Journée mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer

Journée mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer

Journée mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer​

 

La Journée Mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer a lieu le 21 septembre. C’est l’occasion de se pencher sur le défi majeur posé par cette maladie pour le système de santé et la société dans son ensemble. Dans une société qui valorise la performance et l’utilité, quelle place pour les personnes atteintes d’Alzheimer ?

 

La maladie d’Alzheimer, un enjeu de santé publique 

La maladie d’Alzheimer est la forme la plus courante des maladies neurodégénératives en France, c’est-à-dire des « maladies chroniques progressives qui touchent le système nerveux central » (Santé publique France). Environ 1,2 million de personnes en sont atteintes en France et ce nombre pourrait aller jusqu’à 1,8 million en 2050. 15% des plus de 80 ans sont touchés par cette maladie identifiée par la Fondation de France comme la première cause de dépendance lourde de la personne âgée.

Si la maladie d’Alzheimer est souvent associée à la perte de mémoire, elle touche d’autres zones du cerveau au fil de son évolution, compliquant la capacité à communiquer, à réaliser plusieurs choses en même temps ou les actes de la vie quotidienne. C’est pourquoi la présence d’un aidant familial ou professionnel aux côtés de la personne malade est généralement nécessaire.

Le lancement, le 5 septembre, de concertations visant à une “stratégie Maladies neurodégénératives 2024-2028”, est salué par les structures et associations consacrées à la maladie d’Alzheimer. Toutefois, la responsable du suivi des politiques publiques à France Alzheimer s’inquiète de l’absence de financement qui ne répond pas à l’objectif affiché de considérer les maladies neurodégénératives comme un en jeu de service public.

Prévention, dépistages précoces, renforcement de formation et de la recherche, soutien aux aidants

Outre les recommandations relatives au dépistage précoce, ces associations plaident également pour développer la prévention, et en particulier celle liée à l’activité physique adaptée.  Une mission flash menée par deux députées militait quant à elle pour une meilleure formation des soignants et pour le renforcement de la recherche et listait une série de mesures pour soutenir les aidants.

L’essentiel de l’aide repose en effet sur les proches et les familles qui ont besoin d’être soutenus. Or on sait combien les interactions sont essentielles pour les personnes souffrant de cette maladie.

 

Changer de regard : Alzheimer, un enjeu majeur de solidarité

La maladie d’Alzheimer est une maladie qui stigmatise les personnes atteintes, voire leur entourage. L’image dominante des malades tend à les exclure en effet de la vie sociale : comme s’ils étaient déjà morts, ou seulement caractérisés par leur incompétence et par leur absence.

Selon France Alzheimer, lutter contre la maladie d’Alzheimer doit passer par le changement de regard de la société, en valorisant les actions des personnes malades. Elle met à l’honneur les témoignages de malades dont le diagnostic a été précoce et qui prennent la parole ainsi :

« J’ai des difficultés pour certaines choses. Il y aura des modifications dans nos relations et j’ai ou je vais avoir besoin de votre compréhension. Mais surtout, respectez-moi, ne me mettez pas de côté. Je suis toujours moi. Ne gâchons pas le présent. »

 

Interrogé par Alliance VITAle gériatre Victor Larger, auteur de « Est-ce que je nous perds quand je me perds ? Vivre avec Alzheimer » (Balland, 2020) confirme que :

« Les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer expriment souvent, au moins au début, le sentiment de n’être plus bon à rien, de ne servir à rien.  Derrière cette question « à quoi je sers ? », est posée la question « quel sens ma vie a-t-elle ? » et, plus largement « quel sens cela a-t-il ? ». La question du sens des choses et des circonstances suscite chez le malade un mélange de perplexité et d’angoisse à l’origine des troubles du comportement qui, souvent, le submergent.

Le malade fait l’expérience de l’inutilité absolue, de l’insensé et de la vacuité. Lui, qui perd progressivement tout ce qui fait la superbe de l’homme, pousse à l’extrême la question du « quel sens ma vie a-telle ? » qui nous tient tous. C’est pourquoi on peut dire qu’il nous représente tous dans notre quête et ce d’une manière aiguë, exemplaire. Pour l’observateur deux attitudes sont possibles. La plus courante est celle qui nous fait souvent passer à côté de notre vie : croire que le malade est vide de cette richesse qu’est son intelligence. Qu’il n’a rien à voir avec nous.

Que nous n’avons rien en commun, peut-être même pas l’humanité. L’autre attitude est celle de l’interrogation : « où en suis-je, moi ? » Comment puis-je participer à la peine de cette personne, moi qui suis si souvent tenté de distraire mon esprit et mon cœur de cette quête fondamentale de l’existence. Finalement, à quoi je sers en face de celui-ci ? De cette interrogation ou non de l’observateur dépend le choix de son action.

Soit on abandonne le malade à lui-même, perdu dans son abime de solitude et d’angoisse. Soit on s’interroge soi-même sur le sens de sa position envers le patient et on le rejoint dans son expérience qui est aussi la nôtre. Ainsi deux attitudes sont possibles : l’indifférence voire le rejet conduisant à l’abandon du malade à lui-même ou l’attention portée à l’autre maintenant ainsi la relation. »

Ne pas enfermer la personne dans la maladie, cultiver les bons moments, intégrer un groupe de parole pour les aidants… Autant de facteurs qui contribuent à la lutte contre cette maladie.

Cette écologie relationnelle encore à construire pourrait bien être menacée par la légalisation d’une « aide active à mourir », quelle qu’en soit la forme, suicide assisté ou euthanasie. Comment en effet conjuguer la revendication de l’autonomie et l’accueil de la vulnérabilité et la solidarité envers les plus fragiles en particulier les personnes touchées par la maladie d’Alzheimer ?

 

Pour aller plus loin :

Grand témoin – Docteur Victor Larger – Université de la vie « Quelle dignité ? Mieux la comprendre, mieux la défendre ». 2021.

Journée Mondiale Alzheimer 2021 : Le lien social à l’honneur.

journée mondiale de lutte contre la maladie d'alzheimer
Allemagne : les médecins demandent plus de moyens pour la prévention du suicide

Allemagne : les médecins demandent plus de moyens pour la prévention du suicide

Allemagne : les médecins demandent plus de moyens pour la prévention du suicide

 

A l’occasion de la journée mondiale de prévention du suicide, l’Ordre des médecins allemands, le Bundesärtzkammer, a salué la résolution sur la prévention du suicide votée le 6 juillet à une grosse majorité par le Bundestag, après que les députés allemands ont rejeté deux textes pour encadrer le suicide assisté. L’Ordre des médecins demande que la politique de prévention du suicide soit dotée de moyens financiers suffisants.

