[CP] – Docteur, ai-je le droit de vivre encore un peu ?  L’euthanasie et le suicide assisté démasqués

[CP] – Docteur, ai-je le droit de vivre encore un peu ? L’euthanasie et le suicide assisté démasqués

Un peu plus d’un mois après le lancement de la convention citoyenne sur la fin de vie, le porte-parole d’Alliance VITA Tugdual Derville prend part au débat avec un essai intitulé Docteur, ai-je le droit de vivre encore un peu ?, à paraitre le 19 janvier chez Salvator.

 

Nourri de rencontres avec des personnes souffrantes, des soignants et des personnalités politiques, mais aussi de confrontations médiatiques avec des partisans de l’euthanasie, ce livre incisif est à la fois un témoignage personnel et un manifeste solidement argumenté dans lequel apparaît tout l’engagement de l’auteur auprès des plus fragiles. Avec pédagogie, Tugdual Derville déconstruit la pseudo-liberté mise en avant par les défenseurs d’un prétendu « droit de choisir sa mort » : en réalité, alerte-t-il, c’est la place des plus vulnérables qui est menacée.

Présentation de l’auteur de Docteur, ai-je le droit de vivre encore un peu ?

 

Tugdual Derville est essayiste, porte-parole d’Alliance VITA, co-initiateur du courant pour une écologie humaine, et fondateur d’« À bras ouverts », association d’aide à l’enfance porteuse de handicap. Il est également l’auteur de La bataille de l’euthanasie : enquête sur les sept affaires qui ont bouleversé la France (Salvator, 2012) ; Le temps de l’homme (Plon, 2016) ; Nouvelles recettes de bonheur : 71 actions d’écologie humaine (Emmanuel, 2020).

 

Pour recevoir un exemplaire merci de contacter :

Claire-Anne Brulé

+ 33(0)6 67 77 14 80

claire-anne.brule@alliancevita.org

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Université de la vie 2023 « Vivre en réalité » – Première soirée : Un monde à consoler

Université de la vie 2023 « Vivre en réalité » – Première soirée : Un monde à consoler

Un monde à consoler : c’est sur ce thème que s’est ouverte hier l’Université de la vie 2023.

Près de 7000 participants se sont ainsi retrouvés dans plus de 150 villes en France et à l’étranger pour se former, s’informer, réfléchir et pour agir face aux défis bioéthiques, politiques, culturels et humains à relever aujourd’hui. S’il est riche de promesses, de splendeur, de créativité, le monde est aussi marqué par des réalités oubliées, des inégalités, des souffrances occultées ou bien produites.  Face aux enjeux relatifs à la vie et à la protection de la dignité humaine, la réalité et en particulier celle de la fin de vie, nécessite d’être pensée et soignée dans « un monde à consoler ».

C’est le philosophe Emmanuel Leclerc qui a fait entrer les participants dans la réflexion sur la réalité.  Ce docteur en Philosophie morale, expert en Éthique et en Anthropologie, a un parcours étonnant! Né dans un bidonville en Inde, il a été abandonné dans une poubelle, puis retrouvé par Mère Teresa elle-même, recueilli par les missionnaires de la charité puis adopté par une famille en France.

Pour lui, « la connaissance de la réalité est un chemin pour accéder à la vérité. Dans une société en manque de repères, certains ont besoin de se retrouver dans leur propre bulle. Aux jeunes particulièrement, il faut apprendre à être présents car le présent est un repère : c’est la rencontre c’est-à-dire accueillir l’autre tel qu’il est et non pas tel qu’on voudrait qu’il soit. Pour vivre dans la réalité, il faut aussi changer de regard sur elle ». S’il est des lois qui transgressent l’unité de l’humain, le philosophe « invite à faire silence pour écouter la morale inscrite au cœur de l’homme qui lui indique ce qu’il doit faire pour le bien commun ».

« Panser la fin de vie », tel est le thème sur lequel s’est ensuite penché Tugdual Derville, porte-parole d’Alliance VITA et fondateur du service d’écoute SOS Fin de vie. Pour lui, « toute fin de vie appelle la solidarité, par la présence, l’aide et la consolation. Il faut déjouer le piège de « l’idéalisation » de la mort maitrisée mais violente, par euthanasie ou suicide assisté. En définitive, panser la fin de vie, c’est passer d’un monde d’objets à un monde de précieuses relations dont on prend soin ». Tugdual prend sa part dans le débat actuel qui pourrait aboutir à la légalisation de l’euthanasie ou du suicide assisté en publiant chez Salvator le 19 janvier un livre intitulé : Docteur, ai-je le droit de vivre encore un peu ?

Responsable de Thadeo, service d’écoute d’Alliance VITA dédié aux soignants, Clotilde Vitrant a ensuite proposé d’entrer au « cœur du soignant ». Forte de son expérience du terrain en tant qu’infirmière en gériatrie, soins palliatifs et cancérologie, et formé en éthique, Clotilde nourrit également son enseignement des témoignages reçus à Thadeo. Pour elle, « il faut redonner aux métiers du soin sens et valeur, remettre l’éthique et la personne humaine au centre du système de santé et offrir aux professionnels de santé des conditions de bien-être qui leur permettent de rester gardiens et artisans de vie ».

La soirée s’est achevée avec le poignant témoignage de Sophie Druenne, infirmière en maison de soins palliatifs sur la réalité de l’accompagnement global de la personne qui caractérise ces soins prodigués aux patients en fin de vie ou souffrant de longue maladie. Elle nous a rappelé l’importance des soins palliatifs et à quel point il est primordial de développer partout une culture palliative : « tout ce qui reste à faire quand il n’y a plus rien à faire ».

Dans de très nombreuses villes de France et de l’étranger, les soirées se sont conclues par des témoignages locaux : de médecins, soignants, de bénévoles, d’écoutants, de parents….

Prochaine soirée le 16 janvier autour d’« Une réalité à écouter ».

 

Edition du génome : un nouvel essai clinique expérimental en thérapie génique

Edition du génome : un nouvel essai clinique expérimental en thérapie génique

Traitement expérimental pour une leucémie agressive

Alyssa, une jeune adolescente britannique atteinte d’une forme de leucémie agressive affectant ses cellules immunitaires et ne répondant pas aux traitements habituels – notamment chimiothérapie et greffe de moelle osseuse – a reçu pendant 6 mois un traitement expérimental. Sans lui, a déclaré l’hôpital dans son communiqué, sa seule option était les soins palliatifs. Cet essai clinique, réalisé par les médecins du Great Ormond Street Hospital for Children (GOSH) de Londres, a été rapporté lors de la réunion annuelle de la Société Américaine d’hématologie en décembre dernier.

Thérapie génique fondée sur l’édition du génome

C’est ainsi qu’en mai 2022, Alyssa est devenue la première patiente déclarée au monde à recevoir des cellules CAR-T [1]génétiquement modifiées. Il s’agit d’un traitement expérimental qui relève du domaine de la thérapie génique et se fonde sur les techniques récentes d’édition du génome. Ces cellules sanguines – provenant d’un donneur sain – ont été préalablement génétiquement modifiées pour les rendre capables de « traquer » et « tuer » les cellules T cancéreuses d’Alyssa. 28 jours plus tard, considérée comme étant en rémission, elle a pu recevoir une seconde greffe de moelle osseuse pour rétablir son système immunitaire.

