le Respect de la Personne, composé de personnalités de gauche opposées à la marchandisation du corps de la femme).

 

c)    Des plaintes contre des sociétés « vendant des GPA » sont en attente d’instruction

 

–  En complète contradiction avec notre législation, des sociétés étrangères organisent régulièrement des réunions d’information et des consultations privées en France, pour attirer des clients intéressés par des contrats de GPA. Une des plus récentes s’est tenue  fin septembre dans un hôtel de luxe parisien, à 300 mètres de l’Assemblée nationale.

–  Pourtant une première plainte contre X avait été déposée le 10 janvier 2014 par l’association Juristes pour l’enfance, à la suite d’une réunion similaire organisée par la société américaine Extraordinary Conception. Une enquête judiciaire a été confiée le 12 mars 2014 à la Brigade de Répression de la Délinquance sur la Personne, à Paris. Mais depuis cette date, l’instruction semble bloquée et aucune poursuite n’a été officialisée, alors que des preuves incontestables ont été fournies. L’association Juristes pour l’enfance a déposé une seconde plainte début octobre, visant cette fois la société américaine Circle Surrogacy, avec tous les éléments de preuve nécessaires : enregistrement de la réunion, plaquettes de présentation, griffes tarifaires, etc. Enfin, La Manif Pour Tous (LMPT) vient également de déposer une plainte contre X similaire, le 11 décembre dernier.

 

NOTRE COUP DE COEUR

 

Le 20 novembre 2014, jour anniversaire de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE), une pétition internationale No Maternity Traffic a été lancée : elle demande au Conseil de l’Europe de s’engager pour l’interdiction effective de toutes formes de gestation pour autrui.

L’Union Internationale pour l’Abolition de la Gestation pour Autrui (International Union for the Abolition of Surrogacy) qui a lancé cette initiative est soutenue et relayée par l’Agence Européenne des Adoptés, l’Appel des professionnels de l’enfance, Alliance VITA, Care for Europe, la FAFCE, European Center for Law & Justice, Fondazione Novae Terrae, La Manif Pour Tous, Human Dignity Watch, U Ime obitelji …

Le Conseil de l’Europe est l’institution la plus appropriée pour mener une politique d’abolition de la GPA en Europe. La pétition est en pleine actualité car l’Assemblée Parlementaire a entrepris de débattre prochainement de la GPA. Remise officiellement au Président de cette Assemblée, elle aura une influence sur les débats. Le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a le pouvoir d’entreprendre la négociation d’une nouvelle convention européenne, ou d’un protocole additionnel à une convention existante, afin de condamner cette pratique de façon effective.

 

NOTRE COUP DE GUEULE

 

Depuis des mois, les contradictions sont de plus en plus fortes entre les paroles et les actes des pouvoirs publics. Les déclarations de principe se multiplient, mais dans la pratique, chacun peut constater l’absence d’initiative pour sanctionner et décourager cette pratique illégale : circulaire Taubira, refus de faire appel de la décision de la CEDH, plaintes sans suite contre des sociétés étrangères qui vendent de la GPA en France, annonce d’une initiative internationale, etc.

Sur ce dernier engagement, le Premier ministre déclarait encore le 2 octobre dernier : « Il faut rappeler la responsabilité de tous les États dans la lutte contre la commercialisation des êtres humains. La France entend promouvoir une initiative internationale qui pourrait aboutir, par exemple, à ce que les pays qui autorisent la GPA n’accordent pas le bénéfice de ce mode de procréation aux ressortissants des pays qui l’interdisent. (…) Laurent Fabius, le ministre des affaires étrangères, prendra dans les semaines qui viennent des initiatives pour trouver le cadre approprié

Tant sur le plan national que sur le plan diplomatique, que fait la France pour interdire réellement la GPA ?

 

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POUR ALLER PLUS LOIN

 

4 documents d’Alliance VITA :

1° La gestation pour autrui : pourquoi s’opposer à la légalisation ?

Cette analyse approfondie réalisée par Alliance VITA en octobre 2011 décrypte les enjeux éthiques de la GPA, et en particulier :

–  les risques encourus par la mère porteuse et de l’enfant à naître,

–  les risques pour le couple éducateur et l’enfant une fois né,

–  le principe d’indisponibilité du corps humain,

–  les risques de marchandisation du corps humain.