 

Le 6 juillet dernier, deux propositions de loi transpartisanes étaient examinées au Bundestag pour donner un cadre légal au suicide assisté. En effet, depuis la décision de la Cour constitutionnelle du 26 février 2020 qui avait retoqué une loi de 2015 interdisant l’organisation commerciale du suicide assisté, celui-ci est pratiqué par des associations sans qu’il y ait de cadre légal. Selon les chiffres des principales associations qui fournissent aujourd’hui des services d’assistance au suicide assisté en Allemagne, elles auraient aidé près de 350 personnes à mourir en 2021. Les médecins utilisent des médicaments sédatifs tels que le midazolam, par exemple.

Les deux propositions de lois examinées le 6 juillet tentaient d’apporter un cadre légal à cette pratique en fixant des conditions. L’une des propositions de loi, émanant des députés Lars Castellucci, du parti social-démocrate (SPD), et de Ansgar Heveling, du parti chrétien-démocrate (CDU), prévoyait que l’assistance au suicide reste interdite mais que des exceptions soient créées pour des personnes majeures après deux entretiens obligatoires, avec un délai minimal de trois mois entre les deux entretiens.

L’autre proposition de loi, portée notamment par la députée libérale Katrin Helling-Plahr et la députée écologiste Renate Künast, moins restrictive, ouvrait un droit au suicide assisté pour des personnes majeures et autorisait les médecins à prescrire un médicament létal entre trois et douze semaines après un entretien obligatoire.

Les associations d’assistance au suicide étaient opposées à ces deux propositions de loi car elles ne souhaitent pas que l’assistance au suicide soit encadrée, arguant que le cadre légal actuel serait suffisamment « clair », et  rejettent l’idée d’un entretien obligatoire.

De leur côté, les acteurs engagés dans la prévention du suicide ont exprimé des réserves sur l’instauration de centres de conseil agréés pour recevoir les candidats au suicide en entretien. Selon eux, il faudrait plutôt financer durablement et fédérer les structures régionales déjà existantes, ainsi que les services d’écoute téléphoniques et en ligne. La seconde proposition de loi a été particulièrement critiquée par ces spécialistes de la prévention car le délai minimum de trois semaines envisagé est bien trop court pour surmonter une crise suicidaire en étant accompagné.

Ces deux propositions de lois ont finalement été rejetées. En revanche, les députés du Bundestag ont adopté à une écrasante majorité de 688 voix (une seule voix contre) une résolution pour renforcer la prévention du suicide. Cette résolution demande au gouvernement de présenter un projet de loi et une stratégie de prévention du suicide avant le 30 juin 2024. Une ligne téléphonique nationale unique devra être mise en place pour les personnes ayant des idées suicidaires et leurs proches.

Dans son récent communiqué, l’Ordre des médecins salue cette initiative. Il salue également l’annonce faite par le Ministère de la Santé d’avoir déjà commencé à travailler à une stratégie nationale. Maintenant, selon eux, il ne faudrait pas que la prévention du suicide reste un concept. « Les propositions expérimentées et les structures ne doivent pas être abandonnées pour des raisons financières et une agence nationale d’information et de coordination pour la prévention du suicide ne doit pas échouer à cause du financement ».

Selon le Dr Stefan Schumacher, responsable d’un service d’écoute téléphonique, les personnes qui vivent une crise suicidaire n’ont actuellement pas toujours suffisamment rapidement accès à un service d’écoute téléphonique ou en ligne, par manque de capacité. Il convient donc d’augmenter leur accessibilité par une coordination au niveau national. De son côté, Claudia Bausewein, présidente de la Société allemande de soins palliatifs, regrette les inégalités d’accès aux soins palliatifs et une information très variable selon les maladies. « Le pas vers le suicide assisté semble parfois plus petit » a-t-elle mis en garde.

Comme on le voit, les échecs des tentatives d’encadrement légal du suicide assisté en Allemagne illustrent bien l’impossibilité à concilier encadrement du suicide assisté et politique de prévention du suicide. Une politique cohérente de prévention du suicide ne souffre aucune exception.

Rappel à la loi au Québec face à la forte hausse des euthanasies

Rappel à la loi au Québec face à la forte hausse des euthanasies

Rappel à la loi au Québec face à la forte hausse des euthanasies

 

La Commission sur les soins fin de vie a enjoint les médecins du Québec pratiquant l’euthanasie dénommée « aide médicale à mourir » (AMM), à suivre la loi avec plus de rigueur.

En effet la croissance exponentielle des euthanasies dans cette province canadienne soulève de sérieuses questions. Le dernier rapport annuel sur l’AMM au Canada pour 2021 révèle un taux global de croissance du nombre d’euthanasies de 32,4 % pour atteindre le chiffre de 3,3 % des décès soit 10 064 cas. Pour le Québec qui a légalisé l’euthanasie dès 2015, cela représente 5,5 % des décès,  dépassant la Belgique et les Pays-Bas qui se sont dotés d’une loi depuis 21 ans. Cette proportion devrait atteindre 7% en 2023.

Cet avertissement intervient également dans le contexte d’évolutions de la loi au niveau fédéral et au Québec qui a un régime législatif particulier. En 2023, le Québec a voté une extension fortement controversée de la loi  : des personnes handicapées dont le pronostic vital n’est pas engagé sont désormais éligibles à l’euthanasie. D’autre part, dès le 7 décembre prochain, l’ensemble des maisons de soins palliatifs seront tenues de pratiquer des euthanasies à la demande.

Radio Canada souligne que la Commission relève plusieurs infractions à la loi : des pratiques d’euthanasies non conformes ou « administrées à la limite des conditions imposées », ou encore le manque de rigueur sur l’avis d’un second médecin et le « magasinage » autrement dit le fait de se retourner vers des médecins peu regardants. Elle rappelle également que le vieillissement n’est pas une maladie incurable et ne justifie pas l’AMM.