La préparation de ces cellules relève d’une technologie innovante et a nécessité plusieurs étapes :

  • Recueil chez un donneur sain
  • Modification afin qu’elles ne soient pas « reconnues » et attaquées par le système immunitaire de la patiente.
  • Modification pour qu’elles ne s’attaquent pas entre elles.
  • Modification pour les rendre « invisibles » aux autres traitements anticancéreux.
  • Modification pour que les cellules CAT-T puissent reconnaître et attaquer les cellules T cancéreuses de la patiente.

La thérapie génique fondée sur les techniques d’édition du génome offre de réelles promesses de traitement et de progrès thérapeutique. Six mois après la greffe, selon ses médecins, Alyssa se porte bien et poursuit son suivi post-greffe au GOSH.

 

Dignitas : Le suicide assisté non reconnu par le droit européen

Dignitas : Le suicide assisté non reconnu par le droit européen

Suicide assisté : le Conseil d’Etat déboute une nouvelle demande de l’association Dignitas

 

Nouvelle tentative par l’association suisse Dignitas pour un droit à reconnaitre le suicide assisté., nouveau refus du Conseil d’Etat.

Après sa décision en décembre 2021 de ne pas transmettre une QPC (Question Prioritaire de Constitutionnalité) concernant l’interdiction du pentobarbital, le Conseil d’Etat a de nouveau refusé de renvoyer au Conseil Constitutionnel une demande de l’association Dignitas déposée en septembre dernier. Sa décision a été rendue le 29 décembre 2022. Cette demande enjoignait le Premier Ministre et le Ministre des solidarités et de la santé d’abroger des dispositions d’un arrêté fixant la liste des substances psychotropes, et d’un autre arrêté fixant la liste des substances classées comme stupéfiants afin de prévoir une exception “permettant à chacun de pouvoir mettre fin à ses jours consciemment, librement et dans la dignité“.

Comme le remarquait la presse en septembre dernier, cette tactique de Dignitas consiste à vouloir passer par la voie juridique, considérant que la voie parlementaire n’avance pas assez vite vers la légalisation de l’euthanasie et le suicide assisté qui est un des buts de Dignitas. L’avocat français de Dignitas estimait que la situation est bloquée et que “la France refuse le principe d’un quelconque aménagement de sa législation“.

La tactique de Dignitas a également un volet médiatique. Chaque recours permet une couverture de presse, et distille l’idée dans le grand public qu’une situation inchangée est en soi mauvaise, dépourvue d’évolution. Il s’agit en fait d’une grille de lecture qui s’apparente à un “prêt à penser” commode mais faux. Aménager une législation n’est pas un objectif en soi. Déplore-t-on l’absence d’aménagement de l’abolition de la peine de mort ?

Décision du Conseil d’État concernant la demande de Dignitas

La décision du Conseil d’Etat intervient alors que les pouvoirs publics ont relancé les débats sur la fin de vie depuis septembre dernier. Celui-ci motive son refus en remarquant que “Les articles 2, 8 et 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, relatifs respectivement au droit à la vie, au droit au respect de la vie privée et familiale et à la liberté de pensée, de conscience et de religion, tels qu’interprétés par la Cour européenne des droits de l’homme, …, n’impliquent pas par eux-mêmes de prévoir l’aménagement au régime des substances relevant du régime de police spéciale en litige réclamé par l’association pour l’exercice du droit qu’elle revendique“.

Le Conseil d’État a ainsi estimé que le droit européen et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme n’impliquaient pas un droit à reconnaitre le suicide assisté. L’aménagement de la réglementation des substances toxiques, réglementation qui a pour but de protéger la santé publique des Français, ne s’impose donc pas.

 

Ecouter, une clé de confiance pour 2023 ?

Ecouter, une clé de confiance pour 2023 ?

Chacun de nous est concerné par l’écoute. A la fois disposition intérieure et disponibilité à l’autre, l’écoute permet la confiance.

Le site d’Alliance VITA propose d’ailleurs 3 vidéos de formation destinées à tous ceux qui veulent creuser cette aptitude dans le cadre de la vie quotidienne. Ces vidéos sont animées par Caroline Roux et sont le fruit de la longue expérience d’Alliance VITA dans ce domaine.

L’écoute fait l’objet de nombreux livres, théories, colloques, sous de multiples angles : psychologiques, sociologiques, spirituels…Parmi les approches proposées, l’écoute active a été thématisée à partir du travail du psychologue américain Carl Rogers. On ne peut réduire l’écoute à des techniques froides s’appliquant à toute situation. L’écoute nécessite de s’intéresser à l’autre pour lui-même. Cependant, les professionnels ont développé quelques conseils pratiques utiles dans toute conversation amicale ou en situation de dialogue tendu.

En voici quelques-uns.

Utiliser des mots comme “oui”, “OK”, “je vois” pour manifester à l’autre votre attitude d’écoute.

La technique de la reformulation peut aider à lui signifier que vous le comprenez, et éviter des malentendus.

Identifier et nommer les émotions que ressent votre interlocuteur si celui-ci est envahi d’émotions négatives fortes.

Poser des questions ouvertes. Ces questions ouvertes invitent à la conversation et peuvent aider l’interlocuteur à reprendre pied au milieu de ses émotions et ses pensées.

Parler en “je” et éviter le “tu qui tue”.

Accepter des temps de silence. Ce silence peut aider l’interlocuteur à collecter ses pensées et à se rendre compte de la présence de l’autre.

Un article de presse américaine a récemment illustré l’intérêt de ces outils dits “d’écoute active”. Un ancien membre du FBI (Federal Bureau of Investigation), responsable de l’unité de négociation de crise (prise d’otage, détournement d’avions…) témoignait de son expérience en rappelant que “fondamentalement, les gens veulent être reconnus“. Quand les personnes se rendaient à la police sans mettre leur menace à exécution, le service les interrogeait en leur demandant ce qui les avait fait changer d’avis. La réponse était souvent : “Je ne me souviens pas de ce que vous avez dit, mais j’ai aimé la façon dont vous le disiez“.

 

[CP] – Lancement de l’Université de la vie le 9 janvier 2023  « Vivre en réalité »

[CP] – Lancement de l’Université de la vie le 9 janvier 2023 « Vivre en réalité »

Cette année le cycle de formation aux enjeux bioéthiques créé et animé par Alliance VITA, propose des pistes de réflexion pour « Vivre en réalité ». Près de 140 villes en France et plus de 50 villes à l’étranger diffuseront les quatre soirées de formation les lundis 9, 16, 23 et 30 janvier 2023.

Aux côtés des intervenants d’Alliance VITA, des experts et des témoins inviteront les participants à poser un regard ajusté sur la réalité pour agir et avancer sans perdre pied.

programme udv 2023

Informations et inscriptions sur www.universitedelavie.fr

Contact presse
contactpresse@alliancevita.org

Estimation et analyse des demandes d’euthanasie en France

Estimation et analyse des demandes d’euthanasie en France

statistique euthanasie 1 scaled

Estimation et analyse des demandes d’euthanasies en France

 

Introduction et objectifs

Dans le débat actuel sur la fin de vie, les demandes persistantes d’euthanasies sont fréquemment invoquées pour justifier sa légalisation. Dans son avis 139, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) lui-même s’appuie sur une étude pour justifier son revirement sur l’euthanasie et le suicide assisté.