Elle explique également les types de situations possibles selon les modes de fécondation, avec les conséquences pour l’enfant d’avoir deux, voire trois mères différentes : la mère biologique, la mère gestatrice, la mère éducatrice.

2° GPA, renoncement de la France à résister au marché de la procréation, communiqué de presse du 26 septembre 2014 sur le renoncement de la France à faire appel de la décision CEDH.

3° GPA, un manque de volonté politique, communiqué de presse du 4 décembre 2014 sur le rejet de la proposition de loi aggravant les sanctions en cas de GPA.

GPA : VITA dénonce une politique de l’autruche, communiqué de presse du 12 décembre 2014 sur l’arrêt du Conseil d’Etat validant la circulaire Taubira.

Enjeux éthiques de la sédation en phase terminale

Enjeux éthiques de la sédation en phase terminale

 

1 – Définition de la sédation

La sédation consiste en « la recherche, par des moyens médicamenteux, d’une diminution de la vigilance pouvant aller jusqu’à la perte de conscience, dans le but de diminuer ou de faire disparaître la perception d’une situation vécue comme insupportable par le patient, alors que tous les moyens disponibles et adaptés à cette situation ont pu lui être proposés et mis en œuvre sans permettre d’obtenir le soulagement escompté par le patient »[1].

La sédation peut être appliquée de façon intermittente, transitoire ou continue.

L’expression « sédation en phase terminale » concerne la sédation dans les derniers jours ou les dernières semaines de la vie, sans volonté de provoquer la mort, même si les produits utilisés peuvent avoir comme conséquence indirecte un décès plus rapide (mais dans un délai impossible à mesurer précisément). Le député Jean Leonetti, dans sa proposition de loi du 27 février 2013[2], utilise l’expression « traitement à visée sédative » à réaliser « en phase terminale », ce qui peut laisser penser qu’il se situe dans ce cadre d’interprétation.

L’expression « sédation terminale » est par contre utilisée pour exprimer la volonté non seulement d’endormir, mais aussi d’accélérer la survenue de la mort dans un délai rapide. L’Ordre national des médecins, dans un communiqué du 8 février 2013, préconise ainsi qu’il soit possible de réaliser « une sédation adaptée, profonde et terminale », avec la mise en place d’une clause de conscience. Ce qui a entrainé la réaction suivante de l’Académie de Médecine, dès le 28 février 2013 : « dès lors que l’on parle de sédation terminale, le but n’est plus de soulager et d’accompagner le patient, mais de lui donner la mort ».

Comme pour tout traitement, la loi actuelle précise que le consentement et/ou les directives anticipées du patient doivent être recherchés ou, s’il est hors d’état de s’exprimer, que la personne de confiance ou à défaut les proches doivent être consultés.

 

2 – Des situations exceptionnelles

« Les situations dans lesquelles la question d’une sédation se pose sont exceptionnelles, singulières et complexes. Elles sont d’autant plus rares que l’évaluation et le traitement des symptômes ont été mis en place de façon rigoureuse et précoce. Dans la pratique, deux catégories de situation se distinguent:

– les situations à risque vital immédiat en phase terminale ;

– les symptômes réfractaires en phase terminale ou palliative.

Dans les situations à risque vital immédiat, la sédation a pour but de soulager la personne malade de la pénibilité et l’effroi générés par ces situations. En phase terminale, la sédation est alors un geste d’urgence pouvant influer sur le moment de la mort (précipiter ou retarder). Le médecin prescripteur assume la responsabilité de cette décision avec la part d’incertitude qu’elle comporte. Dans la mesure du possible, la prescription de la sédation doit être une prescription anticipée.

En phase palliative, les symptômes réfractaires peuvent parfois redevenir accessibles à des

traitements après une sédation appliquée de façon intermittente ou transitoire. On constate

que le fait d’avoir dormi quelques heures permet au malade un certain temps de répit au réveil, même si la cause du symptôme est toujours présente. »[3]

 

3 – Les questions éthiques spécifiques liées à la sédation en phase terminale

L’altération du processus cognitif

La question se pose de priver une personne de sa conscience et de toute communication, la rendant dépendante dans un état de grande vulnérabilité. C’est pourquoi ce soin de soulagement doit être réservé à des situations exceptionnelles, en suivant les recommandations émises en 2009 par la Haute Autorité de la Santé.