Un éditorialiste du Washington post soulignait le 13 septembre dernier que « Plus la pratique se développe, plus le risque d’erreurs ou d’abus augmente, dans un contexte où l’erreur ou la faute ont des conséquences irréversibles ».

Pour le réseau citoyen Vivre dans la Dignité « Il faut aussi savoir que ces rappels se déroulent alors que la situation est probablement plus grave que celle décrite par la Commission sur les soins de fin de vie qui refuse d’y voir pour l’instant des dérives. »

En effet une étude scientifique parue en août dernier intitulée Les réalités de l’aide médicale à mourir au Canada en août 2023, alerte sur les graves lacunes du dispositif d’euthanasie. Les auteurs concluent que « Le régime canadien d’aide médicale à mourir ne dispose pas des mesures de protection, de la collecte de données et de la surveillance nécessaires pour protéger les Canadiens contre les décès prématurés. »

Dans ces conditions, il est douteux qu’un simple rappel à la loi permette de stopper les infractions observées.

rappel à la loi au québec face à la forte hausse des euthanasies

Voir tous nos articles sur la fin de vie à l’étranger.

La baisse des naissances se poursuit en France

La baisse des naissances se poursuit en France

L’INSEE (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques) a précisé qu’il s’agit du treizième mois consécutif de baisse par rapport au même mois de l’année précédente. La moyenne mensuelle de naissances s’établit à 59100 et “en cumul sur les sept premiers mois de l’année, on compte près de 30 000 naissances de moins en 2023 qu’en 2022, soit une baisse de 7,0 %“. La chute en juillet marque par ailleurs une “première”.

Depuis 1994, le nombre de naissances par jour n’avait jamais été inférieur à 2000. En 2023 il est tombé à 1907. A l’exception de la Guyane, tous les autres départements affichent une baisse et l’Institut ne voit pas d’écart notable entre les régions.

La tendance pour les naissances depuis 2014 est clairement à la baisse : 816,000 naissances en 2014 contre 723,000 en 2022. Hormis un léger rebond en 2021, effet de rattrapage sur une chute plus nette en 2020 liée à la crise sanitaire, la baisse est continue chaque année. Conséquence arithmétique de cette chute : le solde naturel, à savoir l’écart entre le nombre de naissances et le nombre de décès se rapproche de zéro.

Quels facteurs pour expliquer cette baisse des naissances?

Selon des analystes, la baisse des naissances en 2023 est d’autant plus notable que le nombre de mariages a rebondi fortement en 2021 puis en 2022 après la chute de 2020 en raison de la pandémie. Les facteurs qui influencent le choix d’avoir un enfant sont multiples et tous les démographes ne s’accordent pas sur ce sujet. Ils peuvent citer la confiance dans l’avenir, la perte de pouvoir d’achat par l’inflation, l’existence ou non de structures d’accueil pour les très jeunes enfants afin que les parents puissent mener une carrière professionnelle.

La confiance dans l’Etat pour garantir un soutien efficace et pérenne pour leur vie familiale est également citée. Un sondage mené par l’IFOP en 2019 pour les AFC (Associations Familiales Catholiques) montrait que la dégradation de la politique familiale à partir de 2014 avait un impact. En effet, 33% des personnes âgées de moins de 50 ans déclaraient que cette dégradation les avait amenées à renoncer à avoir un enfant supplémentaire, et 29% les avait amenées à différer le projet d’avoir un enfant supplémentaire.

Le site “Vie publique”, rattaché aux services de la Première Ministre, souligne que la France reste dans le peloton de tête pour la fécondité en Europe, tout en étant en dessous du seuil de renouvellement des générations, fixé à 2.1. “La politique d’aide aux familles, par son caractère multiforme allant de la politique fiscale de quotient familial aux aides directes sous forme d’allocations familiales ou au financement de modes de garde, contribue dans son ensemble au maintien en France, depuis plusieurs années, d’un taux de fécondité certes en baisse mais parmi les plus forts des pays européens“.

La baisse de la fécondité est-elle durable ?

Cette multiplicité des facteurs ne facilite pas la compréhension fine de ce phénomène de baisse des naissances. Or l’évolution de cet indice est cruciale pour les projections démographiques, l’autre facteur naturel étant l’évolution du taux de mortalité. Une analyse des projections de l’ONU publiées en 2022 soulignait déjà l’impact des hypothèses sur le taux de fécondité. Une étude datant de 2020 et publiée dans la revue The Lancet donne quelques éléments pour apprécier cet impact.

Dans le modèle de l’ONU dont les projections de population mondiale sont largement relayées, le taux de fécondité est une variable dont la tendance revient vers 1.75 à long terme (l’horizon des projections est l’année 2100). Pourtant, des pays aussi divers que la Corée du Sud, la Grèce, la Thaïlande et le Canada ont un taux de fécondité très bas depuis de nombreuses années. Par exemple, en Grèce, l’indice de fécondité évolue entre 1.3 et 1.5 depuis le début du XXI° siècle. On a constaté également une absence de rebond de la natalité en Chine, malgré des incitations de politique publique initiées depuis 2021.

Dans l’étude citée plus haut, les auteurs modélisent ce taux par pays avec simplement deux facteurs explicatifs : l’accès au contrôle des naissances et la durée en année des études des femmes. Leur modèle prévoit un indice de fécondité tendant vers 1.66 à comparer au chiffre de 1.75 selon les prévisions de l’ONU. Cet écart semble minime. Cependant, un écart de 0.1 de l’indice modifie la projection de population mondiale de 500 millions à l’horizon 2100.

Par ailleurs, les auteurs notent que d’autres facteurs que ceux qu’ils ont choisis influent sur l’indice de fécondité : facteurs économiques et culturels, dont la place et l’accueil faits aux enfants dans la société.

Comme Alliance VITA le soulignait au moment des élections présidentielles, le désir d’enfant reste plus élevé en France (autour de 2.4 enfants par couple) que le niveau actuel de l’indice de fécondité (1.83) ne le suggère. La politique familiale est un élément de solidarité intergénérationnelle et les pouvoirs publics devraient s’en saisir compte tenu de la baisse continue des naissances en France.

Le fiasco choquant d’une euthanasie en Belgique

Le fiasco choquant d’une euthanasie en Belgique

Le fiasco choquant d’une euthanasie en Belgique : une femme étouffée dans un coussin suite à une euthanasie ratée

 

Le media Sudinfo a révélé le 6 septembre 2023 qu’une belge trentenaire atteinte d’un cancer avait été étouffée par deux infirmières à l’aide d’un coussin suite à une euthanasie qui aurait raté.