L’objet de cette note d’analyse est d’étudier l’évolution entre 2012 et 2022 de l’estimation et de la compréhension des demandes d’euthanasie en France à partir d’études scientifiques fréquemment citées dans le débat.

I. Quelle est la réalité chiffrée de la demande persistante d’euthanasies en France hors et au sein des services de soins palliatifs ? (Les demandes persistantes sont des demandes répétées dans la durée par le patient lui-même)

 

1) Une estimation basée sur l’ensemble des décès – Enquête de l’INED “ La fin de vie en France”

L’enquête “La fin de vie en France” a été réalisée pour la première fois par l’INED en 2010 et n’a pas été actualisée depuis. 14 080 questionnaires comprenant 40 questions fermées ont été envoyés à 11 828 médecins certificateurs. 5 217 questionnaires ont été reçus en retour, soit un taux global de participation de 40 % ce qui est considéré comme suffisamment représentatif. Seuls 4723 questionnaires remplis ont été considérés comme exploitables.

Dans l’analyse de l’enquête [1], “selon les médecins enquêtés, 16 % des personnes décédées ont exprimé à un moment ou à un autre le souhait d’accélérer leur mort, mais les demandes explicites d’euthanasie restent extrêmement rares en France : elles concernent 1,8 % des décès, soit 44 personnes sur un échantillon d’environ 2 200 personnes ayant fait l’objet d’une décision médicale en fin de vie.”

Cette enquête déclarative menée auprès des soignants ne mesure pas l’évolution et la persistance de la demande d’euthanasie au cours du temps.

2) Des estimations de requêtes au sein des centres de soins palliatifs

L’article de Guirimand et al [3, 2014] s’appuie sur une méthodologie différente de celle de l’enquête de l’INED. Les souhaits de mort anticipée et les demandes explicites d’euthanasie sont recueillis à partir des notes consignées par les soignants (les infirmières, les psychomotriciens, psychologues, thérapeutes) dans les dossiers des patients admis à l’hôpital en soins palliatifs.

L’approche quantitative se base sur la récupération des notes concernant les patients admis au sein de la maison médicale Jeanne Garnier (81 lits) en 2010 et 2011 soit 2157 patients qui sont restés en moyenne 13 jours dans l’hôpital. Au total 33 024 observations médicales et 195 862 observations paramédicales ont été étudiées ce qui donne un échantillon très large d’observations croisées.

Deux statisticiens ont ensuite analysé ces notes pour évaluer le type de “souhait à mourir” et les ont classés en trois catégories : “Requête d’euthanasie”, “Pensées suicidaires” et “Autres souhaits de mourir”. La catégorie “requête d’euthanasie” nécessite que la requête émane du patient et exclut toutes les requêtes faites par les membres de la famille. Le terme de “pensées suicidaires” renvoie à l’expression de l’intention de mourir de ses propres mains.

La catégorie “autres souhaits de mourir” inclut toutes les demandes de raccourcir la vie, qu’il s’agisse de passer le temps rapidement ou de mourir rapidement sans requérir explicitement l’aide d’une tierce personne. L’article n’indique pas une mesure de performance de l’algorithme de classification notamment l‘évaluation du risque de mauvaise classification. Habituellement, cette mesure de performance peut prendre la forme d’une matrice de confusion avec des vrais/faux positifs et de vrais/faux négatifs.

1
âge et durée de séjour en soins palliatifs
3
statut marital des patients en soins palliatifs
types de maladies
6
Figures 1-a / 1-e: Caractéristiques des patients ayant émis un souhait de mourir en centre de soins palliatifs issues de [3]

Sur les 2157 patients étudiés dans cet hôpital de soins palliatifs, 9% (195) ont exprimé un souhait de mourir dont 3% (61) ont exprimé une requête d’euthanasie initiale, 1% (15) des pensées suicidaires et les 6% restant (119) d’autres souhaits de mourir. Ces 195 patients étaient principalement des patientes (65%), leur durée de séjour était significativement plus élevée (24 jours en médiane) et leur consommation d’anxiolytiques (88% au lieu de 66%) et d’antidépresseurs (55% au lieu de 36%) était plus élevée que les autres résidents du centre de soins palliatifs.

Un article récent publié en 2022 [4] par Leboul et al (avec une partie des auteurs de l’étude réalisée au sein de la maison médicale Jeanne Garnier [3] associés à des acteurs du CHU de Besançon) s’appuie sur une recherche effectuée pendant un an dans 11 unités de soins palliatifs dont 5 en Bourgogne Franche Comté et 5 en Région Parisienne avec une capacité de 151 lits d’accueil au total (ces 151 lits représenteraient approximativement 4000 patients en prenant en compte le taux d’occupation des lits de la Maison Médicale Jeanne Garnier de 26,6 patients par an/lit selon l’étude Guirimand et al citée plus haut[3]).

Ainsi, par rapport à cette étude [3] de 2014, l’enquête actualisée et étendue Leboul [4] au sein de la maison Jeanne Garnier et du CHU de Besançon de 2022, montre des demandes d’euthanasie initiales plus faibles : 31 contre 61 en 2014 pour un nombre de lits presque deux fois plus important (151 lits en 2022 v/s 81 lits représentant 2157 patients en 2014). Si on regarde l’indicateur des demandes d’euthanasie par patient et par lit, celui-ci est passé de 61/81 (0,75) à 31/151 (0,21) ce qui rend encore plus rares les demandes initiales.

Si on applique le même taux d’occupation des lits de la maison Jeanne Garnier c’est-à-dire 26.6 par lit par an, alors on obtient une estimation de 0,7% demandes d’euthanasie parmi les patients en soins palliatifs. (Plus basse que les 3% estimées dans l’étude précédente.)

Parmi les 31 patients qui ont fait une demande d’euthanasie, 18 ont participé à l’étude Leboul et al, les 13 autres n’ont pas été retenus en raison de leurs capacités physiques ou cliniques ou de leur refus de participer. 9 d’entre eux ont pu réaliser les deux entretiens successifs (les autres étant décédés ou en incapacité de réaliser le deuxième entretien). Les caractéristiques de ces patients sont similaires à celles de [3] avec une majorité de femmes demandant l’euthanasie, pour la plupart atteintes de cancer.

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distribution des âges
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Figures 4-a/4-b/4-c: Caractéristiques des 18 patients ayant fait une demande d’euthanasie dans les services de soins palliatifs de Bourgogne Franche Comté et d’Ile de France (issue de [4])

3) Estimation du maintien des demandes d’euthanasie

Dans l’étude Guirimand [3], parmi les 61 demandes d’euthanasie recueillies initialement par les soignants (51% de médecins, 39% d’infirmières et 7% de psychologues), seulement 6 (10%) ont persévéré dans leurs requêtes en répétant leur demande d’euthanasie (représentant donc 0,3% des patients en soins palliatifs). Le reste de l’étude se focalise ensuite sur ces 6 patients uniquement de façon qualitative. In fine, seuls deux patients ont maintenu leur demande d’euthanasie jusqu’à leur décès.

