Evaluation parlementaire de la loi Claeys-Leonetti : Alliance VITA auditionnée lundi 30 janvier

Evaluation parlementaire de la loi Claeys-Leonetti : Alliance VITA auditionnée lundi 30 janvier

Une mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti du 2 février 2016 se réunit régulièrement depuis le 12 janvier et procédera à l’audition d’Alliance VITA le lundi 30 janvier. Née de la volonté de la présidente de la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale de prendre « toute sa part dans le traitement de ce sujet », elle a été lancée en novembre dernier.

Présidée par Olivier Falorni, député des Charentes Maritimes et auteur d’une proposition de loi en faveur de l’euthanasie en avril 2021, cette mission parlementaire composée de 19 membres de plusieurs partis, doit travailler jusqu’en mars, en parallèle de la Convention citoyenne sur la fin de vie qui doit rendre son rapport le 19 mars. La nomination d’Olivier Falorni, à la tête de cette mission d’évaluation avait soulevé des questions et des doutes sur la neutralité de ses travaux.

Outre cette mission trans-partisane, la commission des affaires sociales a commandé un rapport à la Cour des Comptes sur les soins palliatifs. Il s’agit en principe d’évaluer l’existant “avant d’envisager une évolution de la loi sur un sujet aussi sensible et intime“.

Parmi les personnalités déjà auditionnées :

Jean Leonetti, co-auteur et co-rapporteur de la loi de 2016, et Alain Claeys, Jean-Louis Touraine, ancien député du Rhône et partisan de longue date de l’euthanasie, ainsi que Régis Aubry co-rapporteur de l’avis 139 du CCNE renversant la position de celui-ci sur l’euthanasie.

La présidente du Centre National des Soins palliatifs et de la Fin de VIE (CNSFPV) Sarah Dauchy, la Présidente de la SFAP Claire Fourcade, et d’autres responsables de sociétés savantes ou associations de soignants ont déjà apporté leur éclairage.

Le même jour qu’Alliance VITA, l’ADMD et l’association Le Choix, seront reçues, puis viendront les représentants des loges maçonniques et des cultes religieux qui seront auditionnés le 2 février.

 Le Sénat vient également de lancer sa propre mission d’évaluation  dont l’objectif selon l’une des trois rapporteurs, Michelle Meunier (PS) «est d’actualiser l’état des lieux, mais aussi d’examiner comment les législations évoluent à l’étranger ». 

Les déclarations très récentes de la Présidente de l’Assemblée Nationale, souhaitant légiférer pour autoriser l’euthanasie et le suicide assisté avant la fin de l’année 2023, interrogent sur la volonté réelle d’écoute de la part des parlementaires partisans de l’euthanasie.

Protection des personnes vulnérables, soutien d’une éthique du soin et du soulagement de la souffrance, impossibilité de cloisonner la prévention du suicide d’un côté et la mise en place d’un suicide assisté de l’autre, ces sujets majeurs, et d’autres, seront défendus par Alliance VITA lors de son audition lundi prochain.

L’euthanasie et le suicide assisté ne constituent pas une liberté nouvelle, mais un délitement du lien social. Selon l’expression de Philippe Pozzo di Borgo, parrain du collectif Soulager mais pas tuer, « la dépendance induit la fraternité, l’autonomie induit la solitude et l’indifférence ».

Université de la vie 2023 “Vivre en réalité” – soirée 3 : « Une société à construire »

Université de la vie 2023 “Vivre en réalité” – soirée 3 : « Une société à construire »

Près de 8000 participants de l’Université de la vie se sont retrouvés ce 23 janvier dans 190 villes en France et à l’étranger pour la troisième soirée de formation intitulée « Une société à construire ».

Certains choix politiques transforment la société en profondeur. Ainsi les évolutions législatives dans le champ bioéthique modifient le regard posé sur l’embryon humain, sur le corps, sur la vulnérabilité.

La condition humaine, merveilleuse et limitée, la temporalité du corps humain, en particulier féminin, sont des piliers solides sur lesquels s’appuyer pour élaborer une société à construire.

Responsable du service d’écoute SOS bébé pendant 12 ans, Valérie Boulanger a ouvert la soirée sur une réflexion autour de « la vie en temps réel ». Face à l’impression que le temps s’accélère, grandit le besoin de le maitriser. La maternité comme la paternité, s’inscrivent dans le temps long et demandent de pouvoir se projeter avec confiance dans l’avenir.

A l’écoute depuis 20 ans des détresses et questionnements liés à l’accueil d’un enfant, Valérie s’est penchée sur les réalités qui aujourd’hui pèsent sur la maternité et la paternité. « Les reconnaître, les regarder en face, est une condition essentielle pour construire l’avenir. »

Le docteur Laurine Escudier, gynécologue-obstétricien en milieu hospitalier a prolongé la réflexion autour de la tentation d’arrêter le temps en abordant la question de l’autoconservation des ovocytes. Depuis la loi bioéthique de 2021, toutes les femmes de 29 à 37 ans peuvent conserver leurs ovocytes sans raison médicale. Derrière ce qui est présenté comme un droit nouveau, Laurine Escudier interroge la promesse d’arrêter l’horloge biologique. S’agit-il d’un rêve ou de la réalité ? Pour elle, « Cette technique n’est pas une assurance maternité. Il ne faut pas mentir aux femmes […] La vraie révolution serait de penser la société pour aider réellement les femmes à avoir leurs bébés dans le meilleur temps de leur fécondité. »

Puis Blanche Streb, directrice de la formation à Alliance VITA et coordinatrice de l’Université de la vie s’est penchée « sur les manières dont nous percevons la réalité du corps humain et sur sa place dans la construction de notre société ». La tentation de l’homme moderne d’être son propre créateur se nourrit non seulement d’une double rupture, avec la transcendance et avec la nature, mais également d’une accélération des progrès techniques, en particulier des biotechnologies. « L’homme ne se définit pas seulement par ses composants […] C’est en partant de la condition humaine qu’il faut penser les principes qui construisent la société : Homme et femme. Uniques et singuliers. Avec des temps particuliers. Dans l’unité. Etres incarnés. Corps-âme-esprit ».