 

La jeune femme âgée de 36 ans était atteinte d’un cancer et avait appris en décembre 2021, que selon les médecins il ne lui restait qu’un an à vivre.

Alors que son état se dégradait, elle a demandé une euthanasie. Cette dernière a été pratiquée le 29 mars 2022. L’acte a eu lieu en présence d’un médecin et de deux infirmières qui accompagnaient la patiente depuis plusieurs mois. Le produit injecté ne produisant pas l’effet mortel escompté en raison d’un sous-dosage, l’équipe médicale a étouffé la femme avec un coussin.  C’est ce qu’a révélé l’autopsie mais aussi une des infirmières présentes qui se serait confiée à un tiers.

A juste titre des voix s’élèvent en Belgique et à l’étranger pour dénoncer un acte barbare.  Cela doit nous interroger cependant sur la gravité de l’intention euthanasique qui a pu conduire des personnes a priori bienveillantes à un tel acharnement.

Qu’est-ce qui a été exactement pratiqué ? L’enquête le révélera dans quelques temps puisque le compagnon d’Alexina et sa fille de 15 ans ont déposé plainte au parquet de Liège.

Le mobile avancé pour cette demande d’euthanasie était d’apaiser les souffrances. D’après l’équipe médicale, l’euthanasie représentait l’unique solution. Quid de proposition de soins palliatifs plutôt qu’une solution aussi expéditive ?

Au-delà de l’aspect sordide et dramatique de cette affaire, la manière dont les médias rapportent les faits est pour le moins surprenante.

Elle semble révélatrice d’une confusion qui s’est insinuée dans la pratique belge entre produits sédatifs et euthanasie. Les mots sédation et euthanasie sont utilisés indifféremment. Comme si la sédation normalement prévue dans l’intention de soulager la douleur, injectée à forte dose, se présentait comme une euthanasie déguisée.

Cela n’est pas sans rappeler ce qui a été dénoncé aux Pays-Bas. Dans le 3ème rapport quinquennal (2012-2016) d’évaluation de la loi néerlandaise, publié en juillet 2017, l’étude des certificats de décès montre que les « sédations profondes et continues jusqu’au décès » sont passées de 8,2% des décès en 2005 à 18% en 2015.

3 questions au Pr Ducrocq sur les défis de la SLA

3 questions au Pr Ducrocq sur les défis de la SLA

Le professeur Xavier Ducrocq est neurologue et exerce depuis près de 40 ans en milieu hospitalier. De par sa spécialité, il accompagne des patients atteints de SLA (ou maladie de Charcot) en phase diagnostic, en suivi des phases de la maladie et assure le lien avec les équipes spécialisées ou de soins palliatifs.

1. Quelles sont les manifestations de la SLA (sclérose latérale amyotrophique) ou maladie de Charcot ?

La SLA réalise une paralysie musculaire généralisée, rapidement progressive, d’évolution fatale en 2 à 3 ans en moyenne. Elle est due à une dégénérescence des neurones moteurs de la moelle épinière et de la partie basse du cerveau, (le bulbe rachidien.) La paralysie débute le plus souvent dans les membres inférieurs, puis atteint en quelques mois les membres supérieurs.

Elle touche l’ensemble de la musculature, y compris respiratoire. Lorsqu’elle atteint le bulbe, elle affecte la déglutition et la phonation entrainant des difficultés croissantes puis la perte de la capacité de mâcher, d’avaler, de parler.

Certaines formes, rares, évoluent beaucoup plus lentement. Il existe des cas extrêmes comme celui du physicien Stephen Hawking qui a vécu 56 ans avec cette maladie, ce qui nous montre aussi qu’elle n’atteint pas les capacités intellectuelles. Certaines formes vont toutefois se compliquer de démence frontale.

On estime qu’environ 8 000 personnes sont affectées par la SLA. Comparée à d’autres maladies dites neurodégénératives, elle est 10 à 15 fois moins fréquente que la maladie de Parkinson, elle-même beaucoup moins fréquente que la maladie d’Alzheimer.

 

2. Comment est organisée la prise en charge ?

Il n’existe pas de marqueur spécifique de la maladie. Le diagnostic repose sur la clinique, la rapidité d’évolution, et l’électromyogramme qui analyse le fonctionnement des nerfs et les muscles. Le fait que l’on n’ait pas de marqueur est frustrant. L’incertitude ne permet pas d’agir avec la même aisance que lorsqu’on est certain d’un diagnostic.  Il n’existe pas actuellement de traitement curatif.

Les principaux axes de recherche consistent à essayer de comprendre l’origine du processus de dégénérescence dont on ignore toujours la cause.

Des centres experts SLA ont été créés pour essayer de mieux coordonner les soins, la prise en charge respiratoire et les autres symptômes. Il en existe une vingtaine en France mais certains peuvent être éloignés du lieu de vie des personnes qui au fil du temps ont de plus en plus de difficultés à se déplacer.

D’autre part, le centre sert à bien accompagner ponctuellement mais pas sur le long terme. A un certain stade, la prise en charge peut se faire dans un hôpital de proximité et ultimement par une structure de soins palliatifs. Ce sont des patients à accompagner jusqu’au bout et plus on avance dans la maladie, plus l’accompagnement nécessite davantage d’intervenants pour vraiment s’adapter aux patients. Or bien souvent la Médecine s’exerce dans la vitesse et la rentabilité. Cette maladie vient percuter la logique de rentabilité économique et les problèmes d’effectifs soignants.

Il s’agit d’une médecine humble où le médecin doit de se mettre à l’écoute du patient pour s’adapter à ses besoins. Le médecin peut être force de proposition, mais toujours dans un souci d’ajustement, ce qui est délicat.  Cette maladie soulève toutes les questions éthiques de fin de vie notamment celle de l’acharnement thérapeutique : la pose d’une gastrostomie*, une assistance respiratoire plus ou moins invasive sont-elles raisonnables ? La réponse n’est jamais absolument exacte.

Pour les soignants, il est délicat d’anticiper les étapes (l’insuffisance respiratoire ou les problèmes de déglutition ) qui vont immanquablement intervenir à un moment ou un autre sans nuire à la vie présente du patient.