L’article Ferrand et al [2,2012] est basé sur une enquête adressée durant l’année 2010 aux soignants de centres de soins palliatifs. Parmi les 789 services contactés, 352 (45 %) ont envoyé des données sur les demandes d’accélération de la mort dans leurs services (ce taux de réponse ne donne cependant aucune indication sur le nombre de patients totaux dans les unités répondantes).

Parmi ces requêtes d’accélération de la mort (dont 68,9% sont considérés comme des “souhaits clairs” d’euthanasies), un tiers (37%) sont persistantes, 28% disparaissent et 24% sont fluctuantes. Nous notons une différence significative entre celles, d’une part, venant des patients (34%) et des proches (39%) et celles, d’autre part, du personnel soignant qui sont très persistantes (53,1%).

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Figure 2: Persistance des requêtes initiales de hâter la mort issue de [2]

L’étude Leboul [4] permet également de regarder l’évolution de la demande d’euthanasie (maintien, arrêt, ambivalence) au gré des évènements, du vécu et des interactions. […].. Selon les auteurs « Le sentiment d’ambivalence, intrinsèque au désir de mort, peut masquer et nuancer le jeu des pulsions de vie et de mort. La réaction des soignants et leur accueil de la demande jouent aussi sur le fait d’exprimer à nouveau la demande et la forme rhétorique employée. Nous avons constaté leurs variations suite aux interactions avec des soignants et des proches et suite aux évènements liés à la maladie ».

Sur les 26 situations récoltées à partir des questionnaires venant des 31 patients qui ont fait une demande d’euthanasie, 10 sont considérées comme non persistantes par le soignant remplissant le questionnaire, 9 sont considérées comme persistantes. (6 définitions de l’évolution ne sont pas renseignées suite à un décès trop rapide et 1 donnée manquante).

La très récente étude Trimaille [5] se focalise particulièrement sur la sociologie des personnes demandant une euthanasie ou un suicide assisté avec un focus particulier sur la persistance des demandes et les caractéristiques spécifiques de cette persistance. EpiDESA2 est une étude prospective et multicentrique qui s’est déroulée de janvier à décembre 2017 en Bourgogne Franche Comté (2,8 millions d’habitants) auprès des 30 000 professionnels de santé à travers une large campagne de communication.

Le premier questionnaire permettait de recueillir les données socio-démographiques du patient, le contexte et la formulation mot pour mot de la demande.

Le second questionnaire était rempli dans les deux jours suivant la demande, avec un membre de l’Équipe mobile ou du Réseau de soins palliatifs (27 services mobiles ou fixes de soins palliatifs; les données de ressources disponibles de la région sont bien documentées), pour recueillir des renseignements sur l’état de santé physique, le niveau d’autonomie, d’indépendance, la situation familiale, sociale et psychique du patient. Le troisième questionnaire était complété une semaine après la première formulation, pour collecter des informations sur le contexte et les raisons de réitération ou non de la demande.

Les professionnels ont signalé 146 demandes d’euthanasie ou de suicide assisté sur une année.

Sur ces 146 demandes, 14 n’ont pas été retenues car elles ne correspondaient pas aux critères définis : demande formulée de manière explicite par un patient majeur, n’ayant pas de trouble neurocognitif, en fin de vie du fait d’une maladie grave, évoluée et incurable ou du fait de polypathologie gériatrique.

67 demandes ont été exclues pour d’autres raisons (l’accord de participation du patient n’a pas pu être recueilli (38) ; le patient a été perdu de vue (12) ; le patient est décédé (9) ; le patient a refusé de participer à l’étude (7) ; le questionnaire n’a pas été rempli (1)).

Finalement, 65 demandes ont été intégrées dans l’étude au jour 1. Dix patients ont été exclus entre le jour 1 et le jour 2 en raison de questionnaires incomplets ou de décès ce qui donne 55 demandes dont la sociologie et les symptômes médicaux ont été étudiés en profondeur.

Quarante demandes ont été formulées au sein d’un établissement de santé (16 en CHU et 24 en hôpital local), 7 en EHPAD, 7 en cabinet libéral et 1 au domicile du patient. Trente-deux des 55 patients bénéficiaient d’une prise en charge palliative (9 en USP –unité de soins palliatifs-, 19 par une EMSP-équipe mobile de soins palliatifs- ou RSP-réseau de soins palliatifs- et 4 par l’intermédiaire d’un LISP-lits identifiés de soins palliatifs-, d’un gériatre ou d’un médecin généraliste).

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Figures 5: comparaison des caractéristiques socio-économiques et symptômes entre les demandes persistantes et non persistantes selon [5]

Concernant la réitération des demandes au bout d’une semaine, dix patients sont exclus entre le jour 2 et le jour 7 en raison du décès soit au final 45 demandes suivies jusqu’au bout du protocole. Ainsi, parmi les 45 demandes d’euthanasie ou de suicide assisté initiales, 22 disparaissent (49%) contre 23 qui sont réitérées (51%).

Les patients qui ont réitéré leur demande ont une moyenne d’âge plus élevée (81 ans contre 75 ans), sont moins entourés 14/23 (61 %) et 22 des 23 patients disent avoir plus de difficultés à gérer leur perte d’autonomie.

En outre, les comparaisons des caractéristiques socio-économiques montrent que:

  • Les hommes maintiennent plus leur demande d’euthanasie que les femmes,
  • Les artisans, commerçants, chefs d’entreprise sont deux fois plus représentés dans les demandes réitérées.

Les caractéristiques cliniques (figures 5) ne montrent pas de différences significatives hormis dans 3 cas de figure :

  • On compte beaucoup plus de patients dont les symptômes se sont dégradés dans les derniers mois parmi les demandes qui disparaissent que parmi les demandes maintenues. Cette surreprésentation peut signifier que la dynamique de dégradation influence l’expression initiale de la demande d’euthanasie mais une fois passée cette expression, l’adaptation des traitements palliatifs permet de rétablir une stabilité des symptômes.
  • Les symptômes douloureux sont légèrement plus importants pour les demandes maintenues que pour les demandes abandonnées.
  • Les maladies neurologiques sont plus représentées dans les demandes maintenues que dans les demandes abandonnées.

Conclusion

Selon ces études, les demandes initiales d’euthanasie restent faibles en France (1,8% des décès et entre 0,7% et 3% des patients en soins palliatifs).

Les demandes persistantes sont encore plus faibles puisque les études montrent qu’entre 50% et 90% des demandes initiales ne persistent pas dans le temps.

II.Quelles sont les raisons et les motivations de ces demandes d’euthanasie ?

Après avoir estimé le nombre de demandes d’euthanasie initiales et persistantes, nous proposons d’analyser le contexte médical, les conditions de la maladie ainsi que les raisons et motivations de ces demandes.

1) La situation clinique des personnes demandant une accélération de la mort

L’étude Ferrand [2, 2012] (soutenue financièrement en particulier par la SFAP) a permis d’identifier 783 cas de requête pour accélérer la mort1 dont 476 venaient des patients, 258 de la famille ou des amis proches et 49 de l’équipe de soignants.