Le risque euthanasique

Dans un article[4] publié en 2010, «Questions éthiques associées à la pratique de la sédation en phase terminale», Jean-Claude Fondras et Suzanne Rameix analysent la frontière entre sédation et euthanasie de la façon suivante :

« Comment juger si une sédation profonde, continue jusqu’au décès, est sédative ou euthanasique ? Les critères le plus souvent retenus pour la validité éthique d’une décision de sédation sont l’intention du prescripteur, le respect de l’autonomie du patient et le principe de proportionnalité. L’intention d’une personne étant partiellement inaccessible aux autres et, parfois, à la personne elle-même, la valeur morale de la décision est plus facilement mise en évidence par l’examen de l’action et de son contexte que par les explications avancées. De fait, un traitement sédatif, titré, réversible est matériellement et objectivement discernable d’une injection volontairement létale : dans ce cas, nul besoin d’analyser les intentions puisque les données factuelles suffisent à différencier les actes.

Il n’en reste pas moins que, devant des effets secondaires problématiques (« abréger la vie » du patient ou porter atteinte à son autonomie), la détermination de la véritable intention —au sens de l’objectif fixé par le prescripteur— et de sa légitimité reste un point crucial. »

Les auteurs précisent que la sédation profonde et continue constitue une décision particulièrement lourde, qui appelle à la réserver aux malades qui présentent un pronostic vital de courte durée, de quelques heures à quelques jours.

 

4 – Des exemples de sédations réalisées dans un but euthanasique

La ligne de crête est ténue entre la sédation destinée à apaiser la douleur, même si elle peut avoir comme effet secondaire la mort (pratique autorisée par la loi Leonetti), et la sédation réalisée dans un but euthanasique, c’est à dire en vue de donner la mort (pratique interdite en France). Mais la frontière existe, et il est essentiel de maintenir la distinction en cas de doute sur certaines pratiques médicales, si l’on veut que la loi soit respectée.

A titre d’exemple, le procès du Docteur Bonnemaison à Bayonne, en juin 2014, a mis en lumière l’utilisation de médicaments comme l’Hypnovel : ce produit est souvent utilisé en soins palliatifs, mais il ne doit jamais provoquer le décès du patient s’il est utilisé conformément aux recommandations de bonne pratique de la profession. Le procès ayant révélé que cinq patients étaient décédés rapidement après l’injection de ce produit, on peut avoir de sérieux doutes sur le respect de la titration recommandée, et donc une suspicion légitime sur l’intention euthanasique du médecin.

Autre exemple aux Pays-Bas, qui a légalisé l’euthanasie en 2001 : une étude[5] du Centre intégral du cancer néerlandais a mis en lumière que « chaque année, 1 700 cas de sédations en fin de vie relèveraient d’une pratique inadéquate pouvant cacher des euthanasies ». Ces faits, associés à la hausse croissante du nombre d’euthanasies déclarées, prouvent que les dérives peuvent coexister, voire s’amplifier, quand l’interdit de tuer a été levé.

 

5 – Alliance VITA dénonce les risques de la « sédation profonde jusqu’au décès » préconisée par le CCNE

Le Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE) a publié un rapport le 23 octobre 2014 pour faire une synthèse des débats sur la fin de vie réalisés en France depuis deux ans.

Concernant la sédation, le CCNE[6] considère comme une « demande partagée » par l’ensemble du corps social, la création d’un droit à accéder à une sédation profonde jusqu’au décès. Ce droit serait à reconnaître dans deux hypothèses :

–       lorsque la personne le demande, en phase terminale de fin de vie ;

–       ou lors d’une décision de la personne d’arrêter les traitements qui le maintiennent en vie (sous-entendu : même si la personne n’est pas en fin de vie, comme c’est le cas de Vincent Lambert aujourd’hui).