D’où l’importance de la prise en charge palliative. La culture palliative, née en cancérologie, s’est petit à petit diffusée dans les services traitant les maladies neurologiques. Si l’insuffisance respiratoire d’un patient qui a une SLA n’est pas différente en soi de celle d’un insuffisant respiratoire après bronchite chronique, il existe malgré tout une spécificité de la SLA : le patient ne communique pas aussi facilement que les autres ; il est beaucoup plus dépendant physiquement parce qu’il est totalement paralysé.

Les soins sont beaucoup plus lourds : c’est pourquoi les services de soins palliatifs et les neurologues collaborent pour bien accompagner ces malades. Ce travail ensemble permet de s’ajuster au patient avec la meilleure connaissance possible de sa pathologie. Les soins palliatifs peuvent répondre à tout ce dont un patient atteint de SLA en fin de vie peut avoir besoin.

3. Pourquoi cette maladie est-elle aujourd’hui stigmatisée et utilisée pour revendiquer l’euthanasie ? 

C’est une maladie incurable, d’évolution assez rapide.  La paralysie progressive entraine la perte de toutes les capacités physiques. On devient totalement dépendant, vulnérable ; la communication elle-même peut devenir extrêmement compliquée.

Mais il y a de nombreuses maladies aussi difficiles qui ne sont pas stigmatisées comme celle-là. Peut-être parce que le patient avec une SLA garde toutes ses facultés intellectuelles dans l’immense majorité des cas. Se voir diminuer ainsi est douloureux, pour le patient comme pour les proches.

Mais je suis surpris que cette maladie soit utilisée pour justifier l’euthanasie.  Si la fin de vie d’un patient atteint de SLA est souvent marquée par l’insuffisance respiratoire, les grands insuffisants respiratoires, confrontés à des questions similaires, sont bien plus nombreux, sans pour autant qu’on les stigmatise de la même façon.

Le problème d’une loi qui définirait la SLA comme éligible à l’euthanasie ou au suicide assisté, c’est d’en faire une espèce de prêt-à-porter, de modèle dans lequel il faudrait entrer. Ce qui serait forcément réducteur, chaque situation étant unique. Cela pourrait beaucoup réduire les possibilités de dialogue et d’approche du patient. La légalisation risque de créer une sorte d’obligation pour le patient. Les patients s’adaptent si on leur donne le cadre et les moyens pour le faire. Un patient atteint de SLA me disait : « je ne voulais pas que mes filles me voient comme ça, diminué, comme je suis. » Et dans le même temps, quelques minutes après, il allait aussi me dire : « On est dans un autre rapport. On est plus proches, on s’est dit des choses qu’on ne s’était pas dites auparavant. » Lorsque son état respiratoire s’est dégradé, il a réitéré sa demande de sédation terminale. Mais il voulait attendre l’anniversaire de sa fille. On a donc attendu l’anniversaire de sa fille et quelques jours avant, il est mort de lui-même sans qu’on n’ait rien fait de particulier. En service de soins palliatifs depuis plusieurs mois, il recevait quotidiennement les visites de son épouse et de ses filles.

L’histoire de ce patient est éloquente. Quand il raisonne, il veut l’euthanasie, puis il veut la sédation. Et quand il revient au réel, ce n’est pas le moment, il y a toujours autre chose à faire du début de la maladie jusqu’à la fin. Son ambivalence est permanente.

C’est un phénomène bien connu déjà depuis longtemps et en particulier par les services de soins palliatifs. C’est vrai quelles que soient les maladies terminales. Cette ambivalence en fin de vie est tout à fait classique, respectable et salutaire même. Le tout, c’est de pouvoir l’entendre. Or si on légalise l’euthanasie ou le suicide assisté, on va priver ces patients de cette liberté de parole. Certains n’oseront plus l’évoquer par peur du passage à l’acte, par peur des conséquences. Alors qu’aujourd’hui ils ont cet espace de liberté de pouvoir dire ce qui les habite et c’est un appel à l’écoute, au dialogue.

Pour ce patient, derrière sa revendication d’euthanasie, il y avait le souhait de parler simplement, de dire ce qui le faisait souffrir et que ce soit entendu.

Après 40 ans d’exercice de la médecine, et de la neurologie en particulier, je fais encore le constat aujourd’hui de la capacité des personnes à s’adapter à la nouvelle condition que crée la maladie, même la plus handicapante. Au fond de chacun je constate que des ressources vont être mobilisées pour donner un autre sens à sa vie et souvent moins superficiel qu’auparavant.

 *Procédé qui permet d’administrer directement des nutriments dans l’estomac lorsqu’une alimentation par la bouche est impossible.

Pour aller plus loin : Etude sur les enjeux de la loi Leonetti pour les patients atteints de SLA

Prévention du suicide : le dispositif VigilanS mesure son efficacité

Prévention du suicide : le dispositif VigilanS mesure son efficacité

Santé Publique France vient de publier une étude mesurant l’efficacité d’un dispositif de prévention du suicide. A l’occasion de la journée mondiale de prévention du suicide, la publication des résultats montre les bénéfices d’un dispositif de recontact.

 

Qu’est-ce que le dispositif VigilanS ?

Créé en 2015 dans la région Hauts de France, et étendu aux autres régions par la suite, ce dispositif organise un réseau de recontact et d’alerte, par des professionnels de santé, autour d’une personne ayant fait une tentative de suicide.

L’observatoire national du suicide a publié des données chiffrées sur les comportements suicidaires. Environ 9200 personnes se suicident par an, et les tentatives de suicide entrainent 100,000 hospitalisations et environ 200,000 passages aux urgences. Par ailleurs, 75% des récidives ont lieu dans les 6 mois après une tentative. La survenue d’une tentative de suicide multiplie par 20 le risque d’une autre tentative dans l’année qui suit, et par 4 le risque de suicide ultérieur. Le risque de récidive est donc très important après une tentative de suicide.

Pour une personne sortant d’une hospitalisation pour une tentative de suicide, le dispositif comporte plusieurs outils :

  1. La proposition et la remise, si elle l’accepte, d’une carte ressource avec un numéro vert gratuit, pour un contact permanent en cas de mal-être ou de problème.
  2.  Si la personne a fait plusieurs tentatives, un contact par téléphone dans les 10 à 20 jours qui suivent sa sortie d’hôpital, et l’envoi d’une carte personnalisée ou d’un SMS tous les mois durant quatre mois.
  3. Au bout de 6 mois, la personne est contactée pour une évaluation téléphonique détaillée et la décision ou non de reconduite du dispositif.