Parmi les 476 demandes d’accélération de la mort exprimées par les patients :

  • 79,4% des patients exprimant cette demande étaient atteints de cancer.
  • D’après les soignants, 13,9% des patients qui demandent d’accélérer la mort souffraient d’un syndrome dépressif en cours.
  • 82,4% des patients demandant une accélération de la mort ont vu soit un psychologue ou un psychiatre “ce qui peut laisser des doutes sur la capacité à prendre des décisions importantes sur sa fin de vie.”

Lorsque la demande est exprimée par le patient, les symptômes cliniques principaux (>40%) sont la souffrance physique contrôlée (55,3%), les difficultés d’alimentation (54,6%), les difficultés motrices (46%). 5% souffrent de manière incontrôlée.

Parmi les 258 demandes d’accélération de la mort exprimées par les proches, les principaux symptômes cliniques évoqués sont les difficultés d’alimentation (81,4%), les difficultés de communication (67,4%), les difficultés d’excrétion (67,4%) et les déficiences motrices (65,1%). Les douleurs incontrôlées ne sont citées que par 1,9% des proches.

Parmi les 49 demandes d’accélération de la mort exprimées par les soignants, les principaux symptômes cliniques évoqués sont les difficultés d’alimentation (79,6%), les déficiences motrices (73,5%), les difficultés d’excrétion (67,4%) et les difficultés de communication (63,3%). Les douleurs incontrôlées ne sont pas citées du tout.

2a
Figures 2-a : Symptômes cliniques du patient, parmi les patients exprimant une demande pour accélérer la mort, issus de [2]

L‘importance des symptômes évoqués par les groupes de personnes demandant une accélération de la mort (patients, proches, personnels soignants) n’est pas uniforme :

  • Les troubles cognitifs et de communication sont davantage (respectivement 5 et 4 fois plus) mentionnés par les proches et le personnel médical que par les patients ainsi que les difficultés d’excrétion (2 fois plus) et les difficultés d’alimentation (1,5 fois plus).
  • La douleur incontrôlée est peu citée par les patients (5%). Elle n’est pas perçue de la même manière par les proches ou les soignants. Ces derniers ne la mentionnent pas du tout.

2) Les motivations de la requête d’accélération de la mort

Dans l’étude Ferrand [2], le contexte de la demande se fait souvent après l’annonce de la maladie ou à la suite d’un ou plusieurs épisodes sévères sur l’évolution de la maladie (plusieurs choix possibles dans l’enquête) :

  • 39,7% après l’annonce de l’entrée en phase terminale
  • 25% en apprenant le diagnostic
  • 18,1% après un épisode sévère
  • 60,5% après plusieurs épisodes sévères

Lorsque la demande est exprimée par le patient, les motifs principaux (>40%) sont la culpabilité d’être un fardeau pour sa famille (51,3%), la peur de donner une image intolérable de soi-même (49,8%), une vie inutile (42,6%) et la peur d’une souffrance insoutenable (41,2%)

Lorsque la demande est exprimée par les proches, les motifs principaux concernent la peur de donner une image intolérable de soi-même (49,2%), une vie inutile (42,6%), la peur de la douleur insoutenable (37,2%), la culpabilité d’être un poids pour sa famille (36,8%).

Lorsque la demande est exprimée par le corps médical, les motifs principaux concernent la peur de donner une image intolérable de soi-même (51%), la culpabilité d’être un poids pour sa famille (40,8%), la peur de la mort (38,8%), et la peur de la douleur insoutenable (37,2%).

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Figure 2-b : Perceptions du patient, parmi les patients exprimant une demande pour accélérer la mort, issues de [2]

Les trois principaux motifs de demandes d’accélération de la mort chez les patients sont liés à la perception de leur image et de la qualité de leur vie relationnelle :

  1. Culpabilité d’être un fardeau pour sa famille et ses amis
  2. Peur de présenter une image intolérable de soi-même
  3. Vie inutile

Ces facteurs d’ordre psychologique et relationnel demandent une prise en charge adéquate de l’environnement familial, amical et médical.

3) Focus sur une approche nouvelle basée sur des entretiens directs qui donnent la parole aux patients qui font une demande d’euthanasie

Un article récent publié en 2022 [4] par Leboul et al (avec une partie des mêmes auteurs de la maison médicale Jeanne Garnier [3] associés à des acteurs du CHU de Besançon) permet d’enrichir cette approche qualitative pour mieux comprendre en profondeur les demandes d’euthanasie. La collecte de données a été réalisée auprès des patients et pas des soignants ce qui rend cette étude unique.

Deux entretiens approfondis d’une quarantaine de minutes ont été réalisés à une semaine d’intervalle. Grâce à ce procédé de “recherche utilisateur” (procédé utilisé en marketing par exemple), 15 entretiens riches permettent d’obtenir suffisamment d’informations.

Ainsi, cinq catégories de raisons ressortent des entretiens avec les patients justifiant selon eux leur demande d’euthanasie.

Le premier thème confirme les résultats de l’étude précédente sur les motifs des patients [2]. Si la douleur physique après des épisodes aigus des maladies constitue un motif important, on note aussi un appel des patients à reconnaitre une souffrance existentielle insupportable. Cette catégorie inclut :

  • La détresse psychologique de voir son corps et ses fonctions se détériorer, la perte de contrôle de sa vie
  • Les sentiments de solitude liés à la désespérance qu’ils ne peuvent pas partager, un sentiment d’inutilité auprès des autres, la difficulté à communiquer…
  • L’angoisse projective de souffrir dans le futur juste avant la mort notamment en faisant référence à des épisodes traumatiques vécus par des proches souffrant à l’approche de leur fin de vie

En donnant la parole aux patients, cette étude fait ressortir également quatre nouvelles catégories de raisons :

  • Un encouragement à changer d’approche clinique. En effet, parmi ceux qui ont pu avoir les deux entretiens, les patients ont exprimé avoir vu un changement d’attitude du personnel soignant après avoir exprimé une demande d’euthanasie et se sont sentis rassurés par la capacité des soignants à gérer la souffrance physique et les symptômes. Les patients ont aussi investi les relations avec les soignants et témoignent que cette attention accrue a pu leur faire changer de point de vue sur l’urgence de mettre un terme à leur vie.
  • Une réaffirmation de la liberté par rapport aux contraintes médicales. Les déclarations des patients révèlent une recherche de contrôle du moment et des conditions de leur mort afin de se libérer de la mainmise des professions médicales sur leur maladie. Les patients réclament de prendre leurs décisions pour eux-mêmes enracinées dans une philosophie de vie basée sur la liberté et l’autonomie. Ils mettent en avant leur capacité à se battre face à l’adversité.
  • Une capacité à imaginer un futur désirable pour soi-même. Les patients se projettent eux-mêmes dans un futur où ils seront soulagés de toutes les souffrances du présent. Ils souhaitent avoir la capacité à investir le temps restant en prenant un certain plaisir à vivre (refaire des activités qui leur plaisent par exemple). Enfin, ce temps permet de déclencher des discussions avec leurs proches.
  • Le test de la possibilité de transgresser l’interdit de l’euthanasie. En faisant cette demande, ces patients souhaitent vérifier si l’euthanasie pourrait être pratiquée. Lors du second entretien, des patients testent aussi la possibilité de la faisabilité du suicide assisté comme alternative à la demande d’euthanasie.