C’est enfin sur le témoignage plein de force et d’espérance d’Axelle Huber que s’est achevée cette troisième soirée. Coach et thérapeute, Axelle a accompagné dans l’épreuve de la sclérose latérale amyotrophique (SLA), aussi appelée maladie de Charcot, son mari, décédé en 2013 à 41 ans. Dans un échange bouleversant avec Blanche Streb, elle a raconté le parcours accompli aux côtés de son mari et elle a aussi dénoncé l’instrumentalisation de la maladie de Charcot par les promoteurs de l’euthanasie et du suicide assisté. « Toute vie est belle parce que c’est la vie même si elle est difficile même si elle est fragile… au lieu de chercher à légiférer il faudrait voir comment aider les personnes ». Axelle Huber est l’auteur de Si je ne peux plus marcher, je courrai, édition Mame.

Dans de très nombreuses villes de France et de l’étranger, les soirées se sont conclues par des témoignages locaux : de médecins, soignants, de bénévoles, d’écoutants, de parents….

Rendez-vous le 30 janvier pour la dernière soirée « Un futur à tisser. »

Olympe annonce son suicide assisté en Belgique sur les réseaux sociaux

Olympe annonce son suicide assisté en Belgique sur les réseaux sociaux

L’annonce d’euthanasie de la youtubeuse Olympe sur les réseaux

 

Olympe est une jeune française de 23 ans qui souffre, à la suite de graves traumatismes vécus dans l’enfance, d’un trouble dissociatif de l’identité (TDI). Il y a quelques jours, elle a posté une vidéo, qu’elle a retirée quelques minutes plus tard, où elle annonce avoir pris la décision de faire une demande d’euthanasie en Belgique, où c’est légal. Cette annonce a déclenché une onde de choc.

 
Chine : soutien au troisième enfant, quelle réalité ?

Chine : soutien au troisième enfant, quelle réalité ?

Démographie en Chine, quelle réalité pour le soutien à la natalité ?

Le soutien à la natalité, y compris pour un troisième enfant, annoncé en 2021 par le Politburo chinois, ne produit pas encore d’effet dans la réalité démographique.

Le Bureau National des Statistiques a annoncé une baisse de la population, une première depuis 60 ans. A l’époque, une terrible famine, ayant démarré en 1959, avait fait 36 millions de morts, selon le livre du journaliste et historien Yang Jisheng.

La baisse annoncée est de 850000 habitants. Les projections indiquent que l’Inde deviendra le pays le plus peuplé du monde dès cette année.

L’ONU, dans ses projections de 2019 voyait le pic de natalité pour la Chine vers 2031. Mais le taux de fécondité a poursuivi sa baisse et s’établit à 1.15 en 2021. Le scénario d’hiver démographique pour ce pays semble se confirmer. Les impacts économiques et sociaux s’annoncent profonds : équilibre population active et retraités, pression sur la prise en charge des personnes âgées, baisse de la productivité économique, poids de la Chine au niveau géopolitique…

Certains médias qualifient cette baisse de “baisse paradoxale”. L’assouplissement puis la fin officielle de la politique brutale de l’enfant unique date de plusieurs années. Cependant les facteurs cités pour expliquer le bas taux de fécondité sont à la fois culturels, sociaux et économiques, et ne peuvent se résumer à la simple incitation des autorités publiques. Hausse du coût de la vie, logements insuffisants, habitudes des petites familles, grossesses repoussées plus tard, niveau d’études supérieures plus élevé pour les femmes, mais aussi moindre envie d’élever des enfants selon des enquêtes auprès de jeunes chinois. Un démographe chinois, He Yafu, note dans un article du Monde “la baisse du nombre de femmes en âge de procréer, qui a diminué de 5 millions par an entre 2016 et 2021“. Le vieillissement de la population est un phénomène qui s’auto-entretient.

La natalité en France

En France, où les débats actuels sur le système de retraite ont une composante démographique, le ministre du Budget a affirmé récemment dans la presse que “soutenir la natalité n’était “pas du tout “un tabou pour le gouvernement.

Mais davantage qu’une politique de natalité, l’enjeu est une culture où l’accueil de l’enfant, dès l’annonce d’une grossesse, est soutenu et valorisé. Un enjeu dans de très nombreux pays, au-delà du cas chinois.

La politique de l’enfant unique en Chine et ses conséquences

La politique de l’enfant unique, instaurée par Deng Xiaoping en 1980, avait été assouplie en 2013, sans entraîner cependant une hausse des naissances : sur 11 millions de couples potentiellement concernés par cette réforme, 620 000 avaient demandé cette autorisation. En 2015, le plenum du Comité Central avait annoncé que tous les couples seraient autorisés à avoir deux enfants à partir du 1er janvier 2016. L’approche chinoise restait donc très administrative et coercitive. Le ministère de la santé chinois avait dressé un bilan de décennies de contrôle, estimant le nombre d’avortements à 281 millions entre 1980 et 2010. Une politique de stérilisation forcée était également menée.

L’impact de cette politique démographique a eu de profondes répercussions. L’annonce officielle souligne l’angle économique. En 2010, deux adultes actifs se partageaient la charge d’une personne économiquement dépendante (enfant ou personne âgée). Les projections actuelles montrent qu’en 2050, la Chine comptera 250 millions d’actifs en moins et chaque actif devra assumer la charge de près d’une personne économiquement dépendante. Dans un livre publié en 2017, une chercheuse de l’INED, Isabelle Attane, soulignait déjà pour la Chine le risque « d’être vieille avant d’être riche ».