 

Quels sont les résultats de l’évaluation du dispositif ?

L’évaluation de VigilanS a porté sur les données des 6 premières régions d’expérimentation sur la période 2015-2017. L’étude s’intéresse à environ 23,000 personnes ayant fait une tentative de suicide, la moitié ayant intégré le dispositif et l’autre moitié non.

Les chiffres montrent une nette différence. Santé publique France note que : “Dans le premier groupe, 3 214 réitérations suicidaires ont été identifiées contre 5 014 pour les patients non exposés. Ces résultats montrent une diminution de 38 % du risque de réitération suicidaire (passage aux urgences ou hospitalisation pour tentative de suicide ou décès par suicide) dans les 12 mois suivant leur tentative de suicide chez les patients VigilanS. L’efficacité du dispositif est observée quel que soit le sexe ou s’il s’agit de la première tentative de suicide de la personne ou non.”

Cette forte diminution du risque de récidive est une bonne nouvelle en soi.

Santé Publique France ajoute également un élément économique : “L’évaluation médico-économique a montré que 1 € investi dans le dispositif VigilanS permettrait d’économiser 2 € de coût de santé. En moyenne, 248 € de coûts de santé seraient ainsi économisés pour chaque patient inclus dans VigilanS.”. Rapportée à l’ensemble des personnes de l’étude, par exemple, l’économie se monterait à 2.85 M€.

 

La prévention du suicide reste un enjeu majeur en France

D’après les données disponibles, le nombre de suicides serait à la baisse tendancielle en France (plus de 12000 suicides en France au milieu des années 80). D’après un rapport de l’OMS en 2019, la France se classait 75° sur 183 pays pour son taux de suicide. Celui-ci -12.3 pour 100,000 habitants en 2017- reste au-dessus de la moyenne des pays européens. Ce taux est nettement plus élevé chez les hommes que chez les femmes et augmente avec l’âge.

 

Les bénéfices du dispositif VigilanS pour préserver des vies soulignent l’importance du lien relationnel, ainsi que le besoin d’une prise en charge adéquate par le système de santé. Alors que les débats sur la fin de vie se poursuivent, ces éléments, la relation humaine et la qualité des soins, devraient être le cœur d’une amélioration de la prise en charge de la fin de vie, et non la légalisation d’une mort administrée qu’elle qu’en soit la forme. Plusieurs articles de psychiatres ont récemment alerté sur le basculement que représenterait une légalisation du suicide assisté alors que la prévention est un objectif majeur.

 

Pour aller plus loin : L’effet Werther ou la contagion suicidaire

Maladies neurodégénératives : alerte sur la situation des aidants

Maladies neurodégénératives : alerte sur la situation des aidants

Maladies neurodégénératives : alerte sur la situation des aidants

 

Le 12 juillet, Sandrine Josso, députée de Loire-Atlantique, et Laure Lavalette, députée du Var, co-rapporteures de la mission flash sur les maladies neurodégénératives, ont présenté leurs conclusions à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale. Inspirée par des interpellations d’aidants à bout de souffle, cette mission dresse une série de recommandations pour mieux soutenir les nombreuses personnes atteintes de ces maladies.

Elle alerte particulièrement sur la situation des aidants qui connaissent parfois de grandes difficultés pour accompagner leur proche malade.

 

De quoi parle-t-on ?

L’expression « maladies neurodégénératives » (MND) ou « maladies neuroévolutives » désigne des « maladies chroniques progressives qui touchent le système nerveux central » (Santé publique France).

Selon le rapport de la mission flash, ces maladies touchent 47 à 50 millions de personnes dans le monde, dont 60 à 70 % pour la seule maladie d’Alzheimer. En France, on dénombre 1 200 000 personnes touchées par la maladie d’Alzheimer, 300 000 cas de maladie de Parkinson et 110 000 personnes atteintes de la sclérose en plaques. On s’attend à une progression de ces effectifs avec le vieillissement de la population.

L’inertie des pouvoirs publics

La mission flash rappelle que depuis le début des années 2000, plusieurs plans ont été mis place pour structurer l’action publique. Le plan « maladies neurodégénérératives » (dit PMND), dernier en date, couvrait la période 2014-2019. Le rapport d’évaluation de ce plan pointe le nombre trop important de mesures et la « trop grande ambition de certaines », empêchant une totale mise en œuvre du plan. Ce plan a été relayé par une feuille de route 2021-22. La mission flash relève que celle-ci n’a pas fait l’objet d’une évaluation publique à ce jour et qu’aucun nouveau plan n’a été encore lancé.

 
 

Fin 2022, les associations membres du Collectif Maladies neurodégénératives (MND) ont d’ailleurs alerté la Première Ministre sur les conséquences d’une inertie politique et ont appelé le gouvernement à prendre ses responsabilités et à s’engager sur des propositions concrètes.

La mission flash appelle à « diligenter rapidement un nouveau plan pluriannuel qui prenne en compte les MND « rares » et qui associe les malades et les aidants ».

Recommandations

La mission flash formule une série de recommandations pour mieux accompagner les personnes atteintes de ces maladies.

Meilleure connaissance et prévention

Partant du constat que les personnes atteintes de ces maladies sont mal connues, ce qui entrave le suivi et l’analyse des causes, la mission flash préconise la création de registres nationaux et départementaux. Elle propose également de développer la prévention à travers une campagne nationale d’information.

Puis elle demande que soit entreprise une réflexion visant à fusionner la prestation de compensation du handicap (PCH) et l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et de supprimer la barrière d’âge (60 ans). En effet, actuellement, le niveau de prise en charge peut varier très fortement en fonction de l’âge auquel survient la maladie (avant ou après 60 ans).

Formation et recherche

La mission flash alerte particulièrement sur le manque de neurologues dans certains départements et les impacts sur la prise en charge des patients et sur la durée de « l’errance de diagnostic ». Elle relève que certains professionnels « connaissent mal les MND et peuvent faire les mauvais diagnostics ». Pour pallier ces difficultés, la mission préconise d’augmenter le nombre de neurologues et de renforcer leur formation. La recherche doit aussi être renforcée, notamment sur les causes des MND, encore mal connues.