L’étude conclut que l’adoption d’une attitude d’écoute des unités de soins palliatifs face à ces demandes permet de créer un espace de discussion à même de favoriser l’interaction avec le patient au lieu de répondre à cette demande d’euthanasie par une solution irréversible.

 

CONCLUSIONS

Selon les résultats de la première partie de l’étude :

  • Les demandes initiales d’euthanasie restent faibles en France (1,8% des décès et entre 0,7% et 3% des patients en soins palliatifs).
  • Les demandes persistantes sont encore plus faibles puisque les études montrent qu’entre 50% et 90% des demandes initiales ne persistent pas dans le temps.

Dans la deuxième partie, une étude plus qualitative des demandes d’euthanasie montre que :

  • Les demandes d’euthanasie sont très peu motivées par la douleur incontrôlée (seulement 5% des cas), mais majoritairement motivées par la perception de la perte de dignité et la peur d’être un poids pour la société ou les proches.
  • L’existence de demandes d’euthanasie émanant de médecins et de proches peut interroger sur les pressions éventuelles subies par les patients (enquête Ferrand).
  • Certaines motivations exprimées par les patients sont bien identifiées par les soignants comme l‘anticipation de la souffrance et le sentiment de solitude. En revanche, lorsqu’ils sont directement interrogés, les patients disent le besoin de retrouver une marge de manœuvre sur les choix médicaux. Ils cherchent également des interactions plus importantes et un rééquilibrage de la relation avec les soignants.

 

[1] 2012, Pennec Sophie, Monnier Alain, Pontone Silvia, Aubry Régis. 2012. Les décisions médicales en fin de vie en France. Population & Sociétés, 494, 4 p. https://www.cairn.info/revue-population-et-societes-2012-10-page-1.htm

 

[2] 2012, Ferrand E, Dreyfus JF, Chastrusse M, Ellien F, Lemaire F, Fischler M. Evolution of requests to hasten death among patients managed by palliative care teams in France: a multicentre cross-sectional survey (DemandE). Eur J Cancer. 2012 Feb;48(3):368-76. doi: 10.1016/j.ejca.2011.09.020. Epub 2011 Oct 28. PMID: 22036873. https://www.ejcancer.com/article/S0959-8049(11)00733-7/fulltext ; en Français: L’enquête multicentrique DemandE, Médecine Palliative : Soins de Support – Accompagnement – Éthique, Volume 11, Issue 3, 2012, Pages 121-132, ISSN 1636-6522, https://doi.org/10.1016/j.medpal.2011.12.005. https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1636652212000037

 

[3] 2014, Guirimand F, Dubois E, Laporte L, Richard J-F, Leboul D. Death wishes and explicit requests for euthanasia in a palliative care hospital: an analysis of patients files, November 2014, BMC Palliative Care 13(1):53 https://bmcpalliatcare.biomedcentral.com/articles/10.1186/1472-684X-13-53

 

[4] 2022, Leboul D, Bousquet A, Chassagne A, Mathieu-Ricot F, Ridley A, Cretin E, Guirimand F, Aubry R. Understanding why patients request euthanasia when it is illegal: a qualitative study in palliative care units on the personal and practical impact of euthanasia requests, January 2022, Palliative Care & Social Practice, https://www.researchgate.net/publication/357738825_Understanding_why_patients_request_euthanasia_when_it_is_illegal_a_qualitative_study_in_palliative_care_units_on_the_personal_and_practical_impact_of_euthanasia_requests ;

en Français, Étude DESA Demandes d’Euthanasie et de Suicide Assisté Étude prospective, multicentrique et qualitative RAPPORT DE RECHERCHE 2014 – 2017, 2018, https://juridique.defenseurdesdroits.fr/doc_num.php?explnum_id=18356 https://www.jeanne-garnier.org/wp-content/uploads/2022/10/Comprendre-les-Demandes-deuthanasie-de-patients-en-USP-25-oct-2022.pdf

 

[5] Hélène Trimaille, Florence Mathieu-Nicot, Morgane Bondier, Aurélie Godard-Marceau, Régis Aubry, Lionel Pazart, Aline Chassagne, Évolution des demandes d’euthanasie ou de suicide assisté selon les professionnels de santé, Médecine Palliative, 2022, ISSN 1636-6522, https://doi.org/10.1016/j.medpal.2022.09.003, https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1636652222000836

Quelles sont les raisons et les motivations dans une demande d’euthanasie ?

Quelles sont les raisons et les motivations dans une demande d’euthanasie ?

Quelles sont les raisons et les motivations dans une demande d’euthanasie ?

 

Quelques études menées en milieu hospitalier sur les demandes d’euthanasie apportent un éclairage sur les raisons et les motivations des patients. Ces études ont permis d’estimer le faible nombre des demandes initiales formulées par des patients (entre 0.7 et 3%), ainsi que leur persistance encore plus faible (0.3% selon une des études).

La note d’analyse publiée cette semaine apporte des informations complémentaires sur les motifs de ces demandes ainsi que sur le contexte médical des patients.

 

Un contexte médical où la douleur demande un soutien psychologique

Dans l’étude datant de 2012 menée par Ferrand, parmi les 476 demandes d’accélération de la mort exprimées par des patients, beaucoup (82.4%) ont vu soit un psychologue soit un psychiatre. Et selon les soignants, 13,9% des patients qui demandent d’accélérer la mort, souffrent d’un syndrome dépressif en cours. L’étude note d’ailleurs que ces situations peuvent “laisser des doutes sur la capacité à prendre des décisions importantes sur la fin de vie”.

 

Des perceptions différentes entre patients, soignants et proches

Lorsque la demande est exprimée par le patient, Les symptômes cliniques principaux (>40%) sont la souffrance physique contrôlée (55,3%), les difficultés d’alimentation (54,6%), les difficultés motrices (46%). 5% souffrent de manière incontrôlée.

Les trois principaux motifs de demandes d’accélération de la mort chez les patients sont liés à la perception de leur image et de la qualité de leur vie relationnelle :

  1. Culpabilité d’être un fardeau pour sa famille et ses amis
  2. Peur de présenter une image intolérable de soi-même
  3. Vie inutile

L’étude fait ressortir des différences notables selon que la demande d’accélération est exprimée par des patients, des soignants ou par des proches du patient :

  • Les troubles cognitifs et de communication sont davantage (respectivement 5 et 4 fois plus) mentionnés par les proches et le personnel médical que par les patients ainsi que les difficultés d’excrétion (2 fois plus) et les difficultés d’alimentation (1,5 fois plus).
  • La douleur incontrôlée est peu citée par les patients (5%). Elle n’est pas perçue de la même manière par les proches ou les soignants. Ces derniers ne la mentionnent pas du tout.

 

Approche nouvelle basée sur des entretiens directs qui donnent la parole aux patients qui font une demande d’euthanasie

Une étude récente menée en Bourgogne Franche Comté et publiée cette année a interrogé uniquement des patients faisant une demande d’accélération de la mort. A partir des 15 entretiens menés, cette étude confirme des résultats précédents.