Mais la politique de limitation des naissances a eu également des effets sociaux nombreux, comme le déséquilibre Homme/Femme avec un ratio de 107 hommes pour 100 femmes en 2015, quand la France en compte 92. Ce déséquilibre a lui-même des conséquences néfastes comme le trafic de femmes.

Les premières réactions dans les médias et sur les réseaux sociaux semblent indiquer que cette nouvelle directive volontariste des dirigeants chinois ne sera pas forcément suivie d’effets. De nombreux facteurs sont cités : absence de soutien aux mères, prix du logement et de l’éducation, difficulté à mener de front une vie familiale et professionnelle pour les femmes, baisse des mariages, mentalité éduquée par des décennies de politique freinant la natalité… Un article du New York Times mentionnait les résultats d’un sondage en ligne de l’agence Xinhua intitulé « Etes-vous prêts pour la politique 3 enfants ? ». Sur environ 22 000 réponses, 20 000 avaient choisi la réponse « Je ne l’envisage pas ». Il ne paraît pas aisé de parier sur un nouveau « baby boom » dans ce contexte.

On doit surtout s’étonner de la quasi absence de critique internationale de la politique chinoise coercitive et hautement liberticide. L’Etat intervient abusivement depuis des décennies dans la vie intime et privée des chinois, sans aucune action des instances internationales chargées des droits de l’Homme.

 

Droits fondamentaux des personnes âgées en EHPAD : un premier bilan mitigé

Droits fondamentaux des personnes âgées en EHPAD : un premier bilan mitigé

Droits fondamentaux des personnes âgées en EHPAD : un premier bilan mitigé

 

La question du respect des droits fondamentaux des personnes âgées vivant dans des EHPAD fait l’objet d’un rapport par la Défenseure des Droits publié cette semaine. Ce rapport fait suite à une première publication en mai 2021 dont notre site a proposé une synthèse. Elle comprenait 64 recommandations pour mieux accueillir les personnes vivantes en EHPAD et assurer l’effectivité de leurs droits.

En janvier 2022, le livre de Victor Castanet “Les Fossoyeurs” avait produit une forte onde de choc dans les médias et provoqué de nombreuses réactions, ainsi que des enquêtes par les pouvoirs publics sur la situation dans certains établissements. La situation dans les EHPAD sur l’ensemble des territoires est très diverse, et les contributions sont nombreuses pour proposer des nouveaux modèles d’EHPAD.

Prise de conscience collective la dignité des personnes âgées en EHPAD

Le rapport récemment publié mentionne ces faits en parlant de prise de conscience collective de notre société pour respecter la dignité des personnes âgées. Il “salue” l’annonce par le ministère des Solidarités et de la Santé du renforcement des contrôles des 7500 établissements sur les deux années à venir.

Bilan mitigé 

Cependant, le rapport exprime que “le bilan est hélas nuancé” et “les inquiétudes de la Défenseure des droits demeurent“. Depuis mai 2021, 281 nouvelles réclamations ont été reçues, dénonçant en particulier l’atteinte au droit à une prise en charge et un accompagnement adaptés. Le rapport mentionne par exemple les horaires de lever et coucher fixés pour s’adapter aux emplois du temps du personnel.

Selon les données publiées, 43% des saisines concernent la maltraitance par excès ou négligence, 30% les limitations de visite, 12% la liberté d’aller et venir. Les violences physiques sont mentionnées pour 2%. Selon la Défenseure “Ces saisines confirment le caractère systémique du problème de maltraitance au sein des EHPAD ; elles révèlent une demande sociale forte pour faire respecter les droits et la dignité des aînés“. Claire Héron, dans une série d’interviews, a exprimé l’insuffisance de la réponse des pouvoirs publics. Les annonces “peinent à se matérialiser et doivent maintenant se traduire concrètement sur le terrain“.

Des propositions pour avancer 

Le rapport fait état de cinq “actions capitales à mener sans tarder” :

  1. Définir un ratio minimal d’encadrement et améliorer l’attractivité des métiers du grand âge.
  2. Mettre un terme aux violations de la liberté d’aller et venir.
  3. Mettre en place un dispositif de vigilance médico-sociale pour lutter contre la maltraitance.
  4. Clarifier et renforcer la politique nationale des contrôles.
  5. Restaurer la confiance des résidents et de leurs familles.

Concernant les moyens humains des EHPAD pour accueillir et accompagner les résidents, le rapport réclame la mise en place d’une norme de 8 personnes (en équivalent plein temps) pour 10 résidents. Il s’agit des personnes participant directement à la prise en charge. Selon Claire Héron, certains Etats en Allemagne et des pays du Nord de l’Europe atteignent ces ratios. Les difficultés de ce secteur pour attirer du personnel sont largement relayées dans les médias.

Des rapports officiels abordaient ce sujet, aggravé après la crise de la Covid 19. Les salaires peu attractifs et les conditions de travail difficiles sont régulièrement mentionnés. Ce sujet rejoint la difficulté plus vaste de l’ensemble du secteur sanitaire et social.

Sur le sujet sensible de la liberté d’aller et venir, le rapport constate que les dérives demeurent même après la fin de la crise sanitaire. SI l’importance du maintien des liens, des visites n’est plus à souligner, en pratique “la Défenseure des droits continue d’être saisi de situations d’isolement arbitraire des résidents dans leur chambre, sur décision unilatérale de l’établissement et en dehors du cadre de protection prévu réglementairement“.

Les signalements reçus sur le numéro unique contre la maltraitance des personnes âgées et des personnes en situation de handicap (3977) devraient également être “intégrés au dispositif de traitement des signalements suivis par les agences régionales de santé“.

Concernant les contrôles, le manque de moyens humains dans les ARS et les Conseils Départementaux en restreint l’effectivité. La Défenseure réclame également “de procéder à des investigations approfondies sur place et de manière inopinée pour repérer les situations de maltraitance”.

Urgence pour changer de regard et agir

Dans son interview dans le journal La Croix, la Défenseure estime que la proposition de loi “pour bâtir la société du bien vieillir” porté par la majorité présente des points positifs mais “c’est un piètre substitut à la loi grand âge qui avait été promise. Là encore, il faut aller plus loin”.

Alliance VITA dans ses propositions “Priorité à l’humanité” demandait avant la dernière élection présidentielle de finaliser une loi grand âge et dépendance.

Comme le note le rapport en conclusion, c’est une philosophie qui doit sous-tendre les politiques, celle du regard porté sur la vulnérabilité :  “La Défenseure des droits appelle à changer notre regard sur les personnes âgées et leur vulnérabilité“.

Sur ce thème, le dépliant produit par Alliance VITA “Changeons nos regards pour changer sa vie” est une ressource disponible pour des pistes concrètes.

droits fondamentaux des personnes âgées en ehpad : un premier bilan mitigé

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Université de la vie 2023 « Vivre en réalité » – Deuxième soirée : Une réalité à écouter

Université de la vie 2023 « Vivre en réalité » – Deuxième soirée : Une réalité à écouter

 

La réalité est toujours plus vaste que ce que l’on croit, elle embrasse aussi ce qu’on ne voit pas. La réalité se reçoit, se nourrit, se découvre. Pour œuvrer à devenir ce que l’on est, pour vivre en réalité, le chemin n’est pas tout tracé. Apprendre à écouter peut nous y aider.

S’inscrivant au cœur des missions d’Alliance VITA, l’écoute inspire chacune de ses actions, particulièrement sur la réalité de l’avortement. Pour tenter d’éclairer cette réalité, Caroline Roux, Directrice générale adjointe d’Alliance VITA, qui coordonne également les services d’aide et d’écoute de l’association, est revenue sur les mobiles qui guident les politiques publiques et a analysé les situations qui conduisent à l’avortement. Dans un contexte où les revendications pour élargir les conditions d’accès à l’IVG se font de plus en pressantes, malgré un nombre d’avortements en réalité toujours plus élevé, Caroline a rappelé la nécessité d’explorer le champ de la prévention par l’accompagnement, le soutien et l’écoute.

La soirée s’est achevée par le témoignage inspirant de Christian de Cacqueray, fondateur du service catholique des funérailles, sur la réalité des réalités qu’est la mort. A partir de l’accompagnement des personnes en deuil et de sa pratique des rites de deuil, il propose une sagesse de la vie ancrée dans la perspective de la mort. Pour lui, la conscience de la mort donne davantage de goût de vivre.  « Nous ne sommes pas faits pour la mort » a rappelé Christian de Cacqueray. La perspective de la mort, inéluctable et imprévisible, nous incite à interroger la valeur de la vie. « Face à ce destin commun, il y a matière pour plus de vie, pour une plus grande intensité de vie ».

Dans de très nombreuses villes de France et de l’étranger, les soirées se sont conclues par des témoignages locaux : de médecins, soignants, de bénévoles, d’écoutants, de parents….

La Marche pour la vie appelle à la mobilisation le dimanche 22 janvier

La Marche pour la vie appelle à la mobilisation le dimanche 22 janvier

La Marche pour la vie appelle à la mobilisation et donne rendez-vous à Paris le dimanche 22 janvier 2021 à 14h à proximité de la gare Montparnasse.

 

Organisée chaque année en janvier, la marche se déroulera cette année quelques jours avant l’examen au Sénat d’une proposition de loi adoptée à l’Assemblée nationale en novembre visant à inscrire un nouvel article 66-2 dans la Constitution, selon lequel « la loi garantit l’effectivité et l’égal accès au droit à l’interruption volontaire de grossesse ». Un mois plus tôt, une proposition de loi similaire défendue par les sénateurs communistes, socialistes et écologistes avait été rejetée. La majorité sénatoriale s’était alors montrée opposée à cette inscription.

 

Engagée dans l’écoute des femmes confrontées à des grossesses imprévues ou ayant subi une IVG, Alliance VITA soutient la Marche pour la vie, qui par son action, contribue à lever le voile sur l’avortement. Comment se résigner à la banalisation de cet acte radical, qui n’a rien d’anodin car il met fin à une vie humaine à son commencement et bouleverse de nombreuses femmes ?

En France, le nombre d’IVG demeure à un niveau élevé avec 223 300 interruptions volontaires de grossesse (IVG) enregistrées en 2021 et un taux record de recours (15,5 IVG pour 1000 femmes âgées de 15 à 49 ans en 2021). Ce faux débat autour de la constitutionnalisation occulte la réalité de l’IVG aujourd’hui. A Alliance VITA nous sommes témoins que toutes les femmes n’avortent pas librement et par choix. Beaucoup avortent à contre cœur sous la pression du partenaire, de l’entourage ou des conditions économiques.  Le silence assourdissant sur ces situations rendues invisibles est une grave injustice. A force de revendiquer l’avortement comme un droit, on passe sous silence des situations pourtant connues des pouvoirs publics : les femmes les plus pauvres avortent le plus (on pourrait renvoyer à un FA précédent sur ce point ?).

 

L’urgence est à la protection des femmes enceintes contre toute violence et toute pression et la mise en œuvre d’une véritable politique de prévention de l’avortement.

L’aide active à mourir au menu de la 3e session de la Convention citoyenne

L’aide active à mourir au menu de la 3e session de la Convention citoyenne

Du vendredi 6 au dimanche 8 janvier, la Convention citoyenne sur la fin de vie s’est réunie pour sa troisième session, qui ouvre la phase de « délibération », après les deux premières sessions consacrées à « l’appropriation » en décembre ». Une délibération qui commence en abordant la question de l’aide active à mourir.

Après une première journée qui comprenait des ateliers en groupes et des échanges avec le Ministre Olivier Véran, les citoyens de la Convention ont assisté, dans la matinée du samedi 7 janvier, à une table ronde sur « l’aide active à mourir », expression qui désigne à la fois l’euthanasie et le suicide assisté. Les intervenants de cette table ronde étaient Jonathan Denis et Claire Fourcade, respectivement Président de l’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité (ADMD) et Présidente de la Société Française d’Accompagnement et de Soins Palliatifs (SFAP).

On peut s’étonner du choix des invités. Pour s’opposer à l’ADMD, en dehors du monde des soignants et accompagnants engagés dans les soins palliatifs, il existe aussi des citoyens opposés à l’euthanasie. Comme le souligne Tugdual Derville, porte-parole d’Alliance VITA, dans un tweet, « réduire l’opposition à l’euthanasie aux soins palliatifs est… réducteur. Non seulement bien d’autres spécialités médicales sont concernées, mais surtout la prévention du suicide (drame national) et de la désespérance concerne TOUS les citoyens. »

Les deux intervenants ont défendu deux visions opposées de la société. Le président de l’ADMD a plaidé pour une ouverture du « champ des possibles », c’est-à-dire une légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté, au nom de la liberté, y compris pour les souffrances psychiques et pour les mineurs (à titre personnel). Aux antipodes, Claire Fourcade a défendu une société solidaire envers les personnes les plus fragiles, qui leur envoie le message « Vous comptez pour nous », ainsi que le rôle des soignants : « L’idée que la main qui soigne pourrait aussi être la main qui tue est quelque chose qui pour eux est tout à fait inenvisageable ». Sa lecture d’une « lettre ouverte à un patient », au début de la table ronde, a ému les citoyens. Elle a insisté sur le risque de perte de sens pour les soignants en cas de légalisation de l’euthanasie. Selon une enquête menée auprès d’acteurs des soins palliatifs, un tiers démissionnerait en cas d’évolution de la loi. Evoquant les jeunes soignants de son équipe, Claire Fourcade a plaidé pour qu’ils soient soutenus, accompagnés : « Ils ont besoin de savoir que ce qu’ils font au quotidien a du sens pour vous. » Des propos qui ont été applaudis par le public.

Une grande partie des questions des citoyens ont porté sur les risques de dérives et cas problématiques d’une légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté : dérives observées à l’étranger, euthanasie pour les personnes souffrant de troubles psychiatriques, pour les mineurs, répercussion possible pour les personnes âgées qui feraient le choix de mourir plus tôt « pour ne pas déranger » …Un citoyen a pointé l’état catastrophique dans lequel se trouvent l’hôpital et les EHPAD aujourd’hui. « Est-ce que vous n’avez pas peur que la légalisation de l’euthanasie, dans ce contexte d’un monde médical qui apparaît au bord de la rupture, n’amène pas à des erreurs, à des dérives, à des négligences qui seraient absolument intolérables vu le sujet dont on parle ? »

Dans la matinée du troisième jour de cette session 3, était organisée une table ronde avec les « spiritualités non-religieuses », c’est-à-dire, pour les organisateurs de la Convention, les représentants de quatre obédiences maçonniques et deux philosophes, Monique Canto-Sperber et André Comte-Sponville. L’ensemble des invités étaient unanimement favorables à « l’aide active à mourir ». On peut tout de même s’étonner que le CESE ait choisi d’inviter, avec les Francs-Maçons, uniquement des philosophes dont les positions en faveur de l’euthanasie ou du suicide assisté sont bien connues. André Comte-Sponville est de surcroît membre du comité d’honneur de l’ADMD. Où sont donc passés les principes de neutralité et d’équilibre qui font pourtant partie de la feuille de route de la Convention Citoyenne ?

D’après des informations rapportées par La Croix et La Vie, un vote a été organisé à l’improviste à la fin de la session pour répondre à la question : « Êtes-vous, à ce stade, en faveur d’une évolution du cadre légal ? ». 105 votants sur 158 se sont exprimés pour, 13 contre, et 38 se sont abstenus. Là aussi, ce vote non prévu au programme interroge, alors que certains citoyens étaient partis et que la délibération commence tout juste. La Convention doit encore se réunir pendant six week-ends jusqu’au 19 mars. Ce vote, proposé par les organisateurs, ne risque-t-il pas de biaiser les prochains travaux ?

Néanmoins, ce vote ne dit rien de la direction dans laquelle le cadre légal doit évoluer, et l’on peut penser, au vu des questions posées lors des tables rondes, que les citoyens sont très divisés là-dessus. D’après le journal La Croix, parmi 77 propositions discutés le samedi, seules celles prônant une meilleure information sur la fin de vie et celles visant à développer l’offre de soins palliatifs font l’unanimité. Prochaine étape de la délibération : la session 4, prévue du vendredi 20 au dimanche 22 janvier.

 

Urgence pour l’hôpital

Urgence pour l’hôpital

Dégradation des hôpitaux français

A l’occasion des cérémonies de vœux, E. Macron s’est adressé dans un long discours aux personnels de santé depuis le Centre Hospitalier Sud-Francilien, à Corbeil-Essonnes. Le secteur de la santé, et en particulier de l’hôpital ne cesse d’inquiéter les Français. Les articles se succèdent sur les tensions à l’hôpital : crise des urgences, inquiétude sur la pédiatrie, crise prolongée pour la psychiatrie,  dont la misère est dénoncée depuis de nombreuses années…

La dégradation du service de l’hôpital n’est d’ailleurs pas seulement une question de capacité à soigner aujourd’hui, mais également pour demain. Une tribune avait alerté en novembre sur la réduction en euros réels (c’est-à-dire en tenant compte du niveau de l’inflation) pour le budget hospitalier 2023. En effet, la hausse prévue de 4.1% pour ce budget ne permet pas de compenser une inflation qui a augmenté de 5.9% sur 1 an, selon l‘INSEE. Les carences actuelles et l’attractivité des métiers du soin pour demain sont en jeu.

Une mesure phare : la fin de la tarification à l’acte ?

Dans ce contexte, les annonces du président de la République se déploient sur plusieurs axes. E Macron a annoncé d’ailleurs qu’il faudra une décennie pour parvenir à des changements en profondeur et qu’il faudra vivre “dans une situation qui va plutôt se dégrader en termes d’offre médicale” selon ses propres termes, dans les années à venir.

Mesure phare, la fin de la méthode de tarification, dite T2A serait actée dans le prochain PLFSS (le budget de la Sécurité Sociale voté par le Parlement), qui sera discuté à l’automne 2023.  Ce mode de tarification à l’acte pour les hôpitaux, instauré en 2004, s’est révélé à l’usage source de distorsions, par exemple, l’absence de prise en compte de la situation du patient (âge, précarité, maladies chroniques…). En 2018, déjà, l’Exécutif avait prévu de plafonner à 50% la part de la T2A dans le financement des établissements. Si elle a effectivement baissé, la part tarifée à l’activité n’est pas passée sous la barre des 50% : elle représentait 67,3% des financements des établissements de santé par l’Assurance maladie en 2021. Le discours de vœux mentionne qu’ “il faut qu’il y ait une part structurante de la rémunération qui repose sur des objectifs de santé publique qu’on négocie à l’échelle d’un territoire“. Le système dessiné dans ce grand trait devra être précisé plus tard.

Des “chantiers” seront ouverts. Ainsi, le redéploiement entre personnel administratif et de santé, l’embauche d’assistants médicaux, pour passer de 4000 à 10000, “d’ici la fin de l’année prochaine“. Pour les 600,000 patients souffrant de maladies chroniques sans médecin traitant, E Macron a évoqué un accès à une “équipe traitante” faite de ” coalitions d’acteurs qu’on aura identifiées et structurées à l’échelle d’un territoire et d’une équipe“.

Sur la question des moyens financiers, un “chantier” doit aussi s’ouvrir pour discuter de la rémunération du travail de nuit et des permanences. E Macron a  évoqué un “nouveau pacte” avec la médecine libérale pour assurer une permanence de la médecine de garde en ville. Par ailleurs, E Macron a également abordé la question de la prévention, soulignant le titre de François Braun : ministre de la Santé et de la Prévention. Le président a déclaré que “tout ce qu’on prévient, c’est évidemment ce qu’on évite de soigner ensuite. Et c’est un investissement rentable pour la Nation et rentable pour la santé collective. On a besoin d’avoir un système qui prévient mieux“.

La situation de l’hôpital en France a fait l’objet de beaucoup d’attention depuis la crise sanitaire traversée ces dernières années. Attention des médias, des politiques et de l’ensemble de la population française, au point qu’une question spécifique sur ce sujet était posée aux deux candidats à l’élection présidentielle lors du débat organisé mercredi 20 avril.

Récemment, le collège de la Haute Autorité de la Santé (HAS), un organe administratif créé en 2004, a publié une lettre ouverte à tous ceux qui œuvrent pour la qualité des soins et des accompagnements. Le Collège soulignait deux enjeux : les ressources humaines en raison de la pénurie importante de personnel de santé et l’organisation et le mode de financement du système de santé. Il appelait à des réponses urgentes : plus de moyens, développement des téléconsultations, délégation des décisions plus près du terrain…

Sortir des urgences“, c’est aussi le titre d’un épais – 313 pages- rapport du Sénat sur la situation de l’hôpital, publié suite à la demande du groupe LR d’établir une Commission d’enquête.

Cette radiographie de la situation des hôpitaux comporte des chiffres, des analyses et des recommandations. Sans être exhaustif, les éléments suivants méritent d’être partagés.

Les chiffres

La Drees (Direction de la Recherche, des Etudes, de l’évaluation et des statistiques) décompte un peu plus de 3 000 établissements de santé en France en 2020 : 45% sont des établissements publics 22% sont  des établissements privés à but non lucratif  et 33% des établissements privés à but lucratif. La France comprend le plus grand nombre d’hôpitaux par million d’habitants (44,7) parmi les pays européens de taille comparable. En 2019, les effectifs hospitaliers sont supérieurs de 20,4 % à ce qu’ils étaient en 2000, avec cependant un net ralentissement des embauches après 2010. Le nombre de personnels hospitaliers en 2019 n’est supérieur que de 1,7 % à ce qu’il était en 2012. L’activité, elle, n’a pas cessé de croître. Un exemple frappant l’illustre : le nombre de passage aux urgences était de 10.1 millions en 1992, et est passé à 22 millions en 2019.

Concernant la part de personnel administratif, le rapport note que des chiffres du ministère de la Santé estiment sa proportion à 25% du personnel total, mais un rapport de l’OCDE avançait un chiffre de 33.6%. Cacophonie des chiffres qui illustre, selon le rapport, un premier souci : la situation exacte n’est pas bien connue, ce qui ne facilite ni le diagnostic ni la recherche de solutions. Les pénuries de personnel semblent multiples. 5 à10% des postes infirmiers seraient vacants, un tiers des postes de praticiens hospitaliers sont non pourvus dans l’hôpital public. Il manquerait 13% d’aide soignants dans les Ehpad et un tiers de ceux-ci sont sans médecin coordinateur. La baisse du nombre de lits, un indicateur qui a retenu l’attention du public depuis la crise de la Covid, s’expliquerait par des durées raccourcies d’hospitalisation et une situation française plus haute au départ, comparée à la moyenne européenne. Le développement de la chirurgie ambulatoire et la mise en place d’une tarification à l’activité – et non à la durée du séjour- seraient les facteurs contribuant à ces séjours plus courts en hôpital. Ainsi le taux de chirurgie ambulatoire, c’est-à-dire sans nuit passée à l’hôpital, est passé de 43,3 % en 2010 à 59,4 % en 2020. Un objectif de 70 % avait été fixé pour 2022 mais a été repoussé en raison de la crise sanitaire.

Elément crucial, la perception des soignants sur la situation est fortement dégradée et le Ségur de la Santé ne semble pas avoir, pour le moment, renversé la situation. De nombreuses enquêtes ont détaillé le mal-être voire le “ras-le-bol” des soignants. La commission d’enquête a “entendu beaucoup d’acteurs hospitaliers s’alarmer d’un véritable cercle vicieux : les conditions de travail et le sentiment de perte de sens du métier alimentent des départs, les vacances de postes de soignants augmentent, elles-mêmes accentuant la pression sur les équipes en place et renforçant les raisons de quitter l’hôpital”.

Les analyses

La Commission s’est penchée sur les multiples facteurs contribuant à cette situation dégradée.

Concernant la rémunération, le rapport note qu’en 2006 la rémunération des infirmiers était en France équivalente au salaire moyen dans l’ensemble de l’économie. Elle lui était inférieure de 6 % en 2015. Perte de pouvoir d’achat relatif donc et sentiment pour les infirmiers que leur travail n’est pas reconnu. En comparaison, au niveau de l’OCDE, la rémunération des infirmiers était, à la même date, supérieure de 14 % au salaire moyen de la population.

La facturation à l’activité, nommée T2A, fut un élément clé de la réforme du financement de l’hôpital en 2004. Très souvent désignée comme un point négatif majeur, le rapport nuance la critique. Il reconnaît l’intérêt de cette tarification pour allouer à chaque hôpital un financement cohérent avec son activité mais la Commission pointe les limites de la méthode dès lors que le tarif s’éloigne des coûts réels d’une activité, exemples concrets à l’appui. La pédiatrie hospitalière, la prise en charge de patients vieillissants seraient, selon une médecin interrogée, « assurées par le secteur public car non rémunératrices ».

Un autre mécanisme de financement est en revanche clairement mis en cause par la Commission d’enquête. L’ONDAM (Objectif National des Dépenses de l’Assurance Maladie) hospitalier, un élément du dispositif de financement voté chaque année par le Parlement dans le cadre de la Plfss(loi de financement de la Sécurité Sociale), a servi de variable d’ajustement par rapport à l’ONDAM “soin de villes” afin que l’objectif de plafond de la hausse des dépenses totale soit réalisé. La Cour des Comptes avait déjà dénoncé ce point dans un rapport de 2018.

Les recommandations

Le rapport consacre de nombreuses pages à la situation démographique des professions de santé et détaille des recommandations pour les rendre plus attractives. Revalorisations salariales à poursuivre, formation continue, prise en compte des contraintes fortes pesant sur les soignants en hôpital : permanence jour et nuit, continuité du service… L’intensité du travail dans le secteur hospitalier demeure supérieure à celle observée pour l’ensemble des salariés : « 60 % des salariés du secteur hospitalier rapportent devoir toujours ou souvent se dépêcher, contre 45 % de l’ensemble des salariés ». Un chiffre parmi d’autres : l’indemnité compensatrice du travail de nuit des personnels non médicaux de la FPH depuis 2001 est fixée à 1.07 euro de l’heure.

La Commission souhaite aussi que les visites à domicile pour des soins non programmés soient de nouveau développées.  Le nombre de visites à domicile a été divisé par trois en 20 ans : 71 440 000 visites à domicile recensées en 1997, 24 443 000 seulement en 2016. Une tarification inadaptée pèse en défaveur de ces visites à domicile de la part des médecins.

Enfin, l’Hospitalisation à domicile (HAD) est aussi un secteur à favoriser pour désengorger le secteur hospitalier. Portée par près de 300 structures, mais peu connue, elle s’est développée ces dernières années, représentant plus de 5 % des capacités d’hospitalisation. Elle semble bien adaptée à certaines situations, comme les soins palliatifs ou des soins à des patients lourdement dépendants.

Les rapports, les articles se sont multipliés sur la “crise de l’hôpital” depuis plusieurs années, et la crise sanitaire a servi de détonateur pour desserrer un carcan budgétaire et administratif pesant sur les hôpitaux. Mais les difficultés demeurent en bonne partie et le vieillissement attendu de la population pourrait aggraver les tensions faute de décisions fortes. La santé et un bon système de soins constituent une attente top-prioritaire des Français pour le quinquennat qui va s’ouvrir prochainement.

 

Prendre soin des soignants, une urgence de santé publique

Prendre soin des soignants, une urgence de santé publique

iAu début de cette nouvelle année, la situation des professionnels comme celle du système de santé reste préoccupante. Les chiffres publiés pour l’année 2022 semblent même indiquer que l’état de santé des soignants s’est aggravé.

Des chiffres préoccupants en 2023 sur l’état des soignants

En effet, en janvier 2021, 97,3% des professionnels de santé estimaient qu’ils rencontraient des difficultés à l’origine de souffrance au travail. En 2022, selon une enquête menée entre août et septembre par le collectif Santé en danger, 98,4% l’affirment et 77.9 % d’entre eux déclarent avoir déjà été diagnostiqués en burn-out.

En ce début d’année 2023, de nombreux services sont surchargés, certains d’entre eux sont même fermés la nuit pour manque de personnel.

Autre donnée inquiétante, le taux de suicide chez les internes est 3 fois plus élevé que dans le reste de la population française.

Et les démissions continuent de s’accélérer : 71,3% des professionnels de santé envisagent une reconversion professionnelle, alors qu’ils étaient 67,1% en 2021.

98.2% des professionnels de santé interrogés estiment que la souffrance au travail a augmenté au cours des deux dernières années. Les causes invoquées sont:

  • le manque de reconnaissance (75,2 %),
  • le manque de personnel (73.8 %),
  • l’augmentation de la cadence de travail (56.6 %),
  • l’accroissement des tâches administratives (52.8 %)
  • ou encore un manque de sens (44.9 %).

Bien sûr, les démissions et les burn-out touchent les services hospitaliers de façon inégale. Le service des urgences est particulièrement impacté : 90% des soignants des urgences de l’hôpital de Pontoise (Val-d’Oise) ont ainsi déposé le 9 janvier 2023 des arrêts maladie pour alerter sur la dégradation de leurs conditions de travail, information très reprise par les médias.

St Avold, 36 sur 38 infirmiers des urgences sont également en arrêt maladie pour épuisement, et les urgences fermées à partir de 19h à cause du manque de personnel.

Quant au CHRU de Brest, il a donné son préavis de grève pour le 12 janvier 2023. Une soignante de Brest a pointé une logique économique court-termiste.

L’une des conséquences principales de ces situations d’épuisement est la perte de sens : les soignants n’ont plus le temps de soulager réellement leurs patients. Le sujet du tri, évoqué dans la presse pendant la crise de la Covid 19,  pourrait être une conséquence dramatique de ces tensions à l’hôpital.
 

Pour faire face aux causes de leur souffrance au travail, les soignants interrogés par le collectif Santé en danger demandent considération (79,4%) et écoute (74,9%).

Alliance VITA, consciente de cette situation, propose depuis 2021 un service d’écoute confidentiel et anonyme, Thadeo.

Prendre soin des soignants est un facteur de santé publique à ne pas négliger. Pour comprendre les difficultés actuelles du système de santé, en particulier le manque de soignants, l’état de santé de ceux qui sont en première ligne, leur bien-être au travail doit intéresser les décideurs mais aussi la population qui bénéficie de leurs soins.

Quelques signaux faibles pointant vers une dégradation de la situation sanitaire chez les soignants ont paru dans la presse sur les dernières années. Ainsi, un drame lors d’un accouchement mettait en lumière la question de l’addiction chez certains médecins. Une étude menée par l’IFOP avant l’épidémie de la COVID pour la Mutuelle du Médecin faisait ressortir quelques chiffres inquiétants : plus d’un praticien libéral sur deux se disait concerné par un risque cardio-vasculaire. 34% des généralistes se déclaraient insatisfaits de leur situation professionnelle (un chiffre au-dessus de la moyenne des Français qui se situait à 25%), et 15% des généralistes libéraux indiquaient avoir pris des antidépresseurs au cours des 5 dernières années.

La santé mentale des médecins libéraux s’est-elle dégradé avec la Covid ?

Une étude publiée dans la presse récemment s’est penché sur la question de l’impact de l’épidémie sur la santé mentale des médecins libéraux en France.

Le contexte avant l’épidémie était particulièrement tendu : manque d’effectifs, vieillissement de la population médicale, lourdeur de la charge administrative, attentes plus importantes de la population sur la santé, budget de la Sécurité Sociale contraint par l’ONDAM (objectif national des dépenses d’assurance maladie). De nombreuses enquêtes ont révélé l’impact négatif sur la population générale de l’épidémie de Covid et les difficultés qu’elle a générées. Ciblant les médecins libéraux, l’étude a recueilli le ressenti de 1992 médecins libéraux en France. Les symptômes de souffrance psychologique sont mentionnés dans des proportions importantes. Ainsi, 46% disent souffrir d’insomnie, 59% de symptômes anxieux et 27% de symptômes dépressifs. Au cours de la dernière année, 31% déclaraient avoir pris des médicaments psychotropes et 28% avaient augmenté leur consommation de tabac ou d’alcool.  Ces résultats recoupent d’autres donnéesrecueillies sur la France. En plus des facteurs cités plus haut, la violence à laquelle des médecins sont confrontés ajoute un poids de stress. L’observatoire de la sécurité des médecins recense un peu plus de 1000 déclarations d’incidents (1050) par an sur les dernières années. Un chiffre en hausse puisque la moyenne sur les années 2005-2015 s’établit à 757 (+38%).

Une opportunité pour améliorer la relation soignants-soignés ?

Quelques mesures ont été prises pour prendre en charge ce problème : un numéro vert a été mis en place par le Conseil National de l’Ordre des Médecins en 2018, et il existe quelques structures d’écoute et d’entraide. Il ne semble pas que ces dispositifs ont pu couvrir l’ensemble des besoins et des questions, amplifiés par l’épidémie de Covid. Les résultats de l’enquête citée ci-dessus l’attestent. Si les associations professionnelles et les pouvoirs publics doivent être en première ligne pour répondre à ce problème, il concerne l’ensemble de notre pays. L’attractivité des professions de santé est un enjeu fort dans le contexte actuel où le système de santé français est en surtension comme en témoignent les nombreux articles de la presse sur ce sujet. Sur les 4 dernières années, le solde entre les entrées et les sorties pour la profession de médecin est négatif à 7500, soit 3.5% des médecins en activité. Les réponses de type administratives, par exemple la question des statuts et des conditions d’exercice, ne peuvent suffire quand il s’agit de problèmes humains.

C’est en effet l’occasion d’élargir la réflexion sur la relation soignants-soignés et de ne pas l’enfermer dans une simple demande de prestation de santé, de consommateurs à producteurs. La fragilité mise en lumière dans ces études est commune aux soignés comme aux soignants. Le soin n’est pas un service banal, mais un lieu de relations humaines complexes où la compétence et la technique ne peuvent effacer le besoin de respect et d’écoute réciproques.

Avec son service d’écoute Thadeo à destination des soignants, Alliance VITA entend également apporter sa contribution pour un meilleur être des soignants.