Un meilleur soutien des aidants au cœur des préconisations

Dans leur communication, les co-rapporteures de la mission flash ont tenu à alerter sur la situation difficile des aidants. Selon le baromètre Orcip 2016, les aidants sont exposés à un risque de surmortalité de 60% dans les trois ans qui suivent le début de la maladie de leur proche et un aidant sur trois meurt avant son proche aidé de 60 ans ou plus.

Ainsi, la mission flash propose une série de mesures pour mieux les soutenir :

  • Mettre en place des contrôles médicaux réguliers,
  • Soutenir les associations de patients et d’aidants,
  • Créer un statut unique de l’aidant, quelle que soit leur relation familiale avec la personne aidée,
  • Inscrire un droit pour l’aidant à rompre son contrat de travail,
  • Faciliter le départ à la retraite de l’aidant à l’âge légal (sans décote),
  • Assouplir l’allocation journalière du congé de proche aidant.

Enfin, la mission flash est revenue sur le « droit au répit » institué par la loi de 2015 sur l’adaptation de la société au vieillissement. La mission a souligné que pour rendre ce droit effectif, les structures actuellement en place sont très insuffisantes. Elle a cité l’expérience réussie du Village landais Alzheimer voulu par Henri Emmanuelli, avec un taux d’encadrement bien au-dessus de la moyenne, mais unique en son genre en France. La mission flash appelle à sortir d’un modèle trop centré sur l’EHPAD, qui n’est pas adapté à tous les patients, et à créer plutôt des unité d’accueil de jour adaptées selon le degré de dépendance.

Aujourd’hui, alors que certaines maladies neurodégénératives sont bien souvent citées pour justifier une évolution de la loi sur la fin de vie, on voit que bien des choses restent à faire pour mieux accompagner les personnes atteintes de ces maladies et leurs proches. Il est urgent de mettre en place un nouveau plan pluriannuel en lien avec les associations de patients et d’aidants. En outre, comme l’a souligné la députée Monique Iborra lors de la communication de la mission flash, les difficultés auxquelles font actuellement face les personnes touchées par les MND et leurs proches pourraient être abordées dans une loi grand âge et autonomie, qui s’avère plus que jamais nécessaire.

maladies neurodégénératives : alerte sur la situation des aidants

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Le marché de la procréation : un salon qui en dit long

Le marché de la procréation : un salon qui en dit long

Le marché de la procréation : un salon qui en dit long

 

Pour la 4ème année consécutive se tiendra ces 2 et 3 septembre à Paris le « salon de la fertilité et de la parentalité ». Renommé cette année avec les mots anglais « Wish for a Baby », ce salon qui s’appelait jusqu’alors « désir d’enfant » suscite depuis sa création la polémique, puisqu’il a déjà permis à des exposants, notamment des entreprises étrangères, de faire la promotion et de proposer des « prestations » interdites en France et moralement contestables, comme la gestation pour autrui.

Bien qu’il propose des conférences qui semblent intéressantes et équilibrées sur des problématiques douloureuses comme l’endométriose ou les moyens de préserver la fertilité, ce salon qui se targue sur son site de n’être qu’un « événement purement informatif et non commercial » donne malgré tout un aperçu tristement parlant de quatre réalités modernes.

D’abord, celle que la procréation humaine constitue et alimente un marché (in)humain, mondial et colossal. Les exposants et les conférenciers viennent de République Tchèque, Ukraine, Espagne, Etats-Unis, Pays-Bas, Danemark, Royaume Uni et aussi de France, bien sûr.

Ensuite, que depuis plusieurs décennies, et surtout depuis l’apparition de la fécondation in vitro et de la main-mise de la technique sur l’embryon et les gamètes, les biotechnologies n’ont eu de cesse de transformer le regard porté sur la procréation humaine : la vie reçue mue en vie fabriquée, contrôlée, passée au crible des tests génétiques…

Mais aussi, que, de plus en plus, le désir d’enfant est en mutation. Ce désir génère une exigence et se formule désormais comme un « droit ».

Enfin, ce droit tend à s’individualiser, comme si la procréation était devenue un attribut personnel, une capacité personnelle, individuelle, et non plus la seule fonction humaine parmi toutes qui se vit à deux, dans l’altérité sexuelle.

Il y a ainsi Cryos International, la banque de sperme danoise qui “exporte” dans le monde entier, qui viendra expliquer « comment ça fonctionne ». Amnios In Vitro Project, société espagnole qui propose la « méthode ROPA » pour couples de femmes, aussi appelée “maternité partagée”, qui consiste à inséminer l’ovocyte d’une femme avec un donneur de sperme, puis à implanter l’embryon dans l’utérus de sa partenaire…

Une pratique interdite en France. Vida Fertility Institute, une chaine de clinique de procréation, expliquera la manière dont on peut obtenir un ovocyte en Espagne. Quant à la société « IVF Couriers », elle viendra expliquer comment se passe le transport international d’embryons, ovocytes et gamètes… ce qui n’est pas sans rappeler la sordide mais brillante enquête de la journaliste Louise Audibert menée en 2020.

Autre information notable, la banalisation de l‘eugénisme technologique est également au rendez-vous. Les kits « FIV avec don d’ovocytes ou double don avec Diagnostic Génétique Pré-implantatoire sur les embryons obtenus » seront présentés par plusieurs conférenciers et exposants étrangers. Comme Tree of Life, une chaine de société californienne, qui donnera un enseignement sur « les innovations en matière de planification familiale : une plongée approfondie dans la FIV, le test génétique préimplantatoire et le don d’ovocytes »…

Nous voyons bien que nous sommes dans l’ère de la fabrique et de la marchandisation du vivant. L’embryon humain, les ovules, les spermatozoïdes sont devenus des produits marchands. La procréation artificielle sert des desseins plus larges que la seule réponse à une infertilité affectant un couple homme-femme, en âge de procréer. Elle sert une nouvelle économie, pétrie de valeurs libérales du libre choix et de l’individu tout puissant.

C’est un système dans lequel les personnes, acheteurs, ressources ou produits, deviennent elles-mêmes les moyens asservis à cette « économie de la vie ».

Ce salon en dit long sur les enjeux et les défis qui entourent la protection de la dignité de la procréation. Nous voyons bien à quel point il devient urgent de penser l’humain, de sortir de la fascination de la technique ou de la logique de marché.