Ainsi, les motifs invoqués sont d’une part la douleur physique après des épisodes aigus des maladies, d’autre part un appel des patients à reconnaitre une souffrance existentielle qu’ils jugent insupportable. Cette catégorie inclut :

  1. La détresse psychologique de voir son corps et ses fonctions se détériorer, la perte de contrôle de sa vie.
  2. Les sentiments de solitude liés à la désespérance qu’ils ne peuvent pas partager, un sentiment d’inutilité auprès des autres, la difficulté à communiquer…
  3. L’angoisse projective de souffrir dans le futur juste avant la mort notamment en faisant référence à des épisodes traumatiques vécus par des proches souffrant à l’approche de leur fin de vie.

L’étude a aussi fait ressortir d’autres motivations :

  1. Le souhait d’équilibrer et investir la relation avec l’équipe des soignants. Les patients ont exprimé avoir vu un changement d’attitude du personnel soignant après avoir exprimé une demande d’euthanasie et se sont sentis rassurés par la capacité des soignants à gérer la souffrance physique et les symptômes.
  2. Une réaffirmation de leur liberté par rapport aux contraintes médicales.
  3. Une capacité à imaginer pour soi-même un futur désirable.
  4. Le test de la possibilité de transgresser l’interdit de l’euthanasie.

L’étude conclut que l’adoption d’une attitude d’écoute des unités de soins palliatifs face à ces demandes permet de créer un espace de discussion à même de favoriser l’interaction avec le patient au lieu de répondre à cette demande d’euthanasie par une solution irréversible.

La prise en charge des impacts psychologiques de situations douloureuses vécues par des patients en soins palliatifs reste un axe important pour leur assurer une meilleure qualité de vie jusqu’à la fin de leur vie.

Session #2 : La Convention citoyenne sur la fin de vie à l’écoute des acteurs de terrain

Session #2 : La Convention citoyenne sur la fin de vie à l’écoute des acteurs de terrain

Après une table ronde consacrée aux représentants des cultes, les membres de la Convention citoyenne sur la fin de vie ont assisté, au deuxième jour de cette session 2, à des tables rondes de soignants et bénévoles qui ont témoigné de leur expérience de terrain auprès des malades. Ils ont pu être interrogés sur les problématiques concrètes auxquelles ils sont confrontés dans l’accompagnement des personnes en fin de vie.

Médecins, psychologues, infirmiers, bénévoles en soins palliatifs…Au total, au cours de plusieurs tables rondes, 22 soignants ont répondu tour à tour aux questions des citoyens qui se réunissaient pour le deuxième et ultime week-end de la phase d’appropriation.

Le cadre législatif de la fin de vie parait satisfaisant mais les moyens sont insuffisants

Les questions portaient sur l’état de la loi actuelle. « Les soignants ont-ils été confrontés à des lacunes ou à des limites de la loi ? » demande Françoise. Pour le Docteur Clément Gakuba, spécialiste en neuroréanimation et membre du centre d’éthique du CHU de Caen, le cadre législatif permet de gérer les situations rencontrées. Il comporte déjà des notions importantes : ne pas abandonner le patient, ne pas le laisser souffrir…Les autres soignants sont d’accord avec lui. Christophe Roman, infirmier, fait état des avancées de la loi. Il témoigne des cocktails lytiques qu’on faisait « sous le manteau » il y a vingt ans. « Il y a une lyse à faire » était l’expression employée. Selon lui, la loi est venue apporter un cadre et des garde-fous à toutes ces pratiques.

La loi est donc satisfaisante, mais ce qui manque, selon le Professeur Djilali Annane, médecin réanimateur, c’est le temps « pour bien faire les choses ». La part de temps non liée à des actes de soin a été très contractée. « Ce qui me manque, c’est du temps pour accompagner correctement les personnes. » Au-delà du temps « horaire », précise-t-il plus tard, il faut aussi avoir l’esprit disponible. « C’est ça qui manque », poursuit-il, évoquant la souffrance des soignants, qu’il faut prendre en compte. Le temps…ce luxe, selon les mots de la psychologue Emilie Quillien, et qui semble manquer à tous les soignants.

Outre le temps, les soignants s’accordent pour dire que la loi Claeys-Leonetti est mal connue à la fois par les citoyens et les professionnels. Marie-Christine Grach, médecin en soins palliatifs à la retraite à Caen, évoque une enquête auprès de médecins généralistes en Normandie, révélant une très mauvaise connaissance de la loi.

La formation est également un enjeu prioritaire des soignants. Le Professeur Djilali Annane dénonce le déficit actuel des médecins dans l’accompagnement des personnes en fin de vie. Elodie Cailbaut, infirmière en soins palliatifs, se réjouit de l’introduction de modules en soins palliatifs dans les études de médecine, et qui semblent déjà porter des fruits. Selon Emilie Quillien,  la formation manque aussi cruellement aux soignants des EHPAD pour anticiper la fin de vie des résidents.

Sont aussi dénoncées par les soignants des insuffisances actuelles des soins palliatifs. Elodie Cailbaut déplore que, même à Paris, on ne puisse pas permettre aux personnes de terminer leur vie chez elles, par manque de soignants. Selon Olivier de Margerie, président de la Fédération JALMAV, il faudrait multiplier par dix le budget du plan de développement des soins palliatifs lancé l’an dernier pour pouvoir faire quelque chose. Marie-Thérèse Leblanc-Briot, bénévole dans cette fédération, dénonce des « mesurettes qui donnent bonne conscience » mais sont insuffisantes.

Pour les maladies chroniques comme la SLA (maladie de Charcot), la mise en place de moyens suffisants est tout aussi importante pour Sigolène Gautier, psychologue en soins palliatifs à Lyon. Ainsi, selon elle, dans les centres SLA, il n’y a parfois qu’un psychologue pour 100 patients, voire plus. Or, non seulement les patients, mais aussi leurs familles, nécessitent d’être accompagnés, et cela « suffisamment tôt », alors que la maladie dure plusieurs années.

Les directives anticipées : oui, mais…

Une question des citoyens portait sur les directives anticipées : « Comment avez-vous connaissance des directives anticipées ? » demande Nathalie. Même si le Professeur Annane constate que de plus en plus de personnes ont sur elles leurs directives anticipées, les médecins réanimateurs sont confrontés, la plupart du temps dans les cas de pathologies brutales (accidents de la route, AVC…), à une absence de directives anticipées. Les soignants relèvent la difficulté de formuler des directives anticipées quand on est bonne santé. Même malade, le patient est souvent bien en difficulté pour s’exprimer sur des décisions médicales et préfère souvent faire confiance au médecin, relève le Professeur Annane. Heureusement, les directives anticipées sont « recontextualisées ». Le Professeur Annane constate aussi que les avis des patients peuvent évoluer en fonction des circonstances de leur vie, évoquant le mariage d’un enfant, par exemple.

Un refus partagé du « faire mourir »

Les citoyens ont également interrogé les soignants sur une légalisation possible d’une « aide active à mourir », expression utilisée par le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) pour désigner l’euthanasie ou le suicide assisté. A cette question, les soignants ont exprimé un consensus sur l’incompatibilité du « faire mourir » avec leur métier de soignants. Pour Sigolène Gautier, « quand un patient demande à mourir, il implique aussi l’autre. Si je peux activer la mort, comment puis-je continuer à accompagner la vie ? » Il y aurait, selon ses mots, quelque chose de « schizophrénique ».  Marie-Thérèse Leblanc-Briot évoque les graves conséquences « pour une majorité de personnes âgées et fragiles » d’une évolution de la loi dans ce sens : « Le message envoyé, ce serait : « finalement c’est votre choix, que vous viviez ou que vous mourriez, on n’en a rien à faire, c’est votre choix à vous tout seul ». Et finalement peut-être que dans ce cas-là , votre vie n’a pas tant de valeur que ça, ou qu’elle ne compte pas tant que ça pour la société ».