A la suite de ce rapport, Alliance VITA a alerté dans un communiqué de presse[7] sur les risques d’aboutir à des pratiques d’euthanasies qui ne diraient pas leur nom, cachées sous le vocable technique de « sédation », mais dont l’intention serait clairement de mettre fin à la vie des patients concernés :

« Le CCNE semble tirer de ce constat la promotion de ce qu’il nomme la « sédation profonde jusqu’au décès ». C’est une grave dérive. Nous sommes favorables à la sédation « en phase terminale » : elle doit être prudente, réévaluée selon les critères déontologiques des personnels de santé. Ils peuvent même prendre le risque que la mort survienne plus vite. Mais nous contestons formellement l’euthanasie masquée que constitue la « sédation terminale »  telle qu’elle est décrite dans le rapport, et promue en complément non seulement des arrêts de traitements (ce qui est légitime) mais aussi d’arrêts délibérés d’alimentation et d’hydratation. 

D’abord la sédation terminale est une forme d’euthanasie car il s’agit d’un moyen de provoquer délibérément la mort, quel que soit le moyen employé. Les deux critères qui définissent l’euthanasie sont en effet l’intention de provoquer la mort et ce résultat.

Ensuite les promoteurs de l’injection létale auront beau jeu de dénoncer l’hypocrisie d’une euthanasie qui ne dit pas son nom. C’est déjà leur argument pour obtenir les étapes suivantes : l’euthanasie par injection létale ou le suicide assisté. »

Cette préoccupation rejoint celle exprimée par de nombreuses personnalités médicales, comme par exemple Emmanuel Hirsch, directeur de l’Espace de réflexion éthique de la région Ile de France : celui-ci estime que la notion de sédation terminale est ambigüe et dangereuse, et qu’il n’y a d’ailleurs pas nécessité de légiférer à nouveau sur la fin de vie[8].

Novembre 2014


[1] Voir les  Recommandations de la Haute Autorité de Santé 2009, qui s’appuient sur les Recommandations de bonne pratique établies par la SFAP (Société française d’accompagnement et de soins palliatifs).
[2] Proposition de loi visant à renforcer les droits des patients en fin de vie, n° 754, débattue en séance publique le 25 avril 2013 et renvoyée en commission.
[7] Communiqué de presse du 23 octobre 2014 d’Alliance VITA  « Sédation profonde jusqu’au décès : gare à l’euthanasie masquée ! »
[8] Légiférer sur la fin de vie ne s’impose pas. Emmanuel Hirsch, Le Figaro 8-9 novembre 2014
sédation en phase terminale enjeux éthiques de la sédation

[CP] GPA, un manque de volonté politique

GPA : Alliance VITA dénonce le manque de volonté politique de la majorité et du gouvernement pour rendre effective l’interdiction de la GPA.

Le 4 décembre 2014,  une proposition de loi visant à renforcer les sanctions pénales liées à l’interdiction de la gestation pour autrui a été rejetée par l’Assemblée nationale. Proposée par le député Jean Leonetti, elle visait à renforcer la lutte contre les démarches engagées par des Français pour obtenir une GPA, auprès d’agences ou organismes français ou étrangers.

Alliance VITA dénonce la manière dont la majorité et le gouvernement fuient un débat fondamental pour le droit des femmes et des enfants.

Pourtant la question est grave, et la volonté politique affichée par le Premier ministre il y a quelques semaines de promouvoir une initiative internationale sur la GPA, n’est toujours pas suivie d’effets.

Pour Caroline Roux, Secrétaire générale et coordinatrice des services d’écoute d’Alliance VITA : «Toutes les mesures de dissuasion de la pratique de la GPA sont  en train d’être éliminées. La circulaire Taubira de janvier 2013, comme le refus de faire appel sur la décision de la CEDH de juin 2014, constituent  une caution implicite de la gestation pour autrui.  Des sociétés étrangères font de la publicité et même organisent des réunions commerciales sur notre territoire national, sans que les pouvoirs publics aient pris des mesures pour interdire. En renonçant à résister à la GPA, le gouvernement laisse se développer un marché mondialisé de la procréation sans limite. C’est extrêmement préoccupant de voir naître ce « marché de la procréation »  qui instrumentalise la femme et les enfants, totalement en contradiction avec les droits de l’homme et la législation française. Il est urgent que le gouvernement engage des démarches internationales pour l’abolition de la gestation pour autrui. Nous demandons que la GPA soit reconnue, de façon universelle, comme une maltraitance originelle faite à l’enfant et une atteinte au principe de non instrumentalisation du corps des femmes ».

Rappelons que la GPA organise l’éclatement de la maternité en deux voire trois femmes : la génitrice, la gestatrice et l’éducatrice. En son temps, la France avait su peser pour une prohibition mondiale du clonage, avec succès. Aujourd’hui, la France abandonne ses fondements éthiques en cautionnant un marché ultralibéral de la procréation, utilisant les femmes comme des machines et les enfants comme des objets de contrat.

Alliance VITA soutient, avec d’autres ONG internationales, l’appel pour la prohibition universelle de la gestation pour autrui. Cet appel a été lancé le 20 novembre dernier à l’occasion de la Journée Internationale des droits de l’enfant : www.nomaternitytraffic.eu.

Note d’analyse sur la résolution de l’Assemblée nationale visant à réaffirmer le droit fondamental à l’IVG en France et en Europe

Il est urgent de renforcer le droit à l’information des femmes avant la décision de recourir à un avortement.

L’Assemblée nationale a voté, le 26 novembre 2014, une proposition de résolution visant à réaffirmer le droit fondamental à l’Interruption Volontaire de Grossesse en France et en Europe. Au-delà des déclarations de principe, ce débat est l’occasion de considérer la réalité de l’avortement dans notre pays et au-delà. Il devrait prendre en compte  la nécessité de renforcer la politique de prévention et d’information dans le dispositif de l’IVG.

 

1 – La situation actuelle

– En 2012, 219 200 interruptions volontaires de grossesse (IVG) ont été recensées en France. Et des premières statistiques dévoilées pour 2013 annoncent 10 000 IVG supplémentaires par rapport à l’année précédente. Notre pays se situe, par son taux d’IVG de 14,9 IVG pour 1000 femmes en âge de procréer, dans une moyenne élevée en Europe. Le taux le plus élevé est observé chez les femmes âgées de 20 à 24 ans, chez lesquelles il est de 27 en France métropolitaine, et de 50 dans les départements d’outre-mer (DOM). Selon l’Institut National d’Etudes Démographiques, on estime que près de 40% des femmes y auront recours dans leur vie.

– Pourtant, le taux d’utilisation des contraceptifs en France est parmi les plus élevés au monde. Selon le Baromètre Santé 2010, 90,2 % des Françaises sexuellement actives âgées de 15 à 49 ans déclarent employer une méthode contraceptive, y compris chez les jeunes (91,2 % chez les 15-19 ans, et 92,9 % chez les 20-24 ans).

– Ce « paradoxe contraceptif français » est confirmé par le rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales de février 2010. Il révèle que 72% des femmes qui recourent à l’IVG utilisaient une méthode de contraception quand elles ont découvert leur grossesse[1], en concluant qu’ « une maîtrise totale de la fécondité est illusoire ».

Cependant, alors que les pouvoirs publics reconnaissent que le nombre toujours élevé d’avortements n’est pas un constat satisfaisant, les solutions qu’ils proposent ne visent qu’à renforcer la contraception, à trouver de nouveaux prescripteurs de l’IVG et à augmenter le remboursement de l’acte. C’est du moins le sens des orientations prises ces dernières années.

Pourtant l’IVG n’est pas un acte anodin pour les femmes :

– Pour la Haute Autorité de la Santé, citée dans le rapport de l’IGAS sur la prévention des grossesses non désirées (2010) : «L’IVG demeure un évènement souvent difficile à vivre sur le plan psychologique. Cette dimension manque d’éclairage objectif et scientifique ». Aucune évaluation n’a été conduite depuis ce constat par les pouvoirs publics.

– Selon un sondage OpinionWay pour Nordic Pharma en mars 2013, 85% des femmes déclarent avoir ressenti une souffrance au moment de l’IVG médicamenteuse, y compris une souffrance morale pour 82% d’entre elles, ou physique pour 67%. Il confirme un précèdent sondage effectué par l’IFOP en 2010 sur les femmes et l’IVG : 83% des femmes pensent que l’IVG laisse des traces psychologiques difficiles à vivre.

– Le rapport de synthèse de l’IGAS sur l’évaluation des politiques de prévention des grossesses non désirées et de prise en charge des interruptions volontaires semble prôner la fatalité : « Il y aura toujours des situations d’incertitude ou de rupture affective qui remettent en cause une grossesse éventuellement souhaitée à un moment donné ».

Les femmes ont plus que jamais besoin d’être écoutées et accompagnées, et non pas que la collectivité se dédouane en niant la difficulté d’un acte que les hommes, eux, n’ont pas à subir.

Le véritable progrès serait de développer une politique de prévention des pressions sociétales et en particulier des pressions masculines qui s’exercent sur les femmes pour l’IVG, comme il est développé une politique volontariste à l’égard des violences faites aux femmes.

 

2 – Le scandale des avortements sélectifs doit inciter à s’abstenir de toute promotion de l’avortement en Europe et dans le monde

Le Parlement européen s’est penché sur le scandale des avortements sélectifs selon le sexe par le vote de la résolution « Le généricide : les femmes manquantes ? » le 8 octobre 2013 (2012/2273 INI)[2]. Le « généricide » décrit le fait de tuer délibérément une personne appartenant à un sexe du seul fait de cette appartenance. En effet, dans certains pays – tels que la Chine et l’Inde, mais aussi dans certaines régions d’Europe balkanique et du Caucase -, l’avortement des foetus féminins est répandu.

Selon l’exposé des motifs du texte précité, « on estime qu’en 1990 déjà, plus de cent millions de femmes étaient démographiquement «absentes» de la population mondiale pour cause de généricide ; que selon des estimations récentes, ce chiffre a augmenté pour frôler les deux cents millions de femmes «absentes» de la population mondiale ».  Ce même texte donne l’explication suivante : « en dépit de la législation récente contre les pratiques de sélection selon le sexe, les filles font l’objet, de façon disproportionnée, d’une discrimination sexuelle implacable, qui va souvent jusqu’à frapper les fœtus identifiés comme féminins, lesquels font l’objet d’avortements, sont abandonnés ou assassinés, au seul motif que ce sont des fœtus féminins. »

 

3 – Une proposition concrète pour améliorer l’information des femmes

Les femmes ont besoin d’une information impartiale et complète. Or l’information s’est dégradée depuis une dizaine d’années.

Comment accepter que l’on puisse prôner un « droit fondamental à l’IVG » et en même temps dénier aux femmes le pouvoir – et le droit – d’exercer cette liberté en étant pleinement éclairées ?

Or, la tendance de la législation va à l’encontre de ce mouvement, puisque la loi du 4 juillet 2001 a supprimé du dossier-guide remis aux personnes qui viennent s’informer pour une éventuelle IVG, la présentation des aides et protections assurées aux femmes enceintes. De même, aucune information concernant ces droits et aides ne figure sur le site du Ministère de la santé, dans l’espace consacré à l’IVG.

Il est donc urgent de réintroduire dans la loi cette mesure garantissant une information équilibrée sur les droits, aides et démarches pour les femmes enceintes, seules ou en couple, ainsi que le descriptif de leur protection sociale[3]. Cela pourrait contribuer à résoudre un certain nombre de drames personnels, en présentant aux femmes des perspectives autres que l’avortement, qui ne devrait pas être une fatalité.

 

Conclusion

Notre pays a besoin d’avoir un large débat sur la politique qui est menée en matière d’IVG. Mais un débat serein, approfondi, et non biaisé, qui prend en compte la réalité actuelle des femmes. Car il s’agit de la dignité et de la souffrance des femmes.

Il est urgent de mettre en œuvre une véritable politique de prévention de l’IVG et de renforcer le droit à l’information des femmes avant la décision de recourir à un avortement.

 


[1] Etude Cocon cité dans le rapport de l’IGAS sur la pratique de l’IVG et l’évaluation des politiques de prévention des grossesses non désirées -2010.
[2] Texte disponible sur le site  du parlement européen.
[3] Le deuxième paragraphe de l’article L2212-3 du Code de la santé publique pourrait être complété par la disposition suivante : « ainsi que la présentation des droits et des aides existant pour les femmes enceintes ».

Loi Fin de vie : "l’opinion française s’est fait piéger par la crainte véhiculée de l’acharnement thérapeutique" Tugdual Derville

Dans une interview pour le site Atlantico, Tugdual Derville, délégué général d’Alliance VITA, présente les enjeux du débat autour de la fin de vie en France et les raisons de son implication dans le mouvement “Soulager mais pas tuer“, collectif rassemblant professionnels et usagers de la santé contre toute forme d’euthanasie et de suicide assisté.

EXTRAITS :

“La question de l’euthanasie n’en finit pas de biaiser ce débat essentiel. La priorité, pour les Français, c’est d’être pris en charge de façon compétente et humaine. Les soins palliatifs doivent être accessibles partout, à l’hôpital, en maison de retraite et à domicile. Grâce au magnifique mouvement des soins palliatifs, de grands progrès sont faits dans la lutte contre la douleur et l’accompagnement des personnes malades et de leurs proches. Mais comment faire le poids face au lobby de l’euthanasie ? Pendant que les uns écoutent et prennent soin en toute discrétion, les autres jettent de l’huile sur le feu.

Les Français finiraient par croire que mourir sans être tué est ingérable ! Bien sûr, il reste de l’acharnement thérapeutique, et des scandales. Mais l’euthanasie ou le suicide assisté – on le voit en Belgique, en Hollande et en Suisse – sont causes de scandales multiples, selon le principe de la pente glissante. Leur légalisation s’est accompagnée d’une explosion d’euthanasies clandestines et de la dénaturation des soins palliatifs…”

(…) Il faut oser “parler la mort”, la rendre familière, et ne plus compter sur les seuls experts pour recueillir les dernières paroles de ceux qui nous quittent. La mort, notre point commun à tous, fait partie de la vie. Elle nous fait ressentir la fraternité universelle. C’est un appel à la solidarité. Voilà le vrai sujet occulté par le fantasme de l’euthanasie et du suicide, morts violentes s’il en est.

>> Lire l’intégralité sur le site Atlantico

Claeys : une « aide à mourir » ambigüe

Claeys : une « aide à mourir » ambigüe

Trois dispositifs renforçant les droits des patients en vue d’une « fin de vie apaisée » :

  • Rendre plus contraignantes les directrices anticipées, c’est-à-dire qu’elles s’imposeraient au corps médical, sauf cas exceptionnels à justifier dans le cadre d’une procédure collégiale de médecins.
  • Renforcer l’autonomie du patient et le respect de sa volonté, en particulier pour « refuser ou ne pas subir tout traitement qu’il estime relever d’une obstination déraisonnable ». Il serait notamment précisé très clairement que « l’alimentation et l’hydratation artificielles sont des traitements et peuvent être arrêtées ».
  • Créer un nouveau droit à une « sédation profonde et terminale jusqu’au décès dans un délai non déraisonnable », quand un patient « est atteint d’une maladie incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme ». Le député précise, en évoquant cette « sédation forte dans le but d’aider à mourir », que « cela ne doit pas durer trop longtemps, car le temps de l’agonie devient insupportable s’il se prolonge trop ». Cette technique permettrait, selon lui, de régler la quasi-totalité des cas, y compris ceux des personnes dans un état neurovégétatif comme Vincent Lambert.

Dans cette interview, Alain Claeys assume de parler ainsi pour la première fois « d’aide à mourir », tout en refusant de rentrer dans le débat de savoir s’il s’agirait d’une « euthanasie déguisée » ou pas. A la question « Cette sédation profonde et terminale n’est-elle pas un acte dont l’intention est de donner la mort ? », il répond qu’il n’entend pas entrer « dans ce débat philosophique ». Il précise par ailleurs que son projet fait disparaître la notion de « double effet » (double action d’un médicament qui est de soulager, mais qui peut provoquer le décès).

Pour Alliance VITA, ces précisions du député ne font que confirmer et amplifier les craintes déjà exprimées à de nombreuses reprises : la combinaison de ces trois dispositifs (directives anticipées ; refus d’un traitement ; sédation terminale) risque d’aboutir à la multiplication d’euthanasies masquées ou de suicides assistés qui ne diraient pas leur nom.

D’abord sous couvert du respect de la liberté des patients, puis sous les pressions de l’entourage ou de contraintes économiques, ce sont bien les personnes les plus fragiles qui sont menacées si cette « aide active à mourir » était mise en œuvre.