 

Infertilité et assistance médicale à la procréation : enjeux actuels et propositions.

PMA à tout prix

L’aide médicale à mourir (AMM), l’euthanasie au Canada, source d’économies ?

L’aide médicale à mourir (AMM), l’euthanasie au Canada, source d’économies ?

L’aide médicale à mourir (AMM), l’euthanasie au Canada, source d’économies ?

 

Analyse approfondie des coûts de l’aide médicale à mourir au Canada.

 

Selon une étude publiée en 2017 avant le vote de la loi C-14, des économies budgétaires étaient estimées entre 35 et 137 millions de dollars par an. La Loi C-14 a autorisé en 2016 l’euthanasie pour les personnes dont la mort était raisonnablement prévisible à court terme. En 2020, avant le vote d’une loi C-7, élargissant les conditions d’accès à l’AMM, un rapport officiel estimait que l’extension de l’accès à l’AMM permettrait de réaliser 149 millions de dollars d’économies.

Selon leurs auteurs, ces estimations s’inscrivent dans une démarche de transparence et d’évaluation de l’impact budgétaire de mesures législatives. Tout en quantifiant les économies qui découleraient de la mise en place d’un système d’euthanasie, ils réfutent l’idée que la légalisation de l’AMM viserait des économies.

Une récente étude sur le dispositif canadien publiée sur le site des Presses universitaires de Cambridge et analysée par une précédente note expert, a pointé cependant le risque que l’accès à l’euthanasie soit privilégié au détriment d’un accès à des soins appropriés mais coûteux.

Quelle est la fiabilité de ces estimations ?

Commandé par un sénateur pour estimer les coûts financiers découlant du projet de loi C-7, ce rapport du bureau du directeur parlementaire du budget présente « une ventilation entre les coûts qui résultent de la loi actuelle (C-14) et les coûts supplémentaires qu’entraînerait l’élargissement proposé de l’admissibilité à l’AMM (projet de loi C-7) ».

Il reprend la méthodologie de l’étude de 2017 et l’ajuste en extrapolant les statistiques mises en place depuis l’application de l’AMM en 2016. Les économies résultant de la loi C-14 (en prenant en compte les coûts d’administration de l’AMM) étaient ainsi estimées à 86,9 millions de dollars en 2021, en considérant que 6465 décès sont attribuables à l’AMM. Si la loi C- 7 était votée, 1164 décès résulteraient de l’extension de l’AMM, représentant 62 millions de dollars d’économies. Au total, l’extension de l’accès à l’AMM permettrait de réaliser 149 millions de dollars d’économies au total.

Ces estimations et notamment celles de la 1ère étude de Trachtenberg et Manns reposent sur la méthodologie d’un article[1] publié aux Etats Unis 20 ans plus tôt, lequel s’appuyait sur 3 facteurs pour évaluer les économies potentielles issues de la légalisation du suicide médicalement assisté :

  • La proportion du nombre de patients candidats à l’euthanasie,
  • Les effets de l’”intervention”, c’est à dire l’euthanasie, sur le reste à vivre du patient,
  • Les coûts totaux de prise en charge de la fin de vie.

 

Passées au crible des statistiques, les estimations réalisées au regard de chacun de ces facteurs s’avèrent peu fiables voire erronées.

Ainsi du nombre de « patients » candidats à l’euthanasie. Alors que le rapport de 2020 anticipait 6465 décès dus à l’euthanasie en 2021 soit 2,2% du nombre total de décès, 9845 décès par “AMM-C14” ont été recensés en 2021 (soit 3,3% des décès) selon les statistiques officiellesCes mêmes statistiques révèlent aussi l’erreur d’estimation du nombre de décès supplémentaires attribuables à l’AMM dans le cadre de l’extension C-7. 1164 décès par AMM C-7 étaient estimées par le rapport. En réalité, 219 personnes sont décédées dans ce cadre.

Pour estimer le « reste à vivre », l’étude de Trachtenberg et Manns s’est appuyée sur une étude conduite aux Pays Bas fondée uniquement sur des estimations médicales prédictives sur enquêtes, sans vérification possible et profondément dépendantes de la pathologie et de la personne.

En revanche, elle fait l’impasse sur des données montrant que le diagnostic des médecins sur la durée de vie résiduelle d’un patient en fin de vie est précis seulement dans 20 % des cas : dans 63% des cas la durée de vie est surestimée. La tendance à la surestimation a non seulement pour effet d’augmenter les économies affichées mais a aussi des conséquences sur la date d’admission tardive dans les services de fin de vie ce qui peut entrainer une utilisation de traitements lourds très coûteux au lieu d’orienter vers des structures palliatives par exemple pour améliorer la qualité de vie.

Alors que le rapport de 2020 estimait que « la vie des personnes sera raccourcie de trois mois dans 45% des cas », en 2019 les statistiques officielles révélaient que 60% des personnes ayant formulé une requête d’AMM sans l’avoir obtenue meurent dans les 10 jours qui suivent leur demande.

Enfin pour évaluer les coûts de santé des patients demandant l’AMM, le rapport de 2020 a appliqué une réduction des coûts standards de 50% pour 80 % des personnes demandant l’AMM en prenant l’hypothèse que cette proportion aurait bénéficié de soins palliatifs. Or, cette proportion a été fortement relativisée par un récent article qui mentionne que ”l’accès aux soins palliatifs avant la proposition d’AMM aux patients était en fait beaucoup plus faible que rapporté. “. Par ailleurs, le montant de réduction de 50% est une simplification majeure par rapport à la diversité des pathologies des personnes demandant l’AMM au Canada (cancers principalement) engendrant des coûts variant du simple au triple au sein de la catégorie des cancers.

Au final, l’estimation d’économies potentielles résultant des dispositifs d’Aide Médicale à Mourir au Canada s’appuie sur des hypothèses peu fiables et sans base scientifique et statistique. Ce type de publication interroge néanmoins. Dans des pays vieillissants où les coûts de santé pèsent sur les comptes publics, la légalisation de l’euthanasie pourrait être interprétée comme une démarche des gouvernements pour faire des économies aux dépens du bien-être et de l’accompagnement des citoyens.

 

 

[1] Emanuel EJ, Battin MP. What are the potential cost savings from legalizing physician-assisted suicide. N Engl J Med 1998;339:167-72, 1998