Cette accompagnante évoque le questionnement de la majorité des personnes très âgées sur le sens et le valeur de leur vie pour les autres. Un peu plus tôt dans les échanges, les soignants avaient partagé leur expériences des demandes de mourir exprimées dans les services. Anastasia Choveau, infirmière, parle de l’importance de l’écoute et de l’accueil des personnes qui expriment ces demandes. « Ils ont le droit de verbaliser cette demande, ils ont le droit d’exprimer leur ressenti, et déjà d’être entendu dans cette demande, c’est très important, et ensuite, de réfléchir à ce qui motive cette demande. » Les soignants partagent un constat : très souvent, cette demande se transforme. Pour le Professeur Annane, l’expression « j’en ai assez » est toujours conjoncturelle, elle exprime une souffrance qui n’est pas soulagée.

Finalement, pour le docteur Julie Paquereau, si la loi devait évoluer pour légaliser l’euthanasie, « le risque serait qu’on se retrouve, par manque de moyens, à mettre en place des aides actives à mourir, alors qu’il y aurait d’autres options possibles, et en particulier un accompagnement plus adapté. »

10 enjeux prioritaires pour les prochaines sessions de la Convention citoyenne sur la fin de vie

Après ces tables rondes, les membres de la Convention citoyenne ont poursuivi leur réflexion l’après-midi au sein de groupes de travail afin de définir des enjeux prioritaires sur lesquels ils travailleront lors des prochaines sessions. Au total 21 enjeux prioritaires ont été définis.

A l’issue de la session, après un vote, les citoyens se sont ainsi accordés sur ces dix enjeux prioritaires, par ordre de priorité :

  • les moyens humains et financiers pour une pleine application de la loi Claeys-Leonetti de 2016
  • l’obligation légale de mettre à disposition des moyens financiers et humains adaptés et suffisants, de former et d’obliger à l’implantation de professionnels de santé sur l’ensemble du territoire et dans tous les établissements
  • la formation initiale et continue des personnels médicaux, paramédicaux et accompagnants
  • l’information du grand public
  • l’égalité d’accès effective et réelle aux soins palliatifs
  • l’aide active à mourir: suicide assisté et euthanasie
  • les exceptions acceptables/nécessaires à la loi Claeys-Leonetti
  • l’économie de la fin de vie/la mort
  • les limites des soins palliatifs
  • le traitement de l’aide active à mourir pour les formes extrêmes de souffrance psychique (psychiatrique)

A partir de janvier, Claire Thoury, présidente du Comité de gouvernance de la Convention citoyenne, a annoncé la fin de la phase d’appropriation pour entrer dans une phase de délibération et de controverse. Plusieurs citoyens ont exprimé manquer encore d’éléments d’appropriation. Parmi ces manques, la nécessité d’entendre des acteurs internationaux avec des regards différents, des approches spirituelles non religieuses, et aussi des patients.  On leur a assuré qu’ils pourraient demander des auditions spécifiques…

Extension continue de l’euthanasie au Canada et au Québec

Extension continue de l’euthanasie au Canada et au Québec

Extension continue de l’euthanasie au Canada et au Québec

 

Après avoir étendu l’accès à l’euthanasie aux personnes dont la mort naturelle n’est pas « raisonnablement prévisible » à peine 5 ans après la première loi votée en 2016, le Canada entend organiser son accès aux personnes ayant une maladie mentale à partir du 17 mars 2023.

L’euthanasie, désignée par l’expression d’« aide médicale à mourir » (AMM, MAiD en anglais) dans la loi canadienne, a été ouverte en mars 2021 à toute personne atteinte d’une affection grave et incurable et qui souhaite mourir. Depuis lors les médias rapportent des cas troublants d’euthanasie alors que des personnes handicapées ou malades souhaiteraient continuer à vivre.

Ce sont notamment des personnes en situation de précarité ou privées de prise en charge adéquate qui sont conduites à ces demandes, sans autres options comme le décrit un article récent.

Cette inflation de demandes d’euthanasie est saisissante. A titre de comparaison, en Californie, Etat démographiquement comparable au Canada (40 millions d’habitants) et qui a également légalisé le suicide assisté en 2016, 486 personnes sont décédées par suicide assisté en 2021 quand la même année 10 064 personnes sont décédés par « AMM » au Canada, soit 3,3% des décès.

Controverses sur l’évolution de la loi sur l’euthanasie au Québec

Le Québec n’a pas encore transposé l’évolution de la loi fédérale canadienne : un projet de loi devrait être présenté prochainement. Un premier projet (C-38) proposé en mai 2022 a fait l’objet de fortes controverses. Outre la transposition de la loi fédérale, Il prévoyait également d’autoriser une demande anticipée à mourir « aux personnes atteintes d’une maladie grave et incurable menant à l’inaptitude ». Cela concernerait notamment des personnes atteintes d’Alzheimer, de démence, de Parkinson dans certains cas. Des associations se sont élevées contre l’absence de débat sur cette question.

Euthanasie et maladie mentale 

Au niveau fédéral, la loi de 2021 avait exclu la maladie mentale jusqu’au 17 mars 2023 afin de donner au gouvernement le temps d’évaluer les conditions de proposition d’euthanasie ou suicide assisté qui assurent assez de sécurité.  La loi exigeait que les ministres de la Justice et de la Santé réunissent un groupe d’experts « chargé d’examiner les protocoles, les orientations et les mesures de sauvegarde relatives à l’AMM dans le cas de personnes atteintes d’une maladie mentale ». Ce groupe de travail a formulé des recommandations d’ordre réglementaire dans un rapport au printemps 2022.

Selon les experts, “Bien qu’il existe une forte association entre le décès par suicide et la présence d’un trouble mental diagnostiqué, la grande majorité des personnes atteintes de troubles mentaux ne se suicident pas (…). Dans toute situation où les tendances suicidaires constituent une préoccupation, le clinicien doit adopter trois perspectives complémentaires : tenir compte de la capacité de la personne à donner son consentement éclairé ou à refuser les soins, déterminer si les interventions de prévention du suicide – y compris involontaires – doivent être déclenchées, et proposer d’autres types d’interventions qui pourraient aider la personne.”

Ces distinctions risquent d’être difficiles à évaluer. Et comme le note une journaliste analysant l’impact de la loi et de ses extensions sur la prévention du suicide « Qui bénéficie de la prévention du suicide et qui bénéficie de la facilitation du suicide ? Si la mort est exécutée sur la base du consentement momentané de quelqu’un, alors où en est la légitimité de tenter de dissuader une personne en détresse ?»

Les extensions des conditions de recours à l’euthanasie observées au Canada montrent comment les promesses d’un encadrement strict de cette pratique se sont avérées intenables. Réalité cruciale à prendre en compte dans le débat qui s’ouvre en France sur une éventuelle évolution de la